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Interactions protéines-protéines

Dans le document Étude de l'épissage alternatif des UGT2B (Page 90-93)

CHAPITRE I : INTRODUCTION

3. Mécanismes à l’origine de la variabilité de la glucuronidation

3.7 Interactions protéines-protéines

Dès le début des années 1980, des techniques d‘inactivation par la radiation et de filtration sur gel avaient permis de déterminer que les complexes protéiques responsables de la glucuronidation chez le rongeur étaient des groupements moléculaires de 73 et 318 kDa, une masse beaucoup plus importante que celle d‘un UGT (autour de 60 kDa)732-734. Chez l‘humain, des études similaires ont montré que les complexes protéiques responsables de la glucuronidation avaient un poids total de 91-218 kDa 735. À la lumière des caractéristiques maintenant connues des UGT, ces différents indices laissaient croire que ces enzymes pourraient être actives en dimères. Les premières preuves expérimentales de dimérisation des UDP-glucuronosyltransférases ont été détectées chez le rat, où UGT2B1 forme des homodimères 736 et des hétérodimères avec des UGT1 737. L‘impact fonctionnel de ces interactions n‘a pas été rapporté, mais il a été observé que l‘enzyme UGT2B22

du cochon d‘Inde était inactive sur la morphine, mais permettait d‘augmenter significativement la capacité de glucuronidation de ce substrat par UGT2B21 738, 739. L‘oligomérisation des UGT humains a par la suite été testée par différentes méthodes expérimentales, ce qui a permis de déterminer plusieurs des interactions UGT-UGT possibles (voir Tableau 2 pour un résumé des interactions protéine-protéine rapportées). En plus des nombreux exemples présentés dans ce tableau, des études ont démontré que les formes i1 des UGT1A étaient en mesure de former des hétérodimères avec toutes les formes tronquées i2 et que ces formes courtes étaient capables de former des dimères entre elles 61, 62.

Tableau 2 : Interactions protéine-protéine des UDP-glucuronosyltransférases rapportées dans la littérature et méthode de détection.

UGT 1A1 1A3 1A4 1A6 1A7 1A8 1A9 1A10 2B7 1A1 G 275, 740 F 279 C 62, 279 L 275 T 275 F 279 C 279 G 740 F 279 C 279 C 273 F 279 C 279 F 279 C 279 F 279 C 279 F 279 C 279 F 279 C 279 C 273, 274 G 274 1A3 F 279 1A4 G 740 F 279 C 277 1A6 C 277 G 740 F 279 1A7 F 279 1A8 F 279 1A9 F 279 C693, 741 1A10 F 279 2B7 C 273, 274 G 274 C 274 G 274 C 273, 274 G 274 C 274 G 274 C 278 CYP 3A4 C 273, 281 O 281 L 281 C 273 C 273, 280 O 280

Légende : C=Co-immunoprécipitation ; G=immunobuvardage sur gel natif (non-dénaturant); O=« overlay assay » ; L=« cross-linking » ; F=FRET ; T=analyse « two-hybrid » chez la levure

L‘influence de l‘homodimérisation sur l‘activité des UGT n‘a pas été testée jusqu‘à présent, mais certains indices laissent croire qu‘elle induirait une modulation de l‘efficacité de glucuronidation des UGT actives lors de l‘interaction avec un homologue muté 275. Dans le cas d‘UGT2B7, le remplacement de sa région putative de dimérisation mène à un changement de la forme de sa cinétique de glucuronidation et diminue fortement sa capacité enzymatique 268, 278. En ce qui a trait à l‘hétérodimérisation entre les UGT, il a été dans la plupart des cas remarqué que les interactions protéine-protéine entre UGT1A1, UGT1A4, UGT1A6 et UGT1A7 améliorent la capacité de glucuronidation de ces enzymes 279, 740. Fujiwara et collègues ont rapporté que

UGT2B7 augmente l‘activité de glucuronidation de UGT1A1, 1A4, 1A6 et 1A9, et que ces quatre UGT influencent positivement la conjugaison par UGT2B7 274. À l‘inverse des observations obtenues jusqu‘à maintenant, certains ont observé que UGT1A6 modulait négativement l‘action de UGT2B7 sur la morphine et l‘AZT 277. De façon intéressante, les UGT comblent l‘impact négatif de la mutation Y486D sur l‘activité d‘UGT1A6 sur la sérotonine et ce, même si tous ces UGT n‘ont pas d‘affinité pour ce substrat 277. De son côté, UGT1A4 peut restaurer le niveau d‘activité perdue d‘une protéine UGT1A9 tronquée et soluble 742. Cette caractéristique de sauvetage (« rescue ») de l‘activité de glucuronidation d‘une isoforme rendue non fonctionnelle par une mutation pourrait d‘ailleurs constituer un des effets les plus importants de l‘hétérodimérisation de la super-famille des UGT. En ce qui a trait aux formes courtes UGT1A_i2, leur dimérisation avec les formes actives UGT1A_i1 a été identifiée comme étant la cause de l‘inhibition de la glucuronidation par ces formes i2 62.

Étant donné leur implication dans le métabolisme des mêmes molécules et de leur localisation cellulaire identique, certains auteurs ont postulé que les cytochromes P450 (CYP) et les UGT étaient probablement en mesure d‘interagir et de coopérer directement au niveau du réticulum endoplasmique 24, 743. Cette hypothèse a tout d‘abord été testée dans le foie du rat 744, 745, où il a été remarqué que certains inhibiteurs des CYP avaient un impact négatif sur la glucuronidation uniquement lorsque la membrane du réticulum était intacte (donc que les deux types d‘enzymes étaient potentiellement en contact) 746. Chez l‘humain, la co-immunoprécipitation de CYP3A4 et de UGT2B7 a permis de révéler leur interaction dans des microsomes de foie 281. Il a aussi été démontré que cette isoenzyme, en plus de CYP2C9 et CYP1A2, avait un effet négatif sur les niveaux de glucuronidation de la morphine par UGT2B7 280. La transfection de différents CYP influence d‘ailleurs l‘activité de glucuronidation des cellules hépatiques HepG2 (particulièrement CYP2A6, 2C8, 2E1 et 3A4), ce qui laisse également croire à une influence directe des CYP sur l‘activité des UGT au foie 747.

Peu est connu concernant l‘identification de la région essentielle pour la dimérisation des UGT, mais il semble que la partie C-terminale de l‘enzyme y participe : en effet, la région 152-180 de UGT1A1 (appelée MRA pour « Micro-Anchoring Region ») semble allouer l‘homodimérisation de cette enzyme 275 (bien qu‘une étude récente soit venue contredire ces résultats 655), tandis que pour UGT2B7 une analyse in silico a pu montrer que la séquence de UGT2B7 entre les acides aminés H183 et E200 serait impliquée 278. Cependant, la queue cytoplasmique et l‘hélice trans- membranaire ne semblent pas essentielles étant donné qu‘une version soluble de UGT1A9 et les variants UGT1A_i2 sans ces structures forment tout de même des dimères 62, 742. Des délétions

concomitantes du peptide signal et du domaine transmembranaire empêchent l‘homodimérisation de UGT1A1 655, ce qui pourrait laisser croire que l‘interaction protéine-protéine de ces enzymes implique plusieurs domaines.

Sans structure tridimensionnelle, l‘explication moléculaire derrière la modulation de l‘activité par la dimérisation des UGT reste pour l‘instant spéculative. Malgré cela, Finel et collaborateurs avancent que les changements conformationnels provoqués par les interactions protéine-protéine stabilisent indirectement l‘état actif du monomère UGT impliqué et/ou induisent des modifications dans les interactions avec la membrane du réticulum endoplasmique 748. Basé sur les résultats décrits dans cette section, la compréhension fondamentale des interactions protéine- protéine impliquant les UGT permettra probablement de mieux comprendre une partie de la variabilité de l‘activité de ces enzymes 173, 748.

Chacun des éléments décrits dans la dernière section pourrait avoir une influence sur l‘expression et/ou l‘activité des UGT et donc induire la présence de variabilité de la voie de la glucuronidation. Dans les dernières années, la transcription et les modifications post-transcriptionnelles des ARNm des UGT a pris beaucoup d‘importance, ce courant étant amplifié par la découverte d‘une diversité insoupçonnée du transcriptome UGT. Dans ce contexte, une compréhension fine des différents aspects reliés à l‘expression en ARN devient essentielle afin de saisir l‘impact potentiel de ces éléments sur le contrôle transcriptionnel des loci UGT. La section suivante constitue un résumé de la littérature concernant l‘expression, la maturation et le contrôle de la transcription.

Dans le document Étude de l'épissage alternatif des UGT2B (Page 90-93)