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Les investissements directs étrangers : l’UE domine-t-elle ses voisinages ?

Chapitre 3. Une intégration macrorégionale fonctionnelle ? Complémentarités économiques et relations centre-périphérie

3.2 Les investissements directs étrangers : l’UE domine-t-elle ses voisinages ?

3.2.1 Pourquoi étudier les investissements directs ?

L’étude des investissements directs étrangers (IDE) pose de nombreux problèmes maintes fois signalés par les économistes déjà signalés plus haut (Adda, 2006). Pour autant, on ne peut pas

négliger ce thème d’étude, sur lequel un certain nombre de faits sont aujourd’hui bien établis et acceptés. On sait d’une part que les investissements directs sont très largement le fait des pays riches, malgré la montée en puissance des économies émergentes dans les flux et stocks d’IDE depuis les années 2000 (Chine, Brésil, Russie). On sait aussi que l’Union européenne est de loin le premier investisseur et la première destination des investissements directs dans le monde. C’est une position qu’elle a acquise dans les années 1990 et qui se confirme d’année en année, alors que la part des États-Unis ne cesse de reculer et que celle du Japon est faible en comparaison de son poids commercial. Selon la CNUCED, l’UE représentait en 2007 45 % du stock des IDE entrants et 52 % du stock d’IDE sortants dans le monde, en prenant en compte les échanges croisés entre pays membres. Elle conserverait largement sa place de premier investisseur dans le monde si l’on ne prenait pas en compte ces flux internes (graphique 33).

Dans le cadre de cette étude consacrée à la régionalisation du monde, l’analyse des investissements directs a un intérêt particulier car les flux d’IDE sont un des indices de l’interconnexion croissante des économies. Ils sont en grande partie le fait des firmes multinationales qui sont à la recherche de marchés nouveaux ou de facteurs à bas coût. De plus, lorsqu’une firme d’un pays A investit dans un pays B, cela crée un flux commercial (service ou marchandises) entre ces deux pays et cela renforce leur relation bilatérale. L’IDE est donc un facteur d’intégration. Cette dernière peut éventuellement prendre la forme très dissymétrique d’un rapport de type centre périphérie, lorsque les flux sont très déséquilibrés entre les deux pays. Il peut arriver que la structure productive d’un pays qui reçoit beaucoup plus d’IDE qu’il n’en émet soit peu à peu modifiée pour répondre aux besoins de l’économie émettrice d’investissements.

Qu’en est-il de la relation entre l’UE et ses voisins orientaux ? L’UE est le plus grand investisseur dans le monde et les pays de la CEI sont beaucoup plus modestes de ce point de vue. Peut-on considérer que des pays comme la Russie, le Belarus ou l’Ukraine sont en train de devenir des périphéries de l’Union européenne ? La géographie des flux et des stocks d’investissements en Europe orientale confirme-t-elle ce qui a été dit plus haut à propos du commerce de marchandises ? Les pages suivantes apporteront quelques éléments de réponses. Elles ne sont toutefois que le prélude à un chantier de plus longue haleine qui consisterait à collecter des données relatives aux IDE à l’échelle mondiale afin de produire une base de données harmonisées à l’échelle mondiale. Dans l’idéal, cette base de donnée tiendrait compte davantage de flux que des stocks. Par ailleurs, il serait intéressant de savoir dans quelle mesure les bénéfices réalisés en dehors de l’UE par les firmes européennes sont réinvestis sur place pour savoir si des liens économiques durables et profonds s’instaurent. Une matrice de flux est en cours de réalisation actuellement dans le cadre d’un projet de recherche du 7e programme cadre européenne.

3.2.2 L’Union européenne : le premier investisseur mondial

Les IDE de l’Union européenne sont en majorité des IDE internes dont le volume augmente plus vite que le stock sortant externe (49 % en 1994 et 42 % en 2007). La tendance est donc inverse de celle enregistrée pour le commerce (voir supra). On a constaté en effet une baisse du commerce intracommunautaire. Comment évolue le stock d’IDE de l’Union européenne à 1562 dans le monde et dans les diverses parties du voisinage ? Quelle est la place de la Russie et du voisinage oriental dans cette évolution ?

Graphiques 33

Stocks sorta nts d'IDE de 4 puissa nce s é conomique s

0 1 000 000 2 000 000 3 000 000 4 000 000 5 000 000 6 000 000 7 000 000 8 000 000 9 000 000 19 94 19 96 19 98 20 00 20 02 20 04 20 06

Source : Eurostats, 2009. UE 15 = avec (*) et sans (**) les f lux internes M ill io n s d 'e u ro s c o u ra n ts Suis se Etats-Unis UE 15* UE 15** Japon

Les échanges d’IDE sont principalement une affaire de pays riches et restent dominés par les économies de la Triade. L’essentiel de ses IDE sortants se dirige vers les économies riches, notamment les États-Unis qui captent la plus grande part du stock des IDE sortants faits par les firmes de l’UE 15 (cartes 26 et 27). Si on observe la ventilation géographique du stock sortant par grandes masses continentales, l’Amérique vient très largement en tête (malgré la baisse de l’Amérique du Nord qui est due à une augmentation du stock intra UE 15 de 10 points de pourcentage), devant l’Asie orientale et les voisins riches (Suisse, Norvège).

62 On ne prendra en compte que le stock émis par l’UE 15 car les nouveaux membres sont des acteurs marginaux de l’investissement dans le monde.

Dans cette géographie, les voisins du sud et de l’est pèsent peu.63 Ils sont marginaux, même si leur part dans le stock total des IDE sortants de l’UE 15. L’ensemble du voisinage attirait 1,1 % des IDE de l’UE 15 en 1994 et 2,2 % en 2007. Si on ajoute à cela le stock d’IDE sortant de l’UE 15 localisé dans les nouveaux pays membres de l’UE 27, on passe en 2007 de 2,2 % du stock total à 5,9 %. Enfin, si on ajoute les stocks situés en Norvège et en Suisse, on atteignait 11,2 % en 2007. L’UE est donc relativement déconnectée des pays en développement de son voisinage. Elle investit ailleurs.

Graphique 34

Ventilation du stock sortant d'IDE de l'UE 15

0 5 10 15 20 25 30 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006

Source : Eurostats, 2009. Voisinages S et E (voir note inf rapaginale)

P o u rc e n ta g e s Voisinages S et E* Amérique du Nord Suisse+Norv Asie S, E et SE Amérique C et S Autres Af rique

A l’intérieur du voisinage géographique de l’Union européenne, les évolutions sont très différentes d’une région à l’autre. La part de l’Afrique du Nord, du Machrek et du Proche et Moyen Orient reste stable à des niveaux très faibles. La part de la CEI connaît en revanche une augmentation très sensible depuis le début des années 1990. Et la Russie capte l’essentiel de ce

63 Voisins en l’occurrence désigne l’ensemble suivant : Afrique du Nord, CEI, Machrek, Proche et Moyen Orient. On trouvera une définition précise de ces agrégats régionaux les métadonnées de la base de données Eurostats.

stock. Toutefois, cette augmentation ne permet à la Russie que d’atteindre un volume d’IDE de 0,9 % du stock sortant total de l’UE 15, ce qui est finalement peu compte tenu de sa taille et de ses ressources. On est encore très loin d’une réelle intégration régionale Russie – UE par les IDE.

Graphique 35

Ventilation des IDE sortants en stock de l'UE 15

0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0 1,2 1 9 9 4 1 9 9 5 1 9 9 6 1 9 9 7 1 9 9 8 1 9 9 9 2 0 0 0 2 0 0 1 2 0 0 2 2 0 0 3 2 0 0 4 2 0 0 5 2 0 0 6 2 0 0 7 Source : Eurostats, 2009 P o u rc e n ta g e s Af rique N CEI dont Russie Machrek P&M Orient

3.2.3 Une ouverture économique en trompe l’œil de la Russie ?

Si on compare la période actuelle avec la période soviétique, la Russie est une économie en voie d’ouverture vers les pays les plus développés depuis plusieurs années. Toutefois, l’évolution du flux et du stock d’IDE entrants dans ce pays peut être interprétée de deux façons (Gianella, 2006). On peut y voir le signe d’une volonté d’ouverture résolue et durable accompagnée d’une spectaculaire augmentation de l’attractivité de la Russie. On peut aussi faire des comparaisons et conclure que la Russie est sensiblement moins attractive que certains pays de l’Europe centrale.

Le flux d’IDE entrants en Russie ne cesse d’augmenter depuis 2003 (graohique 36). D’après la CNUCED, il a atteint 52 milliards de dollars en 2007 (contre 32 milliards en 2006), loin devant

les autres économies de la CEI (10 milliards au Kazakhstan et en Ukraine). L’augmentation est à mettre au compte de la croissance du marché de consommation domestique (enrichissement d’une partie de la population russe depuis les années 1990) et de la libéralisation de certains secteurs économiques. L’énergie et les ressources naturelles, principalement l’extraction, sont très attractives depuis les années 1990 ; on enregistre aussi une montée en puissance du secteur des services, notamment la distribution et l’immobilier (les services en général représentent plus de 48% du stock des IDE faits par les firmes l’UE 15 en Russie en 2006, d’après Eurostats) et de l’industrie manufacturière (les investisseurs profitant de la présence en Russie d’un appareil industriel bien développé et d’une main-d’œuvre formée et peu chère). La Russie n’est donc pas seulement utilisée par les investisseurs étrangers comme une simple base d’extraction minière et de fourniture de ressources naturelles. Elle attire aussi parce qu’elle possède une main-d’œuvre qualifiée et parce qu’elle devient un marché attractif.

Graphique 36

Le stock d'IDE en Russie

0 50000 100000 150000 200000 250000 300000 350000 2000 201 2002 2003 2004 2005 2006 2007 Source : Cnuced, 2009 M ill io n s d e d o lla rs c o u ra n ts Stock entrant Stock sortant

La croissance du flux et du stock entrants est aussi le résultat de la politique mise en œuvre par Vladimir Poutine à partir du début des années 2000, avec plusieurs décisions et réformes importantes : plus grande liberté accordée aux acteurs économiques avec un allègement des contrôles sur les mouvements de capitaux entrants et sortants, établissement de la convertibilité totale du rouble (en juillet 2006), amélioration de la législation sur la propriété intellectuelle (bien

qu’il reste fort à faire dans ce domaine), égalité de droit entre les investisseurs étrangers et les investisseurs russes pour l’acquisition d’actifs dans des entreprises du secteur bancaire, réforme fiscale de 2000 à 2004 et allégement des prélèvements sur les entreprises (notamment de la TVA), relance des zones franches… Outre cela, le secteur bancaire continue de se développer et joue un rôle croissant en matière d’intermédiation. Le gouvernement a même commencé à assainir les banques en imposant des normes de qualité plus draconiennes.64 Enfin, même si l’adhésion à l’OMC se fait attendre, l’obtention du statut d’économie de marché a constitué une sorte de début d’assurance pour les investisseurs, toujours en quête de sécurité pour leurs actifs. Tous ces éléments donnent à l’économie russe une plus grande prévisibilité sur le court et le moyen terme.

Toutefois, la Russie demeure relativement peu attractive si on compare ses performances modestes avec celles des nouveaux membres de l’Union européenne et d’autres pays émergents comme la Chine (Broadman, Recanatini, 2001 ; Krifa-Schneider, Bauduin, 2007). A titre indicatif, le stock d’IDE entrants en Russie en 2008 s’élevait à 1 499 dollars par habitant, contre 4 236 en Pologne, 6 304 en Hongrie, 11 1093 en République tchèque, 1 519 au Brésil. La comparaison avec la Chine révèle un plus grand écart encore. L’Inde est le seul pays émergent qui fait moins bien que la Russie. Ces différences traduisent un retard accumulé par la Russie dès les années 1990. Les causes sont nombreuses. D’une part, alors que certains pays ont décidé précocement de faire appel aux investisseurs étrangers pour financer leur restructuration, la Russie a préféré faire appel à ses propres ressources en vendant certains groupes industriels ou de services à des investisseurs locaux. Ensuite, à partir de 1999, le pays a fondé son développement sur les revenus tirés de ses exportations de matières premières, profitant de l’augmentation des cours.

Enfin, les investisseurs peuvent être découragés par certaines caractéristiques de l’économie russe et une politique jugée trop restrictive vis-à-vis des IDE entrants. Divers rapports de l’OCDE mettent l’accent sur l’existence de nombreux freins (Gianella, 2006 ; OCDE, 2008) : insuffisante transparence de la politique économique russe, insuffisante harmonisation des outils de mesure statistiques de l’investissement, insuffisante transmission des informations pertinentes aux investisseurs étrangers (grande opacité notamment sur la taille réelle des réserves de matières premières), réglementations administratives trop complexes (notamment les procédures d’obtention des titres de propriété privée ou d’obtention de permis de travail), faible sécurité fiscale, absence d’institution indépendante de régulation du marché, fort risque d’expropriation arbitraire…65

64 Toutefois, il reste fort à faire car ce secteur demeure fragmenté avec beaucoup de petites banques sous capitalisées.

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L’affaire Youkos est symbolique de ce point de vue mais d’autres ont eu lieu ensuite. Outre les mésaventures de Shell et BP, on peut signaler d’autres cas : l’opérateur norvégien de téléphonie Telenor, Ikea (le groupe gèle toutes ses opérations en Russie pour protester contre une surfacturation de 189 millions dollars qui lui aurait été infligée parce qu’il a refusé de verser un dessous de table), Heritage Fund (qui subit des persécutions mafieuses après que son patron ait critiqué l’opacité des compte de Gazprom),

D’autres analyses soulignent le niveau trop élevé de la corruption.66 Le risque pays est élevé et les investisseurs sont encore souvent dissuadés par le fait que la Russie n’appartient toujours pas à l’OMC. Une telle adhésion leur apporterait des garanties en la contraignant à aligner sa législation sur celle des autres pays membres. Enfin, une grande partie de l’appareil productif et des infrastructures (notamment le réseau routier) sont dans un état pitoyable.

Plus important, la Russie a tendance à se refermer depuis l’accession de Vladimir Poutine au pouvoir. Dès 2003, le président russe a décidé de limiter sévèrement l’accès des opérateurs étrangers au secteur énergétique et au sous-sol. Puis, plusieurs attaques du pouvoir contre des entreprises étrangères ont conforté l’attentisme des firmes susceptibles d’investir.67 Le verrouillage de certains secteurs économique est devenu plus explicite lors du deuxième mandat de Vladimir Poutine. Par exemple, le FSB (ancien KGB) siège dans la commission qui donne son accord aux grands investisseurs étrangers. Ces derniers doivent obtenir une autorisation spéciale de cette commission pour pouvoir acheter plus de 50 % des actions dans les entreprises de 42 secteurs économiques, dont la liste précise est restée inconnue pendant longtemps (énergie, défense, industrie nucléaire, aéronautique spatiale, la télévision et la radio, la gestion de l’eau, monopoles naturels...), ce qui était un facteur supplémentaire d’opacité et d’incertitude.68 Dès que la prise de participation doit dépasser 25 % du capital, l’autorisation est indispensable si l’investisseur est une compagnie publique étrangère. Dans le secteur de l'extraction, des seuils encore plus bas ont été imposés (10 % pour les entreprises étrangères privées et 5 % pour les entreprises étrangères publiques).

Parallèlement à cela, l’Etat fait un retour dans l’économie depuis 2003 (Durand, 2006 ; Gianella, 2006). La part du secteur privé dans la production de richesse serait passée de 70 % en 2000 à 63 % en 2006 selon un rapport de la BERD. Cette décision est causée par une forme de nationalisme économique aisément compréhensible mais aussi par le souhait des autorités russes de canaliser les investissements étrangers vers d’autres secteurs économiques que l’énergie et l’extraction des matières premières. Cette ambition se heurte toutefois à certains obstacles, notamment à la baisse de la compétitivité de nombreuses entreprises locales dans plusieurs secteurs

66 Selon le Ministère du Développement économique de Russie, la corruption porterait sur une somme équivalente au PIB de ce pays (Les Echos, 1er mars 2007). Selon la Coface, en 2007, les paramètres qui présentaient le niveau de risque le plus élevé en Russie étaient le défaut de paiement des entreprises, la fragilité du secteur bancaire, la fragilité de l’environnement géopolitique et de la gouvernance.

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Rappelons l’éviction de Shell et de deux entreprises japonaises qui s’étaient très sérieusement investis dans l’exploration et l’exploitation du gaz dans l’île de Sakhaline. Idem pour BP, malgré son mariage avec l’entreprise russe TNK. La justice russe l’a condamné pour non respect de l’environnement.

68

Le texte de la loi a été validé en première lecture en septembre 2007. Il a été adopté en deuxième lecture en mars 2008 et en troisième lecture par la Douma en avril 2008. Cette loi n’est pas rétroactive mais les investisseurs qui détiennent déjà au moins 5 % dans une entreprise d’un secteur stratégique doivent se signaler au gouvernement. Les monopoles naturels sont les entreprises qui contrôlent au moins 65 % d’un marché en Russie. Cette loi date de 2008, mais elle ne fait que confirmer en droit une pratique plus ancienne.

fortement concurrentiels en raison de l’appréciation du rouble à partir de 1999. Le retour de l’Etat prend différentes formes : la prise de contrôle directe de nombreux actifs dans des entreprises stratégiques (comme Gazprom ou Rosneft qui est devenu n°1 du pétrole en rachetant des actifs de Youkos), la consolidation d’une situation de monopole (Rosoboronexport dans l’armement), le regroupement autoritaire de certaines entreprises pour constituer de grands consortium (groupe aéronautique OAK)... Tout cela crée un environnement peu sécurisant pour les acteurs économiques étrangers, même si la publication de la liste des secteurs stratégiques a apporté une incontestable clarification.

3.2.4 Une mise en périphérie de la Russie par rapport à l’Union européenne ?

Il serait erroné de dire que la Russie est une simple périphérie en général et une périphérie de l’Union européenne dans la géographie mondiale des IDE. Elle reçoit des investissements mais elle est aussi capable d’en émettre de plus en plus. Le flux entrant en 2007 était de 52 milliards de dollars, mais le flux sortant était de 45 milliards. C’est un écart relativement faible et ce sont des chiffres assez flatteurs si on les compare avec la plupart des autres pays du monde y compris avec des pays membres de l’Union européenne. Pour le flux entrant, la Russie est classée 8e destination mondiale des investissements directs. Pour le flux sortant, elle est en 15e position selon la CNUCED. Sa part dans le stock entrant des IDE totaux dans le monde est passée de 0,6% en 2000 à 2,1% en 2007. Inversement, sa part dans le stock des IDE mondiaux totaux sortants est passée de 0,3% à 1,6%. Les chiffres la classent assez bien parmi les économies émergentes, pour le stock d’IDE par habitant et pour le ratio IDE entrants / IDE sortants. En 2007, le stock entrant s’élevait à 2 282 dollars par habitant en Russie, contre seulement 68 en Inde et 562 en Chine, selon la CNUCED. Le flux sortant est orienté essentiellement vers l’Europe et l’Amérique du Nord, puis vers Afrique et les économies en transition. Le ratio des IDE sortants / IDE entrants en stock y est également supérieur aux autres économies émergentes : 79% en Russie en 2007, contre 40% au Brésil, 39% en Inde et 15% en Chine.

La Russie est très nettement le premier émetteur d’IDE de la région Europe du Sud-Est – CEI, hors UE, avec une double orientation géographique. Dans les années les plus récentes, la plupart des opérations de fusions et acquisitions impliquant une entreprise russe ont été dirigées vers les pays développés ; les opérations de type greenfield ont été dirigées en majorité vers les pays en développement ou en transition. On remarque aussi une prédominance des grandes entreprises de l’énergie et de l’industrie lourde dans les IDE russes sortants. Mais si les actifs des 25 plus grandes entreprises russes ont très fortement augmenté dans les années 2000, il n’y a pas une stratégie claire

de déploiement global. On ne constate pas non plus, à quelques exceptions notables qui seront étudiées dans la dernière partie, de réelle arrière-pensée politique (volonté d’hégémonie globale ou régionale) dans la géographie de ces IDE sortants dont la localisation est plutôt déterminée par des opportunités et des objectifs principalement économiques.

En pourcentage de la formation brute de capital fixe (FBCF), la part des IDE en Russie augmente, ce qui indique encore un degré croissant d’ouverture malgré les freins évoqués plus haut. Bien que basse si on la compare avec d’autres pays de la CEI, elle est nettement supérieure à la part des IDE dans la FBCF d’autres grandes économies émergentes. En 2007, le flux entrant représentait moins de 20 % de la FBCF en Russie, contre 26% en Ukraine, 32% au Kazakhstan, mais seulement 9% en Argentine, 15 % au Brésil, 13% au Mexique, 6% en Chine (sans Hong Kong) et en Inde.

Graphique 37

Part de plusieurs pays dans le stock d'IDE entrants en Russie en 2008

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