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1.3 La détection directe d’exoplanètes : techniques et limitations

1.3.3 Combattre les aberrations quasi-statiques

1.3.3.2 L’imagerie différentielle

L’imagerie différentielle repose sur un principe simple et intuitif de soustraction de FÉP de référence (obtenue à différents angles, longueurs d’onde, polarisations, etc.). Elle est généralement combinée à un coronographe sur les instruments de haut contraste : le coronographe contre les effets du halo de diffraction (voir section1.3.1) tandis que l’imagerie différentielle diminue l’intensité des tavelures dues aux aber-rations statiques, permettant d’obtenir un gain significatif (typiquement de l’ordre

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de 10 à 100) par rapport au coronographe seul. • L’imagerie différentielle spectrale simultanée

L’imagerie différentielle spectrale simultanée (SSDI, Rosenthal et al. [1996], Smith

[1987], Racine et al. [1999] et Marois et al. [2000]) consiste en l’acquisition simul-tanée d’images à des longueurs d’onde proches, judicieusement choisies pour que le spectre attendu du compagnon y présente des différences de flux significatives. Comme la position des tavelures de l’étoile varie avec la longueur d’onde alors qu’un compagnon reste fixe, le fait de remettre à l’échelle et de soustraire les images permet de diminuer le bruit de tavelure sur l’axe et de conserver le signal de la planète si elle est située à une séparation suffisante. La perte du signal d’un compagnon lors de la soustraction peut également être surmontée grâce aux différences de son flux aux longueurs d’onde choisies et permet une détection proche de l’axe. SSDI est cependant très sensible aux aberrations non communes (différentes aberrations aux différentes longueurs d’onde ou lors de passage dans des chemins optiques différents) et est également limitée par la nécessité d’une connaissance a priori du spectre du compagnon.

• L’imagerie différentielle d’une étoile de référence

L’imagerie différentielle d’une étoile de référence (RDI ou RSDI) consiste à utiliser l’image d’une étoile similaire (magnitude, couleur) observée dans des conditions analogues à l’observation de l’objet cible puis de la soustraire pour diminuer le bruit de tavelure de l’objet sur l’axe. Toutes les images haut-contraste de HST ont utilisé cette méthode (Krist et al.[1998]) avec, par exemple, la découverte (qui reste à confirmer) de l’exoplanète Fomalhaut b (Kalas et al.[2008]), de masse estimée de une à trois fois la masse de Jupiter et située à 120 u.a de son étoile (voir figure1.13).

• L’imagerie différentielle angulaire

L’imagerie différentielle angulaire (ADI) est une méthode puissante, développée par Marois et al. [2006] et utilisée sur un télescope Altitude/Azimuth et/ou doté d’un rotateur de champ. Le fait d’arrêter le dé-rotateur de champ (qui compense

24 Chapitre 1. Introduction : la détection d’exoplanètes

Figure 1.13 – Image de l’anneau de poussière de Fomalhaut ainsi que de l’exopla-nète Fomalhaut b deKalas et al. [2008].

les effets de la rotation de la Terre) entraîne la rotation du champ autour de l’axe optique : une FÉP sur l’axe (contenant tous les effets dus aux aberrations statiques) reste fixe alors que les objets hors-axe tournent sur le détecteur. En soustrayant plusieurs images acquises à des intervalles de temps suffisamment longs pour qu’un objet hors-axe se soit suffisamment déplacé sur le détecteur, on diminue l’intensité des structures fixes liées à la FÉP sur l’axe (signal de l’étoile). Les images sont ensuite tournées et co-additionnées pour renforcer le signal d’un compagnon. Une dizaine d’exoplanètes a ainsi pu être directement détectée, avec, par exemple, la première détection en 2008 du système multiple HR8799 (Marois et al. [2008]) suivie en 2010 de l’image d’une planète géante autour beta Pictoris (Lagrange et al.

[2010]). Cette technique est présentement largement utilisée lors d’observations haut contraste. L’inconvénient de ADI est qu’elle nécessite une certaine séparation entre l’étoile et le compagnon : le temps nécessaire pour détecter un compagnon situé à faible séparation est plus grand que le temps caractéristique des tavelures quasi-statique, rendant la technique peu efficace à faible séparation.

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• L’imagerie différentielle polarimétrique

L’imagerie différentielle polarimétrique (PDI, Kuhn et al. [2001]) consiste à acquérir des images à différents états de polarisation. Elle se base sur le fait que la lumière de l’étoile est non polarisée tandis que la lumière réfléchie par une planète (ou un disque circumstellaire) est partiellement polarisée (environ 10% de polarisation). PDI n’est pas limitée par la position du compagnon (faible/large séparation) mais elle dépend d’une connaissance a priori du degré de polarisation du compagnon et elle possède une faible sensibilité puisqu’une faible fraction de la lumière de la planète est polarisée (Buenzli et Schmid [2009]). PDI est implémentée sur l’instrument ZIMPOL (Zurich IMaging POLarimeter,

Povel[1998]) de l’instrument haut contraste SPHERE (Beuzit et al.[2008]) au VLT.

• Déconvolution spectrale

La déconvolution spectrale (SD,Sparks et Ford[2002]) consiste à acquérir un cube de données à différentes longueurs d’onde grâce à un spectographe à champ intégral (IFS). Elle s’appuie sur la différence de réponse spectrale globale entre une planète et son étoile : la position des tavelures varient avec la longueur d’onde tandis qu’un compagnon reste fixe. La variation de la structure des tavelures en fonction de la longueur d’onde varie lentement (basse fréquence) alors que la présence d’un point source se manifeste par l’existence d’un défaut de fréquence plus élevée. On peut donc évaluer la structure spatio-spectrale de l’étoile et la soustraire, faisant ainsi apparaître la trace spectrale du compagnon. La déconvolution spectrale est limitée à la détection de compagnons à large séparation (les tavelures doivent se déplacer d’au moins un élément de résolution dans l’intervalle de longueurs d’onde, Thatte et al. [2007]).

Toutes ces techniques de soustraction d’images peuvent être renforcées numé-riquement en optimisant la FÉP de référence à partir d’un ensemble d’images de référence, en utilisant, par exemple, les algorithmes LOCI (Lafrenière et al.

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différentielle combinée aux algorithmes de soustraction de FÉP de référence est présentement utilisée dans les instruments de haut contraste au sol comme GPI ou SPHERE.