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Jeux et réseaux d’acteurs : retour sur l’histoire conflictuelle de la

concertation en amont de la RNM

Sommaire

1. 1997-1999 : une phase de pré-concertation menée par l’APMR en vue de l’approbation du projet de RNM ...132

1.1 La commune de Saint-Paul, médiateur d’un conflit naissant ... 133 1.2 Réglementation de la pêche aux capucins nains : Emergence d’un conflit interne aux pêcheurs à pied... 135

1.3 Une « Commission Pêche » pour renouer le dialogue avec les pêcheurs à pied ... 137

2. 2000-2003 : La DIREN au cœur de la concertation pour l’élaboration du décret de RNM...139

2.1 Une médiation environnementale au service du projet de RNM ... 140 2.2 Le projet d’insertion des pêcheurs à pied : une initiative prometteuse soumise aux dysfonctionnements de gouvernance... 142

2.3 La réglementation de la pêche aux capucins : la saga des arrêtés ... 144

3. 2004-2007 : L’histoire douloureuse de la signature finale du décret de la RNM de La Réunion ...147

3.1 Trois Sages pour arbitrer et finaliser le projet de décret... 147 3.2 Conflits et problèmes de gouvernance : 3 ans de délai pour aboutir à la validation officielle du décret de RNM... 148

3.3 L’après-décret : un nouveau défi à relever ... 152

Introduction

La compréhension des opinions et perceptions actuelles des différents usagers et l’analyse de l’acceptation sociale de la RNM ne peuvent être correctement abordées sans opérer un retour sur l’histoire des négociations ayant concouru à la mise en place de l’aire protégée. De 1997, date de création de l’Association Parc Marin La Réunion (APMR), à 2007, date de signature du décret instaurant la RNM, les alliances et les conflits se cristallisent autour d’acteurs et d’évènements décisifs. Ces conflits, non résolus pour certains, pour d’autres de manière insatisfaisante, entretiennent de vieilles rancunes dans la représentation des acteurs et alimentent leurs stratégies et positionnements actuels. Ainsi sont-ils souvent révélateurs d’une acceptation sociale inaboutie.

Ce chapitre a donc pour vocation de retracer l’historique de la concertation en amont de la création de la RNM de La Réunion. Inspiré d’un corpus documentaire composé d’articles de presse, de documents d’archives collectés à la DIREN mais également d’entretiens auprès d’acteurs clé63, l’approche n’a pourtant pas la prétention d’être exhaustive. Les décisions et jeux d’acteurs ne peuvent en effet être exposés dans toute leur complexité et leur diversité dans la mesure où l’auteur

63 Trois acteurs clé ont pu être rencontrés. Il s’agit d’Alain Barcelo, directeur de l’APMR de 1997 à fin

2003, d’Anne Lieutaud, chargée du milieu marin à la DIREN de Septembre 1999 à Juin 2005 et d’Emmanuel Tessier, directeur de l’APMR puis du GIP-RNMR à partir de Février 2006.

n’a pas réellement vécu l’ensemble de la période 1997-200764. C’est pourquoi la présentation des évènements effectuée dans ce chapitre est à nuancer. Elle représente un angle de vue et d’analyse propre à l’auteur qui, pour certains acteurs ayant effectivement participé et vécu ces évènements, peut sembler incomplet, simpliste voire erroné. Ce chapitre s’efforce cependant de rester au plus proche des faits.

La période 1997-2007 a volontairement été scindée en trois. La première phase s’étend de 1997 à 1999 inclus et couvre la période de pré-concertation sous la responsabilité de l’APMR, ayant pour objectif l’approbation du dossier de prise en considération du projet de RNM par le Conseil National de la Protection de la Nature (CNPN). La seconde phase débute en 2000 alors que la DIREN reprend la responsabilité du projet et s’étend jusqu’à fin 2003 au moment de l’achèvement de la médiation environnementale. La troisième et dernière phase couvre les années 2004 à 2007-2008 et retrace les longues années de validation du projet de décret jusqu’à sa signature finale. Chacune de ces périodes est synthétisée par une frise chronologique retraçant les principaux évènements l’ayant ponctuée. Cette frise propose une mise en parallèle des aspects relatifs à la gouvernance du projet, des actions et initiatives engagées et des périodes conflictuelles qui en découlent.

1. 1997-1999 : une phase de pré-concertation menée par

l’APMR en vue de l’approbation du projet de RNM

Le 17 juillet 1997, l’Association du Parc Marin de La Réunion (APMR) est officiellement créée. A compter de cette date et jusqu’à novembre 1999, l’APMR est porteur du projet de création de la RNM65. Pour constituer le dossier de prise en considération de ce projet, première étape dans le processus de création de la RNM, elle lance dès 1998 avec la DIREN et la sous-préfecture de Saint-Paul, quatre groupes de réflexions thématiques permettant une large consultation des acteurs.

Un groupe sur l’analyse socio-économique et l’insertion sociale piloté par la sous-préfecture. Avec le soutien de la Commission Locale d’Insertion de Saint-Paul, cette dernière commande une étude ciblée sur les possibilités de ré-insertion des pêcheurs à pied et des chasseurs sous-marins pratiquant des pêches de subsistance (Assouline, 2000) ;

Un groupe sur l’harmonisation réglementaire, piloté par la DIREN. Ce groupe est chargé de faire l’inventaire des réglementations existantes applicables à la zone d’étude et de proposer une amélioration et/ou une modification des règles en vigueur ;

Un groupe sur l’écosystème et la gestion intégrée des zones côtières, piloté par la DIREN. Dans ce cadre, un inventaire des connaissances disponibles sur le milieu récifal a été réalisé à partir duquel une cartographie de la sensibilité des écosystèmes marins a été conçue (ARVAM, 1999) ;  Un dernier groupe sur l’analyse des techniques de pêche et gestion de la ressource piloté par l’APMR.

Le travail de ce groupe a été l’occasion de rencontrer les pêcheurs à pied, les chasseurs sous- marins, les pêcheurs embarqués ainsi que les ichtyologues et les administrations en charge de la gestion de la ressource.

Aux dires d’A. Lieutaud, ces travaux ont représenté « les prémices de la concertation ». Ils n’abordaient cependant pas la question de la délimitation des réserves sauf pour le groupe sur l’écosystème et la gestion intégrée des zones côtières dans lequel les enjeux écologiques ont été identifiés sous forme de zones plus ou moins vulnérables et donc à conserver de manière prioritaire. Cette étude constitue d’ailleurs la proposition des scientifiques relative au zonage de la future RNM.

Une synthèse des réunions de ces groupes, réalisée par l’APMR, constate « l’accord de tous les

invités, sous des conditions variables, à la réalisation des Réserves Naturelles ». Seuls les membres du

64 L’auteur est présent à La Réunion depuis Juillet 2004

65 Rappelons que le statut de Réserve Naturelle Marine a été retenu après avoir longtemps été discuté

Collectif des Pêcheurs Traditionnels66 (CPT) affichent une opposition. En témoigne leur abandon de l’une des réunions en signe de contestation. L’APMR poursuit en disant que « si les membres du CPT

initient une démarche en interne pour que les pêcheurs s’engagent à suivre la réglementation qui sera mise en place, pour peu qu’elle leur accorde une place, la concertation butte toujours sur la mouvance du CPT. Sa composition n’est toujours pas connue, ses demandes précises ne sont pas encore formalisées (…) ».

Ce collectif est au cœur des débats qui ponctuent cette phase de pré-concertation. Pour tenter de résoudre ce conflit, trois initiatives sont lancées durant cette période : une médiation organisée par la commune de Saint-Paul, la réglementation de la pêche aux capucins et la création d’une commission pêche. Le retour historique sur ces initiatives permet d’une part d’analyser la stratégie d’actions du CPT et, d’autre part, de révéler des dysfonctionnements en termes de gouvernance du projet de création de la RNM, dysfonctionnements qui contribuent à l’ancrage du conflit avec les pêcheurs à pied.

1.1 La commune de Saint-Paul, médiateur d’un conflit naissant

Avec la création de l’APMR en juillet 1997, l’arrêté préfectoral de 1992 instituant le Parc Marin devient une réalité. Afin de veiller au respect de la réglementation en vigueur67, neuf écogardes sont recrutés le 1er avril 1998. Dès juin 1998, une partie de leur mission consiste à patrouiller sur le littoral pour surveiller les pratiques au sein du Parc Marin.

Ce rôle de surveillance dans le lagon marque le début d’un conflit ancré avec les pêcheurs à pied. En l’absence d’un système de contrôle effectif, le Parc Marin est, jusqu’alors, considéré par ces derniers comme inexistant. Malgré l’interdiction de la plupart des pêches à pied dans les lagons, les pratiques des pêcheurs n’ont aucunement changé, d’autant plus que l’arrêté de 1992 est jugé par ces derniers comme arbitraire et incohérent, puisque décidé sans aucune concertation.

La création de l’APMR et le début des contrôles font donc rapidement naître des tensions, notamment à l’occasion des premières interpellations. Il faut dire que l’arrêté de 1992 est mal connu par les pêcheurs des suites d’un manque de diffusion et de communication. En outre, le rôle des écogardes est ambivalent puisqu’ils se voient à la fois chargés de la sensibilisation et de la surveillance. Non assermentés, ils ne disposent de ce fait d’aucun pouvoir de sanction et font donc appel aux services de police pour sanctionner les infractions. Les pêcheurs les perçoivent donc comme « des

maquereaux » ou comme « les yeux des gendarmes » dixit A. Barcelo, et cette situation peu claire nuit

fortement à l’image de l’APMR.

Le conflit se cristallise autour de l’interpellation de plusieurs pêcheurs en infraction début juin 1998. Après s’être vus dresser des procès-verbaux, confisquer leurs matériels de pêche et leurs prises, les pêcheurs décident d’organiser un barrage sur la route RN1 de La Saline en signe de contestation (Annexe M1). Outre la levée des sanctions, leurs principales revendications concernent la reconnaissance de l’existence d’une pêche traditionnelle pratiquée depuis des deux voire trois générations et la nécessité de revoir la réglementation pour autoriser sa pratique. Souffrant d’un manque de légitimité, les pêcheurs décident de se structurer sous la forme d’un Collectif de Pêcheurs Traditionnels (CPT). Créé début juillet 1998, ce CPT se veut un organe représentatif de l’ensemble des pêcheurs à pied des communes de Saint-Paul et Trois-Bassins dont l’objectif est d’obtenir un statut officiellement reconnu pour ces derniers et de lancer une révision de l’arrêté de 1992 en concertation avec l’ensemble des acteurs (Annexe M2). Mené par Mélanie Ringuin, le CPT fédère

66 Ce collectif est entièrement composé de pêcheurs à pied. Pour défendre leur activité, ceux-ci se sont fait

appelés pêcheurs traditionnels. La plupart revendiquent en effet l’aspect traditionnel de la pêche à pied réunionnaise. C’est pourquoi les expressions « pêcheur à pied » et « pêcheur traditionnel » sont souvent assimilée dans ce chapitre.

67 Les limites géographiques du Parc Marin s’étendent du Cap La Houssaye à la Pointe de Boucan Canot,

entre le Port de Saint-Gilles les Bains et la commune de Trois-Bassins jusqu’à l’isobathe 50m. En outre, les récifs coralliens de Saint-Leu, Saint-Pierre et Petite Ile sont également en réserve de la laisse de haute mer au front récifal. L’arrêté de 1992 interdit toute activité de pêche professionnelle ou de plaisance dans ces réserves à l’exception de la pêche à pied à la ligne (sauf sur les barrières récifales). La pêche aux capucins nains peut faire également l’objet d’une autorisation ponctuelle des Affaires Maritimes, uniquement pour les pêcheurs professionnels.

trois associations de pêcheurs à pied déjà existantes : « Pêches et Traditions » menée par H. Sault et existant depuis 1991, l’ « Association de sauvegarde de la Pêche Traditionnelle » menée par G. Mamosa, l’ « Association des P’ti pêcheurs amateurs » menée par J-L Berfeuil. Ces deux dernières associations ont été créées à l’occasion de l’apparition de ces conflits, dans le but de fédérer la parole des pêcheurs. Dans le sud de l’île, il existe également trois associations. Il s’agit de l’association des « Petits pêcheurs amateurs de Saint-Pierre » menée par J-Y Aloyau, des « Pêcheurs Golet » et des « Pêcheurs artisans de La Réunion » menée par J-L Collongues. Enfin, une association est présente au Port. Il s’agit de « Mer et liberté ». Parmi ces associations, seules celles d’H. Sault et de J-L Collongues sont membres adhérents de l’APMR.

Face à l’émergence de ce conflit, deux initiatives visant à construire un dialogue avec les pêcheurs à pied se mettent en place.

Dans un premier temps, E. Gence, Président de l’association Action Ouest et administrateur de l’APMR dans le collège des adhérents, et M. Ringuin entament un premier travail de terrain auprès de l’ensemble des pêcheurs concernés par le projet de RNM. Ce travail de proximité vise à recueillir les revendications des dits pêcheurs dans le but de rédiger un document formel présentant une proposition de zonage, une réglementation de la pêche et du cheminement dans le lagon. Malgré un climat particulièrement tendu, E. Gence et M. Ringuin réussissent à organiser des rencontres entre les pêcheurs et les associations de protection de l’environnement (Vie Océane, SREPEN et Ecologie Réunion). Ces réunions témoignent d’une convergence de volontés à résoudre le conflit à travers le dialogue. E. Gence et M Ringuin parviennent ainsi à présenter un document signé de tous les pêcheurs, en accord avec les principes du colloque « Protection des lagons » de 1991 (cf. Chapitre 2). En outre, la Coordination des associations de pêcheurs traditionnels est-elle crée en tant qu’organe fédérant et représentant les intérêts de toutes les associations existantes. E. Gence en est le secrétaire et devient par ce biais le porte-parole des pêcheurs, à l’interface avec les décideurs.

En parallèle, la commune de Saint-Paul tente de se positionner en tant que médiateur. Le maire, Joseph Sinimalé, organise une série de réunions pour entamer un dialogue, jusqu’ici inexistant, avec les pêcheurs. Un courrier de ce dernier, daté du 21 août 1998, fait état des conclusions de ces réunions, qu’il défend auprès du préfet :

 Nécessité de faire un inventaire hiérarchisé des causes de dégradation du milieu ;  Revoir la réglementation de la pêche traditionnelle en concertation ;

Mettre en place, en attendant cette révision, des « jachères de coraux » afin de protéger certaines zones de toutes formes de fréquentation ;

 Elaborer des mesures d’insertion sociale pour les pêcheurs traditionnels ;

 Reconnaître officiellement le statut de pêcheur traditionnel par le biais, notamment, de leur représentation de droit au sein de l’APMR.

A la suite de ces réunions et devant une situation qui reste tendue, le maire met en place un

comité de travail pour poursuivre les rencontres, auquel l’ensemble des membres du CA de l’APMR

assiste à l’exception des services de l’Etat.

Cette initiative opère une première scission au sein de l’équipe chargée de la gouvernance du projet, scission qui voit s’opposer collectivités territoriales et organismes d’Etat (Préfecture, DIREN). Jusqu’alors, ces derniers envisageaient la pêche dans les lagons uniquement comme un acte de braconnage. Les pêcheurs à pied n’avaient donc aucune légitimité à être intégrés aux discussions concernant le projet de Réserve, leurs pratiques étant inévitablement vouées à disparaître. Les quelques tentatives de négociations entamées par le sous-préfet de Saint-Paul lors du barrage de route, sont d’ailleurs restées vaines. A l’inverse, les mandats électoraux des collectivités territoriales incitent les représentants à préserver la paix sociale et à conduire une politique de proximité auprès de ses administrés. Ces différences de perspectives, couplées aux divergences politiques au sein même de l’équipe de gouvernance du projet (CA de l’APMR) renforcent cette scission. Les élections régionales de mars 1998 font, en effet, basculer le Conseil Régional de droite à gauche (Parti Communiste Réunionnais), entraînant notamment la destitution de G. Cassirame du

poste de président de l’APMR et son remplacement par P. Berne. L’opposition à la tête de l’association vient donc renforcer les problèmes de gouvernance du projet, notamment pour le maire de Saint-Paul, d’appartenance RPR.

Selon A. Barcelo, le conflit entre les collectivités territoriales et l’Etat existe depuis le début du projet et porte également sur des considérations financières :

« Il y a toujours eu une opposition sur le projet entre les collectivités territoriales et l’Etat. La DIREN était perçue comme la structure qui donne des ordres mais qui ne met pas un centime. Sur l’accord initial de création de l’APMR, les collectivités (Région 50%, Département 25% et les 7 communes 25%, au prorata de l’importance du linéaire côtier) devaient prendre en charge le fonctionnement (environ 500 000€) et l’Etat devait prendre en charge l’investissement (environ 400 000€). Durant la première année, ça fonctionne. Mais au cours de la seconde année, l’Etat se retire car il considère qu’il ne devait prendre en charge que l’investissement initial durant la première année. Donc la deuxième année l’APMR n’avait aucun fond pour l’investissement et ça a été mal vécu par les collectivités territoriales. »

Malgré l’officialisation d’un dialogue autour du projet avec les pêcheurs, la structuration d’un collectif les représentant, la formalisation de leurs revendications et le soutien du maire de Saint-Paul, le conflit avec les pêcheurs à pied est loin d’être résolu. Le départ du préfet R. Pommies le 15 juillet 1998 et son remplacement tardif par J. Daubigny le 5 Août 1998, ralentit d’autant plus le processus de gestion de crise. Cependant, au cours de l’assemblée générale extraordinaire de l’APMR datant du 23 juin 1999, il est fait acte de la création du collège des pêcheurs non professionnels en tant que membre de droit et non plus simplement en tant que membre adhérent. Par ce biais, les représentants des pêcheurs à pied obtiennent deux voix délibératives en Assemblée Générale (AG), et une au Conseil d’Administration (CA). Un courrier du 13 Novembre 1999, signé des différentes associations à l’exception de celle de G. Berfeuil, et à destination de l’APMR, présente les résultats de l’élection de ces représentants (Annexe M3). J-Y. Aloyau, représentant de l’Association des Petits pêcheurs de Saint-Pierre, siègera à l’AG avec la représentante du CPT, M. Ringuin, tandis que cette dernière siègera également au CA. Ce changement de statut est une première victoire pour les pêcheurs à pied qui y voient une reconnaissance de la légitimité de leur activité. E. Gence, siège, de son côté, au CA en tant que représentant des membres adhérents, ce qui revient officieusement pour les pêcheurs à pied à détenir deux voix délibératives au CA.

1.2 Réglementation de la pêche aux capucins nains : Emergence

d’un conflit interne aux pêcheurs à pied

Pour répondre aux revendications des pêcheurs à pied, l’APMR entame des négociations pour réviser l’arrêté de 1992 et permettre une pratique encadrée de la pêche aux capucins nains. Cette pêche représente en effet l’archétype de la pêche traditionnelle réunionnaise. Pratiquée en équipe, elle s’effectue sur des fonds majoritairement sableux et consiste à emprisonner les poissons en refermant une senne de plage.

Ces négociations se font tout d’abord avec la Coordination des associations des pêcheurs traditionnels, menée par E. Gence. Rapidement, des différences de points de vue au sein même de cette instance, se font sentir. A. Barcelo témoigne :

« Les négociations ont été menées avec E. Gence, en présence des pêcheurs, en tant que représentant de la Coordination, mais en vain. E. Gence ne voulait pas aboutir. Plusieurs fois nous étions prêts à trouver une solution, mais il trouvait toujours un argument pour repousser l’accord. »

S’opère alors une scission au sein des associations de pêcheurs. En novembre 1998, J-L Berfeuil décide de quitter la Coordination afin de parvenir à trouver une issue au problème. L’APMR, via A. Barcelo, entame alors une négociation en direct avec J-L Berfeuil, sans que la Coordination ne soit au courant. En dehors de la réglementation, ce dernier est chargé d’évaluer le nombre de pêcheurs potentiels. En un mois, les deux hommes arrivent à tomber d’accord sur une

réglementation qui satisfasse les deux côtés (Annexes M4) et l’arrêté préfectoral est signé le 22 janvier 1999. Il vient remplacer l’arrêté de 1992 et autorise, à titre expérimental et pour la seule année 1999, la pêche aux capucins aux détenteurs d’une autorisation délivrée sous la forme d’une carte par la préfecture. La réglementation fixe les dates de pêche aux périodes de lune montante à savoir, du 14 février au 2 mars, du 15 mars au 1er avril et du 14 au 30 avril. La pratique doit se faire