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1. Critique de l’étude

La principale force de l’étude est d’avoir utilisé la classification de Gyamfi-Banneman et al. qui assure une certaine reproductibilité et permet de comparer les différentes pratiques institutionnelles au niveau national et international. Cette étude observationnelle contient néanmoins de probables facteurs confondants non identifiés pouvant impacter la corrélation entre accouchements prématurées tardifs et complications néonatales. Nous considérons également comme limitant le fait que les cas d’accouchements avec PPROM aient été considérés dans la catégorie des accouchements spontanés, puisqu’ils étaient systématiquement induits dans notre centre à partir de 34 SA sur la période étudiée. Toutefois, il a par la suite été démontré qu’une attitude expectative en cas de PPROM durant la période de prématurité tardive n’augmente pas le risque de complications néonatales (38) et qu’ils devraient donc être considérés comme des indications non-EB à l’accouchement, tel que l’a précédemment fait l’équipe Morais et al.. Un changement des pratiques dans ce sens a été effectué en 2016 au sein de notre maternité. Nous avons donc décidé d’étudier ces cas en effectuant une analyse secondaire de nos données initiales, le tout faisant l’objet d’une seconde publication.

2. Résumé court en français de la seconde publication

“Impact of the new guidelines on the management of the premature rupture of

membranes for the prevention of late preterm birth: an 11-year retrospective

study”

Bouchet N., Joal A., Gayet-Ageron A., Lumbreras Areta M., Pfister R. E., Martinez de Tejada B.

Journal of Perinatal Medicine. 2019; 47(3): 341-346.

La rupture prématurée spontanée des membranes (preterm premature rupture of membrane : PPROM) après 34 semaines de grossesse a longtemps été considérée comme une indication à induire l’accouchement (33). En 2016, Morris et al ont publié les résultats d'une vaste étude contrôlée randomisée et ont démontré qu’une attitude expectative en cas de PPROM entre 34 et 37 semaines de gestation n’augmente pas le taux de sepsis néonatal (38). Il est donc maintenant considéré que la PPROM seule n'est pas une indication EB pour induire un accouchement au cours de la période de prématurité tardive. Néanmoins, en cas de portage maternel de Streptocoque du groupe B (SGB) et de PPROM, il demeure une controverse quant au moment optimal pour accoucher et ceci en raison du risque de septicémie néonatale associé au SGB. Une étude néerlandaise a montré que l'accouchement immédiat chez les femmes avec PPROM et porteuses d'un SGB permettait de réduire la septicémie néonatale avec une réduction du risque relatif de 86 % (39). En revanche, plus récemment, l’étude PPROMT a démontré le contraire, soit l’absence de bénéfice à accoucher immédiatement les patientes porteuses d’un SGB (39) en cas de PPROM au cours de la période de prématurité tardive. Ces cas de PPROM avec portage de SGB sont actuellement systématiquement induits dans notre centre à partir de 34 SA de grossesse, alors qu’une attitude expectative est privilégiée pour les cas de PPROM seuls (40, 41).

Le but de cette seconde analyse est d’évaluer le nombre d’accouchements prématurés tardifs qui auraient pu être évités à la maternité de Genève en analysant la même cohorte de patientes que pour l’étude “Avoiding late preterm deliveries to reduce neonatal complications: an 11-year cohort study” si nous avions appliqué les nouvelles recommandations concernant les PPROM.

Pour rappel, dans l’étude initiale, les cas de PPROM étaient considérés dans la catégorie des

accouchements spontanés puisqu’ils étaient systématiquement induits. Dans un premier temps, nous avons donc reclassifier ces accouchements de la manière suivante : soit en spontanés si la mise en travail se faisait naturellement après PPROM, soit en non-spontanés si l’accouchement était médicalement induit ou si une césarienne élective était réalisée. Ensuite, parmi les accouchements non-spontanés, nous avons de nouveau utilisé la classification de Gyamfi-Benneman et al. afin de distinguer les accouchements induits pour des indications EB des accouchements induits pour des indications non-EB.

Nous avons calculé le nombre de naissances prématurées tardives supplémentaires évitées en étudiant deux scénarios possibles :

(1) Scénario permissif (nombre maximum de naissances évitées) : tous les cas de PPROM non spontanés sans indication EB sont traités de façon expectative jusqu’à 37 semaines d’aménorrhée (2) Scénario conservateur (nombre minimum de cas évités) : certains cas de PPROM non-spontanés n'atteindront pas 37 semaines d’aménorrhées pour plusieurs raisons dont :

▪ Le développement d’une hémorragie au cours de la période expectative (taux de prévalence de 1,0 % dans notre étude) (42)

▪ L’induction due au portage de SGB (taux de prévalence de 19% dans notre centre) (43)

▪ Le développement d'une chorioamnionite pendant la prise en charge expectative de la grossesse (estimée à 6% dans la littérature) (44)

▪ La mise en travail spontanée au cours de la période expectative avant d’atteindre les 37 semaines d’aménorrhées (estimé à 60%) (38)

En soustrayant ce nombre de cas pour lesquels une prise en charge expectative était non possible au nombre maximum de cas évités, nous avons obtenu une estimation du nombre minimum de cas évités avec le scénario conservateur selon la littérature la plus récente disponible.

Il en résulte que parmi les 2,017 naissances prématurées tardives (5,0% de tous les accouchements ; n = 40,609), 1,122 (60,6%) femmes présentaient une PPROM.

Pour 473 des cas (42,2%), il y a eu une mise en travail spontanée et pour 649 cas (57,8%), l’accouchement a été médicalement indiqué avec une induction par voie basse ou une césarienne élective. Dans ce dernier groupe, 44 cas (6,8%) avaient une indication EB justifiant l’accouchement, alors que 605 cas (93,2%) présentaient une indication non-EB à l’accouchement.

En fonction du scénario, le taux d’accouchements prématurés tardifs qui aurait pu être évité varie entre 4,2% (95% intervalle de confiance [IC] 3.4–5.2) en appliquant le scénario conservateur et 30% (95% IC 28.0–32.0) en appliquant le scénario permissif.

Nous concluons que l'adoption des nouvelles recommandations pour la gestion de la PPROM durant la période de prématurité tardive permettra de prévenir entre 4.2% et 30% des naissances prématurées. Selon les données actuelles de la littérature cela contribuerait à réduire la morbidité et mortalité néonatales associées à la PPROM, bien qu’un grand nombre de cas de PPROM avec une prise en charge expectative n'arriveront pas à terme.

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