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Chapitre 6 : Types de communication

2. La communication didactique

Introduire la communication didactique, c’est de ne pas occulter la première réflexion qui s’en dégage, celle de l’appropriation d’une L2, qui à son tour appelle tout de suite la problématique acquisition / apprentissage. Bien sûr, je prendrai en compte quelques termes, théories, courants et perspectives relatifs au couple acquisition / apprentissage mais c’est nullement mon intention de ressusciter ici le débat longuement débattu par d’autres chercheurs sur la question. Ce qui constitue le champ d’intérêt de ce chapitre est la traversée théorique de ce duel pour pouvoir examiner ce qui se passe réellement en situation de communication didactique et, par la suite, en situation de communication ordinaire.

Cependant, pour donner mon point de vue sur la question, je me rallie à l’avis de B. Py qui affirme que « nous sommes convaincus pour notre part que la dichotomie,

apprentissage en milieu scolaire vs acquisition en milieu naturel est excessive. Nous lui reprochons en particulier d’ignorer d’une part que toute pratique langagière comporte aussi des attitudes objectivantes (dites « activités métalinguistiques »), d’autre part que les situations scolaires ne constituent que des cas particuliers de situations naturelles et qu’il est donc faux de les opposer sur les unes aux autres » (1994 : 44).

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Evitons, donc cette dichotomie entre l’acquisition et l’apprentissage, car elles sont deux notions complémentaires et, comme le dit R. Galisson, « ce sont deux voies d’accès à la

connaissance des langues » (1990 : 39). Par conséquent, pour éviter d’éventuelles ambiguïtés

dans mes réflexions, j’utiliserai acquisition, apprentissage et appropriation de manière hypéronymique. C’est dire que, sans distinction, j’utiliserai tantôt apprentissage, tantôt acquisition et tantôt appropriation, puisque, de toutes façons, le choix d’une dénomination ou d’une autre n’est pas le cœur du travail.

Pour comprendre comment la notion de la communication didactique est arrivée dans le paysage de l’appropriation de la L2, il faut d’abord remonter à la source de la théorie de S. Krashen (1977) qui oppose processus d’acquisition et processus d’apprentissage. La dichotomie que propose l’auteur met en opposition le système acquis, dit acquisition naturelle, et le système appris scolairement, dite apprentissage scolaire et explicite. Il est inutile de revenir sur les critiques formulées à l’encontre de cette théorie où chacun essayait de trouver son compte. Ce qui m’intéresse dans cette théorie et qui va me permettre de situer la communication didactique, ce sont des places discursives différentes (M-T. Vasseur, 2005), selon la situation, en classe ou hors-classe. Cela peut se traduire en apprentissage guidéet apprentissage non guidé (W. Klein, 1989). La communication didactique rentre dans le cadre de l’apprentissage guidé. Pour planter le décor de cette dernière, trois pôles sont importants et essentiels ; enseignant, apprenants et contenus. Cela renvoie bien entendu au très célèbre triangle didactique. Bien que cette figure triangulaire soit essentielle pour que la communication didactique se mette en place, elle est jugée insuffisante pour rendre compte de la réalité de l’enseignement des langues en général et du fonctionnement interactif de la classe (P. Martinez, 1996). Il est en effet difficile d’identifier la dynamique et l’organisation de ce modèle triangulaire en situation de classe si on est toujours dans le mode de pensée où la centration prioritaire doit être faite sur le code. C’est la raison pour laquelle je vais placer la notion de communication didactique dans une perspective interactionnelle. Mais avant d’aborder cette notion par le biais interactionnel il est tout à fait légitime de souligner la nature spécifique de la communication en classe de langue. C’est dans cette optique que L. Dabène a consacré plusieurs écrits afin de décrire et faire l’inventaire des spécificités de la communication dans une classe de langue.

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2.1. Caractéristiques fondamentales de la communication didactique

Dans un article intitulé « communication et métacommunication dans la classe de langue étrangère » en 1984, L. Dabène passe en revue les caractéristiques fondamentales des

échanges en classe de langue tout en abordant l’ambiguïté du statut de la communication didactique30. Je ferai un bilan synthétique des réflexions de l’auteur en les mettant en relation avec ma recherche.

Le caractère fondamental de ce type de communication repose sur les conditions de productions. Il y a un ensemble d’éléments qui sont imposés et qui représentent comme une sorte de coulisses de cette communication, à savoir ; le lieu, le moment où elle aura lieu et avec qui, les méthodes à employer, les formes d’évaluation et la dissymétrie des locuteurs devant le code de communication employé. Cet ensemble de caractéristiques fondamentales correspond exactement à la CLIN de l’école Bourgogne et à d’autres classes que les ENAF fréquentent, mieux même, elle permet de caractériser la communication en question.

Cependant, l’auteur se heurte à une réalité qui caractérise véritablement la communication en classe de langue : la langue étrangère est à la fois langue-outil et langue- objet. Cet aspect dans la communication didactique ne peut exister qu’en CLIN parce que c’est dans cet espace que les ENAF se retrouvent pour un apprentissage formel de la langue. Lorsqu’ils sont dans leurs classes ordinaires la langue étrangère occupe la fonction de langue- outil parce que les disciplines non linguistiques occupent le statut de matière-objet.

Cette double fonction de la langue étrangère provoque des phénomènes au niveau de la communication. Elle se dédouble et cela crée deux niveaux : la communication et la métacommunication. C’est dans ce sens que L. Dabène s’interroge sur la communication didactique et ses acteurs.

Il en ressort que l’enseignant a trois fonctions principales, celui de vecteur d’information, celui de meneur de jeu et celui d’évaluateur. Pour que ces fonctions soient remplies, une série d’opérations doivent être réalisées. La fonction de vecteur d’information se réalise à travers le métadiscours informatif, explicatif et descriptif de l’enseignant. La fonction de meneur de jeu s’actualise par les opérations de ponctuation de l’échange, d’incitation à la prise de parole et de mise en garde. La fonction d’évaluateur se manifeste par des opérations appréciatives et correctives.

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Toutes ces fonctions sont plus ou moins présentes selon les situations d’enseignement / d’apprentissage. Celle des ENAF à l’école Bourgogne à Planoise est plutôt qualifiée d’endolingue (R. Porquier, 1979). Il est donc clair que certaines de ces fonctions n’ont pas lieu d’être ou se réalisent rarement. D’ailleurs, l’auteur le signale mais de manière inverse « dans le cas d’un apprentissage guidé en milieu exolingue, dispensé selon une

modalité non intensive, les interventions métacommunicatives seront nombreuses et majoritaires, au point de constituer parfois l’essentiel du dialogue » (L. Dabène, 1984 : 136).

Il en va de même pour les cours dispensés en classes ordinaires, il y a certes une métacommunication qui existe, mais certaines fonctions disparaissent, peut-être en laissant la place à d’autres. Les ENAF se trouvent donc dans la communication didactique à une visée non linguistique mais qui n’empêche certainement pas l’appropriation de la L2.

On voit ainsi que traiter la communication didactique dans une vision purement linguistique ne recouvrerait pas toutes les réalités dans lesquelles les ENAF sont plongées. Je rappelle que ces élèves fréquentent plusieurs espaces d’appropriation (la CLIN et les classes ordinaires) et sont sans arrêt confrontés à deux communications didactiques complètement différentes l’une de l’autre. Mais ce qui ne change pas, et cela quel que soit l’espace, est que les élèves sont invités à interagir dans la langue du pays d’accueil, d’où l’intérêt d’inscrire la notion de communication didactique dans une perspective interactionnelle.

2.2. La communication didactique dans une perspective interactionnelle

Conjuguer la communication didactique et l’interaction ne donne pas le résultat de la

méthodologie orale introduite dans les années soixante et soixante-dix qui se donne pour objectif de développer les compétences orales des élèves avec la méthode audio-linguale aux Etats-Unis et celle de structuro-globale audiovisuelle en France. Dans les années quatre- vingt, les travaux sur la conversation dans le domaine de la pragmatique interactionnelle suscitent l’intérêt parce qu’ils considèrent la classe de langue comme un lieu de scolarité, où s’établit un échange actif entre des partenaires ayant leur place dans l’interaction. Selon R. Ullman, le discours didactique se compose de plusieurs contenus : linguistique, culturel, communicatif et éducatif (1982). Cela conduit tout de suite à penser qu’on est dans une mouvance où le code n’occupe plus ou pas la même place privilégiée dans la communication didactique mais qu’il est sur le même pied d’égalité que d’autres aspects cités plus haut. C’est

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ce que le travail de F. Cicurel (2002) a laissé entendre. La donne a changé, c’est l’interaction dans sa dimension collective, le groupe d’apprenants et le déroulement de leurs échanges qui sont accentués (op.cit). Les échanges entre enseignant/élèves, élèves/ enseignant et élèves/élèves ont mis en évidence certains aspects31 qui laissent penser que la communication didactique n’englobe pas uniquement des actes d’enseignement mais constitue la classe comme un tout.

Pour mieux examiner l’interaction didactique dans le cadre de ma recherche, il est à préciser que la classe de langue n’est pas l’unique lieu où ce type d’interaction se produit. Les ENAF sont tantôt en CLIN (classe de langue) et tantôt dans leurs classes ordinaires respectives (classe de disciplines non linguistiques). C’est pourquoi il est plus prudent et logique de traiter la question de la communication didactique dans les deux contextes de classe différents. Il s’agit ici de se rendre compte que, dans ces deux contextes, la L2 est perçue différemment et que chacun possède des spécificités bien à lui.

2.2.1. Les interactions en classe de langue (CLIN)

La classe de langue est le lieu institutionnel où les élèves sont guidés dans l’appropriation d’une L2. La communication dans cet espace prend des formes particulières et spécifiques bien à elle. Je vais me concentrer sur certains phénomènes interactionnels qui caractérisent les interactions en classe de langue.

Le discours de l’enseignant à contenus multiples, fait l’objet d’un échange

communicatif avec les élèves. C’est en situation interactive, entre les élèves et l’enseignant, que différents phénomènes interactionnels ou différentes activités métalinguisco-discursives sont susceptibles de se produire dans la communication didactique.

2.2.1.1. La bifocalisation

Cette notion a été proposée et définie dans le cadre de la communication didactique exolingue par P. Bangé de la manière suivante : « Focalisation centrale de l’attention sur

l’objet thématique de la communication ; focalisation périphérique sur l’éventuelle apparition de problèmes dans la réalisation de la coordination des activités de communication » (1992 : 56).

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Cette bifocalisation, toujours d’après P. Bangé se manifeste dans le principe de compréhension et de production. Dans la CLIN, l’enseignant applique ce principe sur la base de l’intercompréhension et de la sollicitation des élèves. Un élève se trouve devant un problème quelconque, son attention se porte sur la nature même de la communication et simultanément, il centre son attention sur les mots qu’il ne comprend pas à des degrés divers. L’enseignant met en œuvre différentes stratégies (didactisation) pour aider l’élève en difficulté. Quand chacun des deux remplit sa fonction dans la communication, le principe de compréhension et de production s’installe et le phénomène de bifocalisation est alors déclenché.

Pour ce qui est de la compréhension, elle repose sur l’hypothèse faite par chacun des participants « (a) que le locuteur respecte le principe de coopération (c’est-à-dire qu’il fait

un énoncé sensé et pertinent dans la situation ; (b) que le locuteur récepteur suppose que le locuteur respecte le principe de coopération » (op.cit : 57).

En validant ces hypothèses par leur comportement, les deux interactants arriveront à co- construire un véritable sens. Cela peut influencer, par exemple, le comportement du locuteur fort32 (N), qui peut désautomatiser des opérations de décodage, et faire des inférences sur ce que le locuteur faible (LNN) a voulu décoder / comprendre.

Pour ce qui est de la production, la bifocalisation entraîne une utilisation du registre du foreigner talk (xénolecte) chez le locuteur fort, à partir de ce qu’il croit que le locuteur faible doit pouvoir décoder. P. Bangé fait remarquer que, dans le registre particulier, le locuteur fort n’anticipe pas uniquement sur des problèmes de décodage du locuteur faible, il simplifie également l’emploi des règles d’inférence que le locuteur faible aura à utiliser pour l’interprétation.

2.2.1.2. La séquence potentiellement acquisitionnelle (SPA)

Cette notion a été introduite en 1987 par B. Py, M. Matthey et J.-F. de Pietro. La notion, encore peu stabilisée à l’époque est définie comme un ensemble de tours de parole avec un début et une fin, au cours duquel il y a une tension acquisitionnelle chez l’apprenant et une volonté d’aide de l’enseignant.

32 P. Bangé utilise les termes de locuteur natif (LN), et de locuteur non natif (LNN). Je préfère les termes

de locuteur fort pour LN et le locuteur faible pour LNN aux termes de P. Bangé afin d’éviter de possibles ambiguïtés.

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La notion est reprise par B. Py (1989) qui explique qu’une SPA s’articule sur deux mouvements complémentaires « un mouvement d’autostructuration, par lequel l’apprenant

enchaîne de son propre chef deux ou plusieurs énoncés, chacun constituant une étape dans la formulation d’un message et un mouvement d’hétérostructuration, par lequel le natif intervient dans le déroulement du premier mouvement de manière à le prolonger ou à le réorienter vers une norme linguistique qu’il considère comme acceptable » (B. Py, 1990 : 83).

Le mouvement d’autosructuration est présent, selon B. Py, dans les autoreformulations que fait l’apprenant. Ce dernier enchaîne des hybrides ou des unités de la L2, cela dans le but de pallier les obstacles qu’il y rencontre.

Le mouvement d’hétérostructuration se fait dans le but d’aider, guider, contrôler une interprétation. Il émane souvent du locuteur fort. Cependant, dans une situation didactique, je dirai que ce mouvement ne provient pas uniquement de l’enseignant mais aussi des pairs qui sont en interaction avec l’apprenant en question. Comme c’est souvent le cas dans une CLIN, le public est hétérogène, il y a donc des disparités dans le niveau de compétence en L2. Il se peut qu’un élève aide un autre élève en difficulté parce qu’il a les capacités linguistiques et communicatives pour le faire.

Lorsque le locuteur faible sollicite l’aide du locuteur fort et que celui-ci s’engage dans une démarche d’étayage, il y a comme un accord entre les deux interactants. Cet accord plus ou moins explicite est défini par J.-F. de Pietro et al (op.cit) comme un contrat didactique. Il met le locuteur fort dans la position de transmettre ses connaissances linguistiques ou autres, et le locuteur faible est censé prendre en compte les connaissances que le locuteur fort lui transmet. Rappelons que la notion d’étayage est entendue par J. S. Bruner comme « un

système de support fourni par l’adulte à travers le discours, ou la communication plus généralement […] à travers lequel l’adulte restreint la complexité de la tâche permettant à l’enfant de résoudre des problèmes qu’il ne peut accomplir tout seul » (1983 : 288)

Toujours selon J. S. Bruner, dans la démarche d’étayage, le locuteur fort ne donne pas souvent ou pas tout de suite, les formes que le locuteur faible cherche (surtout en situation didactique), ou ce qu’il fournit ne correspond pas a priori à la demande du locuteur faible. Il revient donc au locuteur fort de mettre en place un dispositif qui lui permet d’étayer les productions du locuteur faible. Il est important de signaler que les deux notions sont intimement liées à celle de SPA. En d’autres termes, la notion de contrat didactique et celle

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d’étayage sont des éléments constituants d’une SPA. A la naissance d’une SPA dans une interaction, elles fonctionnent comme des règles invisibles pour réguler la production de l’élève.

2.2.1.3. La séquence analytique

Le phénomène de séquence analytique est décrit par U. Dausendschön-Gay et U. Krafft (1992), comme une méthode qui a pour fonction de gérer un problème d’intercompréhension dans une situation de communication difficile. C’est un phénomène imprévisible dans le sens où « l’achèvement interactif, la reformulation avec des variantes

structurelles, le procédé d’explication, ou le schéma de la réparation interactive […] se construisent dans l’interaction, là où les interactants en ont besoin » (1992 : 139).

Une séquence analytique est composée de quatre mouvements ; le premier est appelé « mouvement initial » et peut être une question ou une prise de position. Le deuxième est appelé « demande de bis33 », il s’agit d’une demande de répétition de l’énoncé précédent. Elle peut se traduire par l’incapacité de répondre au mouvement initial. Le troisième est appelé « bis » et est la reformulation du mouvement initial ; le quatrième est appelé « réponse ».

C’est à travers le troisième mouvement qu’il y a un travail d’expansion pour créer des conditions favorables au déclenchement du quatrième mouvement. U. Dausendschön- Gay et U. Krafft (op.cit) ont dressé une liste de techniques d’expansion, qui sont mises en œuvre par le locuteur fort pour débloquer l’incompréhension : l’amplification du signifiant qui consiste à développer un mot ou un groupe de mots incompréhensibles pour l’interlocuteur ; la concrétisation qui correspond à des énoncés qui rendent les propos plus clairs et moins abstraits ; l’exemplification qui correspond à des exemples donnés à l’interlocuteur ; l’explication qui consiste à faire comprendre nettement les propos et ceci de manière développée ; l’explicitation qui correspond à des énoncés suffisamment clairs et précis pour l’interlocuteur.

119 2.2.1.4. La double énonciation

A. Trévise (1979) a caractérisé la spécificité de l’énonciation didactique à l’aide de la notion de double énonciation. Dans la communication en classe de langue, il existe une complexité énonciative que l’on retrouve dans les échanges entre l’enseignant et l’apprenant. L’énonciation didactique est dédoublée, L. Gajo et L. Mondada (2000) expliquent ce dédoublement en terme de « double réseau énonciatif » (cité in M. Gambra Giné, 2003 : 94) : le réseau linguistique et le réseau métalinguistique. La double énonciation s’inscrit dans ces deux réseaux : une énonciation qui se réfère aux rôles propres de la tâche, et une autre qui renvoie au pôle enseignant - élève.

Pour A. Trévise, la présence de deux énonciations se résume comme suit : «

l’assertion doit passer par un énonciateur différent, simulateur du sujet énonciateur véritable, et même lorsque l’on évite le jeu de rôles, et que l’on demande à l’étudiant de raconter quelque chose à partir de son moi, ici maintenant propre, il n’en reste pas moins que les caractéristiques du sujet énonciateur premier, véritable, en classe, parlant ou écrivant à un enseignant, même si elles sont implicites, demeurent derrière le sujet, qui fait comme si la situation était réelle» (1979 : 45).

Il y a donc deux dimensions dans cette double énonciation. La première englobe l’enseignant ou l’apprenant, comme le vrai énonciateur, et la deuxième englobe quelqu’un d’imaginé ou simulé, comme un deuxième énonciateur fictif.

2.2.1.5. La polyphonie

Cette notion appartient fondamentalement à un champ de recherche bien précis qui est la linguistique textuelle. Elle a été développée par M. Bakhtine. Celui-ci a constaté que dans une œuvre littéraire il existe le caractère inachevable du dialogue polyphonique : « tout grand

écrivain participe à un tel dialogue ; il y participe par son œuvre comme l’une des parties de ce dialogue ; eux-mêmes ne créent pas de romans polyphoniques. Leurs répliques dans ce dialogue ont une forme monologique, chacun d’eux a son monde à lui, les autres participants du dialogue, avec leur monde à eux, restent hors de l’œuvre. Chacun se produit avec son monde personnel et avec son mot personnel direct. Mais le prosateur, et tout particulièrement, le romancier, se heurte au problème du mot personnel. Ce mot ne saurait être simplement son mot à lui (venant du je) » (1979 : 372-373).

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