• Aucun résultat trouvé

L’atomisation/congélation (Spray Freeze-Drying)

CHAPITRE 1 : BIBLIOGRAPHIE

1.4 Techniques de stabilisation industrielles :

1.4.2 Le séchage :

1.4.2.5 L’atomisation/congélation (Spray Freeze-Drying)

L’atomisation/congélation à froid est un procédé surtout utilisé dans l’industrie pharmaceutique. Il combine l’utilisation des deux techniques développées précédemment : l’atomisation à très basse température et la lyophilisation. Le procédé se déroule en trois principales étapes : la génération de gouttes, la congélation de ces gouttes en chambre d’atomisation et la sublimation (Ishwarya et al., 2015). La figure 6 représente le schéma de fonctionnement d’un procédé d’atomisation/congélation à très basse température.

49

Figure 6 : Schéma de fonctionnement d’un procédé de Spray Freeze-Drying

Le produit est introduit sous forme liquide, puis dispersé sous forme de fines gouttelettes (spray) à l’aide d’un dispositif d’atomisation (buse ou disque). Une fois atomisé, le liquide est rapidement congelé par mise en contact avec un fluide froid (liquide ou gaz) et se transforme en fines particules congelées contenant un mélange de glace et de liquide interstitiel amorphe. La lyophilisation proprement dite est ensuite mise en place, soit de manière conventionnelle en étagères, soit par l’intermédiaire d’un lit fluidisé. Généralement, les particules congelées sont récoltées à l’aide de tamis et transférées sur les étagères de lyophilisation pré-refroidies puis séchées par sublimation (séchage primaire) puis par désorption/diffusion (séchage secondaire). Les poudres obtenues sont de tailles contrôlées, poreuses et disposent d’une grande surface spécifique (Wanning et al., 2015). Ces poudres ainsi formées gardent leur morphologie sphérique et peuvent alors être enrobées par des excipients alimentaires pour garantir la stabilité des probiotiques au cours du temps. La vitesse de refroidissement des particules dépend de nombreux facteurs comme la taille des particules, leur composition ou encore le gradient de température entre les particules et le fluide cryogénique. Cette vitesse a pourtant une influence très importante sur la morphologie des particules et donc sur les étapes de séchage qui en découlent (Barbosa et al., 2015). Au cours de ce procédé combiné d’atomisation/congélation/sublimation/désorption, les micro-organismes (bactéries probiotiques) sont soumis aux mêmes stress qu’en atomisation ordinaire et en lyophilisation classique en flacons.

Stratégies de protection

Ce procédé est nouveau et récent, en particulier dans la production industrielle à grande échelle de probiotiques de sorte que les informations et les données de la littérature dans ce domaine sont relativement rares. On peut malgré tout supposer que les stratégies mises en place pour protéger les cellules tout au long du procédé sont similaires à celles utilisées en atomisation et en lyophilisation classiques. L’ajout d’excipients ainsi que l’introduction de stress avant les étapes de séchage proprement dites (sublimation/désorption) ont une influence sur la viabilité et la stabilité des cellules, mais les paramètres opératoires semblent avoir une plus grande influence notamment le déroulement de l’étape de congélation sur la qualité finale du produit final sec et stabilisé. Selon la formulation du produit, il est possible de vitrifier entièrement les gouttes avec une vitesse de refroidissement

50 suffisamment rapide, ce qui pourrait permettre d’éviter une partie des dommages liés à la cristallisation de l’eau autour et à l’intérieur des cellules (Santivarangkna et al., 2011).

Le procédé d’atomisation/congélation à très basse température offre de nombreux avantages, notamment le contrôle de la taille des particules et de leur microstructure ainsi que le maintien des propriétés fonctionnelles du produit. Malgré cela, il semble qu’il existe encore certaines contraintes technologiques et certaines limites quant à son usage à l’échelle industrielle. Tout comme la lyophilisation classique en flacons ou en vrac (plateau), les étapes de sublimation/désorption après la congélation représentent les plus grands inconvénients en raison des coûts opératoires engendrés très élevés. Le fonctionnement en discontinu et la consommation d’énergie élevée requise par la production de froid et de niveaux de vide poussés conduisent à des coûts de fonctionnement importants. De plus, s’ajoute à cela la logistique et la mise en œuvre du fluide cryogénique ce qui complique l’extrapolation industrielle du procédé (Her et al., 2014). L’efficacité réelle de ce procédé par rapport au procédé de lyophilisation classique reste encore à prouver. Les simulations numériques des étapes de séchage avec des lits fixes de particules congelées montrent que les transferts de matière et de chaleur y sont réduits conduisant à des temps de séchage primaire (sublimation) et secondaire (désorption) beaucoup plus importants. Les faibles conductivités thermiques intrinsèques associées aux produits lyophilisés, poreux et généralement faiblement conducteurs de la chaleur semblent aggravées par la faible conductivité thermique équivalente de la couche fixe des particules constituant le produit (Barbosa et al., 2015).

Ce procédé encore récent et innovant, surtout utilisé dans l’industrie pharmaceutique, reste néanmoins prometteur, en raison des avantages potentiels qu’il présente, notamment le fait d’obtenir une poudre facilement réhydratable et/ou utilisable en galénique. Il est donc fort probable qu’il ait sa place sur le marché dans un futur proche, à conditions de surmonter les verrous technologiques qu’il présente encore à ce jour.

Ce premier chapitre bibliographique montre que le champ des probiotiques est très large, de nombreuses espèces et sous espèces avec des propriétés et applications différentes rendent le choix de la souche difficile. Aux vu de nos connaissances et du matériel à notre disposition, il a été nécessaire de choisir une souche à la fois d’intérêt, ne présentant pas de dangers et aisément manipulable dans un laboratoire universitaire. Notre attention s’est donc portée plus précisément sur les souches suivantes : Saccharomyces boulardii, Lactococcus lactis, Lactobacillus plantarum et Lactobacillus casei. La stabilisation des souches sur le long terme représente l’un des plus grands défis scientifiques et techniques que nous avons eu à surmonter car la substitution de l’eau entraine des dommages irréversibles aux cellules. De nombreux procédés, à la fois dans le domaine pharmaceutique et agroalimentaire, ont été adaptés afin de produire des probiotiques stables tout en présentant des avantages et des limites les uns par rapport aux autres. Les procédés de lyophilisation (en flacon, en plateau ou en spray) restent à ce jour les procédés présentant les meilleurs résultats pour la production de

51

probiotiques secs et stabilisés en vue de leur conservation et de leur utilisation commerciale. Nous avons de fortes raisons de croire que l’efficacité du procédé de lyophilisation peut être améliorée en agissant sur les paramètres de formulation et sur les paramètres opératoires du lyophilisateur (vitesse de congélation, température, pression). L’étude de ce procédé sera donc développée plus en détails dans la suite de ce chapitre de bibliographie afin d’en faire ressortir les pistes d’amélioration ainsi que les problématiques liées à notre travail.

53

2 La lyophilisation appliquée aux probiotiques :

2.1 La lyophilisation

2.1.1 Histoire et généralités

L’origine de la lyophilisation est difficile à déterminer. Il serait possible que cette technique de séchage ait été utilisée par le peuple des Incas aux alentours du XVème siècle pour la conservation de la nourriture. Les cultures étaient stockées dans les hauteurs des montagnes où une température suffisamment basse permettait de congeler ces produits. L’eau était ensuite doucement vaporisée grâce aux faibles pressions d’air offertes par l’altitude. Dans la littérature, le principe de la technique fait son apparition à l’Académie des sciences de Paris en 1906, où d’Arsonval et Bordas décrivent un appareil semblable aux lyophilisateurs modernes, qui permettrait de conserver des sérums et des vaccins en congelant puis en déshydratant le produit à l’aide d’un condenseur. De nombreuses recherches voient alors le jour, notamment sur la production de froid et de vide.

Cependant, c’est lors de la seconde guerre mondiale que la lyophilisation industrielle est développée par Flosdorf et Mudd. Elle permet de stabiliser le sang humain et de l’acheminer sur de grandes distances sans recourir au froid. Elle est ensuite rapidement utilisée pour la production de pénicilline. C’est à ce moment-là que la technique s’impose comme l’une des meilleures méthodes de conservation de nombreux produits biologiques. Peu après, la lyophilisation est étendue à un plus grand nombre d’applications, notamment pour la conservation de nourriture, la production de médicaments, ou encore pour restaurer des matériaux endommagés par l’eau, en raison des nombreux avantages qu’elle offre. En effet, cette technique douce de séchage permet de conserver au mieux la structure et les propriétés organoleptiques des aliments, tout en maintenant durablement leurs propriétés nutritionnelles.

Le procédé de lyophilisation est découpé en trois grandes étapes : la congélation, le séchage primaire (sublimation) et le séchage secondaire (diffusion, désorption). La figure 7 (Jancsó et al., 1970) montre les différents changements de phase impliqués dans la lyophilisation à partir du diagramme de phase de l’eau pure.

Figure 7 : Diagramme de phase de l’eau pure, représentant les changements d’états de l’eau pendant la lyophilisation

C’est pendant la congélation que le solvant pur (qui est généralement de l’eau), est cristallisé sous la pression atmosphérique, et donne naissance à une phase cryoconcentrée contenant le principe actif ou les bactéries et les excipients. Durant la période de séchage primaire (sublimation), le solvant

54 congelé est éliminé en le faisant passer directement de l’état solide à l’état gazeux (sublimation). L’étape finale de séchage secondaire (désorption/diffusion) consiste à éliminer par désorption/diffusion, la partie non congelable du solvant liée à la matrice en grande partie sèche du produit et elle permet de fixer l’humidité résiduelle du produit. Un cycle classique de lyophilisation est représenté figure 8 (Wang, 2000). On y retrouve l’évolution de la température du produit au cours du temps. Ces trois étapes seront développées plus en détail ci-dessous.

Figure 8 : Représentation de l’évolution de la température produit, la température d’étagère et de la pression dans un cycle de lyophilisation classique