• Aucun résultat trouvé

De juger l’attitude de sa mère à son égard et d’en démontrer la raison

II – Enonciation : La polyphonie dans le Passé décomposé :

4- De juger l’attitude de sa mère à son égard et d’en démontrer la raison

(Ext. 4)

« Le monologue intérieur, lui, s’émancipe non seulement de l’interlocution, puisqu’il prétend restituer le flux de conscience du sujet, son discours intérieur, mais encore du narrateur ». (3)

1- Ibid. p 30

2– Le passé décomposé. op. cité. P. 39

Il en résulte que tout locuteur usant dans le monologue autonome défit toutes les lois et les contraintes de la littérature, se faisant, le monologue autonome peut convoquer une situation d’interlocution sans ayant recours à un interlocuteur ( ce dernier pouvant être virtuel ou bien narratif (lecteur) comme le signale très bien l’ouverture du roman lorsque Zoheir s’adresse à un «Vous » qu’il assimile aux « gens normaux » et qui n’hésite même pas d’en deviner les propos :

« Mais que connaissez vous de la honte, vous ? vous qui portez un nom qui vous donne le droit d’exister en tant qu’individu dans la société ». (1) ; « Quel scandale que de glorifier d’une pareille infamie ! Diraient les respectables personnes ». (2)

Ce pouvoir acquis par le monologue autonome octroie à Zoheir le rôle d’une « voix interne auquel auteur ou narrateur cède temporairement la place ». (3)

Céder la place c’est aussi rester passif, désormais le narrateur anonyme se garde et se prive d’intervenir dans le discours de Zoheir et se contente de l’écouter monologuer et réfléchir sur son propre discours d’où l’utilisation de la technique de la mise en abyme et même si l’écriture du journal intime est coupée et fragmentée il n’en demeure pas moins qu’elle représente le foyer même de l’enchâssement du discours où une seule séquence est fractionnée en plusieurs événements espacés dans le mouvement de la narration mais qui finissent à trouver union au fur et à mesure de la progression narrative.

202 - Le passé décomposé. Op ; cité p5

2– Ibid . p.5

Monologue inséré :

Dans une narration menée par deux types de narrateurs (extradiégétique / intradiégétique) il n’existe pas tout à fait un monologue autonome, se dernier peut être inséré dans la narration introduit par le sujet monologuant ou par le narrateur anonyme mais dans ce cas précis le monologue de Zoheir et toujours précédé d’un « blanc narratif. »

Exp : Narrateur anonyme :

« Enfin / Il avait trouvé Sara ! Et sa vie, allait-elle changer de cours pour autant ?… « Zoheir alla chercher de quoi écrire et se rassit ». (1) P. 28.

(2) P. 29

Zoheir narrateur personnage»

« Ce soir là, j’ai compris que quelque chose avait changé en moi. Je me sentais un autre homme. J’avais enfin rencontré la femme dont j’avais rêvé ma vie durant : ma mère ! » . (3) P.29

Concernant les différents « blancs narratifs » qui précédent à chaque fois le monologue de Zoheir, nous sommes plutôt tentés de leur attribuer le statut de pause narrative (telle la description) qui prépare le lecteur au futur monologue en le transportant d’un espace textuel à un autre (de la narration (récit) à l’énonciation (discours monologué).

Par ailleurs, en changeant d’espace et de lieu textuel s’effectue au changement de type de focalisation (focalisation externe (archi-narrateur) à la focalisation interne (narrateur personnage).

1– Le passé décomposé op. cité. P. 28.

2 – Ibid. P. 29

3– Ibid. P. 29.

Le monologue intérieur nécessite donc « un décrochage énonciatif » par les ruptures qu’il provoque au sein de la narration et invite par la même occasion le lecteur à une « lecture interactive ». (1) (Bakhtine) puisque le monologue inséré opère

une discontinuité dans le mouvement événementiel en obligeant le lecteur à se situer dans sa lecture en procédant à un repérage narratif (qui parle ?).

b – 2 – Mise en abyme dialogale :

Hormis le monologue intérieur figurant dans le journal intime de Zoheir, tout le texte du Passé décomposé s’articule sur cette forme du discours qui nécessite plus d’un interlocuteur pour se réaliser, appelée « dialogue ».

« En effet, le sens d’un énoncé ne peut souvent être véritablement compris qu’en fonction de la situation d’énonciation ». (2)

Si dans le monologue intérieur, l’énonciateur peut se passer d’un interlocuteur, le dialogue lui fonctionne sur cette interactivité du langage, l’échange énonciatif est indispensable, à côté du « je » du locuteur apparaît un « tu » de l’interlocuteur et dans ce cas il n’est plus question d’une référence « unique » mais plutôt plusieurs (tu / vous).

« Par opposition, le dialogue met l’accent sur l’allocution, se réfère abondamment à la situation allocutive, joue sur plusieurs cadres de référence simultanément et se caractérise par la présence d’éléments métalinguistiques et la fréquence des formes interrogatives ». (3)

Le dialogue est donc une forme très riche du discours elle admet plusieurs interlocuteurs, son pouvoir de référence s’étend au delà du simple locuteur et fait appel à d’autres « éléments métalinguistiques » (en effet, il (dialogue) peut comporter des marques de l’oralité comme le langage « argotique ») et la forme interrogative propre à l’énonciation est assez évidente dans le cadre, (style) « dialogique » ;

1

– Cité par T. Todorov in M. Bakhtine, le principe dialogique, Paris, Seuil (poétique). 1981.p147

2– Y. Reuter :Introduction à l’analyse du roman éd. Nathan Coll : lettre sup. 2èmeédition. Paris 2000. P. 35.

3 – O. Ducrot / J. Schaeffer. Nouveau dictionnaire encyclopédique des sciences du langage. Op. cité. Pp. 664-665.

« Comment as-tu fait pour… pour savoir tout ça ? ».p18 « je T’ai retrouvée grâce à la bonne vieille Kheira. Tu dois t’en douter !… Sa petite fille était ton élève en classe terminale ». (1)

Les marques de l’oralité dans cet exemple se justifient dans la redondance du « pour » comme pour marquer une pause causée par la forte émotion que l’énonciateur (Najet) éprouve au moment concerné, les trois points font aussi officie de pause où l’archi-narrateur préfère ne pas s’introduire afin de ne pas diminuer la densité émotive dont les propos des énonciateurs sont chargée, d’autre fois il n’hésite pas à commenter le temps écoulé entre chaque propos, exp. :

« Il respira un bon coup avant de poursuivre presque avec peine ». (2)