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b. Une lecture orientée systèmes d’information et TIC

Section 2. L’enseignant dans son système d’activité

Quelques chiffres19, complétés en annexe 2, finalisent le cadrage général dans lequel évolue les acteurs de l’activité d’enseignement dans les universités françaises, qui sont l’objet de cette recherche : les enseignants. Sur l’année universitaire 2018-2019, il est dénombré 1614900 étudiants dans 69 universités et 57 sections disciplinaires.

La définition du cadre légal dont dépend l’activité et la présentation des missions qui en découlent, permettent de donner une première caractérisation des acteurs. Cependant, nous avons montré le contexte macro comme impulsant des dynamiques et non pas comme porteur d’injonctions et de directives, car l’université est très fortement imprégnée d’une culture et d’une pratique de la liberté académique. Cette liberté induit une activité délicate à appréhender qui s’envisage selon trois critères : relationnel, dynamique et discrétionnaire. Alors qu’entend-on par enseigner à l’université ? et qui sont ces acteurs ?

2.1. Enseigner : un cadre légal et des missions

Pour l’année universitaire 2017-2018, 68547 enseignants-chercheurs (EC) et enseignants titulaires sont en fonction dans les établissements publics d’enseignement supérieur sous tutelle du MESRI, dont 62356 en universités20.

À l’université, ils se répartissent en enseignants-chercheurs comptant 32530 Maîtres de Conférences (MCF), 18028 Professeurs (PR) et 11798 enseignants du 2nd degré ; 40% sont des femmes, 60% des hommes et 8% ont moins de 36 ans, 68% ont de 36 à 55 ans et 24% ont plus de 55 ans. En outre, l’évolution des effectifs ne démontre pas de changement très fort sur les huit dernières années (Tableau 3) ; pour compléter en 2010, c’est 37% de femmes et 63%

19 De nombreuses données statistiques sont disponibles pour le lecteur qui souhaiterait un panorama plus détaillé : - L’enseignement supérieur en chiffres (2018-2019), consulté sur :

http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/pid24683/l-enseignement-superieur-en-chiffres.html

- Le Conseil Nationale des universités CNU (2019), les sections disciplinaires consulté sur : https://www.conseil-national-des-universites.fr/cnu/#/

D’un point de vue statutaire, enseignants-chercheurs et enseignants du 2nd degré affectés dans le supérieur dépendent du statut général de la fonction publique qui fixe des dispositions nationales quant à leur recrutement, à l’exercice de leur activité et à leur carrière.

L’activité des enseignants a la particularité de n’être régie que par un cadre légal du Code de l’éducation (Article L123-3) qui détermine les missions de l’enseignement supérieur mais ne précise aucunement les modes de réalisation. En effet, l’article L952-2 stipule que « les

enseignants-chercheurs, les enseignants et les chercheurs jouissent d'une pleine indépendance et d'une entière liberté d'expression dans l'exercice de leurs fonctions d'enseignement et de leurs activités de recherche, sous les réserves que leur imposent, conformément aux traditions universitaires et aux dispositions du présent code, les principes de tolérance et d'objectivité ».

L’article 2 du décret n°84-431 du 6 juin 1984, modifié par le décret n°2009-460 du 23 avril 2009 indique la double mission des enseignants-chercheurs : l’enseignement et la recherche. Le Code de l’éducation fixe les six missions du service public de l’enseignement supérieur, en matière d’enseignement et de recherche :

1) La formation initiale et continue tout au long de la vie ;

2) La recherche scientifique et technologique, la diffusion et la valorisation de ses résultats au service de la société ;

3) L'orientation, la promotion sociale et l'insertion professionnelle ;

4) La diffusion de la culture humaniste, en particulier à travers le développement des sciences humaines et sociales, et de la culture scientifique, technique et industrielle ; 5) La participation à la construction de l'Espace européen de l'enseignement supérieur et

Les EC sont soumis à la durée légale du travail pour 1607 heures par an, à concurrence de 50% du temps consacré à la recherche et 50% à l’enseignement soit 192 heures équivalent TD par an. Les enseignants du 2nd degré affectés à l’enseignement supérieur n’ont pas d’obligation de recherche mais l’enseignement est porté à 384 heures équivalent TD et ils sont encadrés par le décret n°93-461 du 25 mars 1993. Les missions et l’autonomie pédagogique restent identiques.

Par ailleurs, l’importance du volet pédagogique du métier d’enseignant-chercheur est à nouveau souligné par le récent décret du 9 mai 2017 (Décret 2017-854, article 13 et 14) qui vise à mettre en place une formation initiale obligatoire pour les Maîtres de Conférences nouvellement nommés.

Dans ce cadre légal, l’activité des enseignants repose sur la totale liberté académique et l’autonomie de réalisation effective des différentes missions. Les déterminants de l’activité se complexifient et peuvent devenir propre à chaque enseignant. Le cœur de l’activité peut cependant être caractérisé.

2.2. Un cœur d’activité relationnel, dynamique et discrétionnaire

Parce que les enseignants exercent auprès de publics différents (étudiants en formation initiale ou en apprentissage, nouveaux bacheliers ou reprises d’étude par exemple), à des niveaux différents (Bac+2 à Bac+5) et dans des disciplines différentes (Sciences Exactes ou Sciences Humaines et Sociales), l’activité d’enseignement est multiple. Comme activité de service, l’enseignement est la mise à disposition d'une prestation intellectuelle, pour un public cible21. Trois invariants peuvent être identifiés pour caractériser cette co-activité relationnelle, dynamique et discrétionnaire (Vinatier, 2009).

dominante selon l’activité pédagogique mobilisée (cours magistraux, travaux dirigés, études de cas, simulations ou jeux d’entreprise). Dans leurs travaux, Bucheton & Soulé (2009, p. 38) précisent cette relation : la posture de l’enseignant est « un schème pré-construit du

« penser-dire-faire », que le sujet convoque en réponse à une situation ou à une tâche scolaire donnée ». Les auteurs en proposent une typologie basée sur le degré de médiation de

l’enseignant (Tableau 4).

Posture Relationnel à l’apprenant

Accompagnement Faire et discuter sur : posture réflexive et créative

Contrôle Faire et cadrage

Lâcher prise Faire discuter sur

Conceptualisation Verbalisation post-tâche : posture réflexive

Magicien Jeu, posture ludique

Tableau 4 : Typologie des postures dans la relation apprenant-formateur

De plus, un des objectifs de l’apprentissage est la mobilisation et la réutilisation des connaissances, nommé : transfert de connaissances. La littérature définit le transfert de formation et le transfert d’apprentissage, mais sans différence fondamentale, selon que l’apprenant soit adulte ou enfant, ou que la réutilisation soit faite en contexte de travail professionnel ou en contexte d’éducation. Subedi (2004, p. 591) définit le transfert de formation « comme l'étendue de la rétention et l'application des connaissances, compétences

et attitudes de l'environnement de formation au travail. En d'autres termes, le transfert de formation est le degré auquel les stagiaires appliquent efficacement l'apprentissage d'un

contexte initial à un autre contexte similaire ou différent, soit un transfert dit vertical-horizontal ou proche-lointain (Bossard, Kermarrec, Buche, & Tisseau, 2008).

En s’appuyant sur le cycle de la connaissance (Ruggles, 1998), le transfert s’envisage comme la phase finale de réutilisation d’un processus complexe initié par une phase de création puis de partage de connaissances. Dans leurs travaux sur la gestion des connaissances, Fallery & Marti (2016) mettent en avant l’importance du rôle des acteurs et caractérisent le transfert en deux actes : une distanciation cognitive (décontextualiser et re-contextualiser la connaissance) suivie d’une conversion sémantique (nouvelle application effective dans un contexte personnel différent).

Dans un contexte d’enseignement et de relation apprenant-formateur, un partenariat de transfert s’établit notamment entre étudiants et enseignants (Subedi, 2004) et se traduit par l’importance du rôle des acteurs qui diffère selon le contexte de la communication.

Dans notre contexte de recherche, si l’on considère le concept de transfert comme la réutilisation dans un contexte B de connaissances, compétences acquises dans un contexte A, l’usage de la réalité virtuelle dans l’enseignement pose la question du contexte d’apprentissage et du contexte de transfert. Dans l’usage de la réalité virtuelle, l’environnement proposé en immersion est une représentation virtuelle de situations dont le degré de proximité avec la réalité peut varier. Bossard et al. (2008) mettent en évidence cette dualité de l’environnement virtuel, qui peut représenter un contexte réel mais qui, par la digitalisation même du contexte, ne l’est pas. Ils étudient dans ce cadre la difficulté de définir la situation de transfert. Il est alors important pour chaque acteur de caractériser cet environnement. Dans ce « dilemme de contextualisation » (Fallery & Marti, 2016) d’enseignement en environnement simulé, le rôle de l’enseignant devient primordial.