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L’optimisation intertemporelle

Dans le document Microéconomie du consommateur (Page 10-13)

Beaucoup de décisions individuelles comme l’épargne, l’éducation ou encore la retraite ont une dimension intertemporelle. Comment l’analyse microéconomique permet d’analyser l’intertemporalité des décisions ?

2.2.1 Optimiser ses choix dans le temps 2.2.1.1 Les préférences intertemporelles

Supposons que l’on doive choisir entre consommer 100 aujourd’hui ou consommer 100 dans un an, la plupart des gens choisirait 100 aujourd’hui. Mais si le choix était entre 100 et 1000, là l’impatience serait moins grande. Comme le choix est influencé par la somme proposée dans le futur, il doit exister un niveau de consommation future pour lequel une personne donnée sera indifférente entre le présent et le futur. Ce montant dépendra vraisemblablement de la personne.

Soit r le pourcentage qui rend une personne donnée indifférente entre consommer 100 aujourd’hui ou 100 x (1+r) demain. Plus r est élevé, plus la personne est impatiente. D’un point de vue psychologique, 1+r est le prix implicite (ou psychologique) du présent. Plus r est élevé, plus le présent a de valeur pour cet individu.

Ce taux d’impatience varie selon les individus et les situations. Si r = 0, l’agent est infiniment patient.

D’un point de vue microéconomique, 1+r correspond au taux marginal de substitution entre la consommation aujourd’hui et la consommation dans un an. Ce nombre représente le coût d’opportunité de retarder la consommation présente pour consommer dans le futur.

On peut faire comme si la consommation dans le présent et la consommation dans le futur étaient deux biens distincts, qui forment un panier de consommation, dont on peut représenter les possibilités par des courbes d’indifférence. La pente de la courbe sera de 1+r.

2.2.1.2 La contrainte budgétaire intertemporelle

Cependant, l’agent est contraint par ses ressources présentes et futures. On aura donc une contrainte de budget qui dépendra des revenus de chaque période. On peut noter le revenu présent et le revenu gagné dans le futur. Ce profil de revenus peut refléter, par exemple, le revenu tout au long du cycle de vie. On fait également l’hypothèse (très forte) que lesmarchés financiers sont parfaits : il est possible d’emprunter ou d’épargner à la période 1, et ce au même taux dans un cas comme dans l’autre, taux que l’on note i.

Si un agent emprunte 100 aujourd’hui, il devra rembourser 100(1+i) dans le futur, alors qu’il récupérera 100(1+i) s’il épargne. On peut noter la contrainte budgétaire intertemporelle de la façon suivante :

C2=R2+ (R1C1)(1 +i)

La consommation future est égale au revenu plus la quantité éventuellement épargnée. Par exemple, si l’individu ne consomme pas pendant la seconde période, il bénéficiera de l’intégralité de son revenu épargné, multiplié par le taux d’intérêt. La pente de la contrainte budgétaire est -(1+i), qui est le prix de la consom-mation aujourd’hui par rapport à demain. On peut réécrire la contrainte :

C1+1+iC2 =R1+1+iR2

Cette nouvelle écriture permet d’introduire quatre définitions :

• La valeur actualisée des revenus. Si l’individu consomme son revenu présent et futur dans la première période, l’intégralité du revenu disponible estR1+1+iR2. C’est la valeur actualisée de tous ses revenus.

Il ne peut pas consommer R1+R2 car il devra rembourser son emprunt, donc on divise son revenu futur par le taux d’intérêt.

• La valeur future des revenus. À l’inverse, s’il ne consomme pas en première période, il bénéficiera de son revenu présent multiplié par le taux d’intérêt, et du revenu futur. On parle de la valeur future du revenu.

• (1+i) (toujours > 1) est le prix relatif de la consommation présente par rapport à la consommation future

• (1/1+i) (toujours < 1) est ce qu’il faut placer aujourd’hui pour obtenir un euro dans le futur. C’est le prix relatif du futur.

2.2.1.3 Le choix intertemporel

Pour connaître le choix optimal, on combine comme précédemment les courbes d’indifférences avec la con-trainte budgétaire. L’individu consommera au point qui lui apporte le plus de satisfaction, donc sur la courbe d’indifférence la plus élevée possible compte tenu de sa contrainte budgétaire. Cette courbe d’indifférence sera tangente à la contrainte budgétaire : 1+r = 1+i.

Cette relation indique qu’au point optimal, le prix psychologique du futur (1+r), c’est-à-dire le coût psy-chologique de la consommation future, doit être égal au prix réel du futur 1+i, où i est fixé par le marché.

Une baisse du taux d’intérêt sera une incitation à l’emprunt (le prix du futur diminue) alors qu’une hausse incitera à l’épargne (le prix du futur augmente).

2.2.2 La cohérence intertemporelle 2.2.2.1 L’utilité intertemporelle

On peut représenter les choix intertemporels avec une fonction d’utilité. La fonction d’utilité intertem-porelle a comme arguments la consommation présente (C1) et la consommation future (C2) tel qu’on note : U(C1, C2) =v(C1) +δv(C2), avecδ <1.

Cette fonction doit refléter que les périodes ne sont pas équivalentes pour les individus. Comme les agents sont impatients, le futur doit avoir une valeur plus faible pour eux. On dit qu’ils escomptent le futur. On note traditionnellement :

Le paramètreδ (<1) est le taux d’escompte psychologique : il reflète le poids psychologique plus faible du futur par rapport au présent. est l’utilité instantanée de la consommation dont on fait l’hypothèse qu’elle est la même à chaque période. La maximisation de cette fonction sous la contrainte budgétaire implique un résultat classique : UU(C(C12)) =δvv(C(C12)) = 1 +i

La valorisation du futur, avec le paramètre delta, aura une influence importante sur la valeur du taux d’intérêt.

P. Samuelson a introduit une représentation de l’utilité intertemporelle avec une infinité de période. On a : U(C1, C2, C3, ...., Cn) =v(C1) +δV(C2) +δ2v(C3) +...+δnv(Cn)

Comme delta < 1, l’escompte psychologique devient plus faible, car tout paraît loin. Il faudrait énormément d’argent dans 50 ans pour renoncer à 10 euros dans le présent par exemple.

2.2.2.2 Cohérence et incohérence temporelle

Si un individu décide de ce qu’il fera aujourd’hui, demain, et après-demain, dans la perspective de la formule de Samuelson, le choix fait hier pour demain sera toujours optimal, il ne changera pas d’avis.

Pourquoi ? Parce que la valeur relative d’une période à l’autre est invariante dans le temps : le TMS entre deux périodes adjacentes (période 1 et période 2, période 2 et période 3, . . . , période n-1 et période ,) est toujours égal àδ, par le jeu des puissances. Cela signifie que l’individu ne se déjugera pas par rapport à ses décisions passées sur le choix de la séquence de consommation optimale.

Or, dans la réalité, on sait très bien que ce n’est pas vrai. On reporte à demain en se disant qu’on le fera, puis on reporte une nouvelle fois à demain, sans jamais finir. Cela signifie que le présent est survalorisé.

Si on noteγ, >1, la valeur du présent (c’est-à-dire de la consommation au moment présent), le TMS entre le moment présent et la période suivante est de γδ. L’agent est donc moins patient qu’il ne l’aurait été en période 1 vis-à-vis du futur.

2.2.2.3 Comment être cohérent dans le temps ?

Comment quelqu’un qui établit un plan optimal pour ses décisions futures peut-il s’assurer qu’il respectera bien son plan quand demain viendra ?

Il existe deux solutions données par la mythologie, analysées par J. Elster (Ulysses and the Sirens, 1979).

Dans l’Odyssée, Ulysse apprend l’existence des sirènes dont le chant mélodieux procure une satisfaction immense à tel point que les marins se jettent à la mer pour les suivre et se noient. En termes économiques, on peut dire que le plan est d’aller dans la mer, écouter les sirènes et revenir vivant. Sachant qu’il ne pourrait pas résister au chant des sirènes, Ulysse demande à ses hommes de l’attacher de sorte à être sûr de ne pas se jeter dans la mer quand il écoutera le chant. Il utilise ce faisant une technologie de contrainte qui réduit l’ensemble des choix possibles dans son propre intérêt, intérêt bien sûr évalué à la période 1.

La seconde solution pour résister est de ne pas savoir : les marins d’Ulysse se bouchent les oreilles avec de la cire. Économiquement parlant, ils se privent d’informations pour leur propre bien-être. Ainsi, il peut être rationné de vouloir se priver d’information.

Exemple de la politique monétaire. Les gouvernements ont longtemps été responsables à la fois de la politique fiscale et de la politique monétaire. Un parti politique peut être tenté de créer de la monnaie et d’augmenter les dépenses afin de stimuler la croissance temporairement (ce qui générera de l’inflation dans le futur). Cela permet de garantir la réélection à court terme, et il ne faudra faire face aux effets de l’inflation qu’une fois la réélection assurée. Pour s’éviter cette tentation, les gouvernements se sont liés les mains en se retirant de la gestion de la politique monétaire, laissée maintenant à des banques centrales indépendantes dont l’objectif principal est la lutte contre l’inflation.

Dans le document Microéconomie du consommateur (Page 10-13)

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