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20 Pourquoi les autres ne sont-ils pas aussi intelligents que moi ?

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Les styles sociaux

« Pourquoi les autres ne sont-ils pas aussi intelligents (ou subtils, drôles, compétents…) que moi ? » Cette question qui vous taraude peut-être, a au moins deux réponses : la première, vous êtes quelqu’un d’exception et ce n’est pas facile ; la seconde, pas nécessairement incompatible : les autres sont… différents ou du moins ils peuvent l’être, notamment dans leurs besoins et leurs préférences. Un certain nombre d’outils typologiques permettent d’appré-hender ces différences de personnalité ou de fonctionne-ment existant entre les personnes. Une analyse et une meilleure compréhension de ces différences peuvent ainsi permettre d’en faire des facteurs d’enrichissement et de complémentarité plutôt que des sources de malentendus, voire d’opposition. Parmi ces outils (cf. aussi section 1), les styles sociaux sont une typologie à la fois très simple d’utilisation et très puissante. Elle fournit une grille d’analyse pour mieux décoder et entrer en relation avec

l’autre en prenant davantage en compte ses besoins, ses forces et ses zones de développement1.

La typologie des styles sociaux

Les styles sociaux sont le résultat de travaux menés par le sémanticien américain Charles Osgood et son équipe dans les années cinquante sur les différentes façons de décrire des personnes.

L’approche des styles sociaux

En demandant à différents groupes de décrire des personna-ges et en se concentrant sur les termes descriptifs utilisés, Osgood met en évidence deux grandes dimensions expri-mées sur deux polarités qui permettent de les ordonner. Le premier axe renvoie au niveau d’ascendance ou de domi-nance d’une personne : à une personne ascendante corres-pondront des qualificatifs comme direct, affirmé, autoritaire, exigeante qui contrastent avec la description d’une personne consentante qui sera plutôt patiente, coopérative, prudente…

Le second axe renvoie au degré d’émotivité d’une personne là encore sur deux polarités : expansive (par exem-ple, enthousiaste, bavarde, chaleureuse…) ou réservée (dis-tante, posée, secrète…). La personne expansive est aussi caractérisée par une orientation vers les gens alors que la personne réservée sera davantage tournée vers la tâche/les connaissances. Les deux axes définissent quatre cadrans avec un nom et des caractéristiques propres et définissent ainsi la matrice des styles sociaux2 :

1. Remerciements à Christian Dupont pour ses éclairages experts sur cet outil.

2. Copyright : Persona Inc. (USA) – Distribution : Open Act.

© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit.

La matrice des styles sociaux

Cette matrice rappelle que les êtres humains ne sont pas animés par les mêmes motivations. Chacun de ces quatre types de personnalité est animé d’un besoin fondamental différent, qui rappelle la pyramide de Maslow (cf. section 28 sur la motivation) qui va expliquer et alimenter ses comportements :

– le type « Promouvant » (cadrant ascendant/expansif-tourné vers les gens) a un fort besoin d’être reconnu. Il aime être au centre, est sensible à l’image et au prestige.

Il est enthousiaste, affirmatif, stimulant, créatif, intuitif.

Il est attiré par le défi, prend beaucoup (souvent trop) d’engagements et aime prendre des risques. Dans sa relation au temps, il est orienté vers le futur et la nouveauté ;

– le type « Facilitant » (cadrant consentant/expansif-tourné vers les gens) a un fort besoin d’appartenance, d’être en lien avec les autres. Il aime faire partie d’une équipe, il est amical, coopératif et sensible à l’autre. Il

Expansif/Tourné vers les gens

Promouvant Facilitant

Ascendant Consentant

Contrôlant Analysant

Enthousiaste, stimulant, affirmatif, créatif, intuitif

Amical, coopératif, sensible, confiant, consensuel

Déterminé, efficace, orienté résultats, impatient

Précis, spécialisé, patient, ponctuel, analytique

Réservé/Tourné vers la tâche

recherche l’harmonie, aime faire plaisir et évite le conflit. Dans sa relation au temps, il est tourné pareille-ment vers le passé, le présent et le futur, en fonction de la relation dans laquelle il se trouve ;

– le type « Analysant » (cadrant consentant/réservé-tourné vers la tâche) a un fort besoin de sécurité. Il aime s’appuyer sur les faits et les procédures et approfondir ses connaissances. Il est précis, expert, spécialisé, fiable, responsable. Il recherche la maîtrise de son sujet. Dans sa relation au temps, il est tourné vers le passé, les valeurs sûres, les traditions ;

– le type « Contrôlant » (cadrant ascendant/réservé-tourné vers la tâche) a un fort besoin de réalisation. Il aime l’efficacité, la détermination. Il est pragmatique, exigeant, impatient, orienté vers un objectif et des résul-tats. Son temps est de l’argent. Il aime aller de l’avant, se dépasser. Dans sa relation au temps, il est dans le présent (ou le futur proche) et la tâche à accomplir.

La compréhension que les besoins des personnes peu-vent être différents va être importante pour établir une rela-tion de confiance : un fonctionnement « analysant » privilégiera la fiabilité et la tenue des engagements pour lui et pour les autres alors qu’un « promouvant » mettra en avant plutôt l’ouverture et la communication ; pour donner sa confiance, un facilitant sera sensible à l’acceptation et le non-jugement alors qu’un contrôlant préférera l’authenti-cité du propos même s’il dérange (il dit ce qu’il pense, il pense ce qu’il dit !). En fonction du type de l’autre, il me faudra donc adapter ma communication et mes actions sous peine de manquer la rencontre avec l’autre.

En général, les gens sont très à l’aise dans un cadran de la matrice, parviennent sans trop de difficultés à adopter des comportements caractéristiques d’un ou deux autres cadrans et ont un dernier carré où il leur est plus difficile ou

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moins naturel, d’aller, notamment dans des situations de stress. Cette analyse permet aussi à titre individuel de donner des pistes de développement personnel pour appro-fondir ses « angles morts », insuffisamment travaillés. À titre collectif, elle permet enfin d’assembler des équipes (cf. section 24 sur les caractéristiques des équipes perfor-mantes) qui associent des individus aux compétences com-plémentaires en fonction de l’objectif donné.

Conclusions managériales

Résumons-nous : la matrice des styles sociaux définit une cartographie de quatre grands types comportementaux qui permettent de mieux appréhender et entrer en relation avec l’autre en prenant en compte ses besoins.

Adapter sa communication en fonction de l’autre

Dans ma communication à un contrôlant, il me faudra donc privilégier un discours pragmatique, direct, centré sur la

« promesse produit » qui répond à la question qu’il se

pose : « Qu’est-ce j’ai à y gagner ? » : interaction donc de type « Powerpoint », synthétique, de quelques points clés qui donnera lieu à une explication plus détaillée si le contrôlant en a besoin ou pose d’autres questions. L’évoca-tion de détails sur ma semaine de vacances passée qui serait malvenue avec un contrôlant passera beaucoup mieux avec un facilitant pour qui l’approfondissement des liens personnels, l’harmonie du groupe fait partie de la relation professionnelle. Une réunion de contrôlants et de facilitants ne se déroulera pas de la même façon : digressions appré-ciées vers l’affectif, le personnel, l’équipe pour le facilitant contrés par des retours impatients sur l’agenda pour le contrôlant. Par ailleurs, la communication à un analysant devra être détaillée et précise, répondant aux problèmes techniques qui pourraient se poser alors que la communica-tion à un promouvant devra davantage mettre en avant les innovations du projet, les bénéfices pour lui ou son service en termes réputationnels…

Développer ses forces et ses angles morts

Les problématiques de développement managérial peuvent s’analyser utilement à l’aide de la grille des styles sociaux en repérant mes zones de confort et celles de travail.

Une des problématiques fréquentes en coaching est par exemple la demande faite à des managers très compétents de passer d’une logique du « faire » au « faire faire », en développant leur charisme, leur visibilité, leur impact stra-tégique. Cette demande peut s’analyser comme un besoin pour un « fonctionnement analysant » d’aller davantage vers certaines qualités de promouvants (en gardant ses forces d’analysant de rigueur, fiabilité…). À d’autres managers, il est demandé de s’assouplir, d’arrondir les angles, bref de passer d’un mode très contrôlant à un mode

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plus facilitant. À d’autres encore, il sera demandé avec des fonctions managériales plus importantes, de développer une capacité plus grande à trancher dans le vif, de prendre des décisions difficiles, de mieux gérer les conflits, c’est-à-dire de développer, à côté de qualités de facilitant, des vertus plus « contrôlantes ».

Se focaliser sur les complémentarités pas les oppositions Les différents comportements des personnes soutenus par des besoins différents peuvent aussi expliquer des antago-nismes forts entre les personnes : à l’extrême, le facilitant pensera que le contrôlant est un monstre froid, intéressé seulement par les chiffres alors que le contrôlant verra dans le facilitant un champion de la perte de temps et de l’inefficacité. Le promouvant pourra reprocher à l’analysant d’avoir trop la « tête dans le guidon », de dire non à tout, de ne pas avoir une vision alors que l’analysant lui reprochera de « brasser beaucoup d’air » et de ne pas être fiable. Les styles sociaux et ce type d’outils en général nous invitent à dépasser cette vision antagoniste pour, au contraire, faire de ces différences, des complémentarités et une richesse pour le groupe.

Une seule précaution mais de taille dans l’utilisation de ces outils de développement : mal utilisés ils ont surtout pour vocation de nous rassurer en enfermant l’autre, être imprévisible, dans une caricature de fonctionnement dans lequel quoi qu’il fasse, il est prisonnier d’une réputation ou d’une attente que j’ai de lui. Je me suis rassuré au prix de sa liberté. Les problèmes relationnels ne font que commencer.

Voir aussi

Évaluation de la personnalité – Prophétie auto-réalisatrice – Théories de la motivation.

Pour aller plus loin

ANGEL P., AMAR P., DEVIENNE E., TENCÉ J. (2007). Dictionnaire des coachings, Paris, Dunod.

CATHELAT B. (1990). Socio-styles systèmes, Paris, Éditions d’Organi-sation.

OSGOOD C., SUCI G., TANNENBAUM P. (1957). The Measurement of Meaning, University of Illinois, États-Unis.

Ce qu’il faut retenir

• Les styles sociaux, hérités des travaux du sémanticien C. Osgood dans les années cinquante, sont une grille d’analyse pour mieux décoder et entrer en relation avec l’autre.

• La matrice des styles sociaux est constituée de deux axes : ascendant/consentant et expansif/réservé qui définissent quatre types de personnes avec des besoins propres : le promouvant, le facilitant, l’analysant et le contrôlant.

• Ces types de personnes fonctionnent différemment que ce soit dans leur motivation, leurs attentes, leur façon de créer la confiance, leur style de leadership ou leur relation au temps.

• Les styles sociaux sont un outil simple et puissant pour mieux communiquer et travailler en complémentarité avec l’autre, développer ses forces et travailler sur ses faiblesses.

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Le manager

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