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5.2 Récits du dévoilement de chaque participant

5.2.3 L’histoire de Carl et de Josée

Josée est la première des membres de son couple à avoir eu des doutes sur le vécu d’agression sexuelle de son fils. Ainsi, lors d’une pratique de soccer de leur fille, Claire lui a raconté comment elle avait découvert, la semaine précédente, que son fils avait vécu des agressions sexuelles de la part d’un adolescent âgé de 15 ans avec qui leurs enfants respectifs avaient antérieurement eu des contacts. Josée s’est alors demandé si son propre fils, Samuel, ne serait pas lui aussi une victime de ce même agresseur. Qui plus est, Josée et Carl estimaient que cet adolescent était bizarre et ils étaient inconfortables face aux intentions de ce dernier à l’égard de Samuel. Lors de cette partie de soccer, Josée a communiqué avec son conjoint et lui a demandé d’interroger leur fils concernant sa relation avec l’agresseur. C’est alors en pleurs que Samuel a dévoilé les agressions sexuelles dont il a été victime. Il a alors clairement manifesté sa peur d’être incarcéré en prison si les agressions sexuelles étaient rapportées aux policiers.

Carl relate qu’il a réagi à la situation comme il gère son propre travail. Il a pris une étape à la fois, rassurant son garçon tout en lui expliquant le rôle et les interventions que feront les policiers. Par la suite, il a contacté ceux-ci pour porter plainte et a parlé à l’un de ses collègues.

Je l’ai géré comme je gère mon ambulance. C’est drôle à dire, il fallait dévoiler, j’ai essayé de le supporter, de l’encadrer, de l’amener à se confier aux policiers. Je ne voulais pas le contaminer non plus parce que la déformation professionnelle, il ne fallait pas trop que je le fasse parler le soir. Pour qu’il raconte cela le plus fidèlement possible aux policiers son témoignage. (Carl)

Le rendez-vous pour l’entrevue d’investigation policière a été fixé au lendemain matin. L’enquêteur a conseillé à Carl et à Josée de ne plus questionner leur fils sur les

agressions sexuelles dont il a été victime afin d’éviter la suggestibilité dans son témoignage. Josée a éprouvé des difficultés à ne pas en parler avec Samuel qui démontrait des manifestations de désorganisation émotive. Après que Samuel eu été au lit, Josée a pris un temps pour vivre ses émotions. Elle a alors contacté son père pour lui raconter ce qu’ils traversaient et pour chercher du soutien. Le lendemain matin, Carl et Samuel sont allés déjeuner au restaurant, et se sont ensuite rendus à la centrale de police. L’entrevue d’investigation policière a eu lieu devant des enquêteurs et des intervenants de la Direction de la protection de la Jeunesse (DPJ). Le dévoilement a eu lieu environ six mois après les agressions sexuelles. Au moment de la collecte des données, Josée n’a pas émis de détails sur les actes perpétrés, mais elle a souligné que l’agression sexuelle avait eu lieu dans un module de jeu pour enfants, situé sur leur terrain. Antoine, le fils de Claire, et l’agresseur étaient venus jouer avec Samuel. Josée et Carl ont vécu de la culpabilité car les agressions sexuelles ont eu lieu sur leur terrain.

Après l’entrevue d’investigation policière, Carl a manifesté son soutien à Samuel en lui proposant de parler des événements qu’il a vécus avec son agresseur mais celui-ci a préféré changer de sujet. Carl a alors respecté la décision de son fils et ils se sont promenés en voiture avant de retourner à la maison.

On a placoté, mais on a placoté de d’autres choses. Je lui ai demandé

comment il avait vécu ça et s’il voulait parler d’autres choses mais c’est lui qui a trouvé les sujets et ça lui a fait du bien, je pense. (Carl)

Dans les semaines qui ont suivies, Carl et Josée ont parlé de l’événement avec leurs autres enfants, estimant que ces derniers étaient assez âgés pour comprendre ce que de tels gestes impliquaient. Carl considère que l’agression sexuelle a eu de graves conséquences sur Samuel, dont des périodes d’énurésie, d’encoprésie, de troubles du sommeil, de diminution des résultats scolaires, etc. Le dévoilement de l’agression sexuelle a également

permis à Josée de comprendre les changements de comportements de son fils. À ce sujet, Carl a relaté que Samuel a éprouvé beaucoup de difficultés à s’endormir après les agressions sexuelles vécues, et le dévoilement de l’agression sexuelle a renversé son cycle habituel de sommeil. Samuel dormait beaucoup mieux et beaucoup plus longtemps après le dévoilement. Carl et Josée ont fait appel au CALACS quelques jours après l’investigation policière étant donné qu’ils se sentaient dépourvus.

On a atteint un palier un moment donné. C’est là qu’on a appelé le CALACS, 2,3 jours plus tard parce qu’on voyait qu’on ne cheminait plus et que Samuel avait beaucoup d’agressivité. C’est là que l’intervenante du CALACS est entrée en scène, puis là ça a comme parti. On est allé toutes les semaines pis c’était quand même exigeant. De mon côté, moi je pense que je suis correct mais du côté des victimes, je pense que les enfants il faut bien les encadrer, il faut les soutenir, faire des bonnes thérapies et ça, ça prend des moyens. (Carl)