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L’ AMENAGEMENT DU SORT DES CONSTRUCTIONS EN FIN DE BAIL

Un bail à construction à l’envers fait partie du mode d’acquisition de la propriété, mais cette fois, par le preneur à bail et non le bailleur. Autrement dit, c’est une situation dans laquelle le preneur et le bailleur concluent dès l’origine la possibilité pour le preneur, à l’extinction du bail, de devenir propriétaire du sol des constructions. De fait, en devenant propriétaire du sol au nom du mécanisme de l’accession il demeurera propriétaire des constructions édifiées ou rénovées en cours de bail. Mais, il est tout à fait possible également pour les parties de prévoir que le preneur aura une indemnité en fin de bail permettant une sorte d’indemnisation pour les constructions et améliorations faites.

Le mécanisme d’accession immobilière par le bailleur est une règle supplétive de volonté lorsque les parties n’ont pas mis en exergue leur liberté contractuelle quant au sort des constructions en fin de bail. En effet, les parties peuvent prévoir que les constructions échapperont au patrimoine du bailleur en restant dans celui du preneur. Dans ce cas, il s’agirait d’un régime de location-accession.

Cette possibilité semble totalement contradictoire avec l’esprit même du bail à construction, cependant, il faut bien comprendre que la qualification du bail ne change pas tant que l’obligation de construction et l’obligation d’entretien par le preneur, en plus d’autres hypothèses prévues par le bail, sont remplies.

Cette hypothèse de la location accession a même été prévue en l’article 25 (désormais abrogé) de la loi du 16 décembre 1964. Aujourd’hui elle est reprise à l’article 151 quater du Code

général des impôts, qui fait application de l’article 26 de la loi de 1964. Autrement dit, cette

possibilité est légalement reconnue. De fait, le législateur a donc fait en sorte que le mécanisme de l’accession différée du bailleur ne soit véritablement qu’une option en cas de silence de la convention.

Pour que cette situation puisse être possible, il faut que les parties l’aient prévue conventionnellement dès la conclusion du bail. Ainsi sera prévue une clause de préférence, ou encore une promesse unilatérale d’achat ou une promesse unilatérale de vente voire même un contrat de vente sous condition suspensive de paiement total du prix. De façon globale dès lors que la construction reste la prestation principale, le bail sera qualifié de bail à construction. La situation à terme ne relevant que de la liberté contractuelle des parties. Tout autant de possibilités permettant de faire du preneur le plein propriétaire des constructions et du sol. En pratique, l’acquisition du sol se fera essentiellement par le versement d’un acompte qui est révisable de sorte qu’à la fin du contrat le prix du sol sera pleinement satisfait. Cet acompte prendra la forme du loyer qui est versé au bailleur par le preneur. Il ne s’agira en aucun cas d’un loyer complémentaire, mais bien du même loyer qui sera acquitté dans le but de l’acquisition du sol. C’est ainsi qu’on tombe dans la location- vente, ou la location accession. Une location qui a pour but in fine d’acquisition et donc la cession du bien loué.

C’est en ce sens que finalement l’article 151 quater du Code Général des Impôts intervient véritablement. En effet, cet article dispose en ses deux premiers alinéas : « Lorsque le bail à

construction prévu par les articles L. 251-1 à L. 251-8 du code de la construction et de l'habitation est assorti d'une clause prévoyant le transfert de la propriété du terrain au preneur moyennant le versement d'un supplément de loyer, la plus-value dégagée à l'occasion de la cession du terrain est imposée dans les conditions prévues aux articles 35,150 U, 244 bis et 244 bis A.

Pour l'application des dispositions de l'article 150 U, le montant de la plus-value nette est déterminé au moment de la signature du bail d'après la valeur du bien à cette date ; la durée de possession pris en compte pour l'établissement de la plus-value est la période comprise

entre la date d'acquisition du bien par le bailleur et la date de transfert de propriété en fin de bail ».

Cela signifie que l’avantage premier pour le bailleur de mettre en place un mécanisme de location-accession est l’exonération de la plus-value dégagée suivant la durée de détention du bien et la date de transfert de propriété. Autrement dit, c’est un avantage fiscal évident, notamment lorsqu’au final les constructions ont plus de trente ans où l’on a une exonération totale de la plus-value.

S’agissant du preneur, l’avantage de cette location-accession est pour lui l’étalement dans le temps du prix du foncier. Ce mécanisme permet également au preneur de rassurer les tiers dans les droits qu’il peut leur octroyer.

En effet, nous avions pu voir précédemment que les droits des tiers s’éteignaient, sauf dans certains cas précis et visés par la loi, au même instant que le bail à construction touche à son terme. Ce qui au final pourrait poser des difficultés quant à la prévoir la sécurisation juridique de la pérennité de leurs droits. Ainsi, par la location-accession il y aura la confusion de la qualité de preneur et de bailleur sur la tête du bailleur. Dans ce cas, pour les hypothèques ou servitudes ou tout autre droit à terme consenti, qui prenaient fin à la fin du bail, perdureront le temps nécessaire à la réalisation de son obligation par le preneur maintenant devenu propriétaire. En conséquence de quoi également, les baux consentis à des locataires (autres que les baux à locaux d’habitation) par le preneur pourront eux également être maintenus en ayant le preneur-bailleur en tant que bailleur-propriétaire désormais.

Ce qui par ailleurs répondrait efficacement à la question des cessions des locaux dont on ne saurait dire leur avenir à l’expiration du bail si devait être joué le mécanisme de l’accession différée au profit du bailleur initial. Ici, il n’y aurait plus de souci apparent quant à leur qualification, ni leur source, ni leur sécurité. Nous nous retrouverons alors dans une copropriété avec pour partie privative les lots vendus à des tiers et comme partie commune, entre le preneur désormais propriétaire et ces tiers, le sol ou autre emplacement considéré en tant que tel. Cette situation nouvelle appelle à une réorganisation nouvelle.