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Chapitre 2 Méthodologie de la recherche

2.5 L’Analyse Réseau

L’analyse réseau a été développée dans les années 1960 en sociologie des organisations dans la logique des représentations de type sociogramme de Moreno (1954). Elle s’est ensuite incarnée dans l’école anglo-saxonne “social network analysis”. Elle a su tirer profit des avancées technologiques récentes permettant maintenant de représenter et de filtrer des réseaux de grande taille (Boutin, 1999).

L’analyse réseau propose une méthodologie d’observation et de caractérisation de ces interactions: les outils de l’analyse réseau sont d’une part des graphes permettant de visualiser ces interactions et d’autre part des indicateurs permettant d’identifier des nœuds du réseau aux propriétés particulières (Wasserman et Faust, 1994). On définit par réseau un ensemble d’éléments en interaction. Ces éléments peuvent être des hommes, des concepts, des pages web, etc. (Boutin, 2005).

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Concernant l’analyse réseau il n’existe pas une modalité claire permettant de savoir par avance comment les groupes ou statuts sont constitués, c'est-à-dire comment se réalisent les combinaisons des relations (Boutin, 1999; Degenne et Forsé, 1994). Cette logique de réseau est à l’opposé de la logique individuelle. Elle sous tend l’idée que le travail collaboratif créé des synergies en terme de créativité, de complémentarité qu’il est intéressant de comprendre, de représenter et d’analyser. Lorsqu’on appréhende un domaine nouveau que l’on ne connaît pas, on a beaucoup de mal à avoir dès le départ une vue d’ensemble du phénomène observé (Boutin, 1999; 2005). Le phénomène est au départ appréhendé de façon disjointe et c’est ensuite à force d’approfondissement que les interactions se font et qu’une vue d’ensemble se dégage. D’ailleurs les systèmes traditionnels de recherche d’information s’inscrivent dans cette logique linéaire (Boutin, 2005; Boutin et Perrin, 2005). Ce qui est intéressant, c’est précisément de reconstituer un processus d’interaction, d’association, de conflit entre les acteurs du système choisi.

L’approche réseau appliquée à l’analyse automatique de corpus de grande taille va permettre de représenter des interactions et de dégager une vue d’ensemble qui permettra de mieux comprendre l’interaction entre les phénomènes observés (Boutin, 2005; Boutin et Perrin, 2005; Wasserman et Faust, 1994). Pour bien faire sentir l’intérêt de cette approche, nous souhaitons l’illustrer pour ancrer notre propos dans le concret. Supposons un corpus composé de 10 projets mise en œuvre par 5 acteurs locaux, appartenant à une région. Voici la façon dont ces projets ont été réalisés:

 A a réalisé 5 projets seul

 B et C ont réalisé 2 projets ensemble  B et D ont réalisé un projet en commun  C et D ont réalisé un projet en commun  C et E ont réalisé un projet en commun

Lorsqu’on effectue une analyse de ce corpus en privilégiant la production de chaque acteur, on est capable, par comptage simple, d’identifier les acteurs locaux qui sont présents dans le plus de projets. Ces informations sont contenues dans un tableau statistique comme illustré tableau 2.7.

Tableau 2.7 Nombre des projets ayant produit chaque acteur

Acteur Nombre des projets réalisés A 5 B 3 C 4 D 2 E 1

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Ce tableau permet d’identifier, dans une logique productiviste, l’acteur A comme étant le plus productif. À partir de ce même corpus, l’analyse réseau va représenter un graphe visualisant les collaborations entre acteurs. La figure 2.5 donne l’exemple d’un tel graphe. Chaque acteur y est représenté par un sommet du graphe et chaque trait entre deux sommets correspond au nombre des projets mise en ouvre par les deux acteurs.

Figure 2.5: Représentation du réseau de collaboration d’acteurs impliqués

Dans ce graphe, une dimension nouvelle apparaît. “A” qui était dans le tableau précédant l’acteur qui avait produit le plus est marginalisé. “A” n’est jamais associé à d’autres acteurs. On observe sur ce même réseau que “C” est dans une position remarquable. ”C” est au centre du réseau. Enlever “C” c’est déconnecter une partie de ce réseau. “C” joue donc le rôle de point d’articulation du graphe. Il a une position intéressante qui mérite d’être soulignée et qui n’apparaissait pas dans le tableau précédant. Dans cette logique relationnelle, les objets ne sont plus étudiés de façon disjointe: l’interaction qui existe entre eux est porteuse de sens (Boutin, 1999; 2005).

Un des intérêts de l’approche réseau est le caractère intuitif des cartographies qui vont être générées par le décideur profane qui n’est pas rompu aux techniques d’analyse de données. En effet le réseau reste fidèle aux données du corpus à étudier. Il représente, sans perte d’information, le contenu des données primaires (Boutin et al., 2007a).

2.5.1 L’instrument logiciel NetDraw

Il existe sur le marché de nombreux logiciels permettant de représenter des réseaux. Nous avons privilégié le logiciel Netdraw qui est un logiciel disponible gratuitement et facilement accessible. NetDraw a été développé par Steve Borgatti, professeur a l’École de Gestion Carroll du Boston Collège aux Etats-Unis. Il fonctionne sous le système Windows et permet de représenter un graphe automatiquement à partir d’un fichier de données créé dans un fichier texte (Figure 2.6). A E C B D

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Figure 2.6 Page d’accueil de NetDraw

Netdraw peut permettre de représenter un graphe dans lequel le lien peut signifier plusieurs choses (Borgatti, 2002). Le logiciel peut affecter plusieurs attributs à chaque nœud, chaque attribut correspondant à la forme, à la couleur, à la police, à la taille des nœuds (Figure 2.7). Le fichier peut être sauvegardé sous différents formats d’images (bitmap jpg et gif). Le programme lit les fichiers du système UCINET, fichiers DL UCINET, fichiers Pajek, et son propre format VNA (qui permet de sauvegarder les données du réseau et de l'attribut ensemble, avec les informations de mise en page comme des coordonnées spatiales, couleurs, etc.). Il se trouve et peut être téléchargeable à l’adresse : http://www.analytictech.com/ (Borgatti, 2002).

Figure 2.7 Formes de graphs dessinés par le logiciel NetDraw