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Ce qui importe à dire en guise de récapitulation c’est :

La contribution de la théorie des actes de langage est qu’elle vient faire apparaitre avec discernement et d’une façon très transparente et assez lucide et encore rigoureuse un caractère intrinsèque qui a été latent, celui de la performativité des énoncés dits performatifs.

À la juxtaposition du fait que les énoncés sont proférés dans l’intention d’apporter, de décrire des informations (contenu propositionnel), il existe une vérité précieuse et inestimable, celle de la charge pragmatique qui anime l’énoncé lui-même en lui donnant un pouvoir qui s’actualise et se concrétise en influençant sur le contexte interlocutif environnant.

Alors, nous nous servons du langage pour produire des énoncés qui nous facilitent et nous permettent d’accomplir une variété hétéroclite d’actes à travers le bon maniement des outils langagiers et linguistiques qu’on dispose dans le cerveau.

Donc, il s’agit bien évidement de savoir sélectionner le mot juste à la convenance du cadre interlocutif en question afin que des actions puissent donner vie au dire. L'apport de la théorie des " actes de langage " est de montrer que les énoncés que nous proférons ne sont pas seulement à visée informative, en revanche, ils sont dotés d'une sorte de capacité permettant d'exprimer des demandes, des ordres et appellent des réactions comportementales. En vertu de cette caractéristique, ce sont des " actes ", autant que des mots simples. En même temps qu'il a un sens, le langage a une " force illocutionnaire ", à laquelle, parfois, se réduit toute sa signification.

48 La fonction ultime du langage (selon la conception austiniènne) n’est point refléter la pensée permettant de l’exprimer, mais c’est intrinsèquement un moyen d’action.

La théorie des actes de langage est couronnée par la naissance du performatif, notion moteur constituant un point central dans cette théorie.

Observons les énoncés suivants

J’écris une lettre à un ami. (1) Je ferme la porte.

Je déclare la séance ouverte. (2) Je te promets de venir ce soir.

(2)Il est bien évident que le point commun entre ces exemples est le fait qu’ils présentent des énoncés n’acceptant d’être sanctionnés ni vrais ni faux ; ils ne servent pas à décrire un état de fait, ils exécutent des actions.

On prend l’exemple (1) dont le contexte est le rituel (voire le procédural) d’une cérémonie de mariage, on comprend qu’il suffit seulement de prononcer ce genre d’énoncé, bien sûr, que soient associés un ensemble bien défini de conditions de réussite pour que l’acte de se marier puisse avoir lieu.

On peut dire la même chose pour le reste des exemples.

Alors, tous ces énoncés servent à exécuter des actions lorsqu’ils se profèrent à la présence des conditions de succès correspondantes.

49 Donc, delà on peut définir un énoncé performatif comme étant :

"L’énoncé qui, sous réserve de certaines conditions de réussite, accomplit (perform en anglais [d’où le terme performatif]) l’acte qu’il dénomme, c.-à-d. fait ce qu’il doit faire du seul fait qu’il le dise". (C.KERBRAT-ORECCHIONI, 2005, page : 09).

Dans l’exemple (1), l’énoncé est constatif parce qu’il décrit un certain type d’action (écriture/ fermeture) concomitant avec la prononciation de l’énoncé, il accepte la sanction vrai ou faux.

En revanche, les énoncés dans l’exemple (2) sont chargés pragmatiquement, c.-à-d. qu’ils exécutent des actions par le seul fait de prononcer l’énoncé correspondant, ils ne décrivent rien, ils n’acceptent pas d’être l’objet de la sanction vrai ou faux.

« Un énoncé est appelé constatif s’il ne tend qu’à décrire un évènement (Jean est venu) sans prétendre modifier les choses (alors qu’il est performatif) s’il se présente comme destiné à transformer la réalité à l’image d’une question ou d’un ordre, qui prétendent influencer sur l’interlocuteur, en l’amenant à faire ou à dire quelque chose ».(O.DUCROT et J-M.SCHAEFFER, 1995, p781).

Le cas de la promesse :

Soit l’exemple suivant :

(Je te promets de venir ce soir) présente un énoncé performatif dans la mesure où l’énonciateur lors de la production de cette énonciation a l’intention de tenir parole.

50 C'est-à-dire, il est censé être sincère et avoir l’intention de tenir sa parole ; dans ce cas on dit que la promesse est un acte heureux sinon elle sera accusé nulle et non avenue (un malheur affectant des énoncés..) et un acte malheureux qui fonctionne mal.

Pour Austin, telle énonciation, véhiculant une promesse implique la présence de tous les éléments concomitants pour qu’elle échappe au malheur du non succès, et par là, qu’elle puisse s’effectuer effectivement et pleinement et avec succès, par conséquent, lorsque l’acte s’effectue sans aucun entrave ou empêchement, on dit que la promesse est accomplie avec bonheur.

Ce bonheur et malheur substituent la sanction vrai et faux constituant le point central de la deuxième conférence.

L’exemple du baptême :

Il s’agit ici d’un acte de baptiser un bateau, et pour que cet acte ait lieu et soit valable (valide/ heureux), il est nécessaire que l’énoncé performatif soit dit par la personne jugée et désignée compétente pour le faire.

Quand il s’agit du pari, on aura besoin de deux partenaires au minimum pour pouvoir entrer en pari, et que le deuxième partenaire accepte la proposition de celui qui lance, annonce son pari.

À l’encontre avec d’autres philosophes, Austin a un autonome mode de penser qui s’éloigne de la règle générale connue à l’époque. Il pense que le rôle d’un énoncé (affirmation) doit dépasser le cadre descriptif et représentationnel « celui qui décrit un état de chose ou affirme quelque chose. »(J-L.ASTIN, 1970,p37).

51 Austin en se servant des exemples suivants :

« Oui [je le veux] (c’est-à-dire je prends cette femme comme épouse légitime) ».

« Je baptise ce bateau le Queen Elizabeth ». « Je donne et lègue ma montre à mon frère ».

« Je vous parie six pence qu’il pleuvra demain ». (Id, p41).

Selon une perspective purement actionnelle et pragmatique, Austin a voulu postuler que ce genre d’énoncés, lorsqu’ils s’énoncent et se profèrent dans les conditions et les circonstances appropriées et opportunes, ils finissent par l’accomplissement des actes véhiculés par le simple fait de parler. Un constat très important : tous ces énoncés partagent un point commun : ils ne sont pas produits dans l’intention de décrire ou de présenter des états de choses, en revanche, ils actualisent, contextualisent, concrétisent, exécutent et réalisent –au sens pragmatique du mot- des actes changeant les données de la réalité existante. Alors, le dire devient tout bonnement un moyen d’agir sur le contexte interlocutif.

Donc, le dire qui dispose d’une puissance, d’une charge pragmatique et performative en s’installant dans les conditions favorisant l’accomplissement et la concrétisation du contenu, est un phénomène capital et intrinsèque, il implique et exige corrélativement l’agir.

« En plus de la formulation des mots qui constituent ce que nous avons appelé le performatif, il faut généralement que nombre de choses se présentent et se déroulent correctement, pour que l’on considère que l’acte a été conduit avec bonheur. »(Id, p48).

52 Alors, selon la conception d’Austin, le bonheur de l’acte s’effectue si et seulement si ce dernier s’est couronné au sein de certaines conditions et circonstances jugées nécessaires, ainsi, ces dernières doivent se présenter et se dérouler convenablement et à la convenance du contexte situationnel correspondant. Faute de quoi, l’acte devient inévitablement malheureux.

J.L.Austin insère l’appellation d’échecs ou “infelicities” (en anglais) lorsque les conditions accompagnant le processus de l’énonciation se fonctionnent et se présentent mal et d’une façon incorrecte, inappropriée.

Austin expose exhaustivement et avec éloquence la distinction entre des actes heureux par opposition aux actes malheureux en excluant la sanction faux aux performatifs. Pour lui, l’acte malheureux porte et correspond aux « actes nuls et non avenus ou sans effets ».(Id, p50).

Dans la deuxième conférence, Austin utilise le terme échec (ou infélicité) pour désigner les actes qui peuvent se mal présenter et fonctionnent mal, il les considère comme des actes malheureuses. Ce malheur est dû à un disfonctionnement de l’acte quant à son exécution ; c.-à-d. un échec et par conséquent l’acte en question (se marier, parier…) est accusé nul, non avenu ou

sans effet.

On constate une richesse et un flux d’appellations telles : insuccès (misfires), creux (hollow), purement verbal (professed), un appel indu (misinvocation), exécution ratée (misexecution)1.

Alors qu’il appelle des actes heureux tout acte qui s’opère correctement dont les circonstances sont appropriées et opportunes ; et par conséquent on dit que l’acte est conduit avec bonheur ou avec succès.

53 Dans cette conférence, Austin expose avec soin et rigueur/ vigueur que l’existence d’un grand nombre de variétés d’échecs, d’ailleurs nous n’allons pas en parler en détail, mais, il convient de dire que cette doctrine d’échecs est une caractéristique qui peut affecter les énoncés performatifs ; c'est-à-dire quant à la production d’un énoncé performatif, il est prétendu que nombre d’insuffisances et de malheurs peut survenir, empêchant l’acte prétendu de son succès en le rendant nul et non avenu.

Ou bien, on peut dire qu’en tant qu’énonciation les performatifs sont exposés à certaines espèces de maux qui atteignent toute énonciation. Austin a dressé une liste rassemblant les différents types d’échecs (malheurs susceptibles d’affecter les actes de discours).

Dans la troisième conférence, la terminologie austiniènne s’étend pour inclure :(incorrect, incomplet…) tout un schéma (voir p52).

Austin s’oriente vers les énonciations performatives dont l’intention est d’indiquer les critères formels pour que la qualité ou bien l’étiquète de la performativité soit pertinente, voire explicite. Alors, selon lui, il est très important qu’un performatif soit présenté et exprimé explicitement afin de se distinguer des constatifs. L’usage de la première personne du singulier et de l’indicatif présent à la voix active pour affecter des traits purement et absolument performatifs aux énoncés.

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