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4.2 Dynamique de recouvrance

4.2.1 Influence de l’intensité du précisaillement

Dans le cas du gel de carbopol, on a réalisé deux essais qui se différencient par le

niveau du précisaillement imposé (1 s−1 et 2 s−1). Le temps de précisaillement ainsi que

le nombre de cycles ont été maintenus constants. Le précisaillement à 2 s−1 se caractérise

alors par une amplitude du cycle deux fois plus grande.

Pour chaque essai, on observe macroscopiquement deux étapes lors de la recouvrance (figure 4.15). La première, qui dure très brièvement (environ 100 secondes), correspond à une forte diminution de l’angle de déformation. La seconde est beaucoup plus longue (plusieurs heures) et correspond à une convergence vers un état quasi-équilibre de la

défor-4. Comportement des sédiments modèles sollicités mécaniquement en configuration viscosimétrique

mation. La valeur d’équilibre est fonction de l’intensité du précisaillement. La déformation totale recouvrée est d’autant plus grande que l’intensité du précisaillement est élevée ; ou plus précisément, que l’amplitude de déformation initiale est grande.

−0.04 −0.035 −0.03 −0.025 −0.02 −0.015 −0.01 −0.005 0 0 1000 2000 3000 4000 5000 6000 7000 8000 φ φmax (rad) t (s) PS = 1 s−1 PS = 2 s−1

Figure 4.15: Evolutions temporelles de la variation des angles de déformation obtenues après l’arrêt du précisaillement oscillatoire (1 s−1 et 2 s−1).

La figure 4.16(a) présente les trajectoires des particules au cours du même essai. Une réponse similaire est obtenue pour les deux essais. Comme précédemment, on peut dis-tinguer deux phases pour chaque trajectoire. Pendant la première, la particule effectue un mouvement initial balistique purement tangentiel suivi d’une déviation plus ou moins importante selon l’intensité du précisaillement. Vu que le sens initial de ce mouvement (de la droite vers la gauche) est inversé par rapport au sens obtenu lors de l’application d’une sollicitation mécanique, on peut attribuer ce mouvement à la récupération de la dé-formation élastique du matériau qui propulse la géométrie dans un sens qui est conservé du fait de l’inertie du système. Comme les caractéristiques du matériau sont les mêmes pour les deux essais, il est logique que la distance balistique soit plus grande quand l’am-plitude de déformation initiale est plus grande. Pour la deuxième phase, la particule suit un mouvement lent, non brownien (le nombre de Péclet de la particule est très supérieure à 1), purement radial et centrifuge, à partir d’un certain temps plus ou moins long selon l’intensité du précisaillement. Cette observation a déjà été faite par Monti et al. [84]. En outre, on remarque que l’application d’un cisaillement initial plus intense conduit à une distance radiale parcourue un peu plus grande. Pour un système de deux disques pa-rallèles, la répartition de la déformation de cisaillement n’est pas homogène, la partie du matériau dans la zone centrale est moins déformée que celle située près du bord. L’entrefer étant beaucoup plus petit que le rayon, l’inhomogénéité radiale prédomine. Si l’on reprend le scénario de Cipelletti et al. [23], basé sur la distribution de sources de contrainte qui induisent des déformations élastiques par relaxation, alors on a une densité de présence qui croît radialement. Conjointement, le matériau étant rhéofluidifiant, la viscosité tend à décroître radialement. Cette distribution favorisait alors un mouvement centrifuge des particules pour l’échelle de structure sondée par les traceurs.

4.2 Dynamique de recouvrance −140 −120 −100 −80 −60 −40 −20 0 20 −100 −50 0 50 100 Y ( µ m) X (µm) tangent line PS = 1 s−1 PS = 2 s−1 10 100 1000 1 10 100 1000 10000 dcu ( µ m) t (s) Theory PS = 1 s−1 PS = 2 s−1 (a) (b)

Figure 4.16: Dynamiques particulaires observées après l’arrêt du précisaillement (PS = 1 s−1, et PS = 2 s−1) : (a) trajectoires des particules, (b) évolutions temporelles du déplacement cumulé des particules. On fixe l’origine comme étant la position initiale observée de la particule.

On rappelle que notre échelle de visualisation ainsi que la taille des traceurs sont d’un ordre de grandeur plus grandes que celles utilisées par Oppong et de Bruyn [90] (i.e.

taille d’image de 175 µm × 131 µm, taille de particules de 0,49 µm) lors de leurs études

de diffusion des traceurs par la technique de micro-rhéologie passive. A cette échelle, on constate que le gel de carbopol est hétérogène. Certains traceurs sont coincés alors que d’autres paraissent plus libres et se déplacent selon un mouvement subdiffusif (qui peut être expliqué dans le cadre du schéma des cages). A l’échelle locale, les environnements rhéologiques sont différents. Les particules piégées voient plutôt un environnement élas-tique, alors que celles plus libres explorent le caractère visqueux et élastique. Cela dit, Cipelletti et al. [23] ont clairement exclu pour leurs systèmes (gel de nanosphères de po-lystyrène, émulsion concentrée et solution de copolymères tribloc), le mouvement diffusif pour la dynamique lente observée pour les temps longs. Cette dynamique correspond pos-siblement à la deuxième phase de nos observations car le phénomène se manifeste sur des distances de plusieurs dizaines de microns. Pour ces auteurs, c’est un mouvement balis-tique auquel est associé une large distribution des temps de relaxation. Le mécanisme à l’origine de ce phénomène serait des fluctuations inévitables de température provoquant des cisaillements mécaniques locaux sous l’effet des dilatations et des contractions ther-miques (ce sont les “sources” de contrainte) [75].

La figure 4.16(b) illustre les évolutions temporelles du déplacement cumulé des par-ticules. Avant tout, on observe que les déplacements particulaires obtenus pour les deux essais ne commencent pas avec la même valeur au départ. Cet écart montre que la dyna-mique de vol libre des particules associée à la recouvrance élastique instantanée est un peu

plus rapide pour le cisaillement à 2 s−1. Par ailleurs, on remarque que le profil

expérimen-tal pour chaque essai, suit correctement la théorie pendant les premiers instants (jusqu’à

environ 300 s pour 1 s−1 et 100 s pour 2 s−1), c’est-à-dire, tant que les déplacements

particulaires induits sont tangentiels. Les déplacements, pour les deux cas, se rejoignent à

partir d’un certain moment marqué par une augmentation du taux d’accroissement dedcu.

4. Comportement des sédiments modèles sollicités mécaniquement en configuration viscosimétrique

mesuré pendant cette deuxième période correspond à la phase établie de déplacement purement radial de la particule vue sur la figure 4.16(a). On serait alors confronté à une même dynamique de mouvement balistique ultra lent (selon l’hypothèse de Cipelletti et al. [23]). On n’assiste plus à une corrélation entre le déplacement angulaire macroscopique et le déplacement local (qui n’est plus purement tangentiel).

La phase intermédiaire correspond à un régime transitoire qui semble plus long pour

l’essai avec un précisaillement de 2 s−1.