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3.5 Etude rhéométrique sommaire des sédiments modèles

3.5.5 Influence de l’état structurel initial

3.5.5.1 Effet du temps de précisaillement

Des études ont montré que l’histoire mécanique est un facteur important pouvant affecter la réponse mécanique d’un matériau complexe sous une charge appliquée. Dans le cas du gel mixte laponite-carbopol, nous analyserons les courbes d’écoulement obtenues par les essais en contraintes imposées (charge et décharge) avec différentes durées de

précisaillement continu de 100 s−1 (300 s, 600 s, 900 s et 1200 s) et une même période

de repos (120 s). La valeur du précisaillement appliqué est largement supérieure à celle obtenue pour la contrainte seuil de 16 Pa et à celle utilisée dans le cas du gel de carbopol

(1 s−1) pour s’assurer que le fluide est complètement cisaillé au sein de l’entrefer.

La figure 3.14(a) met en évidence la dépendance du comportement d’écoulement en fonction du temps de précisaillement. La diversité des réponses élastiques pour les faibles valeurs de contrainte est observée. Les valeurs du seuil de contrainte diminuent ainsi de manière inverse aux durées de précisaillement. Ce résultat est logique puisque le gel de laponite-carbopol est thixotrope et un même temps de repos de 120 s ne peut pas donner un même état restructuré pour des états déstructurés différents. Cela ne devient possible que pour les temps de précisaillement suffisamment longs, pour lesquels, on atteint un état structurel à l’équilibre sous cisaillement. La figure montre clairement que les changements du rhéogramme sont d’autant moins significatifs que le temps de précisaillement est long. Par ailleurs, au-delà d’un niveau critique du taux de cisaillement, les rhéogrammes pré-sentent pourtant un comportement d’écoulement similaire. En ce qui concerne la descente en contrainte, toutes les courbes se superposent. Cela tend à dire que l’organisation struc-turelle sous cisaillement du matériau est identique pour les hauts niveaux de contrainte et donc indépendante de la durée du précisaillement.

Si l’on utilise de nouveau le temps d’inductionti vu précédemment, une relation entre

ce temps et le temps de précisaillement (preshear) tps peut être décrite. Elle prend la

forme d’une loi de puissance d’exposant λ valant -0,273 (figure 3.14(b)). Le signe

néga-tif de l’exposant indique que la présence de la viscoplasticité, lors de l’augmentation de contrainte imposée, apparaît plus tôt lorsque le temps de précisaillement est long. L’utilisa-tion de la loi de puissance ainsi déterminée permet d’obtenir ensuite une courbe maîtresse,

entre le terme J.(tps)λ et le temps t/(tps)λ (figure 3.14(c)). Cette courbe maîtresse, qui

est indépendante de la période de précisaillement, traduit une similitude structurelle du matériau. L’intensité des interactions mises en jeu dépend du temps de précisaillement mais le processus de transition semble globalement inchangé.

3.5 Etude rhéométrique sommaire des sédiments modèles 0.1 1 10 100 1000 0.0001 0.001 0.01 0.1 1 10 100 1000 τ (Pa) γ• (s−1) 300 s 600 s 900 s 1200 s 10 100 1000 100 1000 10000 ti (s) tps (s) (a) (b) 0.001 0.01 0.1 1 10 100 1000 10 100 1000 10000 J.(t ps ) λ t/(tps 300 s 600 s 900 s 1200 s (c)

Figure 3.14: Effet du temps de précisaillement sur le comportement du gel mixte laponite-carbopol : (a) rhéogrammes obtenus pour différentes périodes de précisaillement, (b) évolution du temps d’induction en fonction du temps de précisaillement, (c) utilisa-tion d’une loi de puissance pour adimensionner les courbes de la complaisance en foncutilisa-tion du temps. Dans (b) et (c), seule la courbe de montée des rhéogrammes est considérée. Le trait pointillé vu dans (b) est la fonction de puissance ti = a.(tps)λ, où a = 524,06 et λ = -0,273.

3.5.5.2 Effet du temps de repos

Le temps de repos est classiquement considéré comme un temps de vieillissement du matériau, au cours duquel, une reprise de structure se déroule. Plusieurs auteurs ont déjà rapporté l’influence de cette variable sur la réponse en fluage de différents matériaux [8, 10, 108, 124]. Dans notre cas, on tente d’évaluer cette influence à partir des courbes d’écoulement en contraintes imposées par balayage en rampe (charge et décharge). Pour le gel mixte laponite-carbopol, quatre temps de la phase de repos, qui fait suite à la même

étape de précisaillement (100 s−1, 600 s), sont retenus : 120 s, 600 s, 1800 s et 7200 s.

Quant au gel de carbopol, seuls deux temps de repos sont retenus : 120 s et 7200 s. Les rhéogrammes illustrés sur la figure 3.15(a) indiquent que le seuil de contrainte du gel mixte laponite-carbopol augmente en fonction du temps de vieillissement, ce qui est cohérent du point de vue physique, partant d’un matériau avec un même état initial

3. Matériaux modèles comme simulants des sédiments cohésifs

structuré, l’effet de la réorganisation structurelle au repos est d’autant plus grande que cette étape dure. Concernant la réponse du matériau lors de décharge en contrainte, elle reste une nouvelle fois la même quel que soit le temps de repos. On atteint donc un même état déstructuré sous cisaillement.

La figure 3.15(b) révèle qu’il est une nouvelle fois possible de relier la variable ti (le

temps d’induction que l’on peut encore définir) au temps de repos tw. On obtient alors

une loi de puissance d’exposant µ = 0,124. L’utilisation de la loi de vieillissement ainsi

déterminée permet d’obtenir une courbe maîtresse (figure 3.15(c)) mettant en évidence un domaine, pour lequel, les propriétés de transition du matériau sont analogues pour les différentes durées de repos.

0.1 1 10 100 1000 0.0001 0.001 0.01 0.1 1 10 100 1000 τ (Pa) γ• (s−1) 120 s 600 s 1800 s 7200 s 10 100 1000 100 1000 10000 ti (s) tw (s) (a) (b) 0.01 0.1 1 10 100 1000 10000 100000 1 10 100 1000 J.(t w ) µ t/(tw 120 s 600 s 1800 s 7200 s (c)

Figure 3.15: Effet du temps de repos sur le comportement du gel mixte laponite-carbopol : (a) rhéogrammes obtenus pour différents temps de repos, (b) évolution du temps d’induction en fonction du temps de repos, (c) utilisation de la loi de vieillisse-ment pour adimensionner la complaisance et le temps. Dans (b) et (c), seule la partie de montée des rhéogrammes est considérée. Le trait pointillé vu dans (b) est la fonction de puissance ti =b.(tw)µ, oùb = 48,68 et µ = 0,124.

Pour finir, le phénomène de vieillissement est également observé dans le cas du gel de carbopol seul (figure 3.16). Ceci est visible par l’évolution du rhéogramme, surtout pour la zone de faibles contraintes imposées, où il y a une contrainte seuil plus élevée lorsque le temps de repos est augmenté. Toutefois, cet effet semble être qualitativement de moindre

3.6 Conclusion

ampleur pour le gel de carbopol que pour le gel mixte laponite-carbopol. On n’observe pas de changement pour la courbe de descente, ce qui indique que le cisaillement en fin de la phase de montée a été suffisamment intense pour que l’histoire mécanique n’est plus d’influence. Ainsi, on confirme, de nouveau, que le gel mixte laponite-carbopol a une propriété de thixotropie plus prononcée.

0.1 1 10 100 1000 0.0001 0.001 0.01 0.1 1 10 τ (Pa) γ• (s−1) 120 s de repos 7200 s de repos

Figure 3.16: Effet du temps de repos sur le comportement du gel de carbopol.

3.6 Conclusion

Dans ce chapitre, nous avons présenté essentiellement l’intérêt d’utiliser deux types de matériau modèle (carbopol et laponite) pour remplacer des sédiments cohésifs naturels. Ces matériaux transparents, exploitables pour les techniques optiques, peuvent manifester différents comportements (i.e. liquide viscoélastique, gel viscoélastique ou solide élastique) selon l’ajustement de certains paramètres physico-chimiques comme la concentration en particules, le pH et la force ionique.

Nous avons donné deux méthodes de préparation effectives pour obtenir de manière reproductible deux sédiments modèles (gel de carbopol/glycérol et gel mixte laponite-carbopol/glycérol) ayant des contraintes seuils voisines et des niveaux de thixotropie dif-férents, comme l’a démontré la caractérisation rhéométrique. Un point intéressant qu’il faut également retenir de cette caractérisation est que, la mise en place du gel au fond du canal à érosion ne pourra donner lieu à des expérimentations reproductibles et com-parables à celles de rhéométrie, que si l’on est capable de précisailler le matériau à une faible vitesse de cisaillement et que l’expérimentation se fait assez rapidement après la mise en place (de l’ordre de 30 min).

Chapitre 4

Comportement des sédiments modèles

sollicités mécaniquement en

configuration viscosimétrique

Dans ce chapitre, nous exposons les résultats de la caractérisation des sédiments

mo-dèles réalisée à l’aide du couplage entre les techniques de rhéométrie et de µPTV. Les

champs d’écoulement de fluides pour différents systèmes plan/plan rugueux pour dif-férentes conditions de sollicitation mécanique seront d’abord abordés. Les aspects dy-namiques de transition après l’arrêt du cisaillement et sous cisaillement (marche de contrainte et rampe de contrainte) seront également étudiés.

4.1 Caractérisation du champ de vitesses

Une problématique récurrente du comportement des matériaux à seuil concerne la coexistence de zones cisaillées et non cisaillées qui peut apparaître au sein du dispositif qui les sollicite mécaniquement.

Un bon nombre de techniques expérimentales ont donc vu le jour pour caractériser localement ces organisations que ce soit pour les fluides à seuil ou d’autres matériaux complexes (i.e. surfactants) [74]. Cette manifestation des matériaux à seuil soulève de nouvelles interrogations en ce qui concerne le rôle que peut jouer le caractère thixotrope [15, 76, 80, 112] et les conditions aux limites [34, 42].

Dans cette partie, on cherche à obtenir le champ de vitesses au cours d’essais de fluage pour les deux fluides modèles (gel de carbopol et gel mixte laponite-carbopol) dont l’un présente un caractère thixotrope important. On examinera plus particulièrement l’influence du niveau de contrainte appliqué. L’impact de l’état initial du matériau (confi-guration coincée ou non) et celui de la nature des rugosités seront quant à eux abordés dans le cas du gel de carbopol (géométries PP28 dentés et PP28 Al/PMMA rugueux ).

Avant d’aborder en détail le comportement local, il convient d’apporter quelques élé-ments d’ordre macroscopique.

Tout d’abord, il est à noter que la réponse en écoulement du gel de carbopol (à l’échelle macroscopique) n’est pas affectée par la nature des surfaces rugueuses de la géométrie comme l’indique la superposition des rhéogrammes illustrés sur la figure 4.1.

4. Comportement des sédiments modèles sollicités mécaniquement en configuration viscosimétrique

La même figure présente également le domaine en vitesse de cisaillement dans lequel doit vraisemblablement se situer la vitesse de cisaillement critique en dessous de laquelle il

n’y a vraisemblablement pas d’écoulement homogène ([0,008 ; 0,015] s−1 pour le gel de

carbopol et [1 ; 2] s−1 pour le gel mixte laponite-carbopol). Ce domaine est estimé à l’aide

des courbes de descente. On recherche une diminution importante de ˙γ pour une faible

décroissance de la contrainte (phénomène de bifurcation). Une contrainte de 35 Pa permet alors d’obtenir un état d’écoulement sans localisation du cisaillement pour les deux fluides modèles. 0.1 1 10 100 1000 0.0001 0.001 0.01 0.1 1 10 100 1000 τ (Pa) γ (s−1) 14, 16, 18, 22 et 35 Pa γ• c γ• c

Figure 4.1: Rhéogrammes du gel de carbopol (cercle) et du gel mixte laponite-carbopol (carré) obtenus avec les géométries PP28 dentés (symboles vides) et PP28 Al/PMMA rugueux (épaisseur de la couche de billes collées est de 439 µm) (symboles pleins).

L’inconvénient majeur qui existe, dans le cas du gel de laponite-carbopol, est que les niveaux de cisaillement atteints vont induire des déplacements particulaires beaucoup trop

rapides pour être exploités avec la technique µPTV. Nous sommes donc dans l’obligation

de limiter les tests à des valeurs de contrainte ne conduisant pas à une fluidification rapide au cours de l’essai. Dans une même logique, les niveaux de contrainte permettant de caractériser la réponse de type solide du matériau doivent être suffisamment importants pour que les déplacements particulaires soient détectables sans que l’on ait des temps d’expérience gigantesques. Nous avons retenu les valeurs de 16, 22 et 35 Pa pour le gel de carbopol et de 14, 16, 18 et 22 Pa pour le gel de laponite-carbopol. Il sera montré ultérieurement (cf. section 4.1.1) que la plus faible valeur de contrainte appliquée pour chacun des fluides correspond à une valeur très voisine du seuil. En effet, sur la durée du

test de fluage, le calcul de ˙γ à partir de l’évolution de la déformation met en évidence

une décroissance initiale continue au cours du temps qui débouche vers une stabilisation, voire même sur une nouvelle augmentation, selon les conditions expérimentales. Cette

même évolution de ˙γ est utilisée pour fixer l’instant de démarrage de la cartographie du

champ de vitesses par suivi particulaire. Celle-ci débute lorsque l’on est en présence d’une évolution lente et monotone. Pour chaque champ obtenu, on indiquera l’instant initial et

4.1 Caractérisation du champ de vitesses

l’instant final liés au suivi particulaire. L’évolution de ˙γ sera présentée en regard des profils

de vitesse obtenus s’il est nécessaire de connaître la tendance d’évolution macroscopique au même moment où l’on effectue des mesures de vitesse en un point donné.

Dans cete partie, et sauf mention contraire, les essais de fluage sont réalisés en utilisant le protocole classique. Cela veut dire que la sollicitation mécanique est imposée après avoir obtenu un état de référence défini par un précisaillement en cycles suivi d’un temps de repos. Il faut aussi rappeler que l’épaisseur effective totale cisaillée pour la géométrie PP28

dentés est de 1,498 µm (cf. section 2.7.2).