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L'école change ! -t-elle ?

L'EFFICACITE D'UNE ÉCOLE

"obtenir de ses élèves les résultats les meilleurs possibles (par rapport à l'ùttéressé et à la société) ;

y parvenir en laissant aussi peu que possible les talents des élèves en friche

;

e et en utilisant les moyens dont elle dispose de façon rentable.

"

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1 A ce stade, il nous paraît important de relever la différence que Hanhart(l 995) établit à la suite des Anglo-saxons entre efficacité de / 'école dont on voit bien ici toute la portée notamment pédagogique et efficience de / 'école

Cette perspective d'efficacité de l'école s'inscrit dans un mouvement contraire au déterminisme ambiant conséquence des travaux sociologiques des années soixante et soixante-dix à propos de la fonction reproductrice de l'école (Bressoux, 19941).

Ces travaux, qui ont établi le rôle essentiel de l'origine sociale dans la réussite à l'école, ont amené un certain nombre de personnes à penser que l'école n'avait finalement que peu d'effet.

Cependant, un certain nombre de recherches, effectuées d'abord dans les pays anglo-saxons, ont permis de mettre en évidence des facteurs contribuant à la réussite des élèves.

Nous reviendrons en détail sur ces caractéristiques.

1.3.2. Les enseignants stratèges de l'innovation

Avec l'examen du point concernant les réalisateurs de l'innovation, nous entrons au cœur du sujet. Les pistes que nous avons déjà lancées plus haut aideront le lecteur à formuler la réponse avec nous : les réalisateurs doivent être les plus proches possible de l'action. C'est la meilleure manière d'éviter que le changement ne soit absorbé formellement, sans qu'il n'ait déployé- aucun effet réel, d'éviter que les personnes impliquées jugent d'entrée le coût du changement comme étant exorbitant, d'éviter que la réalisation ne s'éloigne trop du but recherché.

C'est dorlc au seirl de l'établisserrlerlt que doiVêïlt se trouver les réalisateurs et, avec de nombreux auteurs (Gather Thurler, 1993a, 1994a, van Velzen & al., 1988, Montelh & al., 1993), nous estimons que l'amélioration de l'école sera plus importante et de meilleure qualité si les enseignants eux­

mêmes deviennent des stratèges de l'innovation, les créateurs du changement, "qui apprennent ensemble, c'est-à-dire inventent et fixent de nouvelles façons de jouer le jeu social de la coopération et du conflit, bref une nouvelle praxis sociale, et acquièrent les capacités

qui ne concerne que l'utilisation des moyens, soit le troisième point de cette définition. 1 Bressoux cite notamment Bourdieu & Passeron (1964) Les héritiers et (1970) La reprod11ctio11,. Paris : éd. de Minuit / Baudelot & Establet (1971) L 'école capitaliste en France et (1975) L'école primaire divise. Paris : Maspéro / Boudon (1973) L'inégaliU des chances. Paris : A. Colin.

cognitives, relationnelles et organisationnelles correspondantes"

(Crozier & Friedberg, 1977, p.35).

En effet, l'expérience et les théories du changement montrent que l'innovation ne se décrète pas, elle est ce que les acteurs de la base au sommet peuvent bien en faire : des coquilles vides, habillages nouveaux pour des pratiques traditionnelles, ou des cadres permettant de réelles remises en cause (Gather Thurler, 1993a ; Montelh, 1993).

1.3.3. La fin de l'innovation standard

Cette volonté de mettre au centre du processus les enseignants correspond non seulement à un besoin mais aussi à une tendance très nette de recentrage sur la dimension locale : l'établissement.

De même, dans le domaine de l'innovation, l'État a longtemps prétendu au "monopole de l 'innovation Légitime"

(Charlot, 1993, p.23). Avec L'assurance que confère sa. foi au missionnaire, il a lancé plusieurs réformes, transformé l'école jusque dans les campagnes les plus reculées, soucieux que la nouveauté s'installe dans la discipline. Il était donc très réticent à toute innovation issue du terrain. "Dès lors, le système scolaire apparaissait aux enseignants comme u ne machine bureaucratique bloquée où il n 'y avait pas de place pour le désir et le pouvoir des enseignants et des élèves" (Charlot, 1993, p.24). Face à ce qui venait de cette entité anonyme qu'est l'autorité scolaire, il était de bon ton de se montrer critique - "Mais à quoi ils pensent là­

haut" - et plus ou moins docile. Dès lors, on imagine aisément

l'écart existant entre la réforme projetée et la pratique, l'utilisation épisodique d'un nouveau manuel et l'inscription du nouveau programme dans le registre ne garantissant en rien son application dans la classe, l'enseignant se donnant le droit de considérer la nouveauté avec une certaine distance et de l'appliquer à ce qu'il considère être sa situation pratique.

Afin que l'innovation puisse efficacement s'engager, il impol'te donc qu'elle se rapproche des besoins de l'établissement, que l'administration centrale renonce à son monopole et considère l'innovation définie au niveau local comme un moyen efficace d'améliorer l'enseignement, tout en gardant le contrôle des finalités générales, des ressources et de la qualité du service. On devrait ainsi s'engager dans

une autre logique où la justice scolaire ne consiste pas à donner la même chose à tout le monde, mais à donner à chacun ce dont il a besoin et qu'il est capable de recevoir (Gather Thurler, 1994a, Hutmacher, 1993 ; Charlot, 1993).

1.3.4 Quelle stratégie pour un changement réel ?

Ce changement constitue-t-il pour autant un vrai changement? Ne risque-t-il pas de n'être qu'un changement conforme au principe de fonctionnement interne du système, un changement qui n'améliore pas grand-chose (le changement 1 de Watzlawick & al., 1975) ?

En lui-même, le passage d'une logique top->down (dans laquelle la base exécute les ordres du haut de la hiérarchie) à une logique bottom->up (dans laquelle la base exprime les besoins auxquels la hiérarchie répond) constitue probablement la base d'un vrai changement (le changement 2 de Watzlawick &

al., 1975).

Toutefois le risque n'est pas négligeable qu'au niveau de l'établissement, on en reste à quelques modifications qui ne d1angent rien à l'action pédagogique. En effet, "il ne suffit pas de donner de ! 'indépendance nux gens, de leur laisser davantage d 'initiative et tf , pouvoirs : ils doivent aussi désirer cette liberté et savoir en user. L 'inertie jointe ii la force de l 'habitude et des opinions anciennes, empêche que toute réforme soit appliquée. Pour que les intéressés acceptent l 'autonomie qui leur est offerte et en usent pleinement, il faut prévoir des disposiiiuns spéciales afin àe les informer, de les encourager et de les instruire" (van Velzen &

al., 1988, p.89).

Nous avons posé quelques-uns des éléments d'une stratégie globale du changement dans l'école, notamment quant à ses finalités et à ses réalisateurs. Le mode de réalisation a lui aussi bénéficié de quelques traits, mais nous souhaitons préciser son esquisse. En tenant compte des caractéristiques mises en évidence plus haut, nous proposons au lecteur d'explorer dans les chapitres qui suivent quelques autres facettes de cette problématique.

ELÉMENTS D'UNE STRATÉGIE DU CHANGEMENT

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