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I. INTERFACES DE DEPOTS DE CUIVRE PROJETES PAR COLD SPRAY SUR DE L’ALUMINIUM

I.4. Etude des interfaces obtenues par projection cold spray

I.4.2. Interfaces Cu/Cu

Les interfaces particule/particule ont également pu être observées à l’aide de la microscopie en transmission, sur une lame élaborée par polissage mécanique et ionique (Chapitre II § III.1.5). Cette préparation est tout à fait adaptée à l’analyse d’une interface homogène Cu/Cu.

I.4.2.1. Analyse des joints observés

Le repérage d’interfaces séparant deux particules de Cu a été effectué depuis l’interface revêtement/substrat. L’incrustation d’une particule de cuivre dans le substrat conduisait, en effet, à la formation de points de rebroussement à l’interface Cu/Al, entre deux particules de cuivre (Figure IV- 17 a). Dans le dépôt, les frontières en continuité avec ces points de rebroussement étaient donc nécessairement des interfaces interparticulaires. Elles étaient constituées d’une interphase d’une épaisseur de 30 nm environ, présentant de petits pores répartis de façon irrégulière. Le cuivre, de part et d’autre de ce joint que l’on qualifiera de "projection", présentait des lignes de glissement ou une structure nanométrique (Figure IV- 18 b). 5 µm 1 µm (a) (b) 200 nm 50 nm (c) (d) Cu Al 2017 Cu Cu Cu Al 2017 Joint de projection Joint d’atomisation Pore Pore Profil X "Points de rebroussement"

Figure IV- 17. (a) Image MEB après attaque "acide sulfurique" et (b), (c), (d) images HAADF d’un revêtement de Cu cold spray /Al 2017,

en agrandissant les zones encadrées et (e) profils X correspondants

Un autre type d’interface, ne se trouvant pas dans le prolongement des points de rebroussement, a été identifié dans les dépôts de cuivre cold spray (Figure IV- 17 c). Il s’agissait, là encore, d’un film poreux de 30 nm d’épaisseur. Toutefois, les pores avaient une répartition et une taille différente des pores formés dans les joints de projection. Ils étaient plus volumineux, leur largeur étant celle du film dans sa totalité et ils étaient disposés de façon très régulière (Figure IV- 18 a).

La morphologie de ces interfaces rappelle celle des joints observés, plus approximativement, en microscopie électronique à balayage, sur la poudre de cuivre après attaque chimique (Figure IV- 2). Ces joints sont dits des joints "d’atomisation".

Les profils X ont permis de montrer que ces joints, qu’ils soient de projection ou d’atomisation étaient constitués de films d’oxyde de cuivre Cu2O (Figure IV- 17 e).

Figure IV- 18. (a) Image STEM d’un joint d’atomisation et

(b) image HAADF d’un joint de projection dans un dépôt de cuivre cold spray

(e) 100 nm 50 nm Pore Pore Lignes de glissement Nano- structure (a) (b)

I.4.2.2. Discussion

Compte tenu de l’atmosphère environnante, de la température des particules et des temps d’interaction courts, on peut supposer que l’oxydation des interfaces résulte principalement de l’oxydation superficielle de la poudre initiale (§ I.4.1.3.c).

Des analyses à la microsonde ont été réalisées en coupe et en surface de la poudre de Cu utilisée lors de la projection cold spray. La relativement faible résolution de cette technique (au mieux 1 µm3) n’a permis de donner qu’une information qualitative sur l’oxydation des particules. Le taux d’oxygène en superficie des particules (5,9 %at.) est plus élevé qu’en leur cœur (1,3 %at.). L’oxyde Cu2O est celui qui se forme à basse température quand le cuivre est

en contact avec l’air. Un film fin d’oxyde cuivreux Cu2O a donc pu se former en surface de la

particule lors du stockage de la poudre.

Dans le cas des interfaces interparticulaires, il s’agit d’une interaction céramique/céramique entre deux films de Cu2O en contact sous des hautes pressions, qui conduit à la création d’un

seul film de Cu2O.

Si l’on rapproche les mécanismes d’adhérence des particules cold spray entre elles à la consolidation dynamique, on peut supposer que la superficie des particules s’est liquéfiée durant la projection. En effet, pendant la consolidation dynamique de poudre de cuivre, l’adhérence des particules entre elles est principalement assurée par des phénomènes métallurgiques comportant le passage à l’état liquide des interfaces [THO83]. La particule peut donc atteindre localement une température de 1230 °C et permettre la fusion de l’oxyde et d’une partie du cuivre environnant. Les grains nanométriques observés au voisinage des joints de projection semblent donc résulter d’une solidification rapide du cuivre, localement, à l’interface entre deux particules.

Le fait que les joints d’atomisation aient la même taille et la même composition que les joints de projection va dans le sens d’un passage à l’état liquide aux interfaces Cu/Cu. En effet, lors de l’atomisation, on peut supposer qu’une partie de l’oxygène présent dans la particule ségrége dans ces joints durant la solidification pour former l’oxyde cuivreux. Ces joints d’atomisation correspondent à ce que l’on appelle le dernier liquide dans la poudre, durant son élaboration. Ils sont donc issus d’une solidification rapide, correspondant à une vitesse de refroidissement de l’ordre de 1010 °C.s-1 [GER94]. Il existe donc une forte analogie avec les mécanismes présumés de formation des joints de projection dans cette étude.

La porosité des joints d’atomisation peut trouver son origine dans des phénomènes de retassure ou d’empilement de lacunes dues à un manque d’oxygène durant la solidification. Cela expliquerait la régularité de la formation des pores.

La taille plus réduite des pores aux joints de projection peut être expliquée par l’application de hautes pressions lors de la solidification qui forcent un contact plus intime et limitent la porosité due aux phénomènes de diffusion.

I.5. Conclusion

L’analyse métallurgique des interfaces Cu/Al et Cu/Cu à différentes échelles a permis de mettre en évidence des mécanismes phénoménologiques de l’adhérence lors de projections par cold spray. Il est difficile d’attribuer à un unique phénomène l’origine de l’adhérence. On peut plutôt parler de types de mécanismes d’adhérence à différentes échelles.

Tout d’abord, macroscopiquement, l’incrustation du cuivre dans l’aluminium et dans les particules déposées favorise l’adhérence par ancrage mécanique (§ I.2). L’impact des particules mène également à la formation de jets de matière (§ I.3.1) qui augmentent encore la surface de contact entre Cu et Al en formant une rugosité d’interface.

La formation de ces jets de matière est issue de la collision des deux matériaux à haute vitesse qui engendre des sollicitations en cisaillement qui peuvent être considérés comme

adiabatiques et qui sont très rapides. Cela conduit à l’écoulement visqueux du matériau qui devient hyperplastique (§ I.3.2).

D’autre part, les interfaces réalisées sont oxydées (§ I.4.1). Cette oxydation est présumée provenir principalement de l’oxydation superficielle des matériaux en contact. Contrairement à ce qui est souvent supposé dans la bibliographie [ASS03] [GRU03] [CHAN04] [DYK99], toute l’oxydation interfaciale n’est pas expulsée en bord de particule avec l’éjection de matière. Les films d’oxydes sont très probablement fragmentés sous le choc. À des échelles très fines, le contact établi pendant la projection est donc mixte. C’est un contact métal/métal et métal/céramique/métal par endroits.

Aux interfaces dépôt/substrat, des phases intermétalliques Cu/Al oxydées ainsi que des domaines eutectiques ont été identifiées (§ I.4.1.1 et I.4.1.2). Leur nature, leur taille et leur morphologie permettent d’avancer qu’elles ont été formées après une fusion locale suivie d’une solidification plus ou moins rapide (§ I.4.1.3).

Aux interfaces interparticulaires, un film d’oxyde cuivreux est formé (§ I.4.2.1). Au vu de son épaisseur et de sa morphologie (§ I.4.2), par analogie avec l’atomisation, un passage à l’état liquide peut également être supposé.

La bibliographie regroupe les mécanismes d’adhérence mis en œuvre pendant la projection cold spray sous le terme vague de "soudage à froid" (Chapitre I § IV.2.2). On a recours à ce vocable dans d’autres techniques expérimentales : le soudage par explosion et la consolidation dynamique de poudre. La projection d’une particule sur un substrat conduit à des interactions voisines de celles obtenues lors de soudage par explosion. De même, l’impact des particules entre elles présente des similarités avec la consolidation dynamique de poudre. La mise en évidence de fusion locale aux interfaces cold spray peut donc être, par analogie, à l’origine de l’adhérence des interfaces soudées à froid, par soudage par explosion ou compaction dynamique.

Le terme soudage à froid (ou même "cold" spray !) est donc très impropre et suppose une vision macroscopique des mécanismes mis en jeu. Les mécanismes d’adhérence qui interviennent lors de ces interactions de courte durée semblent, en effet, supposer une liquéfaction très locale des matériaux en contact.

II. MODELISATION DYNAMIQUE DES ASPECTS MECANIQUES