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2.1 L’émulsification par agitation mécanique

2.1.1 L’influence des paramètres géométriques et cinétiques

L’émulsification est le plus souvent obtenue par l’apport d’énergie mécanique four- nie par un mobile simple en rotation axiale entraîné par un moteur. Il permet d’une part le cisaillement de la phase à disperser et d’autre part la circulation des fluides dans la cuve pour que l’ensemble du volume puisse traverser la zone de dispersion. En effet, une mauvaise circulation entraîne la coalescence des gouttelettes hors du champ de cisaille- ment du mobile et conduit à la formation d’une émulsion avec une distribution de taille dispersée et peu stable. De nombreux systèmes existent : les turbines, les pales, les hé- lices, les ancres... (figure 21). Ils conduisent à la formation d’une émulsion avec une large distribution de taille de gouttelettes, comprise entre quelques micromètres et quelques centaines de micromètres. Ils peuvent être classés en deux catégories, i.e. les agitateurs pour mélange radial et axial (Merle, 1999 ; Poux et Canselier, 2012). Le mélangeur radial propulse les fluides de l’axe du mobile vers les parois latérales de la cuve qui les renvoient vers le haut et le bas de la cuve puis vers le centre où ils sont de nouveau pompés. Les agi- tateurs permettant le mélange radial ont des lames rectangulaires comme les turbines. Ils sont principalement utilisés dans des milieux très visqueux. Le mélangeur axial provoque un mouvement des fluides dans toute la cuve. Ceux-ci sont aspirés le long de la tige du mobile puis propulsés vers le bas. Ils remontent ensuite le long des parois jusqu’en surface et sont de nouveau aspirés vers le centre. Les hélices et les turbines à pales inclinées sont les principaux mélangeurs axiaux. Ces derniers sont adaptés à l’homogénéisation et aux mélanges nécessitant un milieu turbulent (Dupasquier et al., n c ; Merle, 1999 ; Jouve,

2008 ; IHSEngineering-360, nc). Le choix d’un mobile est ainsi un compromis entre le ci- saillement de la phase dispersée et la circulation des fluides. Divers agitateurs peuvent être combinés. Par exemple, le couplage de deux mobiles, le premier possédant un fort débit de pompage, dédié à la circulation des fluides et l’autre permettant le cisaillement permet de favoriser la bonne émulsion dans des cuves de volume important. Ainsi, une turbine utilisée pour l’émulsification est couplée à une hélice centrée pour assurer la circulation dans la cuve (Brochette, 1999).

Figure 21 – Les principaux modèles de mobiles d’agitation et le type de mélange (Badey, n c ; Jouve, 2008).

La taille du mobile doit également être adaptée à la taille de la cuve et au volume à émulsionner. Un mobile trop petit n’est pas en mesure de permettre la circulation homo- gène des fluides dans la cuve et la phase légère reste en surface ou en périphérie de la cuve. À l’inverse, un mobile trop grand laisse peu de place à la circulation des fluides en sa péri- phérie et entraîne la séparation des phases, la plus lourde étant centrifugée et la plus légère restant dans une zone cylindrique autour de l’arbre (Poux et Canselier, 2012). L’agitateur choisi doit également être positionné de façon à favoriser la mise en émulsion. En effet, la position de l’agitateur dans une phase ou dans l’autre permet d’obtenir des émulsions E/H ou H/E indépendamment de l’ordre d’introduction des phases (figure 22). Le mode opéra- toire et notamment l’ordre d’ajout des différentes phases doivent également être adaptés. Pour réaliser une émulsion H/E, la phase huileuse est préférentiellement ajoutée goutte à goutte dans la phase continue déjà soumise au cisaillement. De plus, il est nécessaire de s’assurer de la bonne circulation des fluides pour limiter les phénomènes de coalescence. Un agitateur placé au centre d’une cuve cylindrique fait tourner l’ensemble du liquide dans le sens de rotation du mobile. Le liquide, soumis à la force centrifuge, est propulsé

vers l’extérieur, il remonte donc le long des parois de la cuve au détriment du centre de la cuve provoquant la formation d’un vortex. Le mouvement de rotation est supérieur aux mouvements radiaux et axiaux et les taux de pompage (et donc de circulation) et de cisaillement sont faibles. Un agitateur désaxé ou en position inclinée limite la formation de ce vortex et favorise la circulation des fluides dans la cuve et permet l’obtention d’une meilleure homogénéité (Merle, 1999). L’utilisation de chicanes ou de contre-pales permet également la meilleure homogénéisation de l’émulsion en cassant le vortex. Les chicanes sont au nombre de 3 ou 4 (de préférence, un nombre différent que celui des pales de l’agi- tateur), elles ont une largeur correspondant au dixième du diamètre de la cuve et sont placées contre la paroi ou à une faible distance de celle-ci.

Figure 22 – L’influence de la position du mobile d’agitation (Poux et Canselier, 2012). Les systèmes rotor-stator sont également couramment utilisés. Ils sont composés d’une couronne ajourée fixe appelée “stator” et d’une turbine centrale, ou “rotor”, tour- nant à grande vitesse (comprise entre 1000 et quelques milliers de tours par minutes). Les fluides sont aspirés par la tête de travail puis expulsés par les fentes du stator. Ils sont contraints de passer dans une zone confinée où ils subissent de forts gradients de vitesse. Ils sont soumis à un cisaillement laminaire dans l’entrefer puis à un cisaillement élonga- tionnel lors de leur passage dans les fentes de la couronne (figure 23). Les gouttelettes de la phase dispersée sont d’abord cisaillées pour former la pré-émulsion qui correspond à la dispersion du mélange et à la mise en suspension de la phase dispersée dans la phase continue. La taille des gouttelettes diminue ensuite et devient plus homogène jusqu’à la stabilisation du système. Outre des paramètres physico-chimiques et la température, la taille et la distribution en taille finales de l’émulsion dépendent de la géométrie du rotor-

stator, du temps et de la vitesse de cisaillement. Elle est généralement comprise entre 0,5 et 5 µm (Theron, 2009).

Figure 23 – Le principe de fonctionnement d’un rotor-stator (Shao et al., 2015 ; Maa et Hsu, 1996a).

L’influence de la vitesse et de la durée d’agitation

Pour préparer une émulsion avec un diamètre et une distribution de taille adaptés, il faut optimiser la vitesse et le temps de cisaillement (figure 24). Plus la vitesse de ci- saillement est importante, plus la taille des gouttelettes est petite (les autres paramètres étant maintenus constants). La distribution de taille varie depuis une loi normale (cen- trée) vers une loi log-normale (avec une queue de distribution) liée à l’augmentation des zones de turbulences qui favorise la rupture au détriment de la coalescence (Poux et Can- selier, 2012). De même, plus la durée de cisaillement est importante et plus la taille des gouttelettes diminue avant de se stabiliser au delà d’une durée optimale. Cette dernière correspond à l’équilibre entre la rupture et la coalescence et est désignée sous le sigle UEEDS (ultimate equilibrium emulsion droplet size). La durée nécessaire à l’obtention de l’UEEDS diminue avec la vitesse d’agitation. La distribution de taille quant à elle diminue avec la durée d’agitation (Poux et Canselier, 2012 ; Bachtsi et al., 1996 ; Tan et al., 1991 ; Butstraen et Salaün, 2014).

Dans le cas d’une émulsion préliminaire à la microencapsulation, une fois la dis- persion terminée, l’homogénéisateur est remplacé par un mobile d’agitation ou la vitesse d’agitation est réduite pour limiter le cisaillement tout en conservant une circulation sa- tisfaisante des fluides.

Figure 24 – L’influence de la vitesse et de la durée d’agitation (a - Butstraen et Salaün, 2014 et b - Maa et Hsu, 1996a).

2.1.2 L’influence des paramètres physico-chimiques