Chapitre 1. Suites et s´eries de fonctions
1.4. Int´egration terme ` a terme des s´eries de fonctions
nx =ζ(x).
La s´erie d´eriv´ee est donn´ee par
X+∞
n=1
−lnn nx .
Soit a un r´eel >1 ; on voit que la fonction u0n est un multiple de un, donc ku0nku,[a,+∞[= (lnn)kunku,[a,+∞[
et kunk[a,+∞[ a d´ej`a ´et´e calcul´e, donc
Xku0nk[a,+∞[ =Xlnn na
qui est une s´erie convergente. Par suite, la s´erie d´eriv´ee est normalement convergente sur l’intervalle [a,+∞[. Le th´eor`eme1.3.2 montre que la fonctionζ est d´erivable sur chacun des intervalles ]a,+∞[ ; il en r´esulte qu’elle est aussi d´erivable sur ]1,+∞[, et de d´eriv´ee
ζ0(x) =− X+∞
n=1
lnn nx .
Il est tr`es facile de voir que ce calcul se g´en´eralise `a toutes les d´eriv´ees successives, donc ζ est de classe C∞ sur ]1,+∞[. En particulier,
ζ00(x) = X+∞
n=1
(lnn)2 nx
montre que la d´eriv´ee seconde est ≥ 0, donc la fonction ζ est convexe sur l’intervalle ]1,+∞[.
2. Pour tout entier k≥1, on obtient pour tout x∈]−1,1[
1
(1−x)k+1 =
+∞X
n=0
(n+k)(n+k−1). . .(n+ 1)xn
en d´erivant plusieurs fois la s´erie g´eom´etrique et en v´erifiant `a chaque fois que la nouvelle s´erie d´eriv´ee est normalement convergente sur tous les intervalles [−a, a], pour 0< a < 1.
1.4. Int´egration terme `a terme des s´eries de fonctions
Les r´esultats sur la convergence uniforme des suites donnent imm´ediatement : Proposition 1.4.1. Si la s´erie de fonctions P
un() est normalement convergente sur [a, b] et si chaque fonction un est int´egrable Riemann, la fonction somme x →U(x) = P+∞
n=0un(x) est une fonction int´egrable Riemann sur [a, b].
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Th´eor`eme 1.4.2.Si la s´erie de fonctions P
un()est normalement convergente sur [a, b]
et si chaque fonction un est int´egrable Riemann sur [a, b], la s´erie des int´egrales est absolument convergente et on a
D´emonstration. On applique `a nouveau le r´esultat correspondant pour la convergence uniforme des suites. Puisque la suite (Un) des fonctions sommes partielles converge uni-form´ement vers U, on sait que
Z b
Corollaire 1.4.3.Soit Iun intervalle de R; on suppose que la s´erie de fonctions P un() est normalement convergente sur I et que chaque fonction un est continue sur I. Soit a un point de I et posons
∀x∈I, fn(x) = Z x
a
un(t) dt.
La fonctionfnest la primitive deunnulle au pointa; pour tout intervalleborn´e Jcontenu dans Ila s´erie des fonctions P
fn()converge normalement sur J, et la fonctionFsomme de la s´erie P
fn(), d´efinie par F(x) = P+∞
n=0fn(x), est la primitive nulle en a de la fonction continue U, somme de la s´erie de fonctions P
un(), d´efinie sur I.
D´emonstration. Soit J un intervalle born´e contenu dans I et soit M tel que J⊂[−M,M]
et |a| ≤M ; pour tout x ∈J on aura
|fn(x)| ≤ |x−a| kunku,I ≤2Mkunku,I, donc la s´erie P
2Mkunku,I est une s´erie majorante convergente sur J pour la s´erie de fonctions P
fn(). Comme tout point x∈I est contenu dans un intervalle born´e J, on en d´eduit que la s´erie P
fn(x) converge pour toutx ∈I, et on peut donc d´efinir pour tout x∈I appliquer le th´eor`eme 1.4.2 `a l’intervalle ferm´e born´e [a, x], donc
F(x) =
Le cas x < a est analogue, ce qui permet de voir que F(x) =
Z x a
U(t) dt
pour tout x∈I. Cela montre que F est une primitive de la fonction continue U.
Remarque.Pour une s´erie de fonctions P
wn() de classe C1 telle queP
w0n() converge normalement sur I, le th´eor`eme de d´erivation1.3.2se d´eduit imm´ediatement du r´esultat pr´ec´edent.
et la s´erie des fonctions un(x) =xn converge normalement sur Xa, donc
∀x ∈Xa, −ln(1−x) =
donc cette relation est vraie pour tout x tel que |x| <1 (on a vu qu’elle est vraie aussi pour x = −1, mais on ne l’obtient pas par les m´ethodes pr´ec´edentes de convergence normale). On peut remarquer que ce r´esultat peut aussi s’obtenir par le th´eor`eme de d´erivation lu `a l’envers. Equation de la chaleur.´ On suppose que P
n∈Zn2|an|<+∞, et que la fonctiong(x) est une fonction 2π-p´eriodique donn´ee par la formule
∀x ∈R, g(x) =X
On voit que limt→+∞f(x, t) = a0 pour tout x (on applique le th´eor`eme d’interversion des limites `a la s´erie normalement convergente qui d´efinit f(x, t)).
L’exemple pr´ec´edent est un cas particulier de la th´eorie des s´eries de Fourier. Pour toute suite (cn) de coefficients r´eels ou complexes telle que P
n∈Z|cn| < +∞, on peut d´efinir une fonction f surR par la formule
∀x∈R, f(x) =X
n∈Z
cneinx.
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La fonction obtenue est continue sur R, et elle est 2π-p´eriodique. D’apr`es le th´eo-r`eme 1.4.2, on peut obtenir les coefficients (cn) `a partir de la fonction f en calculant pour tout m∈Z
cm = 1 2π
Z 2π 0
f(x) e−imx dx, (noter queR2π
0 einxe−imx dx= 0 pour n6=m). Ce qui fait l’importance de cette th´eorie, c’est que l’on peut exprimer la plupart des fonctions p´eriodiques sous la forme ci-dessus : on peut montrer par exemple que sif est une fonction 2π-p´eriodique sur R, de classe C1, alors les coefficients (cn) calcul´es par la formule pr´ec´edente v´erifient P
n∈Z|cn|<+∞ et la fonction f est ´egale `a la somme de la s´erie de Fourier correspondante.
Si on pr´ef`ere les fonctions r´eelles, on peut d´ecomposer l’exponentielle complexe en sinus et cosinus pour obtenir des d´ecompositions de la forme
f(x) = a0
2 + X+∞
n=1
ancos(nx) + X+∞
n=1
bnsin(nx).
S´eries altern´ees de fonctions
La m´ethode des s´eries normalement convergentesP
un() n’est qu’une fa¸con tr`es particu-li`ere d’obtenir la convergence uniforme de la suite des fonctions sommes partielles (Un).
Dans certains cas, d’autres m´ethodes sont beaucoup plus performantes.
Proposition 1.4.4.Soit (vn) une suite de fonctions sur un intervalle X de R telle que – pour tout x∈X et tout n≥0, on a vn(x)≥vn+1(x)≥0(c’est-`a-dire que la suite (vn(x))est d´ecroissante positive pour tout x ∈X)
– la suite de fonctions (vn) tend uniform´ement vers 0 sur X, c’est-`a-dire que limn kvnku,X = 0.
Alors les sommes partielles de la s´erie altern´ee de fonctions P
(−1)nvn() convergent uniform´ement sur X. Il en r´esulte que la fonction somme est continue sur X si chaque fonction vn est continue sur X.
D´emonstration. On remarque d’abord que pour chaque x ∈ X fix´e, on peut en posant un(x) = (−1)nvn(x) appliquer le th´eor`eme des s´eries altern´ees pour d´eduire que la s´erie Pun(x) converge pour chaque x fix´e ; on peut donc poser U(x) = P+∞
n=0un(x). On montre ensuite que
kUn−Uku,X≤ kvn+1ku,X
pour tout n. En effet, on voit que (U2n(x)) est d´ecroissante et (U2n+1(x)) croissante, donc U2n+1(x) ≤U(x) ≤ U2n(x). L’´ecart entre U(x) et U2n(x) est donc au plus ´egal `a U2n(x)−U2n+1(x) =v2n+1(x), et on raisonne de la mˆeme fa¸con pour U2n+1 `a partir de l’encadrement U2n+1(x)≤U(x)≤U2n+2(x).
Exercice. Montrer que π
4 = Arctan(1) = 1− 1 3 + 1
5 − · · · en ´etudiant la s´erie altern´ee de fonctions
X
n>0
(−1)n x2n+1 2n+ 1 sur l’intervalle [0,1].
Un exemple avec Abel La s´erie
X
n>1
einx
√n
d´efinit une fonction continue sur X = [α,2π−α] pour tout αtel que 0< α <2π−α. En effet, les fonctions sommes partielles convergent uniform´ement sur cet intervalle. On pose λn = √n+11 . C’est une suite qui d´ecroˆıt vers 0. On pose aussi wn(x) = ei(n+1)x pour tout n≥0. On montre que
|Wn(x)| ≤ 2
|1−eiα| pour toutx∈[α,2π−α]. Ensuite la transformation d’Abel
λ0w0(x) +· · ·+λnwn(x) = (λ0−λ1)W0(x) +· · ·+ (λn−1−λn)Wn−1(x) +λnWn(x) transforme en une s´erie normalement convergente P
(λn−1−λn)Wn−1() plus un r´esidu λnWn(x) qui tend uniform´ement vers 0 sur X.
Int´egrale g´en´eralis´ee d´ependant d’un param`etre
Th´eor`eme 1.4.5.On suppose queIest un intervalle deR, et quef est une fonction r´eelle ou complexe d´efinie et continue sur [0,+∞]×I. On suppose qu’il existe une fonction g sur [0,+∞[ telle que
– pour tout (x, t)∈[0,+∞[×I, on a |f(x, t)| ≤ g(x); – l’int´egrale de g est convergente, R+∞
0 g(x) dx <+∞. Dans ce cas, la fonction Fd´efinie sur I par
∀t∈I, F(t) = Z +∞
0
f(x, t) dx est une fonction continue sur I.
D´emonstration. Pour tout entier n≥0, posons un(t) =
Z n+1 n
f(x, t) dx.
D’apr`es le th´eor`eme 1.1.11, cette fonction un est continue sur l’intervalle I. De plus, on a pour tout t∈I
|un(t)| ≤ Z n+1
n |f(x, t)|dt≤ Z n+1
n
g(x) dx=vn, 20
et la s´erie num´erique P
vn est convergente puisque
+∞X
n=0
vn = Z +∞
0
g(x) dx.
La s´erie de fonctions continuesP
un() admet donc sur I une s´erie majorante convergente, donc sa somme est une fonction continue. Mais on a
+∞X
n=0
un(t) = Z +∞
0
f(x, t) dx= F(t).