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Confinement de l’agent pathogène

Figure 37 : modèle proposé pour les composants impliqués dans la réponse du tournesol à Phoma macdonaldii. Les composants inconnus sont indiqués par un point d’interrogation.

qui, si elle n’a à notre connaissance pas encore été mise au point sur tournesol, a déjà fait ses preuves sur d’autres plantes comme par exemple Nicotiana benthamiana (Peart et al., 2002), lors d’une étude sur les mécanismes de défense face aux agents pathogènes. Ces deux dernières techniques permettent la mise en place d’essais transitoires de façon fiable et à un débit important, pour tester les fonctions de gènes ou de familles de gènes. Comme seulement 300 pb d’une séquence sont suffisantes pour induire l’extinction d’un gène, les méthodes de VIGS et RNAi sont tout à fait compatibles avec toutes les séquences de gènes connus.

Cette étude, enfin, au delà de l’intérêt qu’elle présentait dans la recherche des mécanismes mis en place par le tournesol pour tolérer Phoma macdonaldii, nous a fait nous interroger sur plusieurs points, dont les avantages que pouvait présenter la tolérance par rapport à la résistance, ainsi que sur les mécanismes de défense mis en jeu par la plante selon l’agent pathogène qu’elle rencontre.

Place de la tolérance dans la protection des plantes

La résistance gène pour gène, comme son nom l’indique, est basée sur la reconnaissance du produit d’un gène de résistance de la plante par celui du gène d’avirulence correspondant chez l’agent pathogène. Une simple mutation, engendrant une perte de fonction, chez le gène d’avirulence du pathogène, et ce dernier ne peut plus éliciter la réaction hypersensible. Il peut ainsi infecter la plante, qui perd donc sa résistance. Ainsi, la résistance gène pour gène est un système de résistance fragile, dont la durabilité dans le temps est des moins sûres. La tolérance, en revanche, n’engendre aucune pression de sélection vis-à-vis de l’agent pathogène. Du point de vue de l’évolution, il semblerait même comme le décrit Clarke (Clarke, 1986), que la tolérance puisse devenir profitable à l’un et l’autre acteurs d’une interaction plante-parasite : certaines formes de résistance partielle, en freinant le développement de l’agent pathogène, pourraient être

continuer à croître et à produire des tissus qui puissent supporter des stades plus avancés de contamination. Un parasite qui passerait outre cette forme de résistance, s’exposerait, en détruisant ou en causant des dommages trop importants à la machinerie photosynthétique de la plante, à ce que cette dernière ne soit plus capable de produire de nouveaux tissus. Il ne nous paraît de ce fait pas impossible que la tolérance puisse prendre une part importante dans les programmes de protection des plantes. Par l’obtention de génotypes hautement tolérants à une maladie donnée, voir à plusieurs maladies, puisque souvent les mêmes types de défense basales semblent être mises en jeu, un niveau de productivité important pourrait être maintenu, tout en palliant le problème des contournements de résistance.

Un autre point sur lequel nous nous sommes interrogée durant cette étude, porte sur les différents mécanismes de défense mis en place par la plante lorsqu’elle se trouve confrontée à un agent pathogène.

Etude d’une interaction hôte-parasite : quelles priorités ?

Au cours des dernières années, les recherches sur les interactions hôte- parasite ont permis d’établir des modèles de résistance des plantes, très souvent basés sur la résistance monogénique, avec le schéma général simplifié suivant : reconnaissance de l’agent pathogène, activation des trois grandes voies de l’acide salicylique, de l’acide jasmonique, et de l’éthylène, et production des protéines de défense par la plante. De ce fait, l’étude d’une interaction hôte-parasite est souvent directement basée sur l’étude de ces grandes voies, ou l’accumulation de tel ou tel composé ou molécule. Mais c’est sans tenir compte de l’agent pathogène lui-même. Une bonne connaissance de ce dernier, de son mode de vie (qu’il soit biotrophe, nécrotrophe, …) à la composition de sa paroi, jusqu’aux types de molécules qu’il peut synthétiser afin de coloniser les tissus végétaux, nous paraît primordiale puisque c’est d’elle que va dépendre la batterie de défense mise en place par la plante. Ces informations sont donc à prendre en compte et nous incitent à une

extrême prudence afin de ne pas établir des modèles trop généraux de réponses de défense induites par les agents pathogènes. Comme l’écrit Knogge (Knogge, 1996), un champignon capable de pénétrer activement les tissus végétaux, et de produire des toxines qui affectent les processus biochimiques fondamentaux possède tout le potentiel pour être un agent phytopathogène universel. A ce jour cependant, un tel agent pathogène n’existe pas, et au contraire, les agents phytopathogènes se développent préférentiellement ou exclusivement sur un nombre d’hôte limité. Les bases moléculaires pour la reconnaissance par la plante d’un pathogène potentiel sont les facteurs du non-soi, présents à la surface du champignon (comme les fragments de chitine ou de glucanes), ou sécrétées par le champignon (comme certaines protéines), ou encore des déterminants du soi tels que des fragments de la paroi végétale, comme les oligogalacturonates, qui vont être relachés par le biais de l’activité d’enzymes hydrolytiques produites par l’agent pathogène. Et si certains de ces éliciteurs, comme les oligo N-acetylglucosamines et les oligogalacturonates sont actifs sur de nombreuses espèces végétales, d’autres apparaissent comme étant espèce-spécifiques. Avant de se lancer dans une étude des mécanismes de défense des plantes, il convient donc de tenir compte des différents éliciteurs ou suppresseurs que les agents pathogènes secrètent ou mettent au contact des cellules végétales. Certaines cascades de réponses de défense pourraient, ou pas, être activées durant la pathogenèse, selon les interactions particulières établies entre les éliciteurs et les suppresseurs avec leur cible.

Un autre point important qui doit permettre d’orienter les recherches est le mode de vie de l’agent pathogène considéré. Des études commencent à montrer que les réponses de la plante sont différentes selon que l’agent pathogène considéré possède un mode de vie biotrophe ou nécrotrophe. En effet, pourquoi le végétal mettrait-il en place une réaction hypersensible pour stopper le développement d’un champignon nécrotrophe, qui se développe sur des tissus nécrosés ? Govrin et Levine (2000) ont d’ailleurs pu démontrer que la HR favorisait le développement du

champignon nécrotrophe Botrytis cinerea. La dissection génétique de ces différentes réponses de défense commence a être élaborée chez Arabidopsis thaliana (voir la revue d’Hammond-Kosack et Parker, 2003), pour qui des études variées ont permis d’identifier des gènes clés et processus. Le consensus émergent veut que les processus controlés par NPR1 et l’acide salicylique assurent une protection contre les agents pathogènes biotrophes, alors que COI1 et EIN2, via les voies du jasmonate et de l’éthylène, seraient plus enclins à contrôler les nécrotrophes. La camalexine, phytoalexine produite par Arabidopsis, serait quant à elle nécessaire dans la mise en place de la résistance au champignon nécrotrophe Alternaria brassicicola (Thomma et al., 1999 b). Comme la production de camalexine n’est pas contrôlée directement par les voies du jasmonate, du salicylate ou encore de l’éthylène, la molécule pourrait être le produit final d’une voie additionnelle. Dans le cas de Phoma macdonaldii, aucun des gènes présents sur le microarray et impliqués dans les voies de biosynthèses des acides jasmonique, salicylique et de l’éthylène, n’ont été différentiellement exprimés durant la contamination par le champignon nécrotrophe.

Ces observations indiquent donc clairement que les agents pathogènes varient fortement dans leur habilité à activer différents composés de défense, aussi bien qu’à supporter les molécules mises en places par le végétal pour se défendre. Des recherches approfondies semblent donc indispensables à la compréhension de toutes ces variations dépendantes des agents pathogènes.