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L’ AFFAIRE DE LA M ÉDAILLE D ’H ONNEUR

La fortune artistique de Sorolla varie d’une aire géographique à l’autre dans la mesure où il réussit en Espagne et à l’étranger avec deux genres différents. On vient de voir que, s’il triomphe dans son pays avec une peinture d’atelier encore très académique, il conquiert des prix hors de ses frontières avec une peinture de “plein air” qui s’inspire d’un modèle forgé par Jules Bastien-Lepage et repris par des peintres de toute l’Europe. On cherchera ici à comprendre cette différence et à expliquer pourquoi, à Madrid, le jury de l’Exposition Nationale refuse de lui décerner la Médaille d’Honneur aux éditions de 1897 et de 1899.

Dans un discours rédigé vers la fin de sa vie, Sorolla fait état des querelles esthétiques qui divisaient à l’époque les professeurs de l’École des Beaux-Arts de San Carlos où il était lui-même élève, c’est-à-dire de 1878 à 1884. Il cite dans ce texte deux peintres valenciens adeptes du pleinairisme français, Antonio Muñoz Degrain et Francisco Domingo Marqués (1842-1920), ainsi que trois professeurs de l’école, le peintre Gonzalo Salvá Simbor (1845-1923), qu’il oppose à deux défenseurs du Classicisme, le graveur Ricardo Franch y Mira (1839-1897) et le sculpteur Felipe Farinós y Tortosa (1826-1888) :

D. Ricardo Franch y D. Felipe Farinós eran almas ponderadas que encarecían la importancia del dibujo; pero D. Gonzalo Salvá, conocedor del momento artístico, lleno de anhelos luminosos, nos dejaba libres, animándonos siempre a copiar la naturaleza con visión realista. […] Sabíamos que Salvá era amigo de Muñoz Degrain y de Domingo, y, debido al trato frecuente de estos artistas, daba primacía a la expansión colorista de los discípulos de aquella escuela, en la que, en lucha interior, venció el color al dibujo, a pesar de los esfuerzos hechos por Franch y Farinós en contra de esta tendencia.46

46. Homenaje a la Gloriosa Memoria del Excm. Don Joaquín Sorolla, Académico electo. Discursos leídos en la Sesión Pública el día 2 de febrero de 1924 – Real Academia de

San Fernando – Madrid, Mateu Artes Gráficas, 1924, page 11. « Ricardo Franch et Felipe Farinós étaient deux âmes pondérées qui accordaient une importance supérieure au dessin ; mais Gonzalo Salvá, au fait du moment artistique, épris de lumière, nous laissait libres et nous encourageait toujours à copier la nature depuis un point de vue réaliste. […] Nous savions que Salvá était un ami de Muñoz Degrain et de Domingo, et, en raison de ses contacts fréquents avec ces artistes, il laissait libre cours aux épanchements coloristes des disciples de cette école, au sein de laquelle, dans une lutte intérieure, la couleur terrassa le dessin, en dépit des efforts déployés par Franch et Farinós contre cette tendance. »

Sorolla affirme son penchant pour la couleur dès ses jeunes années, au risque de contrevenir aux canons établis. En 1886, la majeure partie des travaux qu’il fait parvenir à Valence en échange de sa pension romaine est rejetée par l’Académie de San Carlos. Seuls deux des six dessins compris dans son envoi sont jugés recevables et le reste est qualifié de « […] graciosos apuntes muy propios para la cartera de un artista pero en manera alguna bastante serios cuando se los considera como envío de un pensionado. »47 La seule peinture comprise dans son envoi, Una mujer desnuda, est un nu de facture très libre et, surtout, non idéalisé. Ce tableau rappelle le naturalisme de deux peintres français, le Franc- comtois Gustave Courbet (1819-1877) et le Parisien Édouard Manet (1832-1883), dont Sorolla a peut-être découvert quelques tableaux à Paris l’année précédente.48 La touche, courte et nerveuse, gomme efficacement les lignes du dessin préparatoire. Le volume du corps est modelé dans des nuances de gris, de bleus et de verts pâles. Le triomphe de la couleur sur le dessin est signifié allégoriquement par la palette déposée au pied du modèle, qui occupe tout le tiers droit de la composition. Il s’agit, en Espagne, d’un débat ancien puisque Francisco Pacheco (1564-1644) en fait état dans son Traité de la peinture lorsqu’il relate sa rencontre avec Le Greco en 1611 à Tolède.49 De ce nu, le rapport académique conservé aux archives du Conseil Général de la province de Valence précise :

No puede aprobarlo la Academia porque no se revelan en esta obra las dotes que ha tenido la satisfacción de alabar en las demás […] y porque se nota en él bien patente la tendencia a un grosero realismo que aumenta los reparos opuestos por la decencia a la completa desnudez de la figura humana, sobre todo en el sexo en que son más imperiosos el recato y el pudor.50

47. Document daté du 18/04/1886, in Joaquín Sorolla. Exposiciones conmemorativas de las

pensiones de Bellas Artes de la Diputación Provincial, Valence, Diputación Provincial de

Valencia, 1965, page 13.

48. Una mujer desnuda, 88x168, Valence, Conseil Général de Valence, 1885.

49. Francisco Pacheco, Arte de la Pintura. Su antigüedad y su grandeza, Séville, Simón Fajardo, 1649.

50. Joaquín Sorolla. Exposiciones conmemorativas… page 14. « L’Académie ne peut pas le valider car les qualités qu’elle a eu la satisfaction de louer dans d’autres œuvres ne se révèlent pas ici […] et parce qu’on y observe très clairement un fléchissement vers un grossier réalisme qui augmente nos objections au nom de la décence de la nudité complète du corps humain, surtout à l’endroit du sexe, où la réserve et la pudeur sont indispensables. »

L’aversion de ces professeurs pour le “réalisme” de la représentation rend compte des barrières morales qui ont cours dans la société de la Restauration. En effet, l’implantation d’un régime conservateur a renforcé la prédominance de l’Eglise, notamment en matière d’éducation. L’année suivante, le jeune homme échoue à l’Exposition Nationale de 1887 avec El entierro de Cristo, un grand format peint à Rome. Il confiera plus tard, avec une pointe d’ironie amère, que son tableau ne plut à personne sauf au chef du parti conservateur, Antonio Cánovas del Castillo (1828-1897), un admirateur de ce classicisme qui fut précisément pour lui un carcan insupportable : « Mi pobre Entierro de Cristo fue un fracaso, a nadie gustó, a nadie… menos a Cánovas, que tuvo para mi cuadro una frase suya… »51

Selon le quotidien républicain El País, ce revers met davantage en évidence son manque d’appui au sein du jury du concours que la facture du tableau. Selon Lucius, l’auteur de l’article, le jury est alors majoritairement “villeguiste”, c’est-à- dire partisan du peintre José Villegas Cordero (1844-1921). Ce rival de Francisco Pradilla est alors au sommet de sa renommée. Or, à cette époque, Sorolla est pensionnaire de l’Académie Espagnole de Rome dont le directeur est justement, depuis 1881, Francisco Pradilla. Pour Lucius, c’est la rivalité entre les deux maîtres qui aurait provoqué l’échec de Sorolla.52 Amer, Pradilla adresse une lettre ouverte à son disciple, en commençant par ces mots :

Hoy me explico por qué se sentía V. necesitado de recomendación!! Lo que no acierto a explicarme aún admitiendo grandisimos errores en su “Calvario” como se ha atrevido a desconocer sus bellezas y sus promesas un jurado que ha coronado las mayores aberraciones!!!!53

Cette lettre datée du 12 juin 1887 paraît en première page du journal La Regencia, quelques jours plus tard. Le Valencien est donc confronté au moins à deux formes de résistance, d’une part, au conservatisme d’une partie de

51. Ceferino Palencia Tubau, “Joaquín Sorolla”, La Tribuna, Madrid, 3/07/1912. « Mon pauvre Enterrement du Christ fut un échec et il n’a plu à personne… sauf à Cánovas, qui a eu pour mon tableau une phrase bien à lui… »

52. Lucius, “Nuestros artistas en Roma”, El País, Madrid, 10/07/1887.

53. Francisco Pradilla, “Carta abierta”, La Regencia, Madrid, 27/06/1887. « Je m’explique aujourd’hui pourquoi vous pensiez avoir besoin d’un appui ! Ce que je ne parviens pas à m’expliquer, même en reconnaissant de grandes erreurs dans votre “Calvaire”, c’est comment un jury qui a récompensé les pires aberrations a osé en ignoré les beautés et les promesses. »

l’Académie de San Carlos et, d’autre part, aux manœuvres et aux rapports d’influence propres à l’Exposition Nationale. Il faut préciser que le système politique de la Restauration est lui même vicié par des pratiques clientélistes et antidémocratiques. En 1885, à la mort d’Alphonse XII, les chefs respectifs des partis conservateur et libéral, Antonio Cánovas del Castillo (1828-1897) et Práxedes Mateo Sagasta (1825-1903), échafaudent un plan d’alternance politique réglée, qui repose sur le clientélisme et la fraude électorale. Cette entente, qui écarte du pouvoir les autres forces politiques – républicains, socialistes et carlistes – prévaudra jusqu’en 1923. De même, au sommet de ce concours d’État, l’élection des membres du jury, l’admission des tableaux comme l’attribution des prix n’échappent pas aux influences et aux machinations en tout genre. Sur ce dernier point, El Diario de Barcelona affirmait en 1890 : « […] en el último certamen el reparto de premios fue cosa de compadres y comadres, algo parecido a las meriendas de los Carabancheles, y quien más empujo más obtuvo. »54

À l’évidence, Sorolla ne peut pas se soustraire complètement à ce système et à ces pratiques clientélistes sans risquer d’anéantir son avenir. Mais cette contrainte n’explique-t-elle pas, au moins partiellement, qu’il participe si tôt à des expositions hors des frontières de son pays d’origine ? En effet, bien qu’il présente chaque année des nouveaux tableaux à Madrid, il envoie des réalisations vers des Salons étrangers dès 1891. À cette époque, il ne possède quasiment aucune référence nationale hormis la Seconde Médaille enlevée en 1884 avec El dos de mayo. Toutefois, malgré son manque d’expérience et de références, il parvient à rivaliser avec les meilleurs peintres étrangers à Paris, Berlin, Munich, Venise, Vienne, etc. où, à leur contact, son esthétique se désolidarise progressivement du canon espagnol. Elle s’enrichit et, d’une certaine manière, se modernise en assimilant les techniques et les courants les plus récents. Sorolla élabore une peinture de plein air, lumineuse et dynamique, qui lui offre de nombreux succès à l’extérieur mais qu’il ne parvient pas à faire triompher à Madrid.

À ce titre, le sort réservé à son tableau Cosiendo la vela, une scène de pêcheurs mise en lumière à la manière de Renoir, est éloquent. Cette peinture

54. Anonyme, “titre inconnu”, El Diario de Barcelona, Barcelone, 1890. « Lors du dernier concours, la distribution des prix fut un jeu de copains et de coquins, une chose semblable aux goûters de Carabanchel, car celui qui poussa le plus fort obtint plus que les autres. »

conquiert les premiers prix à Vienne et à Munich, en 1897 et 1898, avant de rejoindre les collections du Musée d’Art Moderne de la ville de Venise. Mais l’année suivante, à Madrid, elle ne décroche pas la récompense escomptée. Dans La Ilustración Española y Americana, la principale revue d’information illustrée, l’historien et archéologue José Ramón Mélida (1856-1933) tente d’expliquer ce paradoxe de la façon suivante : « En suma es demasiado valiente y demasiado técnico ese género de pintura para la masa común del público español. En el Salón de París del pasado año gustó mucho, y se comprende, porque cuadros de esta tendencia son allí muy corrientes. »55 Un tel jugement témoigne du décalage de l’Espagne sur sa voisine. Alors, si Sorolla porte haut les couleurs de l’Espagne en dehors de ses frontières entre 1890 et 1900, c’est au prix d’une forme de transgression du modèle académique espagnol. Tandis que sa peinture perce dans les capitales étrangères, elle implique à Madrid une rupture trop brutale avec la période écoulée. Cela explique, au moins en partie, qu’aux Expositions Nationales de 1897 et de 1899, les jurys successifs lui refusent obstinément la Médaille d’Honneur. On doit rappeler ici l’influence de la famille Madrazo sur l’ensemble du système des Beaux-Arts. Les Madrazo sont une dynastie d’artistes académiques dont les membres les plus éminents occupent des positions clés tout au long du XIXe siècle. José de Madrazo (1781-1859), le patriarche, avait été l’élève du Français Jacques Louis David (1748-1825). Il importa le classicisme en Espagne et occupa des charges importantes à la cour et dans les principales institutions officielles. Un de ses fils, le peintre Federico de Madrazo y Kuntz (1815-1894), est l’homme le plus influent de sa génération. Il est constamment réélu à la tête de l’Académie des Beaux-Arts de San Fernando de 1866 à 1893, et siège régulièrement au sein du jury de l’Exposition Nationale. Son frère Luis (1825-1897) est également membre de ce jury en 1881, 1884, 1887 et 1892.56 Enfin il faut préciser, avant de poursuivre, que les deux dernières éditions de l’Exposition Nationale du XIXe siècle sont organisées sous les mandats de deux chefs du gouvernement conservateurs, Antonio Cánovas del Castillo, assassiné en août 1897, et Francisco Silvela (1843-1905). On se demandera alors, dans la suite

55. José Ramón Mélida, “La Exposición Nacional de Bellas Artes”, La Illustración Española

y Americana, Madrid, 22/05/1899. « Au bout du compte, ce genre de peinture est trop

audacieuse et technique pour la majeure partie du public espagnol. Au Salon de Paris de l’année passée il plut beaucoup, et cela se comprend, car des tableaux de cette tendance y sont très fréquents. »

de ce chapitre, si des critères non artistiques et liés au contexte politique, n’ont pas contribué à provoquer ce double échec de Sorolla.

Dès la première édition de l’Exposition Nationale, qui remonte à 1856, l’article VI du règlement prévoit la possibilité de distinguer une œuvre exceptionnelle par une Médaille d’Honneur, un prix supérieur à tous les autres c’est-à-dire aux médailles de première, deuxième et troisième classe ainsi qu’aux mentions. En dehors de cette hiérarchie de prix, des décorations civiles peuvent également être remises. La Médaille d’Honneur serait décernée par un collège extraordinaire formé par les jurys des trois sections réunies, c’est-à-dire celles de Peinture, Sculpture et Architecture.57 Depuis la création du concours en 1854, la plus haute distinction espagnole a été remise à trois artistes : un peintre, un architecte et un sculpteur. Francisco Pradilla l’avait obtenue à l’issue de l’Exposition Nationale de 1878, pour son tableau historique Doña Juana la Loca. L’architecte Juan de Madrazo y Kuntz (1829-1880) l’avait reçue à titre posthume en 1881 pour l’ensemble de son œuvre. Enfin, elle a été attribuée au sculpteur Mariano Benlliure (1862-1947) en 1895, pour sa statue de l’écrivain basque Antonio Trueba (1819-1889) inaugurée la même année à Bilbao.Dans la première grande étude consacrée à l’Exposition Nationale espagnole, Bernardino de Pantorba rappelle que l’attribution d’une récompense aussi convoitée ne se fit pas toujours sans heurts.58 En 1881, l’influence de Federico de Madrazo, le directeur de l’Académie de San Fernando, changea le sens du scrutin en faveur de son plus jeune frère Juan, qui venait de mourir. L’échec du peintre José Casado del Alisal (1832-1886) souleva une polémique qui eut des répercussions jusqu’au parlement. Car le député républicain Emilio Castelar (1832-1899) demanda à l’État d’acheter La leyenda del rey Monje, le tableau présenté par Casado del Alisal et obtint finalement gain de cause.59 On verra que dans le cas de Sorolla, la conquête de la Médaille d’Honneur est à la fois lente et compliquée. Jalonnée de rebondissements et de polémiques, elle prendra la tournure d’une affaire d’État et sera même à l’origine d’une importante réforme du concours.

57. Reglamento para las Exposiciones de Bellas Artes, Madrid, Imprenta del Colegio

Nacional de Sordomudos y de ciegos, 1897.

58. Bernardino de Pantorba, Historia y crítica de las Exposiciones de Bellas Artes celebradas

en España, Madrid, Jesús Ramón García Rama, 1980, pages 34-35.

À partir de 1897, Sorolla ne peut donc plus prétendre qu’à la Médaille d’Honneur car il a déjà remporté deux Médailles de Première Classe. Deux ans auparavant, le sculpteur Mariano Benlliure a obtenu la Médaille d’Honneur de sorte que, exalté par ce triomphe d’un Valencien, l’écrivain Vicente Blasco Ibáñez réclame la récompense pour son autre compatriote.

Pero a Sorolla aún le faltan aquí en España grados que ganar. Tiene todas las medallas; es teniente general del arte, pero le falta el último entorchado, el de capitán general, el que se da por méritos excepcionales: la medalla de honor, que hasta ahora sólo la han alcanzado Pradilla y Mariano Benlliure, y a la que con justicia aspira Sorolla.60

Blasco oublie sans doute volontairement de citer Juan de Madrazo dont le prix avait été demandé et obtenu par les dirigeants conservateurs. À la fin du mois de mars 1897, le jury présidé par Rafael Conde y Luque (1835- 1922), sénateur conservateur de Cordoue, procède pour la première fois à un vote pour attribuer la Médaille d’Honneur à Sorolla. Il présente onze tableaux qui révèlent plusieurs facettes de son œuvre : le réalisme social, Trata de blancas ; le paysage, El cabo de San Antonio ; le naturalisme lepagien, Ordeñando la cabra et La parra, ainsi que des portraits individuels et de groupe : Mis chicos, La Pepiya, María Guerrero, Amalia Romea, Luis Simarro Lacabra, Señora de Simarro et Una investigación peint dans le laboratoire madrilène du docteur Simarro.61 Entouré de ses confrères, le scientifique manipule des échantillons sous une lumière artificielle qui enveloppe la scène dans une atmosphère orangée. Ce tableau rappelle le portrait du scientifique français Louis Pasteur (1822-1895) par le peintre finlandais Albert Edelfelt (1854-1905).62 Pasteur est représenté en plein travail, dans son laboratoire de la rue d’Ulm où il met au point le vaccin anti-

60. Vicente Blasco Ibáñez, “Crónica artística. Sorolla”, El Pueblo, Valence, 5/06/1897. « Mais ici, en Espagne, il reste encore à Sorolla quelques grades à conquérir. Il a toutes les médailles; il est général en chef de l’art, mais il lui manque le dernier galon, celui de maréchal, celui qui récompense des mérites exceptionnels: la médaille d’honneur, que seuls Pradilla et Mariano Benlliure ont obtenu jusqu’à maintenant, et à laquelle Sorolla aspire en toute justice. »

61. Trata de blancas, 166’5x165, Madrid, MS, 1894. El cabo de San Antonio. Ordeñando la cabra. La parra. Mis chicos, 140x228, Madrid, MS, 1897. La Pepiya. María Guerrero,

131x120’5, Madrid, Musée National du Prado, 1897-1906. Amalia Romea, 107’5x150’5, Collection particulière, 1897.

rabique. Au Salon de 1886, le jeune peintre s’était vu remettre la Légion d’Honneur pour ce tableau.

Lors de l’Exposition Nationale de 1897, le jury comprend quatre sections, Peinture, Scultpure, Architecture et, pour la première fois, Arts décoratifs. Le Valencien n’est pas le seul candidat à la récompense. La concurrence du sculpteur catalan Agustín Querol (1860-1909) réduit de facto les chances de ces deux candidats de même âge et de valeur égale. Le sculpteur formé à Barcelone a effectué un parcours similaire à celui de Sorolla. Ensemble, ils ont été pensionnaires de l’Académie Espagnole de Rome avant de regagner Madrid la même année, en 1890. Sept ans plus tard, leurs palmarès sont comparables. Car même si Sorolla a connu une réussite internationale supérieure à celle de Querol, ce dernier a reçu davantage de commandes publiques, à Madrid. Il réalisa, par exemple, le groupe monumental La gloria y los pegasos qui surplombe la façade de l’ancien Ministère de l’Économie qui abrite aujourd’hui le Ministère de l’Agriculture. Paradoxalement, c’est sans doute la qualité même des deux candidats qui conduit six des seize jurés, dont Francisco Pradilla et Mariano Benlliure, à ne pas attribuer la Médaille d’Honneur. Toute la section de Peinture, à l’exception de Modesto Urgell (1839-1919), vote pour Sorolla. Il récolte donc six suffrages mais n’en obtient aucun des sections de Sculpture et d’Architecture. Querol réunit quatre voix seulement, de sorte que la récompense n’est pas attribuée cette année-là. Le rapport du jury conservé aujourd’hui dans les