2. Place des réseaux de santé dans les parcours de soins
2.3 Discussion sur l’organisation des réseaux de néphrologie
2.3.4 L’évaluation
RNB RENIF NEPHRONOR TIRCEL
Plan personnalisé
de soin x x
Indicateurs de
suivi par patient En cours En cours x
Indicateurs de
suivi collectif x x x x
Tableau 8 d : Indicateurs de suivi des réseaux de néphrologie en 2009
La traçabilité des prestations et actions proposées au sein du parcours de soins de chaque
patient est très variable, en fonction des réseaux. Les réseaux inter hospitaliers utilisent
légitimement les dossiers hospitaliers pour le suivi réalisé par le réseau. Les réseaux
Ville-Hôpital ont créé leurs propres outils de traçabilité.
Le réseau RENIF propose aux patients un carnet de suivi en version papier, des informations
générales et des fiches vierges de consultation ou d’analyses biologiques à remettre au
praticien lors des rendez-vous en lien avec le suivi préconisé par le réseau.
Le réseau TIRCEL propose un dossier médical partagé électronique interactif à destination
des professionnels (hospitaliers comme libéraux, toutes professions confondues) et
imprimable sur demande des patients. Le dossier médical partagé, outil de la télémédecine,
permet les échanges entre professionnels et centralise tous les documents relatifs au suivi
médico-social du patient sur des fiches métier: comptes-rendus médicaux, biologie,
consultations infirmières et diététiques, messagerie, pièces jointes (scanners de radiologie par
exemple). La base de données permet, depuis l’origine du réseau, de bénéficier aussi de
statistiques quantitatives et qualitatives (suivi de l’évolution des patients par individu ou
groupe d’individus, avec courbes de tendance).
Les autres réseaux utilisent des supports informatiques à usage des coordinations pour la
rédaction des rapports d’activité médico-économiques, selon les modèles des Agences
Régionales de Santé. Ils ont toutefois pour projet de développer des logiciels en vue
d’analyses spécifiques sur l’évolution de la maladie rénale de leurs patients.
Résumé et perspectives :
L’usage de la télémédecine est aujourd’hui démocratisé et largement diffusé, toutefois avec
multitude de logiciels non compatibles entre eux. Les réseaux doivent disposer de logiciels de
suivis longitudinaux des parcours de soins avec une traçabilité de tout acte ou prestation
réalisée directement ou indirectement par les professionnels de santé pour chaque patient.
L’avantage de la télémédecine est d’avoir les données du dossier médical partagé sur le Web
et d’éviter la multiplicité de dossiers papier ou de supports informatiques disparates et non
synthétiques.
Le dossier médical partagé doit pouvoir s’imprimer partiellement ou en totalité, afin d’être
présenté à la demande du patient par un médecin ou par le professionnel référent du
parcours de soins. Une synthèse annuelle devrait être systématisée et remise au patient, avec
la périodicité des différentes consultations ou analyses préconisées pour l’année à venir. A ce
jour, cette pratique est possible pour un seul réseau mais non systématique.
Si les réseaux néphrologiques procèdent de façon similaire dans la recherche d’identification
puis de classification de la pathologie à partir de la classification internationale, la déclinaison
des prestations en Parcours de Soins diffère selon les réseaux. Certains mettent l’accent sur
l’éducation thérapeutique (RNB, NEPHRONOR), d’autres sur le Plan Personnalisé de soins
(RENIF, TIRCEL). On retrouve ces différences dans l’évaluation. L’éducation thérapeutique
ne permet souvent qu’une évaluation quantitative sur le nombre de participants, alors qu’un
Plan Personnalisé de Soins permet une analyse quantitative et qualitative des suivis
thérapeutiques.
A partir des présentations de seulement quatre réseaux, issus de la même discipline, nous
remarquons des fonctionnements hétérogènes les rendant peu comparables entre eux. Les
parcours de soins sont différents permettant difficilement des comparaisons sur leur efficacité,
par défaut d’éléments opposables. Nous pouvons nous demander si ces différences de
pratiques relèvent seulement d’un contexte régional, géographique, populationnel, … et si
l’accès à une prise en charge en réseau répond à un besoin médico-social clairement identifié
ou à des volontés individuelles expérientielles, malgré des statuts et des financements validés
par les Agences Régionales de Santé.
Il conviendra donc de se référer aux études nationales ou internationales publiées sur l’impact
des parcours de soins en néphrologie et l’association de thérapeutiques médicamenteuses et
éducationnelles pour argumenter la poursuite des expériences en réseau (hormis deux
publications du réseau TIRCEL).
Les réseaux rédigent un rapport d’activité annuel selon un modèle national pour l’ensemble
des réseaux tenant au fonctionnement des instances, à l’activité de formation professionnelle
et au relevé économique des différentes prestations de dérogations tarifaires. Les Agences
Régionales de Santé ont élaboré un tronc commun d’évaluation pour quelques spécialités,
comme la gérontologie ou la diabétologie. La néphrologie n’est pas retenue comme spécialité
prioritaire et ne bénéficie donc pas d’un tronc thématique national permettant une lecture
comparative entre chaque réseau de néphrologie.
Ainsi les réseaux ont développé une autoévaluation associant les critères quantitatifs et
qualitatifs. Cependant les indicateurs de suivi par thématique ne sont pas les mêmes d’un
réseau à l’autre. Lors de l’enquête, chacun a présenté des illustrations originales, à titre de
projet ou de retour d’expérience, mais aucun réseau n’a pu présenter une enquête de
pertinence ou d’opportunité globale en lien direct impliquant directement la médecine de
ville. De plus les données statistiques par patient ou groupe de patients sont souvent
inexistantes, ne permettant pas d’argumenter la pertinence d’un Plan Personnalisé de Soins.
Le réseau TIRCEL complète le rapport d’activité à destination de l’Agence Régionale de
Santé par un rapport d’évaluation thématique incluant l’impact de la prise en charge en réseau
sur la fonction rénale depuis 2007. Ce complément thématique évalue ainsi l’impact de
l’accompagnement pluridisciplinaire et bio-clinique pour les patients insuffisants rénaux
chroniques. Une étude interne poursuivie annuellement prouve l’impact positif de la
consultation diététique(138) sur la consommation en sel. Cette étude nécessiterait d’être
complétée par une évaluation de la tension artérielle, du recueil des prescriptions
médicamenteuses anti-hypertensives et de l’observance des patients.
Deux études, datant de 2006(122) et 2010(123) montrent un ralentissement de la progression
de la maladie rénale chronique pour les patients bénéficiant d’un parcours de soins organisé
par le réseau TIRCEL. Ces résultats sont conformes aux études réalisées par d’autres équipes
italienne ou américaine(12) sur le ralentissement de la progression de la maladie rénale
chronique, loin toutefois des résultats issus de la politique de soins anglaise(27) relative au
parcours de soins spécifique de la maladie rénale.
Résumé et perspectives :
Le modèle de rapport annuel des ARS n’est ni représentatif de la spécialité néphrologique, ni
même représentatif du suivi des maladies chroniques. Un volet thématique, créé à partir des
cibles thérapeutiques définies dans les recommandations pratiques (1.1.2) est indispensable
pour compléter les critères généraux et comptables.
Nous proposons une définition commune de la file active selon le nombre de patients
adhérents, ayant bénéficié d’au moins une prestation du réseau et ayant fait l’objet par la
coordination du réseau d’une synthèse annuelle du parcours de soins proposé et réalisé. Il
conviendra d’identifier, en plus de la file active, le nombre de patients adhérents mais n’ayant
pas bénéficié d’un suivi au cours de l’année et d’en identifier les causes. Cette analyse
chronophage nécessite d’être répertoriée pour la poursuite des parcours de soins de chaque
patient.
Enfin, chaque réseau doit être en capacité de présenter, selon la classification internationale
de l’insuffisance rénale chronique, une évaluation qualitative et quantitative. L’activité des
réseaux sera évaluée à partir de critères bio-clinique et thérapeutiques d’évolution de la
fonction rénale mais aussi à partir de critères de qualité de vie ressentie et d’autonomie
attendue. A ce jour, aucun réseau n’a développé à part égale ces deux axes d’évaluation.
Les propositions faites ci-dessus pour l’évolution des réseaux de néphrologie répondent aux
recommandations de la CNAM et la DHOS de 2007 et semblent réalisables au regard du
retour d’expérience des quatre réseaux de santé enquêtés. Il s’agit de valoriser et d’harmoniser
les pratiques qui fonctionnent le mieux dans chacun des réseaux.
Dans le document
Parcours de soins des patients atteints de maladie rénale chronique : place et éthique des réseaux de santé ?
(Page 102-106)