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Les prévisions jouent un rôle important dans les activités quotidiennes des organisations. Que ce soit pour l’estimation de la demande future, l’élaboration de plans d’approvisionnement, de production ou de transport, ou encore pour la gestion des effectifs, de bonnes prévisions sont essentielles. Le

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processus de prise de décision devenant de plus en plus rapide, le temps de réponse de plus en plus court, les organisations doivent pouvoir utiliser des modèles de prévision adaptés à cette réalité.Les prévisions de demande établies sur une base mensuelle ou hebdomadaire ne répondent plus aux attentes des gestionnaires. Il existe un besoin grandissant pour des prévisions journalières, une à plusieurs journées à l’avance et rafraîchies quotidiennement.

La demande pour un grand nombre de produits de consommation est influencée par les différentes périodes de l’année, par exemple les différents mois (la demande en janvier diffère de la demande en juin), par la journée dans la semaine (la demande un vendredi versus un lundi) et par les différentes fêtes ou événements qui surviennent au cours d’une année, notamment l’Action de Grâce, la fête de Pâques ou les soldes de fin de saison, pour n’en nommer que quelques-uns.

L’objectif de ce chapitre est de présenter une méthode de prévisions journalières, un ou plusieurs jours à l’avance, qui tient adéquatement compte du double effet saisonnier sur l’année et la semaine, en plus d’un effet de calendrier (St-Valentin, Noël, etc.) influençant les demandes et ventes quotidiennes. La méthode de Holt-Winters (1960) est la plus commune pour effectuer des prévisions de séries chronologiques à effets saisonniers. Or, ce modèle, historiquement conçu dans un contexte où chaque période présente un effet saisonnier, par exemple une série chronologique à périodicité mensuelle et saisonnalité mensuelle, provoque un biais structurel lorsque la saison inclut plusieurs périodes, notamment dans un contexte de prévisions journalières sur des séries temporelles à saisonnalité mensuelle.

La méthode proposée ici, appelée la méthode Bouchard-Montreuil, enrichit la méthode de Holt-Winters de plusieurs façons. D’une part, elle ajuste les indices saisonniers à chacune des périodes (jour) en fonction de leur position dans la saison. Ainsi l’indice saisonnier de la 5ième période sera différent de

celui de la 23ième période, même si ces deux périodes sont incluses dans la même saison. De cette

façon, l’indice saisonnier subit une évolution planifiée au cours de la saison et reflète mieux le comportement naturel de la demande contrairement à la méthode de Holt-Winters, réduisant ainsi le biais structurel encouru et, de ce fait, fournit de meilleures prévisions. D’autre part, la méthode Bouchard-Montreuil s’applique sur des séries chronologiques présentant plus d’une saisonnalité. À titre d’exemple, une série chronologique présentant une saisonnalité mensuelle couplée à une saisonnalité journalière ou encore une série présentant une double saisonnalité journalière et horaire.

31 La méthode de prévision à double saisonnalité proposée par Taylor (2003) diffère de celle proposée dans ce chapitre de plusieurs façons. D’une part, la procédure de calcul des indices saisonniers pour chacune des saisonnalités est différente et permet, par la même occasion, le traitement des jours spéciaux. D’autre part, la méthode développée par Taylor est appliquée sur des séries chronologiques dont la période de temps (demi-heure) est beaucoup plus courte que celle ciblée ici, soit la journée, de ce fait le phénomène de biais structurel, présenté plus loin, est beaucoup moins perceptible que dans les séries présentées dans ce chapitre. De plus, les variantes de méthodes de prévision décrites dans Taylor (2003, 2008b) et dans Taylor et al. (2006) imposent que les saisons soient toutes continues et de longueur identique. Ce chapitre propose plutôt des saisons de longueur variable pouvant même être discontinues. Aussi, les méthodes de Taylor (2003, 2008b), Taylor et al. (2006), Arora et Taylor (2013), Bernardi et Petrella (2015) sont conçues originalement pour des séries chronologiques de demandes en électricité dont le comportement diffère des séries temporelles de demandes de produits offerts aux consommateurs. La demande de tels produits est plus volatile et intermittente, c’est-à-dire qu’on observe des demandes nulles à certaines périodes dans la série chronologique. De plus, la longueur de la série chronologique est plus courte et la durée de vie des produits est limitée.

Par ailleurs, la méthode Bouchard-Montreuil présentée ici met les indices saisonniers à jour à chaque période d’un cycle en fonction des nouvelles informations de demande ou de vente quotidienne. Enfin, elle tient compte de l’effet calendaire influençant la demande sans avoir recours à une intervention exogène, contrairement à la méthode proposée par Souza et al. (2007). Le très grand nombre de séries à prévoir dans le cas de produits de consommation rend difficile une correction a posteriori des prévisions obtenues pour tenir compte des jours spéciaux. La méthode Bouchard-Montreuil propose une démarche innovante de détermination des saisons et des jours spéciaux qui permet de ne considérer que deux saisonnalités au lieu de trois, comme proposée par Arora et Taylor (2013) et Petrella et Bernardi (2015), réduisant par le fait même le nombre de paramètres à estimer. De plus la procédure d’identification des jours spéciaux et de la saisonnalité périodique tient compte à la fois du type de fête et du jour de la semaine où la fête survient, éliminant ainsi la nécessité d’avoir recours à des règles subjectives, telles qu’appliquées par Arora et Taylor (2013).

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Notons que la méthode proposée a été testée sur des données de demande d’essai et de vente de produits de consommation. Pour alléger le texte, on parle ci-après dans ce chapitre, de prévision de demande pour faire référence à la demande d’essai et aux ventes.

À notre connaissance, il n’existe pas, à ce jour, de méthode intégrant directement au modèle prévisionnel journalier à la fois les effets de calendrier, de semaine (lundi versus vendredi) et de saison, dont la mise à jour des indices saisonniers est effectuée à chacune des périodes d’un cycle, et où les saisons sont discontinues, et ce, adaptée au nouveau contexte des produits de consommation décrits précédemment.

Les sections 3.3 et 3.4 décrivent respectivement la procédure d’identification des saisons et la méthode de Holt-Winters journalisée et son biais structurel. La section 3.5 décrit la méthode Bouchard- Montreuil pour la prévision périodique dans un contexte saisonnier double avec effets calendaires. Enfin, les sections 3.6 et 3.7 présentent respectivement les résultats expérimentaux et la conclusion.