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Chapitre 1 Etat de l’art : Les aérosols d’origine marine et leur réactivité

3. Propriétés d’hygroscopicité des particules d’aérosols d’origine marine

3.5. Influence du recouvrement organique des sels marins sur leurs propriétés d’hygroscopicité

d’hygroscopicité

Comme indiqué précédemment, les particules marines primaires ne sont pas uniquement composées de sels inorganiques, mais peuvent également contenir des espèces organiques, bien souvent hydrophobes qui peuvent modifier leurs propriétés d’hygroscopicité (Cochran et al., 2017). Le comportement d’hygroscopicité des particules va varier selon que le composé organique qui la constitue est soluble ou insoluble dans l’eau. Un film hydrophile en surface des particules ne semble pas altérer ses propriétés d’hygroscopicité, et pourrait même faciliter l’absorption des molécules d’eau dans certaines conditions. En revanche, un film hydrophobe peut agir comme une barrière, et ainsi ralentir la capture des molécules d’eau ou l’évaporation de la particule (Donaldson and Vaida, 2006). Cet effet est également dépendant de l’épaisseur du film (Barnes, 1997). Wagner et al. (1996) ont étudié des particules constituées de sels de tailles allant de 50 à 60 µm de diamètre, recouverts d’une couche d’acide octanoÏque. Ils ont montré que le recouvrement n’empêche pas la déliquescence des particules, mais la retarde de 50 à 70%. Ces résultats sont corroborés par des études similaires concluant que le film organique en surface des particules organiques, même de quelques nanomètre, n’empêchait pas la capture des molécules d’eau (Estillore et al., 2017 ; Garland et al., 2005 ; Hämeri et al., 1992 ; Saxena et al., 1995). La distribution hétérogène du film organique en surface, pourrait être responsable des variations de DRH des particules (Mikhailov et al., 2009). Par ailleurs, Zdanowskii, Stokes et Robinson, ont émis l’hypothèse que les espèces organiques et inorganiques réagissent indépendamment les unes des autres à l’évaporation et la condensation

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d’eau, en raison de leurs activités de l’eau différentes (Seinfeld and Pandis, 2006). La conséquence de la présence d’un film organique en surface des particules est la diminution du facteur de croissance GF et l’obtention de particules de plus petite taille pour une humidité relative donnée (Alshawa et al., 2009 ; Andrews and Larson, 1993 ; Hansson et al., 1998).

Dans certains cas de particules organiques (saccharose) ou inorganiques (Ca(NO3)2, Mg(NO3)2), la cristallisation ne se produit pas et un état amorphe comportant un recouvrement organique vitreux se forme (Zobrist et al., 2008). La diffusion des molécules d’eau au travers de cette couche amorphe étant lente, l’absorption et l’évaporation d’eau s’effectue uniquement au niveau de l’enveloppe extérieure de la particule (Koop et al., 2011).

4. (Photo-)Réactivité des aérosols marins

Au cours de leur séjour dans l’atmosphère, les particules d’aérosol d’origine marine vont subir des transformations physiques et chimiques dues aux interactions avec les autres espèces atmosphériques. Les mécanismes de transformations chimiques des particules d’origine marine sont connus. Ces transformations sont observées lors des campagnes de mesures et font l’objet de nombreuses d’études de laboratoire (Ault and Axson, 2017 ; Martin, 2000 par exemple).

De nombreuses observations de la composition atmosphérique ont permis de mettre en évidence la diminution des teneurs en ion chlorure dans les particules marines (Sarin et al., 2011 ; Yao and Zhang, 2012) au profit des ions sulfates et/ou nitrate. La libération d’espèces chlorées dans l’atmosphère a suscité un intérêt considérable puisque celles-ci entrent dans de nombreux processus réactionnels ayant un impact sur la capacité oxydante de la troposphère (Finlayson-Pitts, 2003 ; Finlayson-Pitts and Hemminger, 2000). Le chlore atomique peut être l’oxydant le plus important de la couche limite marine à l’aube lorsque la concentration en radicaux OH est faible. Par ailleurs, la production de radicaux halogénés peut contribuer à l'oxydation d'espèces d'origine océanique comme le sulfure de diméthyle (DMS) et ses produits d'oxydation, tel que le diméthylsulfoxyde (DMSO) et influer sur la production de particules secondaires

La production d’espèces chlorées dans l’atmosphère provient soit de réactions en phase gaz, soit de réactions hétérogènes impliquant les aérosols marins et les oxydants atmosphériques. La réaction entre NaCl et les espèces gazeuses telles que les oxydes d’azotes (HNO3, NO2, N2O4, N2O5), les oxydes de soufre (H2SO4, SO2) et les sulfures organiques (CH3SO3H) sont bien décrites dans la littérature. Les mécanismes de réactions sont complexes et ces dernières sont favorisées quand l’humidité relative augmente.

Etat de l’art : Les aérosols d’origine marine et leur réactivité dans l’atmosphère

La conversion du NaCl en NaNO3 par des oxydes d’azote gazeux (NOx) a été très étudiée et donne lieu à la formation de produits chlorés gazeux photochimiquement actifs (Finlayson-Pitts, 2003 ; Finlayson-Pitts and Hemminger, 2000 ; Liu et al., 2007 ; Rossi, 2003 ; Stemmler et al., 2008) :

NaCl + N2O5  NaNO3 + ClNO2 (1.6)

NaCl + NO3  NaNO3 + Cl (1.7)

NaCl + ClONO2  NaNO3 + Cl2 (1.8)

NaCl + 2 NO2  NaNO3 + ClNO (1.9)

En particulier, en milieu humide, HNO3 est formé à partir de N2O5, ClONO2 ou NO2 et participe à l’élimination de chlore dans les particules marines (Rossi, 2003) :

NaCl + HNO3  NaNO3 + HCl (1.10)

L’étude de la réaction à l’échelle de la surface des particules montre la formation hétérogène d’îlots de NaNO3 avant de former, une couche homogène de NaNO3 solide ou liquide selon la valeur de RH (Scolaro et al., 2009). La présence d’un recouvrement organique, généralement non-uniforme, peut impacter la réactivité de NaCl, sans pour autant l’empêcher (Stemmler et al., 2008 ; Thornton and Abbatt, 2005). Notamment, il a été observé que l’exposition à NO2 d’une surface de NaCl recouverte d’acide stéarique donnait lieu à la formation d’une couche formée d’un mélange d’acide stéarique et de NaNO3 sous forme de gel (Sobanska et al., 2015). La formation de cette couche mixte dépend également de l’humidité. De manière plus générale, le recouvrement organique abaisse la réactivé des sels marins, selon son épaisseur et sa capacité à laisser le gaz réactif s’immiscer vers le cœur salé (Ryder et al., 2015).

Des réactions similaires se produisent entre NaCl et les oxydes de soufre, donnant lieu à la formation de Na2SO4 accompagné d’acide chlorhydrique (Rossi, 2003) :

2 NaCl + H2SO4  Na2SO4 + 2 HCl (1.11) Les espèces organiques présentes à la surface des particules peuvent subir des transformations induites par la présence d’oxydants atmosphériques (O3, NO3, NO2) et radicaux (OH) ou à la présence de lumière (Rudich, 2003). L’ozonolyse des acides gras insaturés est une des réactions se produisant à la surface des particules de sels marins (Moise and Rudich, 2000). L’ozonolyse d’alcènes conduit généralement à la libération d’espèces volatiles telles que CO, CO2 et des aldéhydes, composés sujets à une photolyse et aux réactions avec des radicaux OH en phase gazeuse. Des carbonyles et acides sont également produits en surface des particules, provoquant une modification des propriétés physicochimiques des particules (Rudich, 2003). Une surface d’aérosol plus hydrophile est aussi obtenue par réaction de ces composés organiques avec des radicaux OH, réaction non-spécifique aux

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Le rayonnement solaire est la source principale d’énergie du système Terre-atmosphère et est à l’origine de réactions chimiques atmosphérique en phase gaz mais également à la surface des aérosols (George et al., 2015).

Figure 1.12. Irradiance spectrale solaire au-dessus de l’atmosphère et au niveau de la surface de l’océan, et molécules atmosphériques responsables de l’absorption de l’énergie solaire (Seinfeld

and Pandis, 2006).

Le spectre d’irradiance solaire, au sommet de l’atmosphère et au niveau de la surface des océans, est illustré par la Figure 1.12. L’atténuation de l’énergie solaire est due aux molécules d’O2, O3, H2O et CO2 qui absorbent dans différentes régions du spectre. L’ozone O3 absorbe jusqu’à 290 nm dans la haute atmosphère alors que H2O et CO2 absorbent la lumière pour des longueurs d’onde plus élevées. Certaines régions spectrales du rayonnement solaire n’atteignent pas la surface terrestre et 40% des émissions correspondent à des rayonnements de longueurs d’onde comprises entre 400 et 700 nm (Seinfeld and Pandis, 2006).

Les travaux dédiés à l’étude de la photochimie des particules d’aérosol sont essentiellement consacré à l’étude de la phototransformation des particules organiques. Il existe peu de travaux concernant la photochimie de particules de sels marins. Une étude très récente a montré que l’exposition aux rayonnements UV de particules marines collectées conduisait à la formation de radicaux OH et d’acide nitreux (Ye et al., 2017).

La photochimie des nitrates en solution aqueuse a été détaillée dans la littérature (Goldstein and Rabani, 2007 ; Mack and Bolton, 1999). Elle présence des mécanismes de photolyse complexes et dépendants de nombreux paramètres dont le pH et la longueur d’onde d’irradiation (Figure 1.13).

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Figure 1.13. Photoprocessus primaires et réactions subséquentes se produisant lors de la photolyse d’ions NO3- (Mack and Bolton, 1999).

Les principales réactions mises en jeu sont décrites sur la Figure 1.14. Alors qu’une longueur d’onde d’irradiation inférieure à 280 nm favorise la formation de peroxynitrite ou de son acide associée selon le pH, le nitrite est formé majoritairement pour les longueurs d’onde plus élevées.

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Figure 1.14. Conversion d’ions NO3- pour une longueur d’onde d’irradiation inférieure ou

supérieure à 280 nm (d’après Mack and Bolton (1999)).

Par ailleurs, les travaux dédiés à la photochimie des espèces organiques soufrées d’origine marine sont, à l’heure actuellement, peu nombreux (Finlayson-Pitts, 2017). Les transformations photochimiques sont pourtant des composantes clés du cycle du soufre atmosphérique. Les principales études ont été réalisées pour le DMS dont la photolyse impacte directement le climat et l’environnement, notamment de par la formation d’acide méthylsulfonique et de dioxyde de soufre (Bentley et al., 1972). Néanmoins, les connaissances concernant l’évolution photochimique de sulfures organiques sont encore insuffisantes.