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Apports de l’approche par couplage en ligne

spectrométrie de masse Apports du couplage chromatographique

C. Apports de l’approche par couplage en ligne

C.1. Intérêt du couplage nanochromatographie/spectrométrie de masse

pour l’analyse de mélanges complexes

L’intérêt de l’utilisation de la nanochromatographie en phase liquide réside dans la possibilité d’atteindre des efficacités de séparation très élevées et de travailler avec des volumes d’échantillon très faibles (et donc de faibles quantités de matériel). Par exemple, une centaine de femtomoles d’un digestat protéique suffisent pour obtenir une cartographie peptidique exploitable. De plus, les composés sont élués tour à tour de la colonne analytique, ce qui permet d’augmenter la gamme dynamique. Enfin, une microcolonne placée en amont de la colonne analytique permet de dessaler et de concentrer les échantillons en ligne. Ce montage permet d’améliorer la qualité des analyses en éliminant les contaminants comme les sels (ou autres produits trop polaires pour se fixer sur la colonne) et d’éviter des pollutions éventuelles de la colonne analytique et du spectromètre de masse dans le cas du couplage en ligne « direct ». Néanmoins, nous montrerons que cette précolonne peut également être responsable de la perte de composés.

Jusqu’à présent aucune publication (source PubMed) ne rapporte l’analyse de venins par nanochromatographie. La plupart des études s’effectuent en général par fractionnement par chromatographique du venin avant l’analyse par spectrométrie de masse (ESI, nanoESI, MALDI). Le couplage entre une chaîne de chromatographie liquide à nanodébit et notre FT- ICR a été réalisé pour la première fois au cours de cette thèse. Les premiers essais ont été effectués sur des digestats de protéines. Nous avons ensuite optimisé les conditions expérimentales (le gradient) notamment, en prenant en considération le fait qu’un venin brut contient des constituants aux propriétés bien plus variées qu’un digestat.

C.2. Analyse du venin brut par nanoLC-FT-ICR

Le chromatogramme obtenu pour l’analyse en nanoLC-FT-ICR du venin de Conus virgo est présenté sur la Figure 8.

EIC 1329.5 +All MS, -Spectral Bkgrnd, Smoothed (2.6,2, GA)

EIC 1359.6 +All MS, -Spectral Bkgrnd, Smoothed (2.6,2, GA)

5 10 15 20 25 30 35 40 45 Time [min]

EIC 1329.5 +All MS, -Spectral Bkgrnd, Smoothed (2.6,2, GA)

EIC 1359.6 +All MS, -Spectral Bkgrnd, Smoothed (2.6,2, GA)

5 10 15 20 25 30 35 40 45 Time [min]

Figure 8: Chromatogramme (reconstruit sur l'intensité du pic de base) obtenu pour le venin de Conus virgo en nanoLC-FT-ICR – En dessous, sont extraits les chromatogrammes de (B) ViVA et (C) ViVB

L’analyse de ce chromatogramme révèle la présence de 130 masses moléculaires différentes qui appartiennent à la gamme de masse [500-7000] Da, plus étendue que celle observée lors de l’analyse directe par nanoESI (500-4500 Da). Les traces chromatographiques des deux toxines ViVA et ViVB séquencées dans le venin brut sont reportées sous le chromatogramme total. Il apparaît nettement que ces deux toxines, majoritaires pour les expériences en infusion directe du venin brut, correspondent également à des pics majoritaires dans le chromatogramme.

C.3. Comparaison infusion directe/couplage pour le venin de Conus virgo Le premier point à noter est que, comme attendu, le couplage permet de détecter un plus grand nombre de composés que l’infusion directe. Néanmoins, une observation surprenante est que sur les 130 masses moléculaires mesurées en couplage, seulement 45 sont communes avec celles issues des expériences en infusion directe. Ces 45 masses communes représentent environ 90% du signal total du spectre nanoESI-FT-ICR et 71% de l’intensité des pics obtenus en nanoLC-FT-ICR. Ceci montre clairement que les 21 composés perdus et les 66 gagnés par l’utilisation du couplage correspondent à des espèces de faible abondance.

La « disparition » de composés présents dans un venin brut lors de son analyse en couplage a déjà été observée par Taggi et al. 12 alors qu’ils cherchaient à caractériser des nucléosides dans un venin brut d’araignée. Leur conclusion est que les conditions expérimentales de la chromatographie jouent un rôle crucial sur le nombre de composés qu’il est possible de retrouver après les différentes étapes de la séparation. L’analyse du venin brut sans aucune séparation préalable permet de s’affranchir de ce problème et peut donc apparaître comme complémentaire d’une approche par couplage.

Afin de déterminer s’il existe une corrélation entre la masse moléculaire des composés et leur perte lors de l’étape de séparation, nous avons dénombré les composés observés (i) en infusion directe (ii) en couplage et (iii) communs aux deux approches, pour différentes gammes de masse. 0 20 40 60 80 100 120 140

Masses ESI Masses LC Pics en communs

Gamme de masse (kDa) Effectifs

Figure 9: Comparaison du nombre de masse détectées pour les deux types d’expériences – en violet pour le nanoESI, en vert pour la nanoLC-MS, en bleu le nombre commun aux deux expériences

L’analyse de la Figure 9, qui regroupe ces résultats, apporte différentes informations. Tout d’abord, le nombre de masses détectées à l’issue du couplage est toujours supérieur (quelle que soit la gamme de masse) à celui obtenu en infusion directe, validant l’approche par couplage pour détecter un maximum de composés dans un venin. La deuxième information est que la perte de matériel due au couplage semble répartie sur toute la gamme de masse. En d’autres termes, le couplage n’entraîne pas particulièrement la disparition de composés de faible poids moléculaire ou au contraire de poids moléculaire élevé.

Pour essayer de comprendre ce phénomène, la comparaison de l’approche directe nanoESI et du couplage nanoLC-FT-ICR a été effectuée sur une digestion trypsique de myoglobine de coeur de bœuf. Les résultats de cette étude permettent de tirer des conclusions similaires à ce qui est observé pour le venin puisque plusieurs peptides trypsiques détectés dans les expériences de nanoESI-FT-ICR ne sont pas pas retrouvés après la séparation chromatographique. Des expériences complémentaires en ajoutant un détecteur UV après la précolonne mettent en évidence que certains peptides ne sont pas retenus par la précolonne de dessalage utilisée et sont perdus lors du rinçage de cette dernière. Des améliorations doivent donc être apportées à notre système (changement du type de précolonne, optimisation des conditions de dessalage des échantillons etc…) afin qu’il soit réellement performant pour l’étude des venins bruts, sans perte importante de matériel.

D.

Conclusion

Nous avons montré lors de l’étude de Conus virgo que l’analyse directe, par spectrométrie de masse FT-ICR, d’un venin brut était tout à fait possible, si l’on accepte de se limiter à la caractérisation des composés majoritaires. Pour une étude plus exhaustive, l’utilisation d’une méthode séparative avant la spectrométrie de masse est nécessaire. De la même façon, cette séparation est nécessaire si le mélange est extrêmement complexe car une approche directe conduit à une perte d’informations importante.

III. Analyse du venin de Conus ermineus : comparaison de

différentes approches

Conus ermineus est un cône qui provient des côtes sénégalaises et qui mesure en

moyenne 5 cm. Ce cône a jusqu’alors été très peu étudié mais des études menées au CEA de Saclay ont permis de séquencer une nouvelle -conotoxine nommée -EVIA13,14. Cette toxine

lie sélectivement les canaux sodiques neuronaux et, en association avec un marqueur approprié, permet de les localiser au niveau cellulaire et d’en étudier la distribution. Cette activité permet d’envisager de pouvoir l’utiliser dans le traitement symptomatique de différentes maladies neurodégénératives du système nerveux comme la sclérose en plaques. Cette récente découverte illustre parfaitement tout l’intérêt qui réside dans l’exploration détaillée des venins de cônes.

Plusieurs difficultés liées à l’analyse de ce venin ont orienté notre stratégie analytique. La plus importante est que nous ne disposions pas d’une quantité importante de venin brut puisqu’environ 3 mg seulement ont été obtenus et lyophilisés. Notre objectif était de déterminer un nombre maximum de candidats intéressants d’un point de vue biologique avec un minimum d’échantillon. La première étape pour réaliser cette sélection est d’effectuer une cartographie massique du venin brut avant et après réduction de tous les ponts disulfures. A l’issue de ces expériences, deux types d’informations sont obtenus: la masse précise des toxines ainsi que le nombre de ponts disulfures. Comme nous l’avons vu précédemment, le nombre de ponts disulfures présent dans une conotoxine est une information importante puisqu’elle permet de classer plus ou moins les composés dans les différentes familles de conotoxines.

La cartographie massique du venin de Conus ermineus avant et après réduction a été envisagée dans un premier temps par nanoESI directe. Cependant, le nombre important de composés détecté nous a conduit à introduire une étape de séparation pour effectuer les expériences dans les meilleures conditions possibles.

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