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Chapitre 1. Modèle énergétique et méthodes statistiques

1.3. Analyse de la ségrégation : illustration pour une surface CFC (100)

1.3.1. Isothermes volumiques

L’analyse du phénomène de ségrégation nécessite de caractériser au préalable la compo-sition chimique du volume. Ainsi, pour un système à tendance à la démixtion, la figure (1.2) représente le diagramme de phase du système. Rappelons que le diagramme est caractérisé par la température critique Tc qui correspond à la température du sommet de la lacune de

miscibilité pour laquelle c = 1/2. Les températures supérieures à Tc correspondent au do-maine de miscibilité totale : pour toute valeur de la concentration volumique le système est dans le domaine de solution solide, les atomes A et B étant répartis aléatoirement de manière homogène. En dessous de Tc, le diagramme est caractérisé, à une température donnée, par les limites de solubilité du système cα et cβ,et par les limites de décomposition spinodale csα et csβ. D’un point de vue pratique, un échantillon de composition donnée est chauffé à haute température, puis refroidi lentement à une température T1 inférieure à Tc. En soumettant l’alliage à une série de traitements isothermes à des températures successives T1, T2, T3..., le diagramme de phase peut être déterminé. Lorsque c est compris entre cα et csα (respective-ment csβ et cβ), un processus de précipitation résultant de la combinaison de processus de germination, de croissance et de coalescence des particules, conduit à la formation de deux phases homogènes, l’une riche en atomes A de composition cβ et l’autre riche en atomes B de composition cα, en proportion donnée par la règle des bras de levier [69]. Lorsque c est compris entre csα et csβ (domaine de démixtion spinodale) on prévoit une démixtion progres-sive de la solution solide sous forme d’alternance de zones plus riches et plus pauvres en soluté [69].

Du point de vue expérimental, le diagramme de phase est donc déterminé pour une concentration nominale fixée en diminuant progressivement la température. Dans l’approche sur réseau, le diagramme de phase est obtenu dans l’ensemble grand canonique à partir de la résolution de l’équation (1.8) pour différentes températures.

ca c cb a s csb 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 0 1000 2000 c T

Fig. 1.2: Diagramme de phase volumique. Les traits horizontaux correspondent aux températures (en K) des isothermes de la figure (1.3) : T = 2500 K (pointillés), T = Tc (tiretés), T = 1000 K (trait continu).

L’isotherme volumique obtenue dans l’approximation de champ moyen est représentée sur la figure (1.3a) pour trois températures du diagramme de phase (Fig. (1.2)) : la tempé-rature correspondant au sommet de la lacune de miscibilité T = Tc, T = 2500 K > Tc et T = 1000 K < Tc. A haute température, la courbe est univoque et de pente positive à c = 1/2. La pente de la courbe à c = 1/2 augmente lorsque la température diminue. La température pour laquelle la pente de la courbe devient infinie à c = 1/2 correspond à la température critique Tc, qui s’écrit :

Tc=−ZV2k

B

. (1.18)

Aux basses températures (T < Tc) l’isotherme est une sigmoïde, ou boucle de Van der Waals, caractéristique d’une transition de phase du premier ordre. On observe un domaine de ∆μ pour lequel trois valeurs de c sont solutions de l’équation c = f (∆μ) (Eq. (1.8)).

cas csb ca cb 0,2 0,4 0,6 0,8 0 1 0,2 0,4 0,6 0,8 Dm c c a s csb ca cb 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 -2 0 2 4 c 10 2 ¥D F HaL HbL caêb cas csb 0,2 0,4 0,6 0,8 -5 0 5 10 Dm 10 2¥D F 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 -2 0 2 4 c 10 2 ¥D F HcL HdL

Fig. 1.3: Isothermes volumiques à T = 2500 K (pointillés), T = Tc= 2088 K (tiretés) et T = 1000 K (trait continu) (a). Energie libre à T = 1000 K en fonction de c pour ∆μ = ∆μc= 552 meV (b), en fonction de ∆μ (c) et en fonction de c pour ∆μ = 545 meV (pointillés) et pour ∆μ = 555 meV (tiretés) (d). ∆F et ∆μ sont exprimés en eV. Les couleurs et les symboles sont explicités dans le texte.

de la température. En dessous de Tc, ce potentiel correspond au potentiel chimique critique

∆μc= Zτ (1.19)

pour lequel a lieu la transition de phase. Pour une température et une valeur de V données, l’allure de l’isotherme est inchangée lorsqu’on change la valeur de τ , seule sa position diffère.

Pour le système considéré Tc= 2088 K et ∆μc= 552 meV.

Les valeurs de la concentration des branches basse et haute de l’isotherme pour le potentiel chimique critique sont égales aux limites de solubilité du système cα et cβ données par la relation suivante : cα/β 1− cα/β = exp á 1− 2cα/β ¢ ZV kBT ! , (1.20)

qui peut s’écrire à très basse température sous la forme : cα ≈ expkZVBT et cβ = 1−cα. Les va-leurs de concentration comprises dans le domaine de décomposition spinodale correspondent à la branche médiane de l’isotherme entre cs

α et cs β. cs

α et cs

β sont les deux points pour lesquels l’isotherme présente une tangente verticale (∂∆μ∂c = 0 équivalent à ∂c2F2 = 0). Ils sont définis pour une température donnée par :

csα = Ã 1− r 1−TT c ! /2et csβ = Ã 1 + r 1−TT c ! /2. (1.21)

L’amplitude de la sigmoïde augmente lorsque la température diminue (figure (1.3a)). Inversement, lorsque la composition c du système est fixée, la température spinodale Ts, température en-dessous de laquelle le volume de la solution solide est instable par rapport à toute fluctuation de concentration, est donnée par l’équation ∂2F

∂c2 = 0 :

kBTs = 2Z|V | c (1 − c) . (1.22)

On peut noter que Ts = Tc pour c = 1/2.

Dans le domaine de ∆μ où l’isotherme est multivoque, afin de distinguer les parties stables (en rouge sur l’isotherme à 1000 K de la figure (1.3a)), métastables (en bleu) et instable (en

noir), nous avons calculé l’énergie libre en fonction de ∆μ (Fig. (1.3c)). Nous montrons ainsi que la branche basse de l’isotherme est stable pour les potentiels chimiques inférieurs à ∆μc et métastable entre cα et csα. Inversement la branche haute de l’isotherme est stable pour les potentiels chimiques supérieurs à ∆μc et métastable entre cs

β et cβ. La troisième solution, qui correspond à la partie de l’isotherme à pente négative comprise entre csα et csβ, est une solution instable car elle correspond à un maximum de l’énergie libre (Fig. (1.3c)). Pour ∆μ = ∆μc les deux minima de l’énergie libre donnent les limites de solubilité cα et cβ, le maximum correspondant au point instable c = 1/2. De manière cohérente avec la figure (1.3b), on observe bien que le système a une même énergie libre pour les deux limites de solubilité. Les points d’inflexion de la courbe entre les minima et le maximum sont les points spinodaux. La figure (1.3d) montre que les deux minima n’ont plus la même valeur d’énergie libre lorsque ∆μ est légèrement différent de ∆μc. Les trois solutions possibles de l’Eq. (1.8) correspondent aux deux minima et au maximum de la courbe. Pour ∆μ < ∆μc (resp. ∆μ > ∆μc ) le minimum global est obtenu pour la valeur de la branche basse (resp. haute) de l’isotherme (valeur proche de 0, resp. de 1).

Notons que si on prend en compte uniquement les états stables, le système décrit la branche basse de l’isotherme lorsque ∆μ augmente, puis la branche haute à partir de ∆μ = ∆μc. L’isotherme est donc discontinue alors que l’énergie libre varie continûment.

Les isothermes de la figure (1.3a) ont été obtenues par résolution de l’équation (1.8). Il est également possible de les déterminer en considérant un empilement de plans

• par résolution des équations d’équilibre (1.7) dans l’ensemble grand canonique, en considérant pour chaque valeur du potentiel chimique ∆μ une concentration initiale identique et égale à 1/2 sur tous les plans (cp = 0, 5,∀p).

• par résolution des équations cinétiques (1.17) dans l’ensemble canonique, en consi-dérant pour chaque valeur de la concentration volumique c, une concentration initiale

nulle sur un certain nombre de plans et égale à 1 sur les autres de telle sorte que la concentration nominale soit égale à c.

Aux hautes températures, les isothermes obtenues dans les ensembles grand canonique et canonique sont identiques. Aux basses températures (T < Tc), seuls les états stables et métastables sont décrits dans l’ensemble grand canonique, conduisant à des isothermes avec l’apparition d’une hystérésis entre la montée et la descente. Dans l’ensemble canonique, les isothermes de chaque plan présentent une boucle de Van der Waals.

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