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L’Ischémie-reperfusion :(clampage/déclampage aortique) :

Au cours de la circulation extracorporelle, le clampage et le déclampage aortique va induire des phénomènes d’ischémie-reperfusion [42].

Figure26 :clampage aortique, protection myocardique [43]

L’ischémie est définie par la réduction du flux sanguin, dans un territoire vasculaire donné, compromettant les apports en oxygène (O2), et en substrats énergétiques nécessaires aux fonctions et à la survie cellulaires. Il ya donc une inadéquation entre la demande et les apports énergétiques ; La reperfusion est définie par la restauration du flux sanguin dans un territoire vasculaire donné ayant été préalablement soumis à une ischémie [44].

Dans beaucoup de situations cliniques, l’ischémie myocardique est régionale (localisée à la zone en aval de l’obstruction coronaire). Il existe en chirurgie cardiaque des situations où l’ischémie myocardique intéresse l’ensemble de l’organe, par exemple, lors de la mise en route d’une circulation extracorporelle (CEC) ; l’ischémie est alors globale [45].

Durant l’ischémie, l’apport en oxygène réduit perturbe le fonctionnement de la chaîne respiratoire. La réduction monovalente de l’oxygène est favorisée, ce qui induit une production de radicaux libres [46]. Leur apport soudain à la cellule qui en a été privée déclenche une cascade d’évènements pathologiques. Comme lors du déclenchement de la réaction inflammatoire systémique, la reperfusion et le retour de l’oxygène donne naissance à un excès de radicaux

libres (O2.-, H2O2, OH., NO…) [19], à partir de sources membranaires

(métabolisme de l’acide arachidonique ) , intracellulaires ( mitochondries) et extracellulaires ( polynucléaires activés ) [47].

Ces substances dotées d’un nombre impair d’électrons dans leur couche externe sont très réactives; elles sont normalement détoxifiées au fur et à mesure de leur production par des antioxydants naturels, mais, produites en masse, elles attaquent les phospholipides des membranes, les protéines et l’ADN.

La reperfusion entraîne encore des altérations profondes de la vasomotricité coronarienne par diminution du NO produit par l’endothélium. Comme le NO inhibe l’adhésion des plaquettes et des polymorphonucléaires, sa réduction favorise l’agrégation leucocytaire et plaquettaire, phénomène qui s’accompagne d’une vasoconstriction locale intense [27].

Figure27 : principales sources cellulaires de radicaux libres [47].

RH : acide gras polyinsaturé , ROOH :hydroperoxyde lipidique , SH : substrat réducteur , S : substrat oxydé , SOD : superoxyde dismutase , GSH-Px : glutathion peroxydase , GR : glutathion réductase , GSH : glutathion réduit , GSSG : glutathion oxydé .

Retentissements de la séquence ischémie-reperfusion sur les plaquettes:

La reprise du flux sanguin dans un tissu préalablement soumis à une ischémie déclenche une réaction inflammatoire locale à l’origine de lésions tissulaires et d’une altération fonctionnelle de l’organe en cause. Les cellules endothéliales et les polynucléaires neutrophiles sont les cellules clés des lésions induites par la reperfusion. L’activation du système du complément va participer au déclenchement et à l’amplification de la réaction inflammatoire et induire des lésions directes des membranes cellulaires [44].

En effet, les radicaux libres de l’oxygène produits en excès lors de la reperfusion vont dépasser les systèmes physiologiques de protection endogène et détruite les composants lipidiques des membranes, compromettant ainsi leur structure et leur fonction [48].

Les radicaux libres oxygénés (RLO), sont des agents chimiotactiques pour les plaquettes et les PNN, qui adhèrent à l'endothélium et forment des thrombus [47].

La production de radicaux libres peut induire la formation de facteurs chimiotactiques : dont certains sont dérivés de la peroxydation lipidique qui provoquent un afflux de neutrophiles activés par les composés issus de la dégradation cellulaire induite par les radicaux libres. Par formation d’agrégats, ils vont modifier la microcirculation et favorise le processus ischémique [46]. De plus, ces radicaux participent à l’attraction et à l’activation des polynucléaires neutrophiles par le biais de l’activation de la phospholipase A2 à

Le NO est également un radical libre mais celui-ci tient une place à part dans la séquence ischémie-reperfusion. Il existe une production basale de •NO par les cellules endothéliales jouant un rôle physiologique de vasodilatateur.

En effet le NO est vasodilatateur et possède la propriété d'inhiber l'adhésion endothéliale des polynucléaires neutrophiles et des plaquettes : la perte de cette propriété favoriserait une vasoconstriction, des phénomènes d'agrégation et d'adhésion des PNN et des plaquettes. La contraction des vaisseaux intéressés pourrait contribuer à la survenue d'un spasme ou à la diminution du débit coronaire qui peut ainsi perpétuer l'ischémie. Par ailleurs il semble admis actuellement que le peroxynitrite formé possède lui aussi des propriétés cytotoxiques ; il pourrait alors jouer un rôle majeur dans l'initiation des lésions post-ischémiques [49]

Ainsi, et au cours de la circulation extracorporelle, la production de monoxyde d’azote peut avoir des actions délétères via la production de cytokines inflammatoires. Par ailleurs, le monoxyde d’azote a une haute réactivité radiculaire libre et se combine avec de nombreuses molécules. Il peut se combiner également avec des radicaux peroxydes pour former du peroxyde nitrique qui a un effet direct toxique sur les cellules avec inactivation de la glycolyse et avec diminution de l’ATP intracellulaire, ce qui favorise la destruction cellulaire [44].

Figure 27: synthèse endogène auto et paracrine de monoxyde d’azote par les plaquettes et les

cellules endothéliales [50].

Ainsi l’activation des cellules endothéliales par des agonistes tels que ADP et les forces de frottement provoque une augmentation du calcium cytosolique qui active le monoxyde d’azote synthase (NOS). Le monoxyde d’azote ainsi produit va diffuser vers les plaquettes et stimuler la guanylate cyclase, ce qui entraîne une augmentation de la GMPc intracellulaire responsable de l’inhibition plaquettaire. L’activation plaquettaire peut également induire la production de monoxyde d’azote au sein même de la plaquette qui peut effectuer un rétrocontrôle sur elle-même et, éventuellement, sur les plaquettes [50].

 Rôle des polynucléaires neutrophiles et de l’endothélium vasculaire La mise en évidence de l’expression de molécules d’adhésion par les cellules endothéliales soumises à une ischémie-reperfusion et l’utilisation d’anticorps spécifiques dirigés contre ces molécules ont permis de montrer expérimentalement le rôle important de l’endothélium dans les lésions de reperfusion .

Le recrutement des polynucléaires neutrophiles pendant la reperfusion est secondaire à l’expression de molécules d’adhésion à la surface des cellules endothéliales. Le premier contact est réalisé par l’intermédiaire des sélectines exprimées à la surface des polynucléaires neutrophiles ( L-sélectine ) et des cellules endothéliales ( P-sélectine et E- sélectine ) .Tandis que la L-sélectine est exprimée de façon constitutive à la surface des polynucléaire neutrophiles , la P-sélectine et la E-P-sélectine le sont par les cellules endothéliales dans les heures qui suivent le début de la reperfusion.

L’expression des sélectines permet aux polynucléaires de rouler le long de la paroi vasculaire (phénomène du rolling) .Dans le même temps, l’expression de molécules d’adhésion (intercellular adhesion molecule-1 ou ICAM-1) par les cellules endothéliales va permettre l’adhérence des polynucléaires neutrophiles puis leur migration vers le tissu. Les polynucléaires neutrophiles activés sont capable d’induire des lésions tissulaires par l’intermédiaire de différents mécanismes tels que la libération de radicaux libres de l’oxygène et des enzymes cytotoxiques contenus dans les lysosomes.

Les protéases ( collagénase , gélatinase ) libérées dans le tissu infiltré par les polynucléaires neutrophiles vont altérer la perméabilité vasculaire en lysant les cellules endothéliales , en détruisant la membrane basale servant de support à l’endothélium .Les héparinases et élastases vont détruire les protéines de structure de la matrice extracellulaire et les constituants du glycocalyx des cellules environnantes .De plus , l’accumulation des polynucléaires neutrophiles dans la lumière vasculaire va réaliser une obstruction mécanique participant au phénomène de no-reflow (Non reperfusion) .

Enfin, les polynucléaires neutrophiles activés sont susceptibles de libérer des substances vasoconstrictrices et le facteur activateur des plaquettes (PAF) induisant l’activation plaquettaire l’origine de leur agrégation qui renforce l’obstruction vasculaire et qui est à l’origine de la libération de facteurs vasoconstricteurs surtout en présence d’un endothélium altéré ( thromboxane A2 , sérotonine , thrombine ….) .Le rôle des polynucléaires neutrophiles dans les lésions induites par la reperfusion est illustré par les travaux expérimentaux utilisant du sang déleucocyté , des anticorps monoclonaux dirigés contre les molécules d’adhésion et des animaux rendus génétiquement déficients en molécules d’adhésion .

Outre leur rôle dans l’adhésion et la migration des polynucléaires neutrophiles, les cellules endothéliales sont une source importante de molécules intervenant dans l’homéostasie vasculaire, à la phase initiale de l’ischémie – reperfusion, il existe une diminution importante de la production de monoxyde d’azote (NO) par la NO synthétase constitutive. De manière concomitante, il

augmenté, une adhésion des polynucléaire favorisées ainsi qu’une accumulation augmentée des radicaux libres de l’oxygène [44].

 Réponse inflammatoire :

La CEC active la réponse inflammatoire par l’intermédiaire de deux mécanismes : interaction directe avec le système immunitaire du patient et interaction via le clampage aortique qui va induire des phénomènes d’ischémie-reperfusion. Le déclampage aortique entraîne alors une réponse inflammatoire systémique [44].

La production de RLO, qui « diffusent » dans le milieu extracellulaire, et peuvent déclencher, entretenir puis amplifier les réactions inflammatoires [49].

Le système du complément est composé de plus de 30 protéines retrouvées dans le plasma et les cellules. Il s’agit d’un système physiologique de défense jouant un rôle clé dans le déclenchement des lésions tissulaires et de la réaction inflammatoire. En l’absence de reperfusion, l’activation du complément est tardive et fait partie intégrante des mécanismes impliqués dans la nécrose cellulaire .Au contraire, lorsque survient la reperfusion, le complément est activé rapidement et va participer aux lésions cellulaires induites par celle-ci .La production excessive de radicaux libres de l’oxygène à la phase initiale de la reperfusion est un des éléments à l’origine de l’activation du complément.

La formation d’anaphylatoxines ( particulièrement C3a et C5a ) va promouvoir et amplifier la réaction inflammatoire locale , induire la production de cytokines ( IL1 , IL6 , TNF-α …) , altérer la perméabilité vasculaire , induire une contraction des cellules musculaires lisses vasculaires et provoquer la

ailleurs , la fraction Ic3b obtenue après clivage du C3b participe à l’adhérence des polynucléaires neutrophiles activés . Le complexe terminal C5b -9, appelé aussi complexe d’attaque membranaire, va promouvoir la synthèse et l’expression des molécules d’adhésion à la surface des cellules endothéliales et induire directement des lésions du sarcolemme [44].

Les polynucléaires neutrophiles sont des cellules massivement engagées dans la réponse inflammatoire, que ce soit ou non la conséquence de l'interaction du sang avec les matériaux de la CEC. Ils libèrent dans le voisinage de l'endothélium vasculaire après y avoir adhéré des enzymes protéolytiques telles l'élastase ou la myéloperoxydase leucocytaire dont le rôle délétère sur les structures cellulaires. Ces lésions oxydatives sur les membranes cellulaires, se propagent par de véritables réactions en chaîne [30].