• Aucun résultat trouvé

Le jeune âge cause de vulnérabilité

Dans le document L’âge en droit pénal spécial (Page 47-50)

Section 1 : L’âge, indice ponctuel de vulnérabilité

B- Le jeune âge cause de vulnérabilité

109. Minorité et vulnérabilité sont le plus souvent alternatives, cependant il est des cas où le recours à la vulnérabilité sera possible y compris pour le jeune âge. La vulnérabilité est rarement alternative à la seule minorité, le plus souvent elle se trouve énoncée après une référence à la minorité de 15 ans, et dans certains cas le législateur ne parle que de vulnérabilité en raison de l’âge, voire que de vulnérabilité.

1 V. Infra

48

1- Vulnérabilité et minorité de 15 ans

110. Tout d’abord, dans les travaux préparatoires du Code pénal, il est énoncé que la nouvelle cause de vulnérabilité « vise nécessairement un âge supérieur à 15 ans »1. En effet, en

deçà la circonstance aggravante de minorité de 15 ans s’applique, laquelle se trouve quasi systématiquement visée au côté de la vulnérabilité. Il en va ainsi du viol, des tortures et actes de barbaries, ou encore des différentes infractions de violences.

Il est dans ces différents cas prévus que les peines seront aggravées lorsque les fais sont commis :

sur un mineur de 15 ans [ou] sur une personne, dont la particulière vulnérabilité due à son âge est apparente ou connue de son auteur.

Par la vulnérabilité due à l’âge, le législateur visait donc le majeur, mais également le mineur entre 15 et 18 ans. Dans ce cas, l’âge du mineur entre 15 et 18 ans ne fondera pas une présomption de vulnérabilité, mais suivra le régime de la particulière vulnérabilité, il pourra être à l’origine d’une aggravation de la répression, à condition d’être confortée par d’autres éléments.

2- La vulnérabilité due à l’âge

111. Ensuite, il se trouve une catégorie d’infractions où le législateur vise uniquement comme circonstance aggravante la particulière vulnérabilité de la personne, sans évoquer la minorité. D’une part, cette omission peut s’expliquer par le fait que la protection du mineur est spécifiquement envisagée à un autre endroit du code. Ainsi, si les articles 225-13 et 225-14 du Code pénal prévoient uniquement la vulnérabilité de la victime comme conditions préalables des conditions de travail et d’hébergement contraire à la dignité de la personne, c’est parce que l’article L4153-12 du Code du travail prévoit l’interdiction de principe du travail des mineurs de 16

ans. La minorité n’intervient dans ce cas que comme circonstance aggravante, et non au titre de la matérialité. De même, l’article 223-3 du Code pénal prévoit comme circonstance aggravante du délaissement d’une personne hors d’état de se protéger, la seule vulnérabilité, car est expressément réprimé le délaissement d’un mineur à l’article 227-1 du Code pénal.

D’autre part, cette seule référence à la vulnérabilité peut renvoyer à la volonté du législateur de ne pas protéger spécifiquement la personne du mineur. Ainsi, les infractions contre les biens facilitées par la vulnérabilité de la personne, ou commises au préjudice de la personne vulnérable ne sont aggravées que par la particulière vulnérabilité, sans référence à la minorité. En effet, la

ratio legis ici n’est pas la protection de la personne, mais la protection des biens, il n’y avait donc

pas lieu à une prise en compte spécifique du mineur.

1 P. Renaud-Durand La prise en compte de la vulnérabilité dans le Nouveau Code pénal » In Réflexions sur le nouveau Code

pénal Paris, Ed. Pédone, 1995, p125

49

La vulnérabilité recouvre alors le jeune âge, à la fois en dessous de 15 ans, mais aussi entre 15 et 18 ans, voire au-delà en principe. En effet, même au dessus de 18 ans, l’âge peut encore être qualifié de « jeune âge », ce qui peut être démontré à l’aide de l’infraction de bizutage.

112. L’article 225-16-2 du Code pénal prévoit qu’est aggravée la répression du bizutage par la vulnérabilité en raison de l’âge, sans autre indication. En effet, la loi du 17 juin 19981 a

inséré le délit de bizutage dans le Code pénal. Or, non seulement il parait peu probable que l’infraction de bizutage s’applique aux personnes relevant du troisième âge, mais il est également difficile de concevoir de telles pratiques entre des enfants, particulièrement en dessous de 15 ans. En effet, l’infraction vise implicitement les pratiques observées dans les établissements de l’enseignement supérieur, « les victimes éventuelles des bizutages sont, la plupart du temps, des majeurs »2. Ainsi, l’âge ici visé pourra induire une particulière vulnérabilité y compris pour une

victime majeure, à condition de prouver qu’elle était placée dans une situation de faiblesse par rapport à l’auteur de l’infraction.

Dès lors qu’il n’y a pas lieu de distinguer là où le législateur ne distingue pas, pour une même rédaction il faut en déduire une même application, si les jeunes majeurs peuvent être visés par la vulnérabilité en raison de l’âge pour le bizutage, il semblerait qu’ils peuvent l’être pour les infractions contre les biens.

113. Le jeune âge permet donc de retenir la qualification de vulnérabilité en droit pénal, nonobstant on peut observer dans les applications de la jurisprudence que le plus souvent, la vulnérabilité en raison de l’âge trouve à s’appliquer à la catégorie des séniors, donc plutôt au « grand âge ».

II- Le grand âge et la vulnérabilité

La victime mineure présente par essence une faiblesse l’exposant particulièrement aux agressions d’autrui, il n’est donc pas nécessaire dans la plupart des cas de rapporter la preuve de sa particulière vulnérabilité. Au contraire, dès lors que la victime est majeure, elle est présumée être douée de toutes ses facultés, et ne pas être placée en situation de vulnérabilité. Cependant, en introduisant le critère de l’âge dans l’énumération faite des causes de vulnérabilité, s’il inclut ponctuellement le jeune âge, le législateur visait plutôt l’âge avancé. Il existe toutefois une hypothèse où la vulnérabilité est invoquée, qui plus est comme condition préalable, sans que soit visé l’âge de la victime, il s’agit de l’incrimination de recours à la prostitution d’une personne

1 Loi n°98-468 du 17 juin 1998

2 Lors des débats devant l’Assemblée Nationale, M. Renaud Dutreil relevait que « le bizutage étant un phénomène qui se

développe dans les classes préparatoires ou dans les grandes écoles, il touches des étudiants qui ont passé l’âge de dix-huit ans »,

50

vulnérable1. L’âge, autre que la minorité, n’est donc plus une cause de vulnérabilité dans

l’incrimination de recours à la prostitution, ce qui peut se comprendre en pratique pour les personnes âgées, mais on peut peut-être le regretter pour les jeunes majeurs. Néanmoins, dans la majorité des hypothèses, l’âge est mentionné, mais lorsqu’il est confronté à la notion contingente de vulnérabilité (A), il se révèle être à lui seul insuffisant pour fonder la vulnérabilité (B).

Dans le document L’âge en droit pénal spécial (Page 47-50)