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L’intensité bilatérale des échanges : la régionalisation avance-t-elle vraiment vers l’est ?

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Source : banque centrale de la Fédération de Russie, 2009 ; APEC = Asia Pacif ic Economic

Cooperation P o u rc e n ta g e Pays de la CEI Pays UE 15 Pays de l'APEC*

En ce qui concerne la Russie, il y a de toute évidence une orientation rapide de son commerce extérieur de services vers l’Union européenne (graphique 14). Celle-ci est de très loin sont premier partenaire avec plus de 42 % du total (importations + exportations russes). On constate parallèlement que l’importance de la CEI et de la zone pacifique (APEC) recule régulièrement depuis quelques années.

2.3 L’intensité bilatérale des échanges : la régionalisation avance-t-elle vraiment vers l’est ?

2.3.1 Un indicateur plus nuancé que la valeur des échanges : l’intensité des échanges bilatéraux

La valeur des échanges commerciaux présente un inconvénient. Elle est influencée par la taille des pays qui échangent. Il est par exemple très probable que le commerce bilatéral de marchandises soit très élevé en valeur entre l’UE 15 et les États-Unis car ce sont deux très grandes économies entre termes de richesse produite et de capacité d’exportations et d’importations. Inversement, il y a une très grande probabilité pour que le commerce bilatéral entre l’UE 15 et l’Islande, le Liechtenstein ou la Moldavie soit moins élevé en raison de la petite taille de ces trois économies. La valeur brute

des échanges est donc un indicateur insuffisant qui donne une vision partielle de l’intensité réelle des relations commerciales entre pays. Afin de franchir cette difficulté, il faut utiliser des indicateurs qui permettent de neutraliser l’effet de taille. Des économistes utilisent un indicateur qui calcule l’intensité des échanges bilatéraux par couples de pays (Freudenberg, Gaulier, Unal-Kesenci, 1998 ; Gaulier, Jean, Ünal-Unal-Kesenci, 2004). Il permet de rapporter la valeur observée d’un flux d’échange bilatéral (exportation + importation) entre deux pays à la valeur théorique de ce même échange, elle-même estimée par la taille commerciale des pays (c’est-à-dire leur poids relatif dans le commerce mondial) dans le commerce mondial (Annexe 9).

Dans cette partie, on fera la cartographie et l’analyse de la répartition de différents résidus ou différences entre la valeur observée des échanges commerciaux entre pays et la valeur attendue telle que calculée selon le modèle. Dans la mesure du possible, on tiendra compte du résidu relatif (l’écart en pourcentage entre valeur théorique et valeur observée) et du résidu absolu (l’écart en valeur absolue). Le birapport sera cartographié à deux échelles : à l’échelle du monde et à l’échelle d’un ensemble régional qui englobe l’Union européenne et l’ensemble des pays voisins. Cela permettra de comparer l’évolution de l’intensité des relations commerciales entre l’Union européenne et ses différents voisinages (espace méditerranéen, Balkans, ex-Union soviétique) afin de savoir si le voisinage ex-soviétique suit une tendance originale dans ses relations commerciale avec le reste de l’Europe. Cela permettra également de comparer l’évolution des limites de la région commerciale européenne avec celles des autres grands ensembles régionaux dans le monde.

Dans un premier temps, le birappport sera cartographié pour lui-même sans tenir compte de la distance qui sépare les Etats les uns des autres. Puis, pour aller au-delà de cette étape purement descriptive, on cherchera des éléments d’explication à la répartition géographie du birapport d’intensité bilatérale d’échanges dans la région européenne. A ce propos, on peut faire deux hypothèses. La première est que la géographie des intensités commerciales d’échanges est déterminée par la distance qui sépare les pays partenaires.47 La seconde pose que l’intensité est autant sinon plus déterminée par des effets d’appartenance géopolitique et géoéconomique : l’intensité des échanges bilatéraux serait par exemple plus forte entre des pays qui appartenaient à l’ancienne Union soviétique, moins forte entre des pays de l’ex-URSS et des pays de l’Europe centrale et faible entre les pays de l’ancienne URSS et ceux de l’ancienne Europe occidentale.

Pour vérifier cette deuxième hypothèse largement suggérée par les cartes, il faut aussi observer les évolutions de la ventilation géographique du birapport entre la fin de la Guerre froide et le milieu des années 2000. Il faut donc comparer la répartition géographique des intensités d’échange à deux périodes de référence (1992-1994 et 2004-2006). On peut voir ainsi si une

47 C’est la distance kilométrique entre les capitales des pays concernés qui a été retenue, compte tenu du fait que les régions capitales sont très souvent les centres de gravités économiques des pays.

quinzaine d’années a suffi à effacer les limites héritées de l’ordre bipolaire qui prévalait pendant la Guerre froide (ouest de l’Europe, d’un côté, Conseil d’Assistance économique mutuelle, de l’autre). Le choix de deux périodes de référence de trois années permet de travailler sur des moyennes annuelles qui effacent les éventuelles augmentations ou baisses brutales accidentelles de la valeur des échanges commerciaux.

2.3.2 La région commerciale européenne et les interactions Union européenne - Voisinages

A l’échelle mondiale, les intensités d’échanges commerciaux de marchandises font apparaître plusieurs grands ensembles régionaux. La carte 13 montre la répartition des intensités d’échange en 2004-2006 entre tous les pays ou groupes de pays du monde. Tous les birapports supérieurs à 1 sont représentés, ce qui revient à montrer tous les couples de pays dont la valeur des échanges bilatéraux observés est égale ou supérieure à la valeur attendue selon le modèle. Mais ce seuil est trop bas pour faire émerger des paquets de pays qui entretiennent des relations commerciales privilégiées. Il n’est pas assez discriminant et permet de distinguer avec netteté seulement l’ensemble régional latino-américain voire latino-américain.

La carte 14 est beaucoup plus discriminante. Elle permet de distinguer un ensemble latino-américain (comprenant l’Amérique centrale et les Caraïbes), l’ALENA, un ensemble pacifico-asiatique et un ensemble européen dont les limites excèdent largement celles de l’Europe conventionnelle. On voit sur la carte de fortes interactions commerciales entre les pays de l’Union européenne et l’Afrique du Nord, la Turquie et les pays de l’ancienne Union soviétique.

La carte 15 confirme ces observations, montrant une région commerciale « européenne » qui s’étend de l’Asie centrale à l’Afrique du Nord à l’Islande. Dans cet espace, les interactions sont sensiblement plus nombreuses et plus élevées que dans la région asiatique par exemple où l’on repère deux sous ensembles : un sous ensemble autour du sous continent indien et un sous ensemble englobant l’ASEAN et quelques économies du Pacifique. En Europe, on constate que les intensités d’échanges n’apparaissent plus entre les grandes économies de la partie ouest. Cela est dû au biais présenté plus haut. Cependant, la carte du résidu absolu montre que des liens privilégiés existent aussi entre elles (Annexes 11 et 12).

La carte 16 ne montre que les couples de pays dont la valeur des échanges bilatéraux observés est au moins quatre fois supérieure à la valeur attendue selon le modèle en 2004-2006. On constate que l’Amérique latine forme l’ensemble régional le plus clair. Si une hiérarchie des ensembles régionaux était établie selon le critère de la netteté cartographique, l’ensemble européen apparaîtrait en deuxième position. Aiileurs, notamment en Asie, les choses sont moins claires.

Les cartes confirment l’existence d’une région commerciale européenne composée de pays qui ont davantage d’interaction entre eux qu’avec le reste du monde. Mais elles montrent aussi et surtout qu’il existe des paquets de pays à l’intérieur de cette région.

C’est ce que confirment les cartes réalisées à partir du même indicateur à l’échelle de l’ensemble géographique qui englobe l’Europe et l’ensemble des pays voisins. La carte 17 fait apparaître plusieurs sous ensembles régionaux : Méditerranée (fortes interaction entre certains pays de l’Europe du Sud et certains pays de l’Afrique du Nord), Europe du Nord (région baltique, pays scandinaves dont Islande), Europe centrale (ancienne Mittel Europa), Europe balkanique (ancienne Yougoslavie), voisins orientaux de l’Union européenne actuelle (ex-URSS). Ce dernier sous ensemble est encore fortement intégré en 2004-2006.

La carte 18 fait apparaître ces sous ensembles avec plus de netteté. Elle confirme que les voisinages de l’Union européenne ne se ressemblent pas. Les pays de l’Afrique du Nord ont des échanges bilatéraux plus intenses avec ceux de l’Europe du Sud qu’entre eux, ce qui confirme l’idée qu’il existe une très faible intégration régionale commerciale entre pays de la rive sud et est de la Méditerranée. Inversement, les pays de l’ancienne URSS ont davantage d’interactions entre eux qu’avec le reste de l’Europe. Cette carte montre que la géographie du commerce international en Europe est encore au moins en partie déterminée par l’inertie d’anciennes discontinuités géopolitiques (limite URSS – Europe de l’est, limite Europe de l’est – Europe occidentale).

L’intensité des échanges bilatéraux de l’UE 15 considérée comme un seul pays montre une région commerciale européenne plus étroite dans les années 2000 que dans les années 1990. L’hypothèse de la régionalisation est donc est sérieusement nuancée. De plus, les évolutions varient beaucoup d’une région du monde à l’autre. L’intensité des échanges a baissé avec l’Amérique latine, avec toute la partie centrale de l’Afrique, avec le Moyen Orient et l’Asie du Sud et avec les pays de l’ASEAN. Elle reste élevée avec les économies de l’Afrique du Nord (malgré la baisse avec l’Algérie), les Balkans, l’Europe centrale et la Turquie. Mais elle est faible avec certains voisins orientaux (Belarus, Ukraine). En revanche, elle augmente avec la Russie, le Caucase et le Kazakhstan. La région commerciale européenne tend bien à s’élargir en direction de l’est et l’Asie centrale y entre petit à petit (Annexe 10).

2.3.3 Régionalisation versus dérégionalisation en Europe

La comparaison entre la situation du milieu des années 2000 et celle du début des années 1990 montre des évolutions sensibles. La carte 19 montre que les ensembles régionaux relevés ci-dessus étaient déjà bien identifiables dans la première moitié des années 1990.

La région commerciale européenne s’étendait de l’Afrique du Nord à l’Asie centrale au Proche Orient. La comparaison avec la carte 1 montre que, en une quinzaine d’années, le nombre des relations commerciales privilégiées a baissé dans cette région du monde alors qu’il est stable (Amérique centrale et du sud) ou qu’il augmente (Asie de l’est et du sud-est) dans d’autres régions. On constate un rétrécissement de la région européenne sur son flanc sud (moins de relations bilatérales privilégiées entre les économie d’Afrique du Nord et la rive nord de la Méditerranée) et sud-est (moins d’interactions commerciales entre le Proche Orient et l’Europe). La carte 20 confirme cette tendance. Le nombre des relations commerciales bilatérales privilégiées a baissé dans la région européenne entre 1992-94 et 2004-2006 sur le flanc sud et sud–est ainsi que sur le flanc est (comparer avec la carte 2). On voit en particulier un recul sensible des liens privilégiés entre la France et le Maghreb. De même, les liens commerciaux privilégiés à l’intérieur de l’ex-URSS sont moins nombreux.

Le recul est spectaculaire pour les couples de pays dont les échanges bilatéraux observés étaient et sont au moins trois fois supérieurs aux échanges attendus selon le modèle. C’est ce que montre la comparaison des cartes 21 et 15. La réduction des interactions commerciales à l’intérieur de la région européenne et son rétrécissement sur les marges est très spectaculaire si on compare ces deux évolutions avec l’étonnante stabilité de l’ensemble latino et centre-américain. Tout indique que l’Europe, du point de vue du modèle utilisé ici, est davantage engagée dans un processus de dérégionalisation que le contraire. Cela est confirmé par la baisse de la hauteur moyenne des birapports.

L’analyse de la distribution du résidu relatif à l’échelle macrorégionale permet de cerner ces évolutions avec plus de précision. La comparaison des cartes 22 et 17 et des cartes 23 et 18 confirme la rétraction nette de la région commerciale européenne au sud et au sud-est. Elle montre surtout des évolutions contrastées dans les différentes sous-régions de ce grand ensemble :

- recul des traditionnelles relations commerciales très privilégiées entre pays de la rive nord et pays de la rive sud de la Méditerranée ;

- persistance du nombre élevé de liens commerciaux privilégiés dans l’ancienne Yougoslavie : l’apparition de frontières entre les Etats qui formaient la Yougoslavie a eu impact limité sur l’intensité de leur échanges. Les birapports d’intensité d’échanges ont sensiblement baissé mais restent de loin les plus élevés du monde ;

- renforcement de l’ancrage commercial de l’Islande à l’Europe du Nord et intensification des échanges commerciaux entre les pays riverains de la mer Baltique (pays Baltes, pays scandinaves, Finlande) ;

- intensité stable des échanges commerciaux entre les pays de l’Europe centrale (Pologne, République tchèque, Slovaquie, Hongrie, Slovénie, Roumanie, Bulgarie) malgré la croissance spectaculaire du commerce de ces pays avec l’Europe de l’ouest pendant la période qui a précédé leur adhésion à l’Union européenne ;

- baisse spectaculaire du nombre de liens commerciaux privilégiés à l’intérieur de la région ex-soviétique : on constate en particulier la disparition des relations privilégiés (birapports supérieurs à 3 et même à 2) entre, d’un côté, l’Asie centrale et le Caucase et, de l’autre, les pays baltes. Ces derniers ne jouent plus autant qu’autrefois le rôle d’interface maritime entre l’URSS et le reste du monde ;

- dissolution rapide des échanges bilatéraux privilégiés entre l’ancienne URSS et les PECO (anciennes démocraties populaires).

La distribution du résidu absolu en valeur en 1992-1994 (Annexe 7) montre une évolution apparemment contradictoire, si on la compare avec celle du résidu absolu en 2004-2006 (Annexe 8). Au début des années 1990, l’écart en valeur entre commerce observé et commerce estimé selon le modèle est élevé entre les grandes économies de l’Europe de l’ouest (Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie) et plus bas entre ces économies et celles du reste de l’Europe et du voisinage. Au milieu des années 2000, la configuration a changé sensiblement. Le résidu absolu a augmenté sensiblement entre les économies de l’Europe de l’Ouest mais aussi entre celles-ci et divers pays européens du nord, de l’est et du sud-est. Les relations commerciales se sont intensifiées avec quelques pays du voisinage oriental (essentiellement la Turquie et le Kazakhstan). L’Europe de l’ouest apparaît bien comme l’élément polarisateur des échanges de marchandises dans cette partie du monde.

L’idée de régionalisation doit donc être très sérieusement nuancée aussi bien en Europe qu’ailleurs. Premièrement, l’ensemble latino américain est très stable, ce indique davantage une situation de régionalisation avancée qu’un processus en marche. Deuxièmement, la région commerciale européenne élargie montre des évolutions contrastées apparemment contradictoires. Le modèle retenu permet de confirmer son existence, mais les cartes montrent aussi des évolutions très rapides aussi bien en interne que sur les marges : ici les liens commerciaux privilégiés sont plus nombreux, là leur nombre est stable, ailleurs ils sont en baisse. Surtout, on retire des cartes une nette impression de « détricotage » de l’héritage soviétique dans le voisinage oriental.

2.3.4 Les voisins orientaux dans la recomposition géographique du commerce international de la région européenne

Le voisinage oriental forme encore un ensemble sous régional très visible et très intégré dans l’Europe élargie malgré la baisse des intensités d’échanges entre les pays qui le composent. Inversement, les voisinages sud (rive sud de la Méditerranée) ou sud-est (Machrek) montrent davantage de liens privilégiés avec l’Europe qu’entre eux. Toutefois, l’analyse détaillée de l’évolution des intensités bilatérales d’échanges de plusieurs pays (Russie, Ukraine, Belarus, Kazakhstan) ou groupes de pays (Caucase) montre qu’il n’y a pas un voisinage oriental mais plutôt des voisinages orientaux de l’Union européenne. Au sein de l’ancienne URSS, on peut distinguer au cas par cas des évolutions diverses. Après avoir décrit les trajectoires suivies par ces pays, au moyen d’un autre type de représentation cartographique, on apportera des éléments d’explication.

En ce qui concerne la Russie, les évolutions sont sensibles mais pas radicales (carte 24). Premier constat, les intensités bilatérales d’échanges entre la Russie et les économies de l’ancienne URSS ont baissé dans tous les cas entre les deux périodes, surtout pour le groupe des pays du sud de l’Asie centrale (Tadjikistan, Turkménistan, Ouzbékistan) et pour la Lituanie. On remarque aussi une baisse des intensités d’échanges bilatéraux avec les pays de l’Europe centrale qui composait l’ancien glacis des démocraties populaires intégrées dans le Conseil d’Assistance économique mutuelle et le Pacte de Varsovie (surtout l’ancienne Tchécoslovaquie, la Hongrie, la Bulgarie et la Roumanie). Avec l’Europe de l’Ouest, les intensités d’échange ont évolué à la hausse ou à la baisse, mais ces évolutions ne sont pas significatives car les birapports d’intensité d’échange restent bas.

L’impression de « détricotage » de l’espace économique soviétique se confirme. Toutefois, elle est tempérée par la stabilité de la répartition géographique des intensités d’échanges commerciaux de la Russie avec l’ensemble de l’espace européen. Malgré la baisse décrite ci-dessus, c’est toujours avec les pays de l’ancienne Union soviétique que la Russie commerce avec la plus grande intensité. On voit que les liens restent privilégiés avec le Kazakhstan, l’Ukraine et le Belarus. Les intensités d’échanges restent moyennes avec les pays de l’Europe centrale anciennement socialiste et basses voire très basses avec les pays de l’ancienne Europe de l’Ouest, à une exception près (Suède). On peut donc parler d’un processus de dérégionalisation dans la partie est de l’Europe et dans l’ancienne URSS, mais d’un processus qui prend la forme d’un repli en bon ordre avec des contours géographiques stables. Les évolutions relevées pour l’Ukraine et le Kazakhstan sont presque identiques (Annexes 13 et 14). Mais elles sont différentes pour le Belarus. Dans ce dernier cas, on constate une baisse de l’intensité des échanges bilatéraux avec la plupart des pays de la région commerciale européenne mais une augmentation avec la Russie (Annexe 15).

L’évolution la plus significative est le recul continu de l’intensité des échanges commerciaux de marchandises au sein de l’ancienne URSS. Cette évolution a plusieurs causes. Premièrement, l’éclatement de l’Union soviétique a rendu à toutes les anciennes républiques soviétiques leur souveraineté en matière économique et commerciale. Elles sont libres d’orienter leur commerce comme elles le souhaitent au gré de l’activité de leurs agents économiques. Cette évolution est très claire dans le cas des pays baltes. Liés dès le milieu des années 1990 à l’Union européenne par des accords européens d’association, leur commerce s’est massivement réorienté vers l’UE 15. On sait aussi que la Russie a longtemps imposé des droits de douane prohibitifs sur certains produits venus des pays baltes, ce qui a contribué à l’effondrement du commerce dans cette partie de l’Europe. Deuxièmement, l’intensité décroissante des échanges au sein de la CEI et l’incapacité et des pays membres à faire fonctionner cet ensemble selon les termes des traités signés à partir de décembre 1991 (Light, 2006). Troisièmement, les mésententes politiques entre certains pays membres ont eu plusieurs conséquences dont on ne citera ici que quelques exemples. Les tensions récurrentes entre l’Ukraine et la Russie ont incité par exemple cette dernière à relocaliser certains industries d’armement à haute technologie sur le territoire russe. C’est autant d’échanges en moins entre les deux pays. Autre exemple, la Russie n’a jamais hésité à prendre des mesures de rétorsion commerciale à l’encontre de certains pays dont les choix politiques contreviennent à ses intérêts (embargos sur des produits moldaves et géorgiens). Enfin, la sortie de plusieurs pays de la CEI (Turkménistan et Géorgie) ne peut que renforcer la dissolution des liens commerciaux entre certains membres.

2.3.5 Quels sont les déterminants de la géographie de l’intensité des échanges bilatéraux ?

Pour répondre à cette question, on peut formuler nombre d’hypothèses qui permettent de confirmer ou d’infirmer la thèse d’une tendance la régionalisation. Première hypothèse : avec la disparition de l’ordre bipolaire européen hérité de la Guerre froide, les anciennes frontières idéologiques et économiques se sont effondrées et la distance kilométrique entre les économies est devenue un facteur plus déterminant qu’autrefois de l’intensité de leurs échanges. En d’autres termes, les murs idéologiques ne freinent plus les échanges entre les économies soviétiques et de l’Europe de l’est, d’un côté, et les économies de l’Europe de l’Ouest, de l’autre. Deuxième hypothèse : au contraire,