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Plusieurs points ressortent de cette étude :

- les cellules de l’épiderme des pétioles de cotylédons présentent des ornementations cuticulaires. Celles-ci, étant plus prononcées chez le génotype tolérant, pourraient freiner la pénétration du champignon.

- Nous notons une absence de cires à la surface des pétioles, et ce, quel que soit le génotype considéré. Cependant, il faut considérer le traitement subi par les pétioles pour l’observation en microscopie à balayage, qui a très bien pu éliminer toutes traces de cires. Une méthode de fixation par le froid (cryofixation) aurait peut-être été plus appropriée à cette étude.

Alternativement, nous aurions pu traiter les pétioles du génotype tolérant au chloroforme afin d’ôter les éventuelles cires présentes à la surface de la cuticule, et procéder à des observations sur la pénétration du champignon en conditions « cuticules traitées » et « cuticules non traitées ». La cuticule peut jouer un rôle important dans la défense contre les agents pathogènes, en tant que barrière préformée. Ainsi, Yang et al. (1992) ont démontré que la cuticule avait une place importante dans la résistance de la moutarde (Sinapis alba L.) et des plantes âgées de colza (Brassica napus) à l’infection par Rhizoctonia solani.

- L’épaisseur de cuticule ne semble pas être un frein à la pénétration du champignon, puisqu’elle est quasiment la même entre le génotype sensible et le génotype tolérant ; cependant, nous ne savons rien sur la composition exacte de cette cuticule : peut-être diffère-t-elle entre les deux génotypes considérés ?

- A la surface des cellules, le champignon germe avec des longueurs moyennes de tubes germinatifs non significativement différentes, voire quasi identiques, quel que soit le génotype considéré. Il ne semble donc y avoir aucune corrélation entre la longueur du tube germinatif et la sensibilité du génotype. Ceci confirme les résultats de Larfeil (2003). Chez Phoma clematidina, des différences au niveau à la fois de la longueur et du nombre de tubes germinatifs, avaient été observées en fonction de la sensibilité du génotype (Van de Graaf et al., 2002).

- Nous n’avons pas observé de thygmotropisme. Ce phénomène est observé chez certains champignons pathogènes des plantes tels que Puccinia hordei et P. tritici , agents responsables de la rouille. Les tubes germinatifs de ces deux micro-organismes exhibent une croissance directionnelle marquée, plus ou moins perpendiculaire aux jonctions des cellules épidermiques. De courts branchements latéraux, de longueur variable, sont habituellement formés sur les jonctions cellulaires ( Read et al., 1992).

- Un matériel d’adhésion permet dans les deux cas considérés, la fixation des spores à la surface de l’hôte. Cette gaine mucilagineuse avait déjà été décrite par Roustaee et al. (2000b) pour ce même couple hôte-parasite. Le mucilage est généralement composé de polyssacharides et parfois d’enzymes. Il permet de protéger la spore de la dessiccation et favorise l’adhésion au végétal. Pascholati et al. (1993), ont démontré que cette matrice protégeait Colletotrichum graminicola des métabolites toxiques et exsudats synthétisés par la plante en réponse à l’infection. Ce mucilage est retrouvé chez d’autres champignons phytopathogènes. Chez Phoma lingam (Abadie et Boudart, 1982), Aschochyta rabiei (Hohl et al., 1990), et Aschochyta fabae (Maurin et al., 1993), il ne présente aucune activité enzymatique. A l’opposé, chez Colletotrichum graminicola (Pascholati et al.,1993) et Erysiphe graminis f. sp. hordei (Pascholati et al.,1992), la matrice mucilagineuse produit des enzymes impliquées dans la dégradation des parois, généralement des cutinases. Deising et al. (1992) ont également mis en exergue le fait qu’une association cutinases et estérases pourrait permettre à l’agent pathogène de mieux adhérer à l’hôte, ce qui donnerait à ces enzymes un rôle nouveau dans le processus d’infection fongique. Les observations de Roustaee semblaient révéler que chez Phoma macdonaldii, ce mucilage ne présente aucune activité enzymatique (Roustaee et al., 2000b) ; il serait cependant judicieux d’effectuer des dosages biochimiques afin de confirmer ces constatations.

- Nous n’observons pas de formation d’appressorium, ce qui confirme les résultats de Roustaee (2000b) et de Larfeil (2003). Cette structure d’infection spécialisée est indispensable à la pénétration de tissus sains par certains champignons, comme Sclerotinia sclerotiorum (Lumsden et Dow, 1973 ; Tariq et Jeffries, 1984). Cependant, la complexité d’une telle structure varie considérablement et pourrait dépendre de la nature de la surface attaquée. De simples appressoria, consistant en un renflement de la pointe de l’hyphe, ont

été observés sur des feuilles de laitues ou de haricots (Phaseolus vulgaris) après contamination par Sclerotinia sclerotiorum, alors que sur d’autres tissus comme les feuilles et les épicotyles de Phaseolus coccineus ou Chrysanthemum spp., le même champignon développe des appressoria plus complexes, résultant en une composition de plusieurs hyphes dont les sommets sont orientés de façon quasi-perpendiculaire à la surface de l’hôte (Tariq et Jeffries, 1984). Des variations dans la formation de l’appressorium ont également été observés chez un autre champignon nécrotrophe, Botrytis cinerea (Garcia – Arenal et Sagasta, 1980). Il a été suggéré que la complexité appressoriale de Botrytis cinerea puisse être directement liée au statut nutritionnel de l’inoculum (Garcia – Arenal et Sagasta, 1980). Nous avons réalisé les contaminations par P. macdonaldii sur pétioles de cotylédons, donc sur des tissus jeunes. L’éventualité que ce champignon puisse former des appressoria sur des tissus plus âgés n’est donc pas à rejeter. L’inoculum utilisé (composé d’eau, de jus d’orange et de gélatine), pourrait également être à l’origine de cette absence de formation de structure spécialisée, compte tenu des données bibliographiques.

- La densité des spores semble équivalente, il n’y aurait donc pas de rétention plus importante des spores en surface du génotype sensible. Cette éventualité avait été proposée par Debaeke et Pérès (2003), qui suggéraient un effet possible de l’architecture du pétiole sur la rétention d’eau et donc sur l’infection par Phoma macdonaldii.

- Par ailleurs, il apparaît cependant nettement que les deux génotypes de tournesol, sensible et tolérant, réagissent de façon différente à la contamination par Phoma macdonaldii. Dès 24 heures après contamination artificielle, le champignon a pénétré les tissus de l’hôte sensible, alors qu’il faut attendre 48 heures pour observer le même phénomène chez le génotype tolérant. Par ailleurs, chez le génotype sensible, la pénétration de l’agent pathogène engendre immédiatement une plasmolyse des cellules

épidermiques, et un affaissement des cellules sous-jacentes, alors qu’il faut attendre 144 heures après contamination pour observer un phénomène aussi prononcé aux points d’infection chez le génotype tolérant. Phoma macdonaldii est un champignon nécrotrophe, qui émet des toxines à distance afin de déstructurer les cellules et de se nourrir dans les tissus morts. Sugarawara et Strobel (1986) ont isolé du zinniol de filtrats de culture du champignon. Cette phytotoxine (C15H22O4) est produite par d’autres champignons. Elle induit des

symptômes identiques à ceux causés par Alternaria zinniae (White et Starrat, 1967) comme des nécroses sur les tiges, un brunissement des nervures foliaires ainsi qu’une chlorose entourant les tissus infectés. C’est une toxine non spécifique qui peut induire des symptômes sur cotonnier, tomate, melon, blé, gombo et zinnia (Cotty et al., 1983). Barrash et al. (1981) ont suggéré que cette absence de spécificité du zinniol ferait que la molécule puisse intervenir dans le développement des symptômes comme un déterminant secondaire du pouvoir pathogène. Du fait du délai d’apparition des symptômes et de leur étendue moindre, nous pourrions envisager que le génotype tolérant utilisé pour cette étude pourrait inhiber la synthèse de zinniol ou d’autres toxines produites par P. macdonaldii. Ce procédé est utilisé par certaines plantes résistantes. Il a également été démontré que certains génotypes sont plus sensibles que d’autres à l’action d’une toxine fongique. L’helminthosporoside, produite par Helminthosporium sacchari, est un modèle très étudié : elle a été utilisée avec succès pour opérer la sélection de clones de cannes à sucre résistants à H. sacchari. Une pulvérisation sur le feuillage permet de distinguer les hybrides sensibles au champignon, qui meurent en deux à trois jours, alors que les hybrides résistants survivent. L’helminthosporoside modifie la perméabilité de la membrane des plantes sensibles en agissant au niveau de la potassium-magnésium ATPase, dont l’activité est stimulée chez les plantes sensibles. Une autre hypothèse serait que le génotype sensible exprime un

nécrotrophe, produit une toxine hôte sélective, la victorine. La victorine affecte seulement quelques cultivars d’avoine qui possèdent le gène Vb dominant. Les lignées LOV1 d’Arabidopsis (pour Locus Orchestrating Victorin effects) sensibles à la victorine, sont sensibles à l’infection par C. victoriae, alors que les lignées Col-4, insensibles à la victorine, ne le sont pas. Ce gène LOV apparaît comme étant un gène dominant de sensibilité à la maladie (Lorang et al., 2004).

- Chez le génotype tolérant, nous observons des modifications caryologiques, ainsi que des modifications au niveau des chloroplastes : les noyaux prennent une forme polylobée et les chloroplastes se gorgent d’amidon. Le phénomène observé chez les chloroplastes avait déjà été observé par Barrault et al. (1982), lors de l’étude de l’interaction Helminthosporium teres / Hordeum vulgare. Ces auteurs suggèrent que se phénomène pourrait être inhérent à une baisse d’activité des β-amylases, comme l’avaient suggéré Tanaka et Akai (1960) chez le riz, d’une réduction de la teneur en esters phosphoriques participant à la mobilisation de l’amidon (Michalikova, 1974), ou d’une modification de la perméabilité membranaire affectant le transport de différents métabolites. Seule une étude complémentaire menée sur un plan biochimique nous permettrait de mieux comprendre cette observation. Les modifications caryologiques ont souvent été décrites dans le cas de maladies parasitaires ou lors de troubles métaboliques. Elles sont interprétées comme la manifestation de la défense des cellules par une augmentation de la protéogenèse. Chez l’hôte sensible, la déstructuration cellulaire est tellement rapide que ces modifications n’auraient pas le temps de se mettre en place.