• Aucun résultat trouvé

spectrométrie de masse Apports du couplage chromatographique

I. Introduction générale

En analyse protéomique, la fragmentation de peptides issus d’une digestion trypsique de la protéine à identifier permet d’obtenir des éléments de séquence primaires. L’utilisation de la trypsine permet d’obtenir des peptides d’une taille généralement raisonnable pour la dissociation (<2500 Da), dont le dernier acide aminé en position C-terminale, est soit une arginine, soit une lysine. La présence de ces sites basiques, capables de piéger un proton, oriente souvent la fragmentation et conduit à la formation de nombreux ions y dans les spectres MS/MS réalisés par collision basse énergie avec un gaz inerte. La présence de cette série d’ions y, et notamment d’un ion y1 à m/z 147,1128 (Lys) ou m/z 175,1190 (Arg), permet une lecture facile de la séquence du peptide fragmenté en démarrant de l’acide aminé C- terminal.

Dans le cas de peptides naturels comme les conotoxines, qui ne portent pas de résidu basique sur leur extrémité C-terminale et qui sont fortement structurés et modifiés post- traductionnellement, le problème est bien plus délicat. Tout d’abord, la présence de nombreux ponts disulfures dans leur structure ne permet pas une fragmentation directe de ces composés Une étape de réduction chimique de ces ponts est à intégrer dans la stratégie d’analyse d’autant que la détermination du nombre de ponts disulfures de ces toxines est importante. En effet, la Figure 1 montre la relation étroite entre la masse des conotoxines, le nombre de ponts disulfures qu’elles contiennent et leur famille d’appartenance. Si on prend le cas des conotoxines possédant un unique pont disulfure, on observe qu’elles possèdent toutes une masse voisine de 1000 Da. Il s’agit d’une famille très intéressante composée des conopressines, actives sur les récepteurs à la vasopressine, et des contryphans dont les cibles biologiques sont encore mal définies. Jusqu’à aujourd’hui, peu de ses représentants sont connus et la découverte de nouveaux contryphans permettrait d’étoffer cette famille et d’ajouter de nouveaux outils nécessaires à la découverte de leur activité biologique. Un intérêt encore plus grand résiderait dans la découverte d’une toxine possédant un unique pont disulfure mais dans une gamme de masse totalement différente, par exemple vers 500 ou 2000 Da. Cela constituerait la signature unique d’une nouvelle famille de conotoxines. Dans la même optique, une nouvelle branche de la superfamille M a récemment été découverte1

(notée sur le diagramme M-superfamily*). Cette famille possède une signature très intéressante du fait qu’il s’agit des plus petites conotoxines connues possédant trois ponts disulfures.

500 1500 2500 3500 4500 Masses (Da)   O    Conopressines Contryphans T-superfamily M-superfamily* 1 pont 2 ponts 3 ponts 500 1500 2500 3500 4500 Masses (Da)   O    Conopressines Contryphans T-superfamily M-superfamily* 1 pont 2 ponts 3 ponts

Figure 1: Répartition des masses de plusieurs familles de conotoxines en fonction du nombre de ponts disulfures dans leur séquence – seules les familles possédant 1, 2 ou 3 ponts sont répertoriées ici – la M-

superfamily* indique une nouvelle branche de la M-superfamily composée jusqu’alors des -, - et M-

conotoxines

L’absence d’arginine ou de lysine en C-terminal conduit à des spectres de fragmentation complexes, sans réel point de départ pour leur analyse du fait de l’absence des ions y1 caractéristiques des peptides trypsiques. Il faut par ailleurs noter que la présence

d’acides aminés modifiés (hydroxyproline par exemple) et de modifications post- traductionnelles (amidation de l’extrémité C-terminale, pyroglutamylation en N-terminal) ne facilite pas non plus ces études. Il convient également de rappeler que le génome des cônes marins n’est pas séquencé et que, par conséquent, obtenir un tag de séquence ne suffit pas pour identifier une conotoxine. Dans ce contexte, la précision en masse de la spectrométrie de masse FT-ICR est importante puisqu’elle permet : (i) dans le cas de spectres présentant des séries de pics discontinus, de proposer des tags de séquence basés uniquement sur des mesures de masse exacte des ions observés (ii) de trancher entre deux acides aminés de masse très proche (hydroxyproline/leucine ou isoleucine par exemple).

Une autre difficulté pour l’analyse de peptides naturels présents dans un venin vient du fait que les constituants d’un venin présentent une gamme dynamique très grande avec des

variabilités très importantes au niveau de la masse moléculaire des espèces. Ainsi, si certaines toxines majoritaires peuvent être étudiées directement par infusion d’une solution de venin brut, une séparation chromatographique est souvent nécessaire pour réaliser l’étude plus complète du protéome d’un venin. Les venins de cônes n’étant pas disponibles dans de grandes quantités, l’utilisation de techniques de chromatographie miniaturisées peut s’avérer nécessaire.

La première partie de ce chapitre est consacrée à l’étude du venin de Conus virgo. Nous montrons notamment qu’il est possible, par FT-ICR, de séquencer de petites conotoxines directement dans le mélange complexe et que les performances de la technique en terme de précision et de résolution sont utiles pour déterminer des séquences complètes. Dans une seconde partie, l’analyse du venin de Conus ermineus met en évidence que dans le cas de venins très complexes, il est indispensable d’avoir recours à une séparation chromatographique avant l’analyse par spectrométrie de masse, aussi résolutive soit-elle. Les avantages et limitations des différentes approches utilisées (infusion directe, couplage on-line et off-line, fragmentations dans un FT-ICR ou un Q-TOF) pour l’analyse d’un venin brut sont discutés.

II.

Séquençage de novo de conotoxines dans le venin brut

Documents relatifs