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3. La méthode

3.2. Interprétation des erreurs

3.2.1. Equivalence orthographique des deux textes

L'analyse des erreurs a permis de relever quelques déséquilibres existants d'un texte à l'autre notamment en terme d'orthographe lexicale qui, au vu des erreurs, a paru plus problématique dans le texte 2.

Ces observations nous ont amenées à réaliser quelques transformations, notamment en ce qui concerne les erreurs récurrentes. Ce travail a abouti à une nouvelle version des dictées, donc à une modification des textes, des items cibles et des syntagmes (Annexes 30 à 34, pages 34 à 38). De plus, certaines erreurs lexicales retrouvées isolément ont également fait l'objet de suppression ou de modification. Par voie de conséquence, la typologie des erreurs et les grilles de relevé des erreurs ont été changées également (Annexes 35 à 38, pages 39 à 42). En considérant les performances des participants à notre étude et en intégrant ces modifications, nous pensons être parvenues à un équilibre orthographique optimisé.

3.2.2. Présence d'interprétations sémantiques

La correction nous a permis de relever un certain nombre d’interprétations sémantiques possibles que nous n'avions pas forcément envisagées au préalable (Annexe 29, page 33). Ces décisions orthographiques à effectuer en lien avec la sémantique ont sans doute alourdi la charge cognitive (Lecocq et al., 1996) sans toutefois créer de déséquilibre entre les textes qui contiennent un nombre équivalent d'interprétations réalisables. Nous n'avons donc supprimé que la seule interprétation sémantique posant problème, portant sur l'item cible « originel » et « naturel » du syntagme 2 de chacun des textes.

3.2.3. Erreurs lexicales versus grammaticales

Selon nos recherches théoriques, l'orthographe grammaticale est la plus exposée aux erreurs (Manesse et Cogis, 2007). Nos items cibles ne permettent pas de le vérifier car les occurrences lexicales ont été sélectionnées pour leur difficulté particulière, renvoyant aux zones de fragilité orthographique (Fayol et Jaffré, 2008). Ainsi, nous observons à l'inverse que l'orthographe lexicale a été la plus touchée.

En revanche, l'analyse des textes complets contenant également des mots sans ambiguïté va dans le sens des études. L'orthographe grammaticale y est plus affectée bien que la différence quantitative reste faible. Ce constat peut être expliqué par :

– un grand nombre de mots inconsistants présents dans les textes, qui génèrent plus d'erreurs que les mots consistants (Bonin et Méot, 2002)

– le niveau orthographique des étudiants, appliquant généralement correctement les règles d'orthographe grammaticale (Millet et Lucci, 1994)

3.2.4. Erreurs lexicales

Comme nous l'avons montré dans nos résultats, plusieurs facteurs d'exposition aux erreurs peuvent être intriqués :

– des erreurs liées à l'ambiguïté orthographique (*s'afadit), les occurrences les plus affectées contenant plusieurs difficultés et augmentant ainsi l'hésitation orthographique (*crystaline, *desharssonne, *nouriçons) ;

– des erreurs liées à l'effet d'analogie (coupe-rose*) ; – des erreurs relevant d'une exception (*acnée), et,

– des erreurs en lien avec une faible fréquence (*rougeode).

Nous retrouvons ainsi les processus sur lesquels s'appuie le scripteur pour orthographier (effets de fréquence, d'analogie et application des règles) ainsi que les zones de fragilités de l'orthographe lexicale, notamment le doublement de consonnes, comme l'avait déjà révélé l'enquête de Blondel auprès des étudiants (Blondel, 2011 et 2012).

3.2.4.1. Erreurs entravant la phonologie des mots

Concernant le respect de la phonologie, 3 erreurs ont été retrouvées à la fois dans chacun des deux textes et pour les passations avec et sans tache ajoutée. Celles-ci ne renvoient pas à de réelles erreurs phonétiques dans le sens d'une conversion phonographémique erronée, mais à une mauvaise sélection de graphèmes dans le cadre de la polyvalence du son /an/ («*condescandante» et «*opalescante») et du son /s/ («*deçarssornent» - «*cicatrises» - «*insidieucement»).

De plus, nous retrouvons également «*insidueusement» chez 3 des participants, dans chacune des modalités avec et sans tâche ajoutée. Cette erreur peut résulter soit d'un mauvais encodage du mot dans le lexique orthographique, soit d'une erreur de langage oral, les mots «*insidueusement» et «*insidieusement» étant phonétiquement proches. La faible part de ce type d'erreurs correspond aux études théoriques qui s'accordent sur le fait que la procédure d'assemblage s'automatise précocement chez les sujets non dysorthographiques.

3.2.5. Erreurs grammaticales

Les erreurs retrouvées sont en adéquation avec le niveau orthographique de ces participants, étudiants en orthophonie. En effet, elles ont concerné en majorité les relations interférentes, plus complexes à traiter (Fayol et Jaffré, 2008). Comme nous l'avons vu dans la partie théorique, certaines correspondent à des erreurs de processus d'automatisation (Fayol et Got, 1991 ; Fayol et al., 1994) ou de récupération en mémoire (Largy et al., 1996), se rencontrant même chez le scripteur expert.

3.2.6. Erreurs sémantiques

Elles concernaient les occurrences monosyllabiques en rapport avec les thématiques de chaque texte, à savoir la voix (« voie ») et la peau (« pot »). Peu d'erreurs dans la sélection de ces homophones hétérographes a été retrouvé : 2 sans tâche ajoutée et 1, avec tâche ajoutée. Cette observation ne met pas en évidence l'influence de la tâche ajoutée sur le choix orthographique en lien avec la sémantique.

3.2.7. Autres erreurs

Les erreurs d'omissions, de substitutions et d'ajouts de mots ou de syllabes n'affectent pas l'orthographe en tant que telle. Elles ne nous ont pas vraiment renseignées sur les performances orthographiques des participants mais plutôt sur leur capacité d'attention et de mobilisation de leur mémoire de travail.

Le nombre d'erreurs plus élevé dans le texte 2 sans tâche ajoutée, pourrait être imputé à plusieurs paramètres :

– l'examinateur a dicté différemment en terme de segmentation ou plus rapidement le texte 2 ;

– son intensité vocale était moindre par rapport au texte 1, et,

– l'attention des participants était diminuée lors de la dictée du texte 2, réalisée après la dictée du texte 1.

Nous avons écarté les deux premiers paramètres extrinsèques, la façon de dicter ayant été similaire pour les deux textes, prenant le même temps (passations chronométrées) et les textes ayant été dictés dans les mêmes conditions sonores.

Ainsi, le paramètre attentionnel, intrinsèque, semblerait être à l'origine du plus grand nombre d'erreurs d'omissions, de substitutions et d'ajouts.

Toutefois, cette observation n'a pas été constatée dans la passation 2, dans laquelle nous avons retrouvé un nombre équivalent de substitutions et d'omissions.