• Aucun résultat trouvé

Chapitre I – La conception de la firme basée sur les ressources et le courant du KB

2. L´apprentissage organisationnel comme un des fondements du KBV

L´apprentissage organisationnel peut être défini comme le processus selon lequel de nouvelles informations sont incorporées dans le comportement des agents, changeant leur comportement et amenant – mais, pas nécessairement – à meilleurs résultats.

Au début, le point focal de la théorie de l´apprentissage était centré dans les individus en utilisant le mécanisme stimulus-réponse (Weick, 1991). Mais, plus récemment, il y a eu une conceptualisation au niveau organisationnel envisageant l´apprentissage comme un processus- clé dans l´adaptation des organisations à leur contexte (Argote, 1999).

Toutefois, l´ouvrage de référence en matière d´apprentissage organisationnel (C. Argyris et D. Schön, op.cit.) repose sur une position scientifique très précise – la recherche-intervention en provenance des travaux de K. Lewin (1952) – qui met face à face un ou plusieurs chercheurs et un ou plusieurs praticiens. Le terme praticien se revêt d´un sens tout à fait particulier, car il s´agit de tout agent capable, par sa position et formation, de se débrouiller sur les problèmes qu´il rencontre dans son organisation. Le chercheur n´est pas un spectateur mais un acteur voulant comprendre et modifier l´action. Cette perspective de l´apprentissage servira de base au concept de savoir actionnable qui est vraiment un des plus féconds dans le domaine de l´apprentissage organisationnel, par la perspective dynamique qui découle de la synthèse entre connaissance et action. Au niveau du comportement interpersonnel et organisationnel, Argyris et Schön (op.cit.) soulignent la différence et les interactions complexes qui existent entre les types d´apprentissage de boucle simple (au sein des systèmes de valeurs et cadres d´action existants) et de double boucle (impliquant non seulement des changements dans les valeurs et cadres d´action existants mais engendrant aussi une recherche critique intégrant schémas de pensée distincts).

Le travail séminal d´E. Penrose (op.cit.) a été un important point de départ pour la compréhension de l´apprentissage organisationnel. En effet, Penrose a décrit la façon selon laquelle les processus d´apprentissage engendrent de nouvelles connaissances et forment la base de la croissance des organisations à travers la recombinaison des ressources existantes.

routines organisationnelles qui constitueraient selon ces auteurs la base de l´apprentissage collectif dans les organisations. Elles étaient vues comme des capacités d´exécution pour une performance répétée qui avaient été apprises par l´organisation en réponse à pressions sélectives (Cohen et al., 1996). L´apprentissage organisationnel étant perçu comme un processus de changement adaptatif influencé par l´expérience passée, focalisé sur le développement et le changement des routines et appuyé dans la mémoire organisationnelle. Cependant, Nonaka et Takeuchi (1995), comme on l´a déjà souligné (V. page 9) ont conçu l´apprentissage organisationnel d´après le modèle de la spirale du savoir qui comprenait les phases suivantes:

• la socialisation (pour évoluer du tacite pour le tacite) par l´acquisition directe de connaissance à travers la pratique, l´imitation et l´observation;

l´externalisation (formalisation) des savoirs tacites pour évoluer du savoir-faire tacite au savoir-faire explicite;

• la combinaison (de l´explicite pour l´explicite) par opérations logiques (ordinations, addition, catégorisation) pour la création de nouveaux savoirs; et

• l´ intériorisation (de l´explicite pour le tacite) par enracinement (réflexes, automatismes) des connaissances explicites.

La création de connaissance organisationnelle devrait alors intégrer ces quatre types de conversion de connaissance et se déroulerait sur deux dimensions: épistémologique (la distinction tacite-explicite) et ontologique (de l´individu à l´organisation et de l´organisation au domaine inter-organisationnel). Ces processus seraient mutuellement complémentaires et interdépendantes.

Dans le contexte de l´économie évolutionniste, Nelson et Winter (1982) ont été les premiers à défendre l´intégration de la connaissance organisationnelle et des routines en

La relation entre l´apprentissage organisationnel et l´innovation de l´entreprise a été développée par Cohen et Levinthal (1990) en introduisant le concept de capacité absorptive défini par la capacité de reconnaître la valeur des informations externes en les assimilant et appliquant à des fins commerciales. Une telle capacité absorptive dépendait, selon ces auteurs, du niveau de connaissance au préalable et ne pouvait se développer que selon un chemin qui respecterait la dépendance de sentier.

Brown et Duguid (1991) ont proposé une vision unifiée du travail, de l´apprentissage et de l´innovation qui associe les niveaux de connaissance individuelle et organisationnelle. Ces auteurs ont commencé pour souligner que la codification des procédures de travail peut être complètement distincte des pratiques de travail réelles et même contradictoire dans certains cas. Dans leur approche, les connaissances utiles sont profondément enracinées dans le travail quotidien et l´acquisition de nouvelles connaissances (apprentissage) est socialement construite à partir des pratiques de travail. Cette construction sociale de connaissance se fait au sein de communautés de pratique, dans lesquelles les connaissances sont librement partagées à travers de mécanismes collaboratifs, comme la narration et le travail conjoint. Ces auteurs soutiennent également qu´il est probable que ces communautés de pratique s´engagent en activités innovatrices, car leur vision du monde se confronte continuellement avec les exigences du travail quotidien. Le caractère informel de ces communautés et la participation fluide de la part de leurs membres facilitent l´innovation et mitigent les tendances d´ossification des grandes organisations.

Finalement, une brève référence à la question du savoir apprendre immanent au concept de "learning organization" pratiqué par les organisations intelligentes dans l´actualité (Senge, 1990). Selon cet auteur – fondateur de la Society for Organizational Learning – aux quatre disciplines typiques d´une organisation intelligente (maîtrise de soi, remise en cause des modèles mentaux, création d´une vision partagée, apprentissage en équipe) on devrait ajouter une cinquième discipline focalisée dans la pensée systémique et se fondant dans une relation étroite avec chacune des autres disciplines pour analyser les phénomènes dans leur globalité.