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PARTIE I. Un nouvel outil communicationnel pour véhiculer les valeurs de la

C. Une revendication identitaire de plus en plus forte de la part des marques

2) De l’intérêt du consommateur

La musique de publicité, les jingles ou les identités sonore, considérés comme des outils de communication permettant d’élever les valeurs de la marque et de la mettre en exergue, se trouvent à un moment confrontés à un public externe aux marques, qui ne pratique pas la communication ou la publicité dans son quotidien, et que l’on appelle communément le « grand public ».

Sur le cas de Peugeot et de son identité sonore, Stéphane Lévy explique :

SL : […] On s’est vite rendus compte que c’était un choix qui avait été correct puisque les premiers tests qui ont été fait, ont été très bons et ça c’est important, en France et dans le monde. On a des situations très contrastées de connaissance de la marque, d’image de la marque, de notoriété, etc. dans le monde.. Et on s’est rendus compte dans les premiers tests fait, qu’on avait de très, très bons résultats de tests à la fois en mémorisation, en attribution à la marque, et dans ce que ça voulait dire. Et notamment un point qui était très important,

c’était le moment où on commençait à parler de notre montée en gamme. Et donc le tag sonore d’une façon ou d’une autre, il fallait qu’il dise aussi montée en gamme. […]

Lors de notre entretien avec Stéphane Lévy, nous lui avons demandé si le tag sonore de Sixième Son avait eu un impact retentissant auprès des cibles que Peugeot visait. Ce qui l’en ressort de la part de Stéphane Lévy est qu’effectivement ce tag a eu un bon impact auprès des consommateurs de Peugeot mais que l’un des pouvoirs associés au son est notamment sa capacité à créer une attribution et une mémorisation rapidement dans l’esprit des consommateurs. En cela, pour Peugeot, la création de l’identité sonore doit être internationalement intelligible et doit permettre de véhiculer un message de marque universel, rapidement. Selon notre analyse, cette conception est à nuancer pour les raisons que nous aborderons plus loin dans ce travail.

Ces consommateurs qui par jour sont confrontés à plus de 15 000 publicités vues ou entendues58 sont de plus en plus difficiles à capter en publicité. Dès lors, le design sonore s’avère être un outil puissant nous l’avons vu pour favoriser l’ancrage d’une marque dans l’esprit des gens. Mais au-delà de cela, il existe un aspect plus inconscient dans la conscience du consommateur et qui pourtant revêt de nombreux atouts autant pour les marques que les consommateurs eux-mêmes : les tubes.

A partir du moment où une musique de publicité, une identité sonore ou autre est reprise par un artiste, cela devient le Saint Graal pour la marque car d’une part l’artiste en l’occurrence magnifie un moyen initialement commercial, de communication, pour le mettre au même niveau que l’art, et d’autre part, cela permet à la marque de lui donner une amplitude et de créer un « buzz » important autour d’elle. Cette puissance s’exprime dans le fait que tout à coup le consommateur ne se dit plus que c’est la marque X qui lui parle mais désormais que c’est l’artiste X qui se sert d’un matériau musical commercial pour le détourner, produire une création originale. Cette pratique de détournement ou d’assemblage de musiques, vieille comme l’histoire de la musique, n’est ni plus ni moins que la pratique de la citation en musicologie ou du mashup.

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Tchaïkovski dans son poème symphonique 1812 évoque à un moment le thème de La Marseillaise pour se moquer des français, Berlioz dans la Symphonie Fantastique fait entendre dans son dernier mouvement un thème très célèbre en musique qui se nomme le thème du Dies Irae (Jour de colère). Stanley Kubrick reprend ce thème au début du film Shinning. The Beasties Boys produisent en 2008 un mashup de Serge Gainsbourg, Initials BB, et de leur propre musique.

Les exemples ne manquent pas en musique classique. Mais en musique de publicité, le sujet est déjà un peu plus marginal. Nous pourrions citer notamment les différents

Remix de Musiques De Pub du duo youtubeur French Fuse59. Le principe de leur dernière vidéo : réaliser une composition à partir de 35 musiques et jingles de publicité en moins de 5 minutes. Ils mixent donc les hymnes de marques et autres slogans que la plupart des consommateurs connaissent. Cette synthèse musicale de décennies de musique au service de la publicité fait appel à notre imaginaire profond sur ces marques.60 En termes d’impact, presque deux millions de vues sur YouTube par vidéo.

Depuis le plus jeune âge, notre cerveau est entraîné à mémoriser les comptines et airs entêtants. Puis vient celui de fredonner les chansons pop et les génériques TV, dont nos oreilles sont sensibles aux mélodies enivrantes savamment travaillées. Les premiers sons sont donc les plus importants. Les résultats d’une analyse décrite dans Science Daily, ont montré que les participants mémorisent rapidement les premières notes de musique qu’ils entendaient. Il s’est aussi avéré que ce premier élément sonore est estimé, par ces mêmes participants, être le plus approprié pour la publicité et la marque. Le co-auteur de cette étude, Patrick Hartmann, ajoute :

« Être exposé simultanément à un jingle spécifique et à une marque crée très rapidement une association dans l’esprit du consommateur. »

Si le but d’une marque est de toucher son public, d’informer son consommateur, et surtout qu’il s’en souvienne, alors la façon la plus rapide d’y parvenir est de, non

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Voir annexe 16 60

« Musique et marques : le grand détournement », Article Influencia paru le 18/04/2016 (disponible ici : http://www.influencia.net/fr/actualites/art-culture,let-the-music-brand,musique-marques-grand- detournement,6258.html?utm_campaign=newsletter-s12-24_03_2017&utm_source=influencia- newsletter&utm_medium=email&utm_content=musique-marques-grand-detournement)

seulement jouer un morceau de musique, mais aussi de jouer le bon morceau pour avoir comme but final de créer un tube.

Pour avoir étudié les cas traités par l’agence Sixième Son et les marques auxquelles elle a eu affaire, nous avons pris connaissance du cas du jingle de la SNCF et de sa reprise par David Gilmour, en 2015, le chanteur et guitariste des Pink Floyd. A travers son nouvel album « Rattle That Lock », David Gilmour a en effet utilisé le jingle de la SNCF, créé en 2005 par l’agence, pour composer son titre. L’idée naît quand David Gilmour se retrouve en France dans la gare d’Aix-en-Provence et patiente. Il entend le jingle dans les haut-parleurs et est immédiatement séduit par la texture du son, sa

qualité et son originalité. Gilmour explique en effet que c’est la puissance narrative

de l’identité sonore de la SNCF qui l’a captivé et qu’il n’avait jamais rien entendu de semblable.61

Résultat, cinq millions et demie de vues du clip sur YouTube, avec une véritable portée de la marque SNCF à l’international pour zéro euro d’achat média.

Michaël Boumendil, PDG et fondateur de Sixième Son : Le pilotage musical réussi d’une marque, ce n’est pas plus de musique, c’est mieux de musique. Ce n’est pas plus d’émotions, c’est de l’émotion plus juste. 62

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« David Gilmour et Michaël Boumendil cosignent « Rattle That Lock », Article Sixième Son paru le 27/04/2015 (disponible ici : http://www.sixiemeson.com/fr/david-gilmour-et-michael-boumendil- cosignent-rattle-that-lock/)

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« Le pilotage musical de la marque est un enjeu émotionnel majeur », Article Stratégies paru le 08/11/2016 (disponible ici : http://www.strategies.fr/blogs-opinions/idees-tribunes/1050545W/le- pilotage-musical-de-la-marque-est-un-enjeu-emotionnel-majeur.html)

Pour Michaël Boumendil, disposer du son pour une marque revient à créer ou à renforcer une émotion auprès des consommateurs. Pour lui, cela implique que posséder une musique de marque revient à la gérer durablement dans le temps et à l’entretenir pour bâtir durablement une identité de marque forte.

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