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1.4 Rhéométrie des sédiments cohésifs

1.4.3 Connaissances des propriétés rhéologiques des sédiments cohésifs

cohésifs

Comme il a été souligné précédemment, les sédiments cohésifs sont des matériaux com-plexes de par leur composition. Leur caractérisation est nécessaire pour pouvoir effectuer des comparaisons au cours du temps ou entre différents systèmes vaseux ; ou bien établir une modélisation de leur comportement à partir de paramètres physiques à des fins de simulation prédictives.

Berlamont et al. [9] ont rappelé les différents aspects complémentaires à étudier (granu-lométrie, minéralogie, sédimentation/consolidation, rhéologie, ...) ainsi que les difficultés associées. Il est bien identifié que les sédiments cohésifs sont des matériaux rhéofluidifiants qui présente un caractère seuil si la concentration en matière solide (“finie”) est suffisante. Le caractère thixotrope est également connu, mais comme l’ont souligné Berlamont et al. [9], la détermination de la contrainte seuil a reçu beaucoup plus d’attention que la dé-termination des temps caractéristiques de thixotropie. Ces mêmes auteurs ont également rappelé que celle-ci va affecter les résultats des valeurs de seuil compte tenu des évolutions temporelles. Ce point semble quelque peu oublié dans les études se focalisant exclusive-ment sur la contrainte seuil. Dans cette recherche, Berlamont et al. [9] abordent la pro-blématique des techniques expérimentales et pointent du doigt l’importance de considérer des courbes d’écoulement à l’équilibre, de maîtriser les conditions initiales des fluides et de disposer d’instruments de mesure appropriés (typiquement, les rhéomètres à contrainte imposée) pour obtenir un domaine de cisaillement important surtout pour des très faibles valeurs qui ne sont pas accessibles aux viscosimètres comme celui de type Brookfield très largement utilisé au départ [77].

C’est bien le domaine de mesure, le protocole expérimental et la nature de la mobilisa-tion du comportement de fluide à seuil qui vont conduire à une valeur du paramètre seuil

c) pouvant varier dans des proportions importantes (figure 1.12). On peut se contenter

de réaliser des régressions (sur la courbe de montée ou de descente) avec le modèle de Bingham aux bas gradients de vitesse [93] ou aux forts gradients [77, 93] ou avec celui d’Herschel-Bulkley qui peut prendre en compte un domaine plus large [58].

Figure III-5 : Différentes définitions possibles de la contrainte critique d’écoulement. Par

extrapolation de la courbe ascendante et descendante (valeur supérieure ou de Bingham : !

1

et !

2

; valeur inférieure !

3

et !

4

). Par définition de la valeur de pic de la contrainte : en test

dynamique (!

5

- Kuijper et al., 1992), et en test statique, à faible vitesse de déformation (!

6

-

Migniot, 1968 ; Migniot et Hamm, 1990) (d'après Silva Jacinto, 2002)

Dans cette étude, le seuil d’écoulement !

y est défini par la valeur à 0,1 s-1

de la vitesse

de cisaillement (fig. III-6), lue sur la courbe de descente (phase décroissante des vitesses),

équivalent à la contrainte !

4

représentée dans la figure III-5. Il a été montré que ce seuil de

restructuration (en descente) est proche du seuil déterminé par les tests d'oscillations, souvent

employés pour l'étude des suspensions (Coussot et Ancey, 1999a ; Mansoutre, 2000).

Figure III-6 : Définition de la contrainte critique d’écoulement !

y

dans cette étude pour une

vitesse de cisaillement de 0,1 s

-1

III-2.2. Etude des paramètres hydro-sédimentaires sur les estrans

Afin de mieux comprendre les processus hydro-sédimentaires à court et moyen termes

qui se produisent dans la Baie de Marennes-Oléron, des instruments de mesures autonomes

(fig. III-7) ont été installés en avril 2007 sur 7 sites de la baie (fig. III-8 et tab. III-3), jusqu’en

Figure 1.12: Courbe d’écoulement typique des vases avec différentes définitions possibles du seuil de contrainte (τ12, ..., τ6) (d’après [9]).

1.4 Rhéométrie des sédiments cohésifs

Lorsque l’on obtient des courbes d’écoulement plus complexes, on peut recourir à des lois mathématiques avec de multiples paramètres (i.e. les lois de Worrall-Tuliani et de Bingham Dual [51]) pour décrire le comportement sur l’ensemble du domaine de mesure. Des interrogations demeurent toutefois sur ce type de pratique et la signification des résultats obtenus si on exploite des mesures où il n’y a pas d’homogénéité du cisaillement au sein de l’entrefer. Cela permet tout du moins d’effectuer des comparaisons lors d’études paramétriques. Pouv et al. [108] ont en effet montré dans le cas de sédiments naturels (dont

la partie inférieure à 125 µm a été conservée par tamisage) que la courbe d’écoulement

dépendait du mode d’application de la sollicitation (contrainte imposée CI ou vitesse imposée VI) (figure 1.13). Une dépendance forte est observée lors des courbes de montée alors que pour les courbes de descente, il y a concordance tant que les valeurs de vitesse de cisaillement restent plus grandes que celle de la vitesse de cisaillement critique qui conditionne l’homogénéité du champ de cisaillement.

sont systématiquement plus petits. Ce constat de biostabilisation mécanique du sédiment est cohérent avec la description des effets biologiques présentés dans l’ouvrage de WINTERWERP & VAN KESTEREN (2004).

Figure 1. Courbes d'écoulement pour le sédiment naturel (carré) et irradié (cercle) en fonction du mode d'imposition des sollicitations mécaniques. Les flèches indiquent la

charge et décharge du système.

En mode contrainte imposée, les courbes présentent une première phase où la vitesse de cisaillement évolue peu. Ce régime traduit le caractère solide du sédiment qui se déforme élastiquement sous l’effet de l’accroissement de la contrainte. Au-delà de la valeur de contrainte critique (52 Pa pour le sédiment naturel et 38 Pa pour le sédiment irradié), une transition brutale s’opère et se matérialise par un quasi-plateau en contrainte, qui correspond en fait à une zone d’écoulement instable. Il a été montré que la stabilité n’était possible qu’au-delà d’une vitesse de cisaillement critique pour laquelle l’état du fluide est homogène au sein de l’entrefer. Il est important de noter que la transition solide/liquide est associée à une dynamique propre ce qui fait que la contrainte critique correspond à un changement observable sur l'échelle de temps défini par l'essai. Cette valeur est donc plus grande que la valeur de contrainte seuil qui permet d'initier la transition. A la fin du plateau, on est en présence d’un écoulement homogène associé à une vitesse de cisaillement compatible avec le niveau de contrainte imposé. On assiste ensuite à une augmentation conjointe de la vitesse de cisaillement avec la contrainte qui traduit une déstructuration progressive du sédiment. Cet état déstructuré perdure lorsque les valeurs de contrainte diminuent, si bien que la courbe de descente se trouve en dessous de la courbe de montée. Lorsque le système atteint la valeur de

Figure 1.13: Courbes d’écoulement pour le sédiment naturel (carré) et irradié (cercle) en fonction du mode d’imposition (CI ou VI) des sollicitations mécaniques (d’après [108]).

Pham Van Bang et al. [8], Huang et al. [51], Kervella [58] et Qi [111] ont également travaillé avec des systèmes naturels, pour lesquels, il ressort des courbes d’écoulement un peu particulières car on y identifie, à notre avis, deux vitesses de cisaillement critiques :

l’une aux alentours de 1 s−1 (valeur “usuelle” associée au problème de stabilité

d’écou-lement) et l’autre aux alentours de 10 s−1. Il peut être intéressant de souligner que des

observations similaires peuvent être faites pour des systèmes boueux à base de bentonite, dans le cadre des travaux de Besq [10] et de Paumier et al. [100], et pour lesquels, il n’y a pas de particules “grossières”. Cela suggère qu’un effet type “migration particulaire” n’est pas seul responsable. Pour ces cas particuliers en vitesse de cisaillement imposée, et idépendamment de la géométrie utilisée (plans parallèles rugueux, géométrie de Couette lisse, croisillon), il conviendrait de s’intéresser à l’organisation de l’écoulement au sein de l’entrefer.

1. Problématique de l’érosion dans le cadre du transport de matériaux cohésifs

Si des essais d’érosion sont réalisés conjointement à ceux rhéométriques, il est alors

possible de comparer les valeurs de seuil τc (qui peut aller jusqu’à 50 Pa ou plus pour les

vases naturelles de concentration allant jusqu’à 40 %) à la contrainte critique d’érosion

τce (souvent inférieure à 5 Pa pour les vases naturelles pour le domaine de concentration

voisin). On obtient classiquement une relation en loi de puissance. La loi de début d’érosion

des vases plastiques proposée par Migniot [77] peut être mise sous la formeτce = 0, 081τc.

Les essais menés par Otsubo et Muraoka [93] avec différents systèmes vaseux natu-rels et modèles montrent que le seuil obtenu, à partir de la loi de Bingham ajustée aux points de mesure aux bas gradients de vitesse, présente une bonne corrélation avec le

seuil d’érosion. Une même loi se dégage pour tous les systèmes (τce = 0, 78τ0,94

c ) si on

considère comme critère de définition du seuil d’érosion le moment où le lit vaseux est endommagé. Cela n’est pas le cas (plusieurs lois de puissance nécessaires) si on consi-dère que la contrainte conduisant à l’arrachement de particules du fond vaseux est celle définissant le seuil d’érosion.

Les études rhéologiques réalisées avec les sédiments cohésifs ont principalement permis de quantifier l’effet de la concentration en matière solide et de classifier les comportements selon la proportion des classes granulométriques (argile, silt et sable) [5, 51, 58, 111] et éventuellement leur minéralogie. Elles exploitent majoritairement des essais en écoulement [58] et parfois en oscillation [5, 11, 51] qui mettent tous en évidence le phénomène de transition solide/liquide.

Pour le cas spécifique des essais en oscillation, Qi [111] a montré que l’état de rugosité des géométries modifiait la réponse lors de la transition solide/liquide. La valeur de dé-formation critique conduisant à la “liquéfaction” du matériau augmente avec la taille des rugosités. Il ressort des essais qu’une évolution en loi de puissance ou exponentielle est

utilisée pour décrire l’augmentation du seuil (τc) ou du module de conservation dans le

domaine solide (G0

0) en fonction de la concentration ou de la fraction volumique solide. Il

est à noter que les études systématiques des mélanges sable-vase (variation de la concen-tration des espèces et de la minéralogie des argiles) ont été abordées, à notre connaissance, seulement à partir d’essais en érosion [54, 78]. Kervella [58] présente une classification en 5 catégories de ses échantillons selon la teneur en sable. Une évolution en loi de puissance du seuil selon la fraction volumique totale est observée pour chaque catégorie avec une hiérarchisation selon la teneur en sable. Si l’on raisonne en termes de fraction volumique des fines (argile et silt), alors on obtient une loi “unique” de même nature. Il valide

éga-lement l’approche de Coussot et Ancey [27] où le seuil τc d’un mélange sable/vase, où

du sable est ajouté dans un fluide interstiel de seuil τc0 (teneur en eau ou concentration

fixée), varie selon la relation τc = τc0(1− φmφs)−m avec φs la fraction solide de grains, φm

la fraction d’entassement maximale des sables et m un coefficient positif.

Pouv et al. [108] se sont intéressés aux temps caractéristiques d’évolution d’un

sédi-ment naturel (fraction infra 125µm et concentration massique de 36 %) au cours du repos

(reprise de structure) et au cours de la transition solide/liquide. L’évaluation de l’impact de la composante biologique a été également faite en soumettant une partie des échan-tillons à un rayonnement gamma (dose 35 kGy en périphérie). Les résultats soulignent que les échantillons irradiés présentent un niveau de résistance mécanique plus faible mais que la réponse, quel que soit le test, est similaire à celle obtenue pour les échantillons naturels