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L ES DIMENSIONS DE LA FÊTE PUBLIQUE

Développement territorial et services publics,

L ES DIMENSIONS DE LA FÊTE PUBLIQUE

Les possibilités d’actions, désormais nombreuses, donnent pourtant d’ores et déjà les moyens de faire de l’arrivée du très haut débit ce qu’il devrait être, c’est-à-dire un véritable événement qui transforme les façons de vivre et de travailler, hors donc du seul cadre classique des offres strictement télécoms. Nombre d’ingrédients de la fête ne demandent qu’à être organisés et déployés, en particulier par des acteurs publics qui, comme les collectivités territoriales, inscrivent leurs politiques au cœur de nos quotidiens. Mais les réseaux restent toujours affaire de gens sérieux ; technique, droit, communication officielle et budget veillent. Développeurs locaux, urbanistes, artistes, bénévoles associatifs, et autres empêcheurs de délibérer au carré sont incités à revenir plus tard. N’est ce pas une erreur ? Ne commet-on pas une faute en pensant que les projets d’aménagement numérique sont avant tout des projets d’ingénieurs. Ils le sont incontestablement mais ils sont tellement plus.

Pour retrouver les vraies dimensions politiques de ces chantiers, il paraît indispensable de remettre au premier plan, dès les phases de conception, les solutions de gestion de la cité permises par ces réseaux. Sans chercher à en dresser un inventaire exhaustif, nous avons donc choisi de mettre l’accent sur trois pistes qui semblent être en mesure de donner plus d’épaisseurs au projet numérique territorial. La première consisterait à lancer une plate-forme de services publics à la mesure des potentialités de ces réseaux. La seconde chercherait à développer les solutions de convergence entre réseaux fixes très haut débit et mobiles. Une troisième porterait sur le déploiement « d’infrastructures publiques 3.0 » connectées apprenantes et interactives.

Le bal des usages de services publics

Maîtrise d’ouvrage publique oblige, l’allumage d’un réseau d’initiative publique FttH doit d’abord marquer un véritable changement en matière de services publics de proximité. Il fallait hier se déplacer pour souscrire un abonnement, pour réserver un ouvrage dans une médiathèque, pour régler ses factures de services gérés par la Collectivité, pour rencontrer un élu ou pour assister à une conférence. Tout cela demain doit changer. L’ouverture d’un réseau d’initiative publique peut être l’un des moyens pour y parvenir. Techniquement, toutes les solutions existent. Financièrement, la modernisation des pratiques de services publics de ce type est un

investissement générateur d’économies de fonctionnement. Humainement, il y aura, évidemment, un important travail de formation à consentir mais les solutions du web 2.0 ont fait désormais de tels progrès que ce volet ne semble pas poser de problèmes insurmontables.

Bien entendu, et c’est là aussi une véritable valeur ajoutée à mettre au crédit de la fibre optique, alors que le cuivre conditionnait la performance d’accès à l’Internet aux hasards de la géographie des NRA et des lieux de résidence ou de travail, la fibre optique assure une nouvelle forme d’égalité numérique. C’est un point capital pour tout projet de services publics en ligne.

Pourquoi également ne pas rendre visible le réseau très haut débit dans le paysage du territoire ? C’est pourtant bien l’un des intérêts de ces échelles de la proximité que de pouvoir associer solutions en lignes et lieux d’échanges physiques. Maisons numériques pour tous, espaces numériques et centres de télétravail, pôle de santé et e-santé, ces espaces marqueurs des réseaux d’initiative publique s’avèrent ainsi à même de rendre plus visible l’intérêt collectif des investissements numériques de la Collectivité dans les espaces de vie. Les chantiers de convergence entre réseaux fixes et mobiles ou ceux déployant des infrastructures publiques 3.0, abordés dans les lignes qui suivent, offrent d’ailleurs à ce sujet de véritables potentialités.

Entre fixes et mobiles, les cafés des convergences

Le lancement d’un RIP FttH ne peut ensuite se concevoir sans traductions mobiles. L’invention et la stimulation de l’espace public numérique sont à ce prix. Il semble donc indispensable de traduire tout programme de maîtrise d’une infrastructure numérique par le lancement de nouveaux usages mobiles transportés par un réseau radio public interconnecté aux infrastructures très haut débit.

Réseaux wifi publics, solutions de paiement sans contact, ou encore, par exemple, solutions de réalité augmentée, là encore il doit y avoir un avant et un après. Nous avons eu à ce sujet l’occasion de signaler plusieurs projets pilotes dans ces domaines, à Tulle par exemple, où les habitants peuvent se connecter gratuitement via les lampadaires et la solution Citybox. L’interconnexion de stations wifi avec les réseaux optiques offre bien d’autres perspectives dans ces domaines. En matière de tourisme, de mise en valeur patrimoniale, de services de proximité ou encore, par exemple, de relations entre les usagers et la Collectivité, ce type de projet procure aux collectivités territoriales et aux usagers de nouveaux leviers d’actions. La plateforme de proximités augmentées proposée dans la première partie de l’ouvrage présente à ce sujet plusieurs exemples concrets.

Les chemins ouverts par les infrastructures publiques 3.0 ou comment urbaniser le très haut débit ?

C’est aussi le cas en matière de convergence entre RIP et mobiliers urbains. Nous avons déjà cité le cas d’Oslo et de son projet réussi d’éclairage public « intelligent » portant sur 10 000 des 62 000 lampadaires de la ville. Nombre d’initiatives de ce type se préparent ou sont opérationnelles en France aussi. La RATP a par exemple récemment lancé une expérimentation intéressante en matière de station de bus. Cette dernière intègre à la fois des solutions communicantes orientées transport, via des écrans d’information sur la position des autobus en temps réel, et des services à vocation urbaine. Ces derniers s’organisent par exemple autour de messages sur l’actualité du quartier ou de petites annonces sur Paris. La station comprend en outre une connexion Wi-Fi publique et une prise électrique permettant le rechargement de petits équipements personnels. À ces différents services, s’ajoutent également une station de location de vélos électriques, une bibliothèque en libre-service, ainsi qu’un espace commercial où sont vendus des cafés ou des snacks. Selon le site Urbanews.fr, la paroi située derrière les bancs diffusera

enfin une douce chaleur lors des journées hivernales les plus froides.

Le projet Cité des Écrans développé par la ville de Montpellier81 ouvre

également une voie dont il sera possible de s’inspirer. L’opération vise à informer et à partager les savoirs de la cité via des écrans interactifs publics conçus comme de nouveaux médias urbains. Ces écrans prennent la forme de grandes dalles interactives tactiles installées dans les établissements publics ou les principaux lieux de passage et d’échanges de la ville. On peut, en particulier, y trouver une carte interactive de la ville, un outil de débat en ligne, une série de vidéos locales, la découverte de la cité en 3D ou un journal numérique temps réel et multi-utilisateurs. Ce dernier génère, en laissant quelques secondes le doigt sur le flux qui nous intéresse, un QR code afin de récupérer l’information sur un téléphone mobile ou sur une tablette. Les contenus de ces écrans émanent de la municipalité mais aussi d’entreprises de services, d’acteurs sociaux ou culturels et des citadins eux-mêmes. Ces écrans organisent un nouvel outil de service de proximité, de lien social et de partage de savoirs. Cette ville 2.0 esquisse sans doute ainsi les prémisses d’une cité qui se construit aussi avec ses habitants et avec des outils, numériques ou non, que les réseaux de nouvelle génération peuvent contribuer à développer.

Les exemples et les idées abondent donc. Ils montrent de quelles manières il s’avère désormais possible de faire sortir les infrastructures publiques numériques de leurs fourreaux pour en faire quelques-uns des

moyens de la réinvention de nos proximités et de nos espaces de vie. L’internet des objets publics pourrait bien être ainsi l’un des volets importants des futurs réseaux d’initiative publique très haut débit. Les

collectivités territoriales représentent d’ailleurs à ce titre des partenaires naturels en matière d’expérimentations orientées services très haut débit. Modernisation des services publics, déclinaisons mobiles, lieux numériques d’apprentissage ou de travail, mobiliers urbains interactifs, coopérations entre acteurs publics et privés, la liste des bonnes raisons de faire sortir les projets très haut débit de terre pour en faire de vrais outils de services de l’espace public s’avère déjà fournie. Sans nul doute, prendra-t-elle demain encore plus d’épaisseur et de sens. C’est un argument qui plaide là encore pour que l’on conçoive aussi les projets d’initiative publique très haut débit sous l’angle de ces services et de ces écosystèmes. C’est l’un des enjeux pour lequel les collectivités territoriales ont un rôle premier à tenir.

conclusion partie 3