ACTEURS SOCIAUX RÉFÉRENTS ET DE SON TERRITOIRE
Introduction
Dans ce chapitre il est souligné l'importance du territoire dans lequel le pôle de compétitivité
est implanté, ses membres et leurs cultures identitaires en référence à un territoire particulier.
Figure 16 : Les interrelations entre la sphère socio-territoriale et l’écosystème du pôle de compétitivité
Source : L’auteur
Ainsi, le pôle de compétitivité est un espace lieu à part entière vécu par les hommes et ce en
trois sens différents, d'après la classification développée par H. Gumuchian, et B. Pecqueur
(2007)
106, qui influent sur le fonctionnement du pôle :
- L’espace vécu historique qui représente l’espace où les hommes ont vécu, chaque espace
est unique, a une histoire. Cet espace est la rencontre de l’histoire et de la géographie.
L’espace est intériorisé par les acteurs. La prise en compte du pôle de compétitivité par les
acteurs du territoire dans lequel il est implanté, leur adhésion.
106
Cette classification fait référence à une approche développée par Gumuchian H., Pecqueur B., 2007, La
ressource territoriale, Economica, Paris. Il est fait référence à la notion de territoire comme configuration
spatiale, comme auto-référence, ainsi que la notion d’acteur territorialisé.
Sphère politique Liens d’interrelations externes au PdC
Environnement Sphère socio-territoriale Liens d’interrelations externes au PdC
Ecosystème
du PdC
Interactions internes
Sphère économique Liens d’interrelations externes au PdC90
- L’espace vécu subjectif qui traduit la dimension productive de ressources économiques.
Cette dimension subjective est génératrice d’une ressource, d’une richesse. Il sera abordé
la notion d’actifs et de ressources spécifiques.
- L’espace vécu des acteurs qui lui, retranscrit la scène économique, la vie économique, la
« city », dans notre cas celle du pôle avec notamment les notions de marché et de
concurrence (M. Porter).
Précédemment, nous faisons référence à l’espace vécu historique, l’espace vécu subjectif et
l’espace vécu des acteurs selon la classification de H. Gumuchian et B. Pecqueur pour
interpréter dans son ensemble la notion de territoire. Afin d’avoir d’autres interprétations du
territoire, une référence a été faite à l’ouvrage de A. Moine (2007) qui identifie le territoire
comme « un système complexe »
107et qui, indirectement, démontre son rôle dans l’économie.
Après lecture, nous observons trois dimensions pour lesquelles il est possible de superposer
la classification de H. Gumuchian et B. Pecqueur. Ce qui nous laisse entendre un consensus
sur la notion de territoire et de ses acteurs sociaux. Le territoire est par conséquent désormais
pris en compte dans l’économie via notamment la politique industrielle française des pôles de
compétitivité qui s’inscrit dans cette dynamique « socio-territoriale »
108.
Comme le présente A. Moine (2007), le territoire en tant que système peut être abordé sous
trois angles qui permettent son évolution et le façonnent. Tout d’abord le territoire est qualifié
par l’espace, ici, le territoire « témoigne d’une appropriation à la fois économique,
idéologique et politique de l’espace par des groupes qui se donnent une représentation
particulière d’eux-mêmes, de leur histoire, de leur singularité »
109, G. Di Méo souligne par
cette citation l’existence d’un espace social et d’un espace vécu. En ce sens il devient alors
possible d’associer à l’espace des représentations et une socialisation, le territoire peut alors
être qualifié d’espace approprié, d’espace vécu historique (H. Gumuchian, B. Pecqueur, 2007)
où l’espace est intériorisé par les acteurs, ou encore de « territoire de vie » (A. Moine, 2007)
afin de traduire la complexité de la construction des territoires au cours de l’histoire, autour
du social, du politique et du psychologique. Ainsi, le territoire s’appuie sur l’appropriation qui
107
Moine A., 2007, Le territoire : comment observer un système complexe, L’Harmattan, Paris.
108
Terme repris dans le cadre de notre étude et inspiré de l’ouvrage : Tremblay D.-G., Klein J.-L., Fontan J.-M.,
2009, Initiatives locales et développement socioterritorial, Télé-Université TELUQ, Presse Université du
Québec.
109
Di Méo G., 1998, Géographie sociale et territoires, Paris, Nathan. In Moine A., 2007, Le territoire : comment
91
en est faite par des groupes d’individus et reflète selon A. Moine une notion de propriété,
mais aussi de propriétés administratives via la construction du territoire dominée par le rôle de
l’Etat et maintenant la décentralisation qui de surcroît engendre de nouveaux territoires. Ainsi
la première vision représente l’espace matériel, l’espace géographique synonyme d’une
histoire propre à lui. La deuxième vision, elle, insiste sur la notion d’appartenance à un
territoire, et souligne la symbolique ou l’idéel du territoire qui guide « les sociétés dans
l’appréhension qu’elles ont de leur « environnement » »
110. G. Di Méo retranscrit cette vision
en mettant en lumière que « le territoire est souvent abstrait, idéel, vécu et ressenti plus que
visuellement repéré ». Et le troisième point est en relation avec les deux premiers à savoir
l’espace géographique et les représentations que nous faisons de cet espace. Il exprime l’idée
que ce sont les acteurs qui font le territoire. Cette troisième dimension est caractérisée par les
interrelations multiples qui façonnent le territoire.
Ces trois dimensions sont résumées comme suit par A. Moine (2007)
111A ce titre l’économie territoriale prend en compte le fait que le territoire est un système qui
intègre la diversification et la complexification du territoire en coordonnant notamment les
dimensions sociales, politiques, économiques et environnementales, et en considérant tous les
usages, sur la base d’une participation des acteurs du territoire. La dimension constitutive
d’un territoire est alors reconnue avec l’idée que l’espace délimité par un collectif humain
devient pertinent dès lors qu’il est suffisamment cohérent identitairement pour permettre des
choix politiques les plus unanimes possibles.
110
Moine A., 2007, Le territoire : comment observer un système complexe, L’Harmattan, Paris, p.p. 31.
111
Ibidem p.p. 35.
- L’espace géographique, approprié par l’homme, aménagé, et au sein duquel
apparaissent des organisations spatiales et de multiples interactions fondées sur les
interrelations entre les sous-systèmes qui le compose (naturel, anthropisé, social et
institutionnalisé), qui reflètent le jeu des acteurs par les objets qu’ils produisent.
- Le système des représentations de l’espace géographique, ensemble de filtres
(individuel, idéologique, sociétal et lié aux modes) qui influence les acteurs dans
leurs prises de décisions, et les individus, dans l’ensemble de leurs choix, selon deux
temps :
- lors de l’observation de ce qu’est l’espace géographique
- lors de la projection de ce que sera l’espace géographique après le choix
d’une action ;
- Le système des acteurs (anthroposphère) qui agissent consciemment ou
inconsciemment sur l’espace géographique, influencés par leurs filtres, et suivant
leur position au sein de ce système.
92
Pour notre approche nous retiendrons la classification de H. Gumuchian et B. Pecqueur, mais
avec la prise de conscience que le territoire est complexe (en référence à A. Moine) et qu’il
faut bien intégrer tous les éléments pour le comprendre et étudier son impact sur les pôles de
compétitvité. Effectivement le pôle de compétitivité n’est pas seulement une structure
indépendante, la réussite de son implantation dépend des influences extérieures (comme
notamment la sphère politique - Chapitre 1) mais aussi du territoire dans lequel il est
implanté. Ces territoires peuvent être définis comme « des régions économiques [qui] sont
des ensembles de personnes et d’activités productives, aux contours souvent mal délimités,
mais à l’influence économique certaine »
112.Le pôle de compétitivité ou encore cluster
intègre le territoire puisqu’il est avant tout une forme d’espace géographique, ou organisation
spatiale où il se passe des interrelations entre acteurs. La Harvard Business School le définit
alors comme « une concentration géographique de groupes interconnectés, d’universités et
d’institutions associées, qui résulte des couplages ou des externalités entre industries », d’où
l’intérêt de prendre en compte le rôle socio-territorial :
- socio- : les relations entretenues entre les acteurs locaux du pôle lui permettent d’être
compétitif mondialement et ce à long terme.
- -territorial : le pôle de compétitivité interagit avec une sphère territoriale qui façonne
son identité favorisant le dynamisme d’évolution du pôle et progressivement
l’assimilant à un lieu.
Dans le document
Le dynamisme d’évolution des pôles de compétitivité territoriaux.
(Page 91-94)