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6. Les protoplastes

6.1. L’obtention et la culture de protoplastes chez le bananier

La première tentative d’isolement de protoplastes de bananier a été effectuée par Bakry (1984a, 1984b) qui a montré que seuls des cals inflorescentiels du bananier (génotype AA) permettaient l’isolement de protoplastes alors que le limbe des feuilles et les cals foliaires ne donnaient que des cellules isolées. Cette différence de réponse est due a une inhibition des enzymes par un composé élaboré par les cellules lorsque celles-ci se trouvent dans un état de différenciation donné (Bakry, 1984b).

Slameto (1995) a montré que les jeunes feuilles chlorophylliennes ou étiolées du cultivar IRFA 903 (diploïde) ne libèrent que de rares protoplastes après addition de 1 à 2 g/L d’acide ascorbique dans la solution enzymatique.

En 1985, Chen et Ku ont isolé des protoplastes en utilisant la gaine des jeunes feuilles issues de vitroplants alors que le mésophylle de ces mêmes feuilles n’a fourni que des cellules isolées. Les protoplastes isolés ont survécu 15 jours mais n’ont pas régénéré de paroi et ne se sont pas divisés. Le même résultat a été obtenu par Chaput (1987) chez trois génotypes AA, AAA et ABB.

Assani et al. (2000-2002) ont isolé des protoplastes à partir de cals issus d’anthères et de jeunes feuilles et de cals de trois génotypes de bananier. Cependant, pour ces deux types d’explants, un faible rendement en protoplastes a été obtenu. Après 8 jours de culture, ces protoplastes ont synthétisé leur paroi sans se diviser.

Les protoplastes ont été aussi isolés à partir des bractées des inflorescences mâles par Matsumoto et al. (1988). Ces protoplastes se divisent pour former uniquement des petits groupes cellulaires.

Les rendements en protoplastes les plus élevés chez le bananier ont été obtenus à partir des suspensions cellulaires issues de CHP (Megia et al., 1992; Megia, 1993; Panis et al., 1993; Bui Trang, 1994) et d’inflorescences mâles (Slameto, 1995; Assani et al., 2000-2002).

Le rendement en protoplastes dépend du type de suspension obtenue. La suspension cellulaire laiteuse sans nodules de Musa acuminata ssp. burmannica type Long Tavoy (AA) libère plus de protoplastes que les suspensions granuleuses à nodules du génotype Matavia (ABB) (Megia 1993). Megia et al., 1992 ont réalisé, chez Musa acuminata ssp. burmannica type Long Tavoy, une co-culture de protoplastes à haute densité sur couche nourrice, permettant de stimuler le développement des protoplastes et de conduire à la formation d’un cal.

La régénération de plantes à partir de protoplastes d’un triploïde ABB (Matavia) a été obtenue pour la première fois en utilisant la co-culture de protoplastes à haute densité sur couche nourrice, simultanément par deux équipes de recherche, l’une en Belgique (Panis et al., 1993) et l’autre en France (Megia et al., 1993).

Megia (1993) et Bui Trang (1994) ont montré que l’évolution des protoplastes sur la couche nourrice dépend du génotype de la suspension cellulaire utilisée: les protoplastes du génotype Musa balbisiana type Tani (BB) forment leur paroi sans se diviser et les cellules noircissent, les protoplastes de Musa acuminata ssp. burmannica type Long Tavoy (AA), forment des cals après 60 à 90 jours de culture sur couche nourrice, les protoplastes de Musa

Matavia (ABB) évoluent en proembryons puis en embryons. Plus récemment, Assani et al. (2000-2002) ont obtenu des embryons à partir de protoplastes issus de suspensions cellulaires de 5 génotypes de bananier deux triploïdes AAA (GN et Gros Michel ) et trois diploïdes AA (IRFA 903, col 49, et SF 265).

Afin d’optimiser les divisions des cellules des protoplastes puis la formation des proembryons, Megia (1993), Assani et al. (2001-2002) ont testé différents types de cellules nourricières. Megia (1993) a montré que les cellules des suspensions cellulaires de Lolium et celles de Musa acuminata ssp. burmannica type Long Tavoy sont plus efficaces que les cellules de Triticum. Assani et al. (2000-2001) ont montré chez 5 génotypes testés que la couche nourricière de la suspension cellulaire de GN favorise plus l’évolution des protoplastes et la formation des proembryons que celle issue du cultivar IRFA 903 (AA). Ce résultat est en rapport avec la structure cellulaire de la suspension cellulaire de la couche nourricière, compte tenu du fait que la suspension GN est plus riche en cellules embryogènes non organisées que celle du cultivar IRFA 903 et que sa vitesse de croissance est plus élevée.

Le mécanisme d’action des cellules nourricières sur l’évolution morphologique des protoplastes est mal connu. D’après Karp et Lazzeri (1992), les cellules nourricières produiraient des substances non définies « growth-promoting-factors: GPF » qui stimuleraient les divisions cellulaires. Une autre hypothèse considère que les protoplastes produisent par l’intermédiaire de débris et d’excrétions, des «growth-inhibitor-factors: GIF» qui gêneraient leur évolution s’ils n’étaient pas neutralisés par les GPF (Assani et al., 2001).

Parmi les facteurs importants qui interviennent aussi lors de l’utilisation des nourrices, le type de support qui sépare les protoplastes ensemencés de la couche nourricière. Les protoplastes de bananiers peuvent se développer sur trois types de supports utilisés: toile à blutter, membrane Millipore, disque de cellophane alors que sur la membrane à dialyse les protoplastes ne se développent pas. Le type de support peut agir par les échanges qu’il permet entre la couche nourrice et les protoplastes mis en culture (Megia, 1993).

D’autre part, la durée de contact des protoplastes avec la couche nourrice, et le moment de son application ont été précisés : pour être efficace la nourrice doit intervenir dès le début de la culture et sur une période de 60 jours, en continu, sans changement de milieu (Megia 1993). Assani et al. (2000) a montré que les cellules nourricières sont nécessaires au développement des protoplastes jusqu’à l’apparition des proembryons puisque très peu de proembryons évoluent en embryons lorsqu’ils sont laissés sur la couche nourricière (contenant 2,3 µM de zéatine, 0,9 µM de 2,4 D et 4,4 µM d’ANA) alors que le nombre

d’embryons est plus élevé lorsque les proembryons sont transférés sur milieu A0,4B0,5

contenant 2,3 µM d’AIA et 2,2 µM de BAP.

Concernant la conformité des plants issus de protoplastes de bananier, la séquence complète protoplastes-embryons somatiques-plantes régénérés-plantes au champ a été réalisée pour la première fois chez le bananier par Bui Trang (1994). Une première analyse de la variabilité de ces plantes a permis de conclure qu’elle n’est pas significativement différente de celle observée chez le témoin, issu de multiplication de méristèmes.