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6.2 L’action comme un processus situ´e

6.2.2 L’affordance comme ph´enom`ene ´emergent

Nous avons postul´e dans le chapitre 5, qu’une affordance est une possibilit´e d’action pre-nant la forme d’une propri´et´e ´emergente du couple acteur/environnement. Celui-ci est repr´esent´e dans le mod`ele par la configuration des entit´es-environnementales situ´ees au mˆeme moment sur la mˆeme place. En effet, les entit´es-environnementales poss´edant des capacit´es d’action et qui sont identifi´ees commeactuateur`a un instant t repr´esentent les acteurs tandis que les entit´es-environnementales qui les entourent repr´esentent l’envi-ronnement dans le monde r´eel. Ainsi, selon les caract´eristiques des affordances que nous avons pr´esent´ees dans le chapitre 2, un objet de l’environnement poss`ede un sens qu’il soit per¸cu ou non. Cette caract´eristique est pr´eserv´ee dans le mod`ele et est repr´esent´ee par les ensembles Ce et Sedes entit´es-environnementales. Ces ensembles ne repr´esentent pas les possibilit´es d’action mais ce sont des propri´et´es qui caract´erisent les entit´es-environnementales et qui permettent de d´etecter les affordances. Celles-ci sont d´etect´ees par un niveau sup´erieur `a celui o`u les entit´es-environnementales ´evoluent et interagissent, c’est le niveau agent, constitu´e par les agents-places (Figure 6.1). Ces derniers sont dot´es d’un ensemble de m´eta-connaissances qui op`erent sur les ensembles Ce et Se afin de d´etecter les affordances.

efinition 4. Une affordance est une possibilit´e d’action repr´esent´ee sous la forme

d’une propri´et´e ´emergente d’une configuration d’entit´es-environnementales (niveau mi-cro) susceptible d’ˆetre d´etect´ee par les agents-places (niveau mami-cro) par l’interm´ediaire des m´eta-connaissances qu’ils d´etiennent.

6.2.2.1 D´etection des affordances

La phase de d´etection de propri´et´es ´emergentes, constitue l’´etape o`u l’on (expert ou simulateur) extrait par observation certaines informations qui semblent int´eressantes et

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peuvent conduire `a un ph´enom`ene ´emergent [David et Courdier, 2009]. Il s’agit dans notre cas d’observer les ensembles Ce (capacit´es d’action) et Se (capacit´es `a subir) de chaque entit´e-environnementale. Cette observation permet de construire un ensemble de faits K. Ainsi, dans le cas o`u l’ensemble K ou un sous-ensemble de K constitu´e de faits provenant des Ce et des Se des entit´es per¸cues permet la d´etection d’une ou plusieurs af-fordances, cela conduit `a la reconnaissance d’un actuateur pouvant ´eventuellement ˆetre constitu´e d’une conjonction de plusieurs entit´es-environnementales. En effet, la capa-cit´e d’agir d’une entit´e-environnementale constitue, `a la fois, une propri´et´e permettant la d´etection d’une affordance ainsi que la capacit´e n´ecessaire `a l’ex´ecution de l’action correspondant `a cette affordance4. Par exemple, un agriculteur peut manifester un en-semble de capacit´es telles que conduire un tracteur. Un tracteur manifeste la capacit´e de tracter des machines agricoles. La capacit´e d’une charrue est de labourer un champ. Ces trois capacit´es d’action de ces trois entit´es-environnementales permettent de d´etecter la possibilit´e d’action de labourer ainsi que l’actuateur correspondant constitu´e par la conjonction agriculteur-tracteur-charrue. Cependant, ce type d’affordance ne peut cau-ser le d´eclenchement d’une action que si par ailleurs, les autres conditions n´ecessaires `

a son ex´ecution qui compl`etent la situation actuelle sont r´eunies (disponibilit´e des res-sources, ´etat de marche des mat´eriels, conditions climatiques, existence de chemins,. . . ). Nous consid´erons que seules les affordances impliquant, `a la fois, au moins une en-tit´e-environnementale qui joue le rˆole de l’actuateur et au moins un objet-passif pour subir l’action, peuvent causer une action. N´eanmoins, d´etecter une affordance li´ee seule-ment aux Ce et reconnaˆıtre un actuateur permet apr`es r´eification de cette affordance d’enrichir le syst`eme avec cette nouvelle connaissance (nous argumentons les avantages de r´eifier les affordances dans la section 6.2.2.2). L’ensemble Se repr´esente les actions pouvant ˆetre subies par les entit´es-environnementales per¸cues. Cet ensemble conjointe-ment avec l’ensemble Ce ainsi que les affordances li´ees `a la conjonction d’un ensemble d’entit´es-environnementales permettent de d´etecter un ensemble d’affordances qui cette fois-ci sont susceptibles de mener au d´eclenchement d’une action. Par exemple, l’action de labour peut ˆetre r´ealis´ee par l’actuateur agriculteur-tracteur-charrue et subie par la parcelle.

Rϕ= {f : K → ϕ} (6.1)

La d´etection des affordances se fait par un ensemble de fonctions appel´ees R´ev´elateurs d’affordance Rϕ. Celles-ci prennent comme argument l’ensemble des faits K per¸cus sur l’ensemble ei des entit´es environnementales et retournent l’ensemble des affordances ϕ

4. Toute affordance ne sera pas forc´ement r´ealis´ee au travers de l’action correspondante. Une affor-dance est une possibilit´e d’action, son ex´ecution est contrainte par un ensemble d’autres conditions de r´ealisation (cf. § 5.1.3).

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ainsi que les actuateurs et les objets passifs susceptibles de subir l’action correspondante `

a l’affordance d´etect´ee e.

Les r´ev´elateurs d’affordance caract´erisent la connaissance n´ecessaire qu’un agent-place doit d´etenir pour d´etecter les affordances ´emergentes. Dans le travail actuel, les r´ev´elateurs d’affordances sont exprim´es par des r`egles de production de type si/a-lors. Nous nous sommes en effet concentr´es uniquement sur l’aspect conceptuel de l’id´ee, et non sur l’optimisation de son impl´ementation. Il existe cependant plusieurs langages pouvant ˆetre utilis´es pour formaliser les m´eta-connaissances, tels que le lan-gage de sp´ecification Z [Woodcock et Davies, 1996]. Ce dernier a ´et´e utilis´e dans plu-sieurs SMA pour sp´ecifier formellement les architectures d’agents, tel que dMARS BDI [d’Inverno et al., 1997] et SMART [d’Inverno et Luck, 2001]. Aussi, nous trouvons dans l’approche IODA [Kubera et al., 2011] un mod`ele formel pour repr´esenter les diff´erentes interactions entre les entit´es du syst`eme appel´e matrice d’interaction. Celle-ci peut ˆetre utilis´ee et adapt´ee pour exprimer les r´ev´elateurs d’affordances et les int´egrer au niveau des agents-places. En effet, la matrice d’interaction permet de sp´ecifier ce qu’une entit´e source peut initier et une entit´e cible peut subir comme in-teraction. L’intersection d’une ligne et d’une colonne indique l’interaction pouvant ˆetre initi´ee entre deux types d’entit´es. Comme une affordance est d´etect´ee par un agent-place lorsqu’une entit´e-environnementale portant une capacit´e d’action co¨ıncide avec une entit´e-environnementale pouvant subir une action, la matrice d’interaction pour-rait ´eventuellement ˆetre utilis´ee pour exprimer les r´ev´elateurs d’affordances. Cependant, il convient de pr´eciser que la matrice d’interaction permet de repr´esenter les interac-tions impliquant au plus deux entit´es, alors que dans notre cas, une affordance peut ˆetre d´etect´ee `a partir de plusieurs entit´es-environnementales. D’autre part, un actuateur de l’affordance d´etect´ee peut ˆetre une conjonction d’entit´es-environnementales, c’est-` a-dire que l’ensemble des capacit´es d’actions de plusieurs entit´es-environnementales sont n´ecessaires `a l’ex´ecution de l’action. Par cons´equent, la matrice d’interaction consti-tue une solution pour repr´esenter que les r´ev´elateurs d’affordances qui permettent de d´etecter les affordances impliquant deux entit´es.

6.2.2.2 R´eification des affordances

Dans le mod`ele propos´e, toute action est sp´ecifi´ee localement en fonction de la situa-tion observ´ee. Un agent-place ne poss`ede donc pas de m´emoire ni de m´ecanisme de raisonnement lui permettant d’inf´erer des actions en se basant sur son historique. Ce-pendant, une affordance d´etect´ee constitue une nouvelle connaissance dans le mod`ele qui reste valide tant que les entit´es-environnementales qui ont men´e `a sa d´etection sont toujours per¸cues par l’agent-place. ´Etant donn´e que nous nous positionnons dans une

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mod´elisation o`u l’environnement porte toutes les connaissances n´ecessaires `a l’agent, une affordance d´etect´ee est mat´erialis´ee dans l’environnement par ce que nous appelons structure d’affordance. Cette derni`ere est un artefact qui peut ˆetre assimil´e `a un objet (au sens de la programmation orient´ee objet) qui simule une m´emoire `a court terme des affordances d´etect´ees. D’un point de vue conceptuel, la r´eification des affordances permet d’enrichir le syst`eme avec de nouvelles connaissances, ce qui peut mener `a la d´etection d’autres affordances qui n’aurait pas pu ˆetre d´etect´ees dans le syst`eme `a par-tir des entit´es-environnementales pr´esentes initialement. D’un point de vue simulation, la r´eification d’affordance permet d’´eviter aux agents un calcul suppl´ementaire. En effet, il se peut qu’une affordance reste valide pendant plusieurs pas de temps5 cons´ecutifs. Il est alors plus int´eressant de m´emoriser cette affordance dans l’environnement que de la recalculer `a chaque pas de temps.

Une structure d’affordance est supprim´ee de l’environnement lorsque les entit´es-environnementales qui ont men´e `a sa d´etection ne sont plus localis´ees sur la mˆeme place.

Une structure d’affordance Fϕ se caract´erise par : — ϕ l’affordance ;

— {e} les entit´es-environnementales impliqu´ees dans l’affordance.