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II.2 Vieillissement expérimental des échantillons par irradiation électronique

II.2.1. i Interactions électrons – matière

Afin de prévoir la trajectoire d’un électron dans la matière, il est nécessaire de comprendre comment il évolue à l’intérieur de celle-ci. Pour cela, il est essentiel de connaître les interactions qui peuvent se produire et de quelles manières elles vont modifier la course et l’énergie d’un électron.

Elles peuvent être classées dans deux catégories : élastique ou inélastique. Une interaction élastique est définie comme une interaction au cours de laquelle il y a conservation de l’énergie cinétique totale du système. Dans le cas où l’énergie cinétique totale n’est pas conservée, l’interaction est dite inélastique. Interactions électrons – nuages électroniques

Les électrons incidents peuvent interagir avec les électrons du nuage électronique des atomes. L’élec- tron primaire est alors dévié de sa trajectoire et transfère une partie non-négligeable de son énergie à l’électron du nuage électronique. En fonction de l’énergie transférée, deux types de processus peuvent être observés : l’excitation ou l’ionisation.

Phénomène d’excitation :

Dans le cas où l’énergie absorbée n’est pas suffisante, l’électron atomique peut être promu vers un niveau énergétique de plus haute énergie. Dans ce cas, l’électron absorbe un quantum d’énergie dont la valeur est égale à la différence d’énergie entre les deux niveaux.

Phénomène d’ionisation :

Dans le cas où l’énergie transférée à l’électron du nuage électronique est supérieure à l’énergie de liaison, ce dernier est éjecté du cortège électronique : l’atome est ionisé. L’électron éjecté est alors appelé électron secondaire par analogie aux électrons incidents nommés électrons primaires. S’ils sont créés suffisamment proches de la surface, ils peuvent ressortir du matériau et être détectés. C’est sur la détection de ce type d’électrons que se base en partie la technique de Microscopie Élec- tronique à Balayage. Dans ce mode de fonctionnement, la détection de ces électrons permet de faire une image de la topologie de surface. En effet, le rendement d’émission secondaireδ suit une loi de Lambert [139] qui est fonction de l’angle d’incidence :

δ = δ0(cosθ)−

1

n (II.1)

Avecδ0le rendement d’émission secondaire maximal à incidence normale,θ l’angle d’incidence du

faisceau d’électrons et n un coefficient qui dépend du matériau. Interactions électrons – noyaux atomiques

Les électrons peuvent également interagir de manière coulombienne avec le noyau des atomes. Ces interactions ont pour effet de dévier les électrons de leur trajectoire initiale et d’entraîner des pertes d’énergie.

Cette perte d’énergie peut se traduire par deux phénomènes. Dans un premier cas, l’énergie cinétique perdue par l’électron peut être transférée au noyau atomique. L’énergie totale du système est alors conservée et la diffusion est dite élastique. Au cours de cette déviation par un atome de nombre de masse A, l’énergie perdue par un électron incident peut être calculée, en fonction de l’énergie initiale de l’électron E0et de l’angle de déviationθ, par la relation suivante [140] :

E = Emax sin2 µθ 2 ¶ (II.2) Où Emax=E0(1,02 + E0× 10 −6)

465,7A représente l’énergie maximale que peut perdre l’électron lors de cette interaction.

Ainsi, pour des angles de déviation faibles, la perte d’énergie est négligeable par rapport à l’énergie incidente de l’électron.

Par exemple, un électron de 200 keV dévié de 10 ° par un atome de fer (A = 56) perd 70 meV. Mais, pour des angles de déviation importants (E = Emaxlorsqueθ = 180 °), cette perte d’énergie n’est plus négligeable pour des atomes ayant un nombre de masse faible et des énergies initiales importantes. Dans un second cas, l’énergie perdue n’est plus transférée au noyau atomique mais est convertie en photon. En effet, la diminution de la quantité de mouvement de l’électron à l’approche du noyau s’accompagne de l’émission d’un photon. Cette émission prenant son origine dans la décélération d’un électron, elle est également appelée rayonnement continu de freinage ou Bremsstrahlung. Dans cette interaction, l’électron peut perdre toute son énergie en produisant un photon d’énergie E0: la longueur d’onde maximale du photon émis estλmax= hc/E0. Ainsi, l’énergie du rayonnement

émis peut prendre des valeurs continues dans la gamme [0 ; E0] eV. La distribution de l’intensité du

rayonnement en fonction de son énergie est décrite par la loi de Kramers [141]. Cette loi prévoit que l’intensité maximale de l’émission correspond à une énergie proche de E0. De ce fait, pour des énergies

initiales importantes, la longueur d’onde de l’émission se trouve donc principalement dans le domaine des rayons X.

L’électron primaire qui a perdu une partie de son énergie au cours d’une interaction, que ce soit avec le noyau atomique ou le cortège électronique, a la possibilité de ressortir du matériau s’il est dévié vers la surface : l’électron est alors appelé électron rétrodiffusé.

Pénétration d’un faisceau d’électrons dans un solide

En pénétrant dans un matériau, les électrons vont subir toutes les interactions décrites ci-dessus. La Figure II.3 présente les trajectoires, simulées à l’aide du logiciel CASINO, d’électrons de 400 keV pénétrant dans du silicium (ρSi= 2,33 g.cm−3).

Figure II.3 – Simulation CASINO de la pénétration

d’un faisceau d’électrons mono-énergétiques de 400 keV dans un solide de silicium.

Le logiciel CASINO (acronyme pour "monte CArlo SImulation of electroN trajectory in sO- lids") est un logiciel libre qui permet de modéliser par des méthodes Monte-Carlo l’interaction d’un faisceau d’électrons avec un système d’objets [142, 143]. Ce système peut être composé d’un ou plusieurs solides caractérisés par leur com- position chimique et leur densité. Ainsi, ce logi- ciel ne prend pas en compte la structure physico- chimique du matériau. Cependant, cette approxi- mation est mineure car le paramètre jouant prin- cipalement sur les interactions électrons–matière est la masse des atomes.

Cette succession d’interactions va disperser les électrons dans un volume appelé poire d’interac- tions. Les dimensions (diamètre et profondeur) de ce volume sont fonction de l’énergie des élec- trons incidents et de la densité du matériau. La

portée d’un électron est alors définie comme la distance maximale parcourue dans le matériau avant de s’arrêter. Pour les particulesβ (électrons et positons), les relations empiriques de Katz-Penfold [144] permettent de calculer cette portée :

R =0,412 E

1,265−0,0954ln(E)

ρ [0, 01 ≤ E ≤ 2,5MeV] (II.3)

R =0,530 E − 0,106

ρ [E ≥ 2,5MeV] (II.4)

Où R est la portée des électrons (cm), E l’énergie des électrons incidents (MeV) etρ la densité du matériau (g.cm−3).

Dans cette relation, le seul paramètre matériau pris en compte est la masse volumique de celui-ci. En effet, le numéro atomique des atomes va jouer sur le nombre d’interactions et les pertes d’énergie qui y sont associées alors que la masse volumique va jouer sur le libre parcours moyen des électrons et donc sur la distance parcourue (i.e. sur la portée).

Les différents rayonnements issus de l’interaction des électrons avec le matériau proviennent de ce volume mais d’une profondeur différente. Par exemple, les électrons Auger, qui ont une énergie faible par rapport au faisceau incident, ne peuvent provenir que de l’extrême surface de l’échantillon : ceux créés à une profondeur plus importante sont stoppés avant d’atteindre la surface, ce qui fait de la Spectroscopie d’Électrons Auger une technique d’extrême surface. La Figure II.4 reprend cette poire d’interactions en faisant apparaitre les différentes zones de production des rayonnements.

Figure II.4 – Schéma de la poire d’interactions et des différents rayonnements produits (extrait de [145]).

II.2.1.ii Pouvoir d’arrêt électronique d’un matériau et notion de dose ionisante