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2.2 Introduction `a la physique des fermions lourds

2.2.4 Interaction RKKY - Diagramme de Doniach

En raison de la grande concentration d’impuret´es magn´etiques dans les r´eseaux Kondo, les interactions entre les diff´erents moments ne peuvent plus ˆetre n´eglig´ees. Ces interactions entre les ´electrons f qui occupent diff´erents sites atomiques ne sont pas directes, comme dans le magn´etisme des m´etaux de transition, mais indirectes ; elles sont m´edi´ees par les ´electrons de conduction. Ce sont les interactions Ruderman-Kittel-Kasuya-Yosida (RKKY) [49, 50, 51].

Dans le cadre des interactions RKKY, un spin localis´eSi interagit avec le spin s d’un ´electron de conduction, conduisant `a une polarisation du spin de ce dernier. Cette polarisa-tion interagit `a son tour avec le spinSj d’un autre ion localis´ej, ce qui cr´ee une interaction indirecte entre les spinsSi etSj. Lorsque cette interaction magn´etique, dont le signe oscille en fonction de la distance entre les impuret´es, est dominante, elle induit un ordre magn´etique `a longue distance dans le syst`eme. L’´energie associ´ee `a l’interaction RKKY s’´ecrit sous la forme :

kBTRKKY ∝J2NF) (2.6) A partir des deux ´echelles d’´energie caract´eristiquesTK etTRKKY (formules 2.2 et 2.6), Doniach d´ecrit l’´etat fondamental `a basse temp´erature des fermions lourds comme r´esultant de la comp´etition entre les diffusions de type Kondo et les interactions RKKY, ce qui conduit au diagramme de phase illustr´e sur la figure 2.5. Les syst`emes `a fermions lourds sont g´en´eralement proches d’une instabilit´e magn´etique gouvern´ee par la comp´etition entre l’effet Kondo et les interactions RKKY.

(a) (b)

Figure 2.4 – (a) Trac´e du coefficient de Sommerfeld γ en fonction de la susceptibi-lit´e χ(0) en ´echelle log-log pour diff´erents fermions lourds. La ligne correspond au rap-port de Wilson RW=1 [48]. (b) Trac´e du coefficient de la r´esistivit´e A en fonction du coefficient de Sommerfeld γ en ´echelle log-log pour diff´erents fermions lourds. La ligne continue correspond au rapport de Kadowaki-Woods RKW = A

γ2 trouv´e dans la plu-part des compos´es RKW 106µΩcm(mol.K/mJ)2 La ligne en pointill´es correspond `a RKW 0.4×106µΩcm(mol.K/mJ)2 et semble d´ecrire `a la fois les compos´es `a base de Yb et les m´etaux classiques [47].

pression. PourJNpetit (r´egion 1), on aTRKKY > TKet le syst`eme a tendance `a d´evelopper un ordre magn´etique, particuli`erement `a basse temp´erature o`u un ordre antiferromagn´etique est g´en´eralement observ´e. En revanche, `a fortJN (r´egion 3), c’est la temp´erature de Kondo TK qui domine ; le syst`eme est dans l’´etat fermion lourd, caract´eris´e par un comportement liquide de Fermi renormalis´e avec de grandes masses effectives. Dans ce cas, on constate la disparition du magn´etisme car les moments magn´etiques des impuret´es sont isol´es. La r´egion o`u les deux ´echelles d’´energie sont comparables (r´egion 2) est gouvern´ee par de fortes fluctuations magn´etiques, pouvant induire, `a basse temp´erature, l’apparition de supracon-ductivit´e non conventionnelle et dans certains cas l’observation d’un point critique quantique (transition de phase `aT=0).

Plusieurs r´esultats exp´erimentaux montrent qu’au voisinage de l’instabilit´e magn´etique on a un comportement non-liquide de Fermi (NLF) [52]. A la diff´erence d’une transition de phase classique, d´ecrite par la th´eorie de Landau, o`u ce sont les fluctuations thermiques qui gouvernent, une transition de phase quantique a lieu `a T=0 K et elle est gouvern´ee par les fluctuations quantiques associ´ees au principe d’incertitude d’Heisenberg. Il semblerait que les effets de la temp´erature sur ces fluctuations quantiques soient `a l’origine, au PCQ, de ce r´egime non-liquide de Fermi. A l’approche du PCQ, le r´egime NLF est souvent caract´eris´e par :

une r´esistivit´e quasi-lin´eaire :ρ∼AT1+² avec ²¿1

une divergence du coefficient quadratique de la r´esistivit´eA

une d´ependance logarithmique en temp´erature du coefficient de Sommerfeld : γ −ln(T)

La masse effective m ´etant proportionnelle `a ces deux derniers coefficients, elle diverge ´egalement `a l’approche d’un PCQ.

Introduction `a la physique des fermions lourds Liquide de Fermi TK TRKKY T e m ra tur e δ = N(εF)J

Point Critique Quantique

1 2 3

Magnétisme

Figure 2.5 – Diagramme de Doniach temp´erature en fonction d’un param`etre ajustable tel que la pression ou le dopage. La r´egion 1 correspond au r´egime antiferromagn´etique o`u T < TK et la r´egion 3 au r´egime dit `a fermions lourds (liquide de Fermi renormalis´e). La r´egion 3 correspond `a un r´egime de fortes fluctuations o`u dans le cas de certains compos´es une phase de supraconductivit´e non-conventionnelle peut apparaˆıtre `a basse temp´erature. Dans la limiteT 0 la transition `aδc entre la phase ordonn´ee magn´etiquement et le r´egime liquide de Fermi donne lieu `a un point critique quantique.

De tels comportements sont observ´es par exemple dans le cas de CeCoIn5. Alors qu’`a basse temp´erature ce compos´e est supraconducteur avec une temp´erature critique Tc=2.3K, l’application d’un champ magn´etique va conduire le syst`eme dans un ´etat liquide de Fermi. En revanche, `a plus haute temp´erature, les propri´et´es du liquide de Fermi ne sont pas v´erifi´ees. Un PCQ induit sous champ est observ´e vers le champ critique supraconducteur Hc2 ' 5 T [53, 54]. La figure 2.6 montre que la r´esistivit´e est lin´eaire sur une large gamme de temp´erature et que le coefficientA diverge quand le champ magn´etique approche 5T.

Figure 2.6 – D’apr`es [53]. A gauche : r´esistivit´e de CeCoIn5 pour des champs compris entre 0 et 16T. A droite : Diagramme de phase de CeCoIn5obtenu `a partir de mesures de r´esistivit´e. En insert, d´ependance en champ magn´etique du coefficientA.

Supraconductivit´e non-conventionnelle