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1. Définition de la prématurité tardive

La prématurité est définie selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) par une naissance survenant avant 37 semaines d’aménorrhée (SA).

Un accouchement prématuré peut survenir à la suite d'un travail prématuré spontané avec ou sans rupture prématurée des membranes ou à la suite d'interventions médicales, comme l'induction du travail ou une césarienne élective, effectuées pour éviter une issue maternelle ou fœtale défavorable (1).

On considère les sous-catégories suivantes (2, 3) :

- Prématurité tardive : naissance entre 34+0 et 36+6 SA - Prématurité modérée : naissance entre 32+0 et 33+6 SA - Grande prématurité : naissance entre 28+0 et 31+6 SA - Très grande prématurité : naissance avant 28 SA

2. Épidémiologie

Le taux d’accouchements prématurés mondial est globalement estimé à 10%, ce qui correspond à 15 millions d’enfants prématurés nés par an dans le monde (4, 5). Depuis 1990, le taux d’accouchements prématurés est en augmentation, malgré une stabilisation de ce taux entre 2010 et 2015 en Europe et aux États-Unis; les derniers chiffres de 2018 confirment une tendance à la hausse (6). Cette croissance quasi constante du taux d’accouchements prématurés s’explique essentiellement par l’augmentation du taux d’accouchements dits « prématurés tardifs » qui représente actuellement les deux tiers des accouchements prématurés (3, 7).

3. Facteurs associés à l’augmentation du taux d’accouchements prématurés tardifs

Les nouveau-nés prématurés tardifs ont longtemps été considérés à tort comme des enfants

"presque à terme". Ainsi, les croyances sur leur supposée maturité ont fréquemment conforté le choix d’induire des accouchements prématurés tardifs, parfois sans indications médicales scientifiquement prouvées, mais basé uniquement sur des présomptions cliniques (8, 9).

Durant les dernières décennies, des efforts ont été effectués afin de limiter le taux d’accouchements induits durant cette période, et ce grâce à une meilleure compréhension des risques néonataux de l'accouchement prématuré (1, 10). Néanmoins, des indications médicales d’induction à l’accouchement basées sur des niveaux de preuve faibles ou insuffisants persistent, cela particulièrement durant la période de prématurité tardive (9).

4. Morbidité et mortalité néonatale

Les complications néonatales liées à la prématurité sont la cause majeure de mortalité chez les enfants de moins de 5 ans à travers le monde (11). Les enfants nés prématurés tardifs sont connus pour avoir un taux de mortalité et de morbidité à court et long terme faible mais supérieur aux enfants nés à terme (12). Une revue systématique de 2011 conclut que les enfants prématurés tardifs ont quatre fois plus de risque de décès dans la première année de vie que les enfants nés à termes. À court terme, ils présentent surtout des complications de type respiratoire dont syndrome de détresse respiratoire (RR 17.3 ; IC à 95% : 9.8–30.6), apnée (RR 15.7, IC à 95% : 11.8–

20.9), tachypnée transitoire du nouveau-né, hypertension pulmonaire persistante, pneumothorax et pneumonie (13). Ils présentent aussi globalement plus de complications

métaboliques (hypothermie, hypoglycémie, jaunisse, hyperbilirubinémie) et infectieuses, de difficultés alimentaires, d’entérocolite nécrosante et d’hémorragie intraventriculaire que les nouveaux-nés à terme. Enfin ils sont aussi plus fréquemment hospitalisés et ré-hospitalisés en néonatologie et ont des séjours hospitaliers globalement plus longs (12, 14-16). Ces dernières années l’étude du neuro-développement à moyen et long terme des enfants nés prématurés tardifs a généré une littérature abondante. La maturation cérébrale s’achevant essentiellement durant les dernières semaines de grossesse, chaque semaine in utéro jusqu’à 39 SA s’avère être d’un réel bénéfice d’un point de vue neuro-développemental (17). Les enfants prématurés tardifs semblent plus à risque d’anomalies du développement que les enfants nés à terme, ils présenteraient plus de retards cognitifs, de retards de l’acquisition du langage et de retards moteurs (18-20). On retrouve également un risque augmenté de paralysie cérébrale et des compétences socio-émotionnelles globalement moins bonnes que leurs pairs nés à terme (21).

L’association de ces différents éléments ayant pour répercussion des difficultés d’apprentissage, on observe aussi plus d'échec scolaire et de problèmes comportementaux. Certains auteurs ont même montré que les enfants nés prématurés tardifs acquièrent un niveau socio-économique souvent plus bas que celui de leurs parents (13, 22-24). Néanmoins ces données ne sont pas homogènes à travers la littérature avec parfois des résultats contradictoires ce qui suggère un risque neuro-développemental plutôt modéré, de plus un rattrapage de certaines compétences au fil du temps a été constaté.

La prématurité tardive correspondant à la grande majorité des accouchements prématurés, l’impact de ces complications est énorme autant du point vu médicale qu’économique (25). Il s’avère donc essentiel de déterminer le moment optimal pour l'accouchement de ces enfants afin de réduire la morbidité et la mortalité périnatales associées aux naissances prématurées tardives (26) et le cas échéant d’évaluer la nécessité d’un suivi neuro-développemental.

5. Établissement d’une classification basée sur les évidences

Face à la nécessité de diminuer la fréquence des accouchements prématurés tardifs et leurs répercussions néonatales des efforts étaient nécessaire au sein des équipes obstétricales, l’établissement d’une classification basée sur les évidences s’est avérée primordiale. Les indications avec un niveau de preuve suffisant (evidenced-based : EB) justifiant un accouchement prématuré tardif ont été répertoriées par Gyamfi-Banneman et al. en 2012 (27, 28) sur la base des recommandations de l’American College of Obstetricians and Gynecologists’ (29), la littérature obstétricale et l’avis d’experts (30).

Les indications EB retenues sont les suivantes : - Prééclampsie sévère ou éclampsie

- Retard de croissance intra-utérin associé à des anomalies des tests fœtaux, c'est-à-dire associé soit à des anomalies du Doppler fœtal, soit à des anomalies du rythme cardiaque fœtal ou soit à un oligohydramnios

- Décollement placentaire

- Rythme cardiaque fœtal non rassurant

- Cholestase gravidique avec acides biliaires supérieurs à >40 micromol/L - Rupture utérine

En l'absence de preuves scientifiques suffisantes, les indications ont été jugées faibles pour justifier l’induction iatrogène d’accouchement prématuré tardif et ont donc été classées comme non pertinentes (non evidenced-based : non-EB) (9).

Les principales indications non-EB retenues sont les suivantes : - Hypertension chronique ou gestationnelle

- Prééclampsie non sévère

- Retard de croissance intra-utérin avec tests normaux

- Antécédent de myomectomie ou de césarienne classique (corporéale) - Oligohydramnios isolé

- Toutes les autres indications à l’accouchement issues du dossier médical et non listées précédemment ont été classées comme « électives ».

À noter que ne sont prises en compte que les indications pour les grossesses uniques, les grossesses multiples ayant des prises en charges qui leur sont propres.

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