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Première partie : Partie théorique

II. Les anticoagulants oraux :

II.2. Les anticoagulants oraux directs :

II.2.10. Interactions médicamenteuses et alimentaire :

Il n’existe pas, à l’heure actuelle, d’interaction alimentaire connue avec les AOD.

Comme tout médicament à risque hémorragique, l’association des AOD avec un autre médicament faisant saigner sera prudente et réfléchie [80]. Les interactions médicamenteuses, bien que moins fréquentes qu’avec les AVK, nécessitent d’être connues. Elles sont expliquées par divers mécanismes tels que la métabolisation hépatique ou le transport membranaire. Ces interactions changent le devenir pharmacologique de ces médicaments. Leur concentration attendue dans le plasma sera modifiée.

Il y a deux mécanismes pouvant être à l’origine de ces modifications pharmacologiques chez les AOD. Ce sont ceux en relation avec la P-glycoprotéine [81] et le cytochrome P450 (ou CYP3A4). La P-gp est une protéine de transport qui permet aux molécules ayant une excrétion intestinale majeure de rejoindre la lumière intestinale, tel que le dabigatran et le rivaroxaban. Les molécules, comme le rivaroxaban et l’apixaban, qui ont une élimination plutôt par voie fécale après passage hépatobiliaire sont en relation avec le CYP450.

Une augmentation du risque hémorragique du Dabigatran, du Rivaroxaban et de l’apixaban est à craindre par plusieurs mécanismes :

 Par augmentation du risque hémorragique en cas d’association avec un autre médicament anticoagulant:

o Agents antiplaquettaires (Clopidogrel, Prasugrel, Ticagrelor, ...) par inhibition de l’agrégation plaquettaire et addition du risque hémorragique ;

o A l’aspirine, quelle que soit la dose par inhibition de l’agrégation plaquettaire et addition du risque hémorragique ;

o AINS (Ibuprofène, Naproxène, Diclofénac, Célécoxib, Etoricoxib, ...) par inhibition de l’agrégation plaquettaire.

 Par accumulation lors de la diminution de l’élimination rénale : o Les diurétiques, induisant une hypovolémie par augmentation de la natriurèse, ou encore les AINS qui diminuent la perfusion rénale par inhibition de la synthèse des prostaglandines, exposent à des insuffisances rénales fonctionnelles. On peut également citer les Inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et les Sartans;

o Les médicaments exposant à des insuffisances rénales organiques sont : anti-infectieux (Aminosides, Vancomycine, Amphotéricine B), Cytotoxiques (Méthotrexate, Platines) Immunosuppresseurs (Ciclosporine, Tacrolimus), Autres (Mannitol, Litium, Fibrates).

 Par inhibition de la P-gp (risque de surdosage et donc hémorragique):

o Antifongiques azolés (Kétoconazole, Itraconazole, Voriconazole) car ils sont des inhibiteurs du CYP 3A4 et de la P-gp et augmentent l’exposition au médicament de 160 % [82]. Ils sont donc contre--indiqués en association avec les AOD ;

o Les antiarythmiques (Amiodarone, Vérapamil, Quinidine, qui doit être donnée au minimum 2 heures après le dabigatran) ;

Une augmentation du risque hémorragique des anti Xa directs est également à craindre en cas d’association aux inhibiteurs du CYP 3A4, qui augmentent leurs concentrations plasmatiques. Il s’agit des :

o Antibactériens : Clarithromycine et macrolides, avec une augmentation de l’exposition de 50 % [83];

o Inhibiteurs de la protéase du VIH : Ritonavir avec une augmentation de l’exposition de 50% ;

o Antisécrétoire gastrique : Cimétidine.

Un risque thrombotique est à craindre lors d’un traitement concomitant par:  Les inducteurs de la P‐gp, qui diminuent l’exposition aux traitements anti IIa et anti Xa, il s’agit des :

o Plantes : Millepertuis ;

o Antibactériens : Rifampicine, qui diminuent l’exposition au médicament de 50 % [83].

 Les inhibiteurs de la pompe à protons, l’absorption intestinale étant dépendante d’un pH acide.

 Les inducteurs puissants du CYP3A4, qui diminuent l’exposition aux seuls anti-Xa directs :

Tableau 11 : Interactions médicamenteuses dabigatran [45,74] dabigatran inhibiteur de la P-gp: ciclosporine kétoconazole idraconazole dronédarone tacrolimus contre indiqué amiodarone quinidine vérapamil ticagrelor posaconazole adaptation posologique clarithromycine surveillance inducteur de la P-gp: rifampicine millepertuis carbamazépine phénytoine à éviter

Tableau 12 : Interactions médicamenteuses rivaroxaban [46] et apixaban [47,74] rivaroxaban apixaban inhibiteurs du CYP3A4 et de la P-gp kétoconazole itraconazole voriconazole posaconazole ritonavir à éviter à éviter dronédarone à éviter érythromycine fluconazole aucune recommandation

inducteurs du CYP 3A4

rifampicine phénytoïne carbamazépine phénobarbital millepertuis à éviter

association à éviter dans la prévention des MTEV en chirurgie et contre indiquée dans le traitement des MTEV

Tableau 13 : Interactions médicamenteuses edoxaban [48]

edoxaban inhibiteurs de la P‐gp ciclosporine dronédarone érythromycine kétoconazole adaptation posologique (30 mg en une seule prise par jour)

II.2.11. Effets indésirables :

II.2.11.1. Complications hémorragiques :

Les AOD présentent le même risque hémorragique que les autres anticoagulants. Différentes études ont comparé les taux d'hémorragies sous AOD à ceux des patients traités par l'anticoagulant oral de référence : la Warfarine. Ces études rapportent une incidence des hémorragies sous AOD similaire à celle sous Warfarine. Cependant le taux d'hémorragies intracrâniennes sous AOD est plus faible que sous Warfarine, alors que le taux d'hémorragies intestinales est plus élevé. La mortalité toutes causes sous AOD n'est pas significativement plus élevée que sous Warfarine [84,85]. Il n'y a pas d'étude comparative avec la Fluindione ou l'Acénocoumarol.

II.2.11.1. Autres complications :

Indépendamment des complications hémorragiques, d’autres effets indésirables ont été mis en évidence avec les AOD au cours des essais cliniques et depuis leurs commercialisations [3, 70, 71,72] :

Troubles gastro-intestinaux : les nausées sont fréquentes sous AOD. Pour le Dabigatran, il a également été rapporté des diarrhées et des dyspepsies ;

Anomalies de la fonction hépatique avec une augmentation des transaminases, cela fait l'objet d'une surveillance accrue par la pharmacovigilance (Surtout avec le dabigatran et le rivaroxaban) ;

Infarctus du myocarde : pour le Dabigatran, une augmentation du risque d'IDM avait été rapportée lors des études, mais cette augmentation n'était pas significative ;

Insuffisance rénale : peu documentée, mais qui fait l'objet d'une surveillance accrue par la pharmacovigilance (Rivaroxaban) ;

Thrombopénies peu fréquentes ;

Effets cutanés d'hypersensibilité : prurit, éruption, œdème, voire DRESS syndrome (Drug Reaction with Eosinophilia and Systemic Symptoms) ;

sensations vertigineuses, céphalées (rivaroxaban).

II.2.11.2. Pharmacovigilance et plan de gestion des risques :

Depuis la commercialisation de ces nouveaux médicaments, les comités de pharmacovigilance européens tiennent compte régulièrement des données recueillies au travers des déclarations d'événements indésirables, il y a de plus en plus de signalements d’événements hémorragiques, voire fatals, non documentés dans le cadre de leurs essais cliniques. Selon les résultats de ce suivi, la plupart des accidents liés aux AOD sont hémorragiques, dont 42% d’hémorragies graves sous rivaroxaban et 24% sous dabigatran en 2010.

Certains facteurs de risque identifiés comme étant liés à la survenue d'événements indésirables ont été identifiés (insuffisance rénale, sujets âgés de plus de 75 ans, faible poids inférieur à 60 kg, interactions médicamenteuses, posologies inadaptées, non-respect des indications du produit,...), et ont permis de préciser les conditions d'utilisation et de surveillance des patients [65].

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