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L’insalubrité des espaces urbains

2 PORTRAIT DE L’ÉVOLUTION DE LA SITUATION POLITIQUE, SOCIALE,

2.2 Portrait environnemental

2.2.3 L’insalubrité des espaces urbains

La ville de Port-au-Prince figure au premier rang des villes d’Haïti avec une population d’environ 2 470 762 habitants. Le département de l’Ouest dans lequel se trouve la capitale représente 37 % de la population totale, soit environ 3 852 888 habitants (IHSI, 2012). Du point de vue de la salubrité, la ville de Port-au-Prince n’a rien d’une capitale nationale. L’intensification du phénomène des bidonvilles a considérablement modifié la configuration de l’aire métropolitaine. Les habitats érigés

causent de sérieux problèmes en raison de leur faiblesse structurelle et de la qualité des matériaux utilisés pour leur construction, les rendant vulnérables aux cyclones, tremblements de terre et inondations comme ce fut le cas lors de la catastrophe du 12 janvier 2010.

Ces constructions anarchiques sont érigées soit sur des terrains appartenant à l’État, soit sur des terrains appartenant à des particuliers ou encore à flanc de montagne. Une fois de plus, l’insécurité foncière, l’insalubrité et l’anarchie sont érigées en règle, au mépris des lois garantissant le droit de propriété, des règlements d’urbanisme et des normes techniques de construction édictés par le ministère des Travaux publics, Transports et Communications (MTPTC) et de la législation sur l’aménagement du territoire.

Cette situation illustre l’impact des pratiques socio-politiques sur les institutions du pays. D’une part, les ouvriers travaillant dans le parc industriel situé au nord de Port-au-Prince, résident soit dans le bidonville de Cité Soleil situé à proximité, soit dans ceux de la périphérie de Port-au-Prince. D’autre part, des étudiants, des employés de l’administration publique et certains groupes de bandits habitent les bidonvilles, à l’exclusion des individus de la classe paysanne qui n’ont pas pris le train de l’exode rural. Fort de ce constat, les habitants qui vivent dans les bidonvilles bénéficient d’une certaine protection et d’une certaine tolérance vis-à-vis des autorités car il est difficile, voire impossible, de les déloger ou encore de reconstruire les maisons de fortune qu’ils y ont érigées. Logés ailleurs ou relocalisés dans leur patelin respectif, ces individus perdraient tous les privilèges associés à leur survie, puisque la ville de Port-au-Prince représente le poumon économique du pays.

Cette explosion démographique due principalement à l’exode rural et à d’autres facteurs aggravants plus récents, tels le dernier tremblement de terre qui a fait de Port-au-Prince une ville où les immondices jonchent les rues tant dans les quartiers résidentiels qu’aux abords des bidonvilles. Résultat, un tiers seulement de la population des bidonvilles est desservi en eau potable car les fontaines publiques ne coulent que quelques heures par jour et le mauvais état des conduites fait que la moitié de l’eau distribuée est gaspillée ou perdue (Cornevin, 1993). Sur une échelle beaucoup plus grande, seulement 8.5 % des ménages sont connectés au service de distribution d’eau potable selon un recensement réalisé en 2003 (IHSI, 2003b). Les habitants des bidonvilles sont obligés d’acheter de l’eau pour leurs besoins quotidiens. Quant aux plus fortunés, ils ont recours à l’achat de camions d’eau à partir d’une station de pompage située à la Croix-des-Missions, une localité située au nord de Port-au-Prince. Parallèlement, le PNUD estime que, 55,2 % des personnes ont accès à une ressource

vitale (PNUD, 2011). En outre, la surexploitation de la ressource hydrique est à l’origine du phénomène de salinisation de la nappe phréatique de la plaine du Cul-de-Sac, une problématique environnementale qui dépasse largement les capacités de l’État haïtien. Tel que mentionné précédemment, la disparition des ressources halieutiques est une conséquence de la prolifération des bidonvilles qui s’étendent en bord de mer, à l’ouest et au nord de la capitale.

D’autres problèmes de santé publique sont associés à l’insuffisance de la collecte des ordures. Les services publics n’évacuent pas les ordures et de surcroît, les fosses d’aisance ne sont pas vidées régulièrement. À cela s’ajoute la vétusté des systèmes d’égouts, lesquels sont toujours engorgés par des immondices car dans les bidonvilles comme dans les quartiers résidentiels, les habitants se débarrassent de leurs ordures dès qu’il pleut. Une situation qui est répugnante, due à un manque d’éducation et de civisme ainsi qu’à un manque de respect pour les autres citoyens et les institutions étatiques. À titre d’exemple, le taux extraordinairement élevé de mortalité infantile observé à Cité

Soleil semble être la conséquence de ce déplorable état de choses (Cornevin 1993).

Des efforts sont quand même déployés pour contrer ce fléau. En 2008, 208 poubelles ont été déployées le long des principaux axes de la région métropolitaine afin de collecter 60 % des déchets produits dans la région et de les déverser dans la décharge de Truitier au nord de la capitale (MTPTC, 2014). En ce qui concerne la gestion des déchets solides, un programme du MTPTC a été réalisé dans le cadre d’un projet pilote financé par la BID afin de moderniser la gestion des déchets solides. Ce projet a permis de déplacer et de stocker 54 % du volume des déchets produits, soit environ 468 554,04 mètres cubes pour une période de huit mois (MTPTC, 2014). Des compléments d’informations sur le rôle du MTPTC en tant qu’acteur de l’APD seront apportés au chapitre trois traitant des principaux acteurs locaux de l’APD en Haïti.