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4 L A REALISATION D ’ UN OUTIL D ’ AIDE A LA DECISION

La démarche proposée permet alors de "savoir" contrôler. En effet, nous avons créé les standards nécessaires pour accomplir cette tache et développé l’expertise pour contrôler une anomalie.

Nous verrons alors qu’il est utile de saisir ces informations pour avoir d’une part une assistance à la décision et d’autre part être capable de faire du traitement statistique sur ces données. Le but est alors de regrouper au maximum les informations et de faciliter leur utilisation. Pour ce faire, nous verrons que nous avons réalisé un outil d’aide à la décision.

4.1 L

ES DIFFICULTES DE MISE EN PLACE DE LA DEMARCHE

Malgré les apports de la démarche que nous avons essayés de lister dans les paragraphes précédents, il faut reconnaître que dans le contexte de leur mise en place en production cela a suscité quelques difficultés que nous allons exposer maintenant.

Tout d’abord, chaque modification dans l’organisation du travail engendre une résistance au changement. Cette résistance aux changements apparaît dans la majorité des cas par un refus de suivre les nouvelles indications et procédures de travail. Chacun pensant que sa manière de travailler est la meilleure et par conséquent ne voulant pas changer ses habitudes de travail, les décisions et modifications décidées ne sont pas suivies par l’ensemble des personnes concernées. Dans notre cas, la plus grosse difficulté fut de demander aux sujets de suivre la procédure de contrôle développée par les experts afin d‘augmenter les possibilités de détection des anomalies d’un produit. Nous avons alors constaté la réticence des personnes vis-à-vis de cette procédure et par conséquent dans certains cas, le non respect de cette dernière.

Cette procédure de contrôle ainsi que les divers standards créés pour améliorer l’expertise d’exploration et l’expertise d’évaluation permettent alors une formation des sujets plus stricte que précédemment. La formation est donc plus structurée qu’avant la création de ces documents – nous rappelons qu’il s’agissait d’une formation purement orale et suivant le savoir faire d’une personne habituée à faire du contrôle visuel. Cependant et malgré notre modification du plan de formation, la formation reste encore en partie tâtonnante car comment vérifier la bonne utilisation des standards, comment s’apercevoir d’une dérive des contrôleurs consciemment ou pas...

Ces deux points sont entre autres des conséquences de la dernière difficulté que nous allons développer : la traçabilité. En effet, dans notre démarche d’amélioration de l’exploration et même de l’évaluation, les produits sont contrôlés mais aucune traçabilité des produits n’est effectuée. Les produits sont rejetés car non conformes aux spécifications i.e. à la table des niveaux de référence. Ils sont simplement définis comme tel mais dans aucun cas, il n’est véritablement indiqué les causes précises de ce rejet. Les résultats des contrôles sont donc saisis de manière très succincte. Aussi, il paraît dans ce cas là très laborieux de mettre en place des indicateurs de performance sur différents points (contrôleurs, référence du produit, temps de contrôle…) mais aussi des actions préventives et correctives.

4.2 U

NE SOLUTION

:

UNE INTERFACE DE SAISIE

Aussi, pour répondre aux difficultés que nous avons décrites dans le paragraphe précédent, nous avons mis en place une interface de saisie. Cette interface permet alors d’une part une formation plus rigoureuse dans le contrôle des produits mais aussi un suivi des contrôles aussi bien vis-à-vis des utilisateurs que des produits. Cette interface peut alors être considérée comme un outil d’aide à la décision. Le concept est simple : à partir des données

que le contrôleur va saisir, cet outil donnera la décision finale : "Conforme" ou "Non conforme". Il représente une assistance à la décision mais aussi un outil d’analyse à partir des données entrées par le contrôleur.

8 Cahier des charges

Les données d’entrée à la réalisation de l’interface pour notre cas d’étude sur la boîte de montre sont donc :

- 4 descripteurs d’anomalie

- La grille d’intensité permettant de qualifier la gravité des anomalies

- Les zones de localisation des anomalies

- Les niveaux d’acceptation des anomalies en fonction de sa zone, de son intensité et de sa catégorie. (i.e. la table des niveaux de référence)

Voici l’analyse fonctionnelle réalisée en phase d’utilisation pour la construction de l’interface. (Figure 72)

Figure 72 : Graphique de l’analyse fonctionnelle

Nous avons alors comme fonctions principales :

FP1 : L’utilisateur doit se servir de l’interface pour savoir s’il doit accepter ou non la pièce. FP2 : L’utilisateur doit se servir de l’interface pour suivre la procédure de contrôle

Nous avons alors comme fonctions de contraintes :

FC1 : L’expert doit pouvoir échanger et modifier facilement avec l’interface le niveau qualité, les zones à identifier… tous les paramètres d’entrée pour l’utilisateur.

FC2 : L’interface doit se « fondre » dans l’environnement de travail.

FC3 : L’interface doit être réalisée sur un logiciel facilement adaptable et commun.

FC4 : Les pièces doivent pour être saisie dans l’interface par scannage en début de contrôle. FC5 : L’utilisateur doit se servir de l’interface le plus facilement possible tant au niveau d’interface (ergonomie) qu’au niveau saisi (utilisation de la souris limitée).

FC6 : L’interface doit être utilisable pour toutes les références de pièces.

FC7 : Après la fin d’une saisie de pièce, l’interface doit faire le bilan des anomalies non acceptées et doit laisser la possibilité de modifier une anomalie saisie (l’erreur est humaine !) tout en gardant une trace de cette modification.

FC8 : Les utilisateurs doivent s’identifier par scannage (de matricule) pour utiliser l’interface en début de contrôle.

8 L’interface

L’interface ainsi obtenue reprend entièrement la procédure de contrôle qui a été réalisée. Il est alors imposé aux contrôleurs de suivre pas à pas cette procédure.

Interface Utilisateur Pièce Expert Environnement de travail FP1 FP2 FC1 FC2 FC3 FC4 FC5 FC6 FC7 FC8

Chaque contrôleur devra alors, après avoir rentré différentes données d’entrée - matricule, référence de la pièce, numéro de lot …, saisir zone après zone les anomalies qu’il perçoit. Pour chaque anomalie, il notera l’intensité de chacune comme le montre la Figure 73.

Figure 73 : Principe des saisies des anomalies dans l’interface

Nous voyons donc sur la Figure 73, le mode de saisie des anomalies par le contrôleur. Sur cet exemple, le contrôleur a saisi sur le Fond (zone de l’anomalie), une Marque (nom de l’anomalie) nommée "M" d’intensité 4.

Pour faire défiler les zones à contrôler (dans l’exemple, Fond, puis Dessous de cornes, puis

Poinçons, …), le contrôleur appuie sur une pédale ce qui lui permet de gagner du temps dans le défilement de la procédure. Il n’est donc pas obligé de poser la pièce pour faire défiler la procédure. La seule cause qui l’oblige à poser sa pièce, est la saisie d’une anomalie qui se fait grâce à la souris de l’ordinateur ce qui le rend responsable de sa saisie. Une croix rouge vient s’inscrire dans la case où le contrôleur a cliqué.

A la fin du déroulement de la procédure de contrôle, un bilan des anomalies saisies est réalisé par l’interface (Figure 74). L’interface donne donc la décision finale au contrôleur en lui disant d’accepter (notée "OK") ou de refuser (notée "KO") la pièce suivant ce qu’il a déclaré lors de son contrôle. Le contrôleur n’est donc plus maître de la décision finale.

Figure 74 : Décision finale donnée par l’interface

La Figure 74 nous montre donc le résultat de l’interface après la saisie des données par le contrôleur.

Ce rapport reprend donc dans une première partie notée 1, toutes les données générales sur la pièce contrôlée et sur le contrôleur : référence de la pièce, numéro de série, date, heure, matricule du contrôleur.

Dans une seconde partie notée 2, le rapport reprend toutes les anomalies perçues et donc saisies par le contrôleur. Par exemple, ici, la première anomalie est une marque sur le Fond

qui correspond à l’étape de 2 de la procédure de contrôle (numéro d’opération).

Grâce au schéma de la boîte, partie notée 3, il est indiqué que cette anomalie sur le Fond

est acceptable. En effet, l’interface va alors donner anomalie par anomalie l’acceptation de la pièce. Le vert indique que l’anomalie est acceptable, le rouge indique que l’anomalie est refusée. Dans l’exemple, seule la bande de carrure est en rouge, aussi cette anomalie est refusée ce qui va avoir pour conséquence de rebuter la pièce.

Une partie de la fenêtre du rapport est laissée à la disposition du contrôleur (partie notée 4), où il pourra alors indiquer ses remarques ou si certains éléments de la pièce sont manquants...

La partie 5 est la partie où l’interface qui intervient dans la prise de décision en ayant intégré les différentes combinaisons d’acceptabilité que nous avons tentées d’expliquer au chapitre 4.

Cette interface vient donc garantir le bon apprentissage de la méthode de contrôle tant au niveau de l’exploration que de l’évaluation. Elle va donc assurer un véritable suivi à la fois des pièces mais aussi de l’instrument de mesure. L’instrument de mesure sera alors évalué et pourra être rapidement recalibré par une formation si une dérive est perçue.

8 Les indicateurs de performance

Ayant un nombre conséquent de données d’entrées par les contrôleurs, l’interface va donc être en mesure d’emmagasiner et de donner des indicateurs de performance par contrôleur, par référence de produit, par type d’anomalie …

1

2

3

4

La Figure 75 en donne des exemples.

Figure 75 : Exemples d’indicateurs de performance pouvant être donnés par l’interface

Répartition du niveau d’intensité des anomalies par référence

Répartition des types d’anomalie selon la référence 5980-1 AOA

Ces exemples d’indicateurs nous montrent donc la possibilité de mettre en place des actions :

- sur les références pouvant poser le plus de difficultés : indicateurs des niveaux d’intensités par référence (premier graphique) ou indicateur des types d’anomalies retenues pour une référence donnée (second graphique).

- Sur les contrôleurs : indicateurs sur le nombre de pièces contrôlées par jour, par mois (troisième graphique)….

Bien sûr ce ne sont que des exemples et toutes les données entrées par les contrôleurs dans l’interface peuvent être transformées en indicateur : nombre de pièces contrôlées par heure pour chaque contrôleur, nombre moyen d’anomalies par pièce, par référence…

5 LA MISE EN PLACE D’UNE STRUCTURE METROLOGIQUE CHEZ

PATEK PHILIPPE

5.1 D

U CONCEPT A L

APPLICATION

La Figure 76 reprend l’organisation métrologique théorique décrite au chapitre 3 en l’associant à notre cas d’application.

Figure 76 : Architecture Métrologie Sensorielle dans notre cas d’application

Chaque atelier de contrôle est donc un niveau d’exécution et par conséquent va utiliser la méthodologie mise en place afin de contrôler les pièces une à une et en limitant la variabilité dans ses contrôles.

Niveau de référence Groupe d’arbitrage Métrologie centrale ENTREPRISE Métrologie d’atelier Niveau d’exécution Contrôleurs Niveau de transfert 2

Pilotes aptes au contrôle

Secteur 2 Métrologie d’atelier Niveau d’exécution Contrôleurs Métrologie d’atelier Niveau d’exécution Contrôleurs Niveau de transfert 1

Pilotes aptes au contrôle

Secteur 1 Métrologie d’atelier Niveau d’exécution Contrôleurs Responsable méthodologique

Entre chaque atelier et afin de vraiment dissocier le niveau d’exécution et le niveau de référence, un niveau de transfert composé de personnes pilotes est mis en place. Ce niveau de transfert va donc être composé de personnes venant directement des ateliers mais considérées comme ayant des prédispositions pour être une rotule entre plusieurs ateliers et/ou niveaux. Elles sont étalonnées et ré étalonnées à intervalles définis afin de garantir la pérennité de la méthode. Ces personnes alors en relation à la fois avec le niveau inférieur et supérieur sont aussi un lien entre les ateliers d’un même secteur. Ils vont donc avoir un aspect critique sur l’aspect des pièces mais vont prendre en considération les autres interventions ultérieures ou postérieures de la production sur la pièce avant de décider quant à l’acceptabilité des pièces. Ce niveau représente donc un niveau de responsabilité quant à l’utilisation de la méthode par le niveau d’exécution mais aussi un niveau de réflexion sur la production en elle-même.

Le niveau de référence est un niveau que l’on pourrait se permettre d’appeler un niveau de litige. En effet, il est utilisé en cas de litige sur le niveau inférieur (niveau de transfert) quant à l’acceptabilité des pièces. En pratique, nous avons pu remarquer que ce niveau était utilisé dans deux cas de figures :

- les pièces où la prise de décision n’était pas seulement une question de critères esthétiques : problème économique, problème de délai, problème de procédés de mise en forme…

- les pièces où les anomalies ont été détectées en production et non en contrôle. Si nous reprenons la Figure 76, le secteur 1 présente des pièces au secteur 2 avant même de leur livrer pour effectuer leurs contrôles. Le secteur 1 a remarqué une anomalie sur les pièces et demande l’avis au secteur 2 avant la livraison. Cette manière de faire permet d’éviter les retours des pièces et des cas litigieux.

Aussi, en utilisant la méthode développée, le niveau de référence devient un étalon de prise de décision sur les critères esthétiques à la fois responsable des niveaux d’acceptabilité des pièces mais aussi responsable des problèmes bien souvent de production qui ne changent en rien les critères définis ultérieurement. C’est donc aussi un niveau de dérogation de pièces. Ce niveau reste alors le garant de la qualité prenant en considération tous les aspects nécessaires afin de produire "en quantité et en qualité".

Le responsable méthodologique représente le niveau garant de la métrologie définie. Il est donc, comme son nom l’indique, en charge de faire utiliser la méthode correctement suivant le niveau qui est visé. Il est donc garant de la méthodologie pouvant la modifier lorsque cela est nécessaire. Il va donc auditer chaque niveau et maintenir le respect de l’étalonnage du niveau inférieur par le niveau supérieur. Ce niveau est donc aussi un niveau support pour tous les autres niveaux.

5.2 L

E CHEMIN QU

IL RESTE A PARCOURIR

La métrologie que nous venons de décrire a été mise en place dans l’entreprise à partir du concept que nous avons décrit dans le chapitre 2. Cette mise en place a été réalisée petit à petit en respectant l’ensemble des acteurs concernés. Cependant, développer une métrologie comme nous venons de la décrire doit être réalisé de manière très méthodique pour ne brusquer et ne frustrer personne. En effet, cette métrologie fait intervenir des niveaux de compétence sans même considérer les niveaux hiérarchiques de la société. Il est donc possible que ce dernier élément puisse parfois engendrer quelques tensions au sein des ateliers et entre ateliers. Il est donc nécessaire de continuer à travailler sur cette nouvelle organisation afin que chaque acteur trouve sa place et son importance personnelle dans le schéma organisationnel.

De plus, le système d’étalonnage et de ré étalonnage est encore très primaire. En effet, même si chaque niveau a la responsabilité de l’étalonnage et du ré étalonnage du niveau inférieur, les tests sont encore en grande partie réalisés par le responsable méthodologique. Or, le rôle de ce dernier est de superviser ces étalonnages, d’en réaliser quelques uns dans le but de réaliser des audits mais pas de les réaliser en majorité. Il est donc nécessaire de continuer à prendre de la maturité sur les étalonnages et sur les ré étalonnages afin d’arriver à rendre ces derniers automatiques et réalisés par les personnes concernées. Il faut entendre par automatique, le fait de réaliser ces derniers suivants les intervalles de temps figés auparavant mais aussi sur l’organisation en terme de sorties des pièces de la production, de conditions de contrôle…

La formation donnée pour réaliser des contrôles est assez longue à l’heure actuelle. Bien souvent, les personnes entrantes dans l’entreprise ne sont pas issues de l’horlogerie et du contrôle. C’est pourquoi, le simple fait d’assimiler le produit en termes de manipulation, d’appréhension au toucher, de contrôle dimensionnel, de contrôle fonctionnel, de contrôle esthétique est long et contraignant.

Cependant, nous rappelons que la démarche que nous proposons peut être déployée sur l’ensemble des composants de l’entreprise.

Notre objectif est donc de proposer une formation type avec un composant où son assimilation personnelle est rapide. Citons par exemple, le cas du bracelet en cuir. La manipulation de ce composant est simple et le risque de créer des anomalies dessus est peu élevé contrairement à une boîte de montre. De ce fait, l’appréhension que peut ressentir le contrôleur devant ce composant est minime. Les différents contrôles à effectuer sont faciles et leurs mises en place ne demandent pas une formation poussée. L’apprentissage de la démarche d’exploration et d’évaluation sur ce composant parait donc plus adéquat afin de juger plus rapidement des prédispositions ou non du contrôleur.

Face à ce constat, il faut envisager la création d’une cellule de formation basée sur un composant simple pour juger de l’aptitude d’une personne rapidement. Chaque personne qui doit être engagée sera alors formée sur un tel produit et donc jugée sur son aptitude rapidement.

Ce point permet donc de garantir la qualité souhaitée par l’entreprise lors de la livraison de ses produits. En effet, chaque contrôleur est responsable de l’image de marque de l’entreprise par son exploration et son évaluation des anomalies. Dans le cas d’une formation longue, la multiplication des contrôles a autrefois permis d’obtenir cette qualité. Une formation rapide et efficace de ce dernier est donc importante pour obtenir la garantie de cette qualité à atteindre plus facilement.

Cette formation ne doit pas s’arrêter là. En effet, pourquoi attendre qu’une personne arrive dans un atelier pour travailler en tant que contrôleur ? Pourquoi former cette personne si après étalonnage elle est jugée comme inapte à effectuer des contrôles? Pourquoi étalonner cette personne dans ce cas là… ?

Même si nous choisissons un composant adéquat pour former les nouveaux arrivants, cette formation reste une chose coûteuse pour une entreprise. En effet, la personne apporte à l’atelier un nombre de pièces réalisées non négligeables. C’est pourquoi, une personne en formation ne peut pas, du même coup, réaliser des contrôles de production. Cette main d’œuvre est considérée perdue même si le principe premier d’effectuer une formation reste à plus long terme un gain essentiel pour l’entreprise comme nous avons pu le voir précédemment. Nous envisageons donc de faire passer des tests d’aptitude au contrôle dès l’entretien d’embauche. Ces tests seraient basés sur des principes simples qui permettent de détecter des prédispositions ou des aptitudes. Nous sommes en train de travailler sur ce concept. Ces tests seront donc par exemple, des tests d’acuité visuelle, des tests basés sur le principe des jeux où l’on présente deux images et où il faut trouver les 7 erreurs…