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Chapitre 1 Etat de l’art : Les aérosols d’origine marine et leur réactivité

2. Caractéristiques physiques et chimiques des aérosols marins

2.1. Taille des particules d’origine marine

Indépendamment de leurs sources d’émission, les particules d’aérosols sont catégorisées en fonction de leur taille. Selon leur nature, leur mécanisme de formation et leur évolution dans l’atmosphère, leur taille varie de quelques nanomètres à plusieurs centaines de micromètres. Trois

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principaux modes se distinguent pour caractériser des particules d’aérosols (Figure 1.6) (Fitzgerald, 1991 ; Whitby, 1978) :

 Le mode "nucléation" correspond aux particules provenant des phénomènes de nucléations homogènes et hétérogènes. Leur taille est estimée à quelques nanomètres, et malgré leur faible contribution massique, ce sont les particules les plus nombreuses dans l’atmosphère.  Les particules associées au mode "accumulation" possèdent un diamètre compris entre 0,1

et 1,0 µm. Elles sont produites par coagulation des particules du mode nucléation ou bien par condensation de vapeurs sur les particules existantes. Contrairement au mode nucléation, les particules du mode accumulation contribuent à la masse totale de particules atmosphériques.

 Le mode "grossier" se réfère aux particules de taille supérieure à 1,0 µm. Ces particules correspondent généralement aux aérosols primaires formés par des processus mécaniques (production de sels marins, envolées de particules de sols, émissions de poussières désertiques). Les particules de sels marins primaires possèdent des diamètres s’étendant de quelques dizaines à plusieurs centaines de micromètres (O'Dowd and de Leeuw, 2007). Mészáros and Vissy (1974) ont en effet mesuré des diamètres de particules pouvant atteindre 100 µm. Ce type de particules constitue environ 95% de la masse totale, mais uniquement 5 à 10% des particules en nombre (Seinfeld and Pandis, 2006) et a une durée de vie limitée dans l’atmosphére.

Figure 1.6. Modes de répartition des particules atmosphériques en taille (Demoisson, 2014).

Concernant les aérosols marins, en moyenne, les gouttes de film ont un diamètre inférieur à 1 μm alors que les gouttes de jet possèdent un diamètre supérieur à 1 μm. Enfin, les gouttes issues de l‘écrêtage des vagues peuvent être d’une taille atteignant plus de 20 μm (Ghabache and Séon,

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2016). Les particules secondaires se forment par nucléation et possèdent donc un diamètre aérodynamique moyen inférieur au micron.

La Figure 1.7 illustre la distribution granulométrique typique d’aérosols marins collectés durant une campagne de mesure.

Figure 1.7. Distributions en nombre selon la taille de particules pour des masses d’air marines (en bleu) et pour des contributions marines, rurales et biogéniques (en noir) mesurées dans l’Est de

l’Océan Pacifique (Sorribas et al., 2015).

2.2. Composition chimique des particules d’origine marine

Comme la plupart des aérosols produits à partir de processus mécaniques, au moment de leur formation, la composition chimique des particules marines primaires reflète celle du milieu dont elles proviennent, c’est-à-dire l’eau de mer. En zone exempte de toute influence anthropique, les aérosols marins contiennent majoritairement du chlorure de sodium avec en moyenne 50% en masse, mais la présence d’autres ions, notamment SO42-, Mg2+, Ca2+ et K+, n’est pas négligeable (Tableau 1.2). Le pH des gouttelettes varie entre 7,0 et 8,7 (Keene et al., 1998).

Tableau 1.2. Composition moyenne d’un sel marin, à partir de la composition de l’eau de mer, sans tenir compte des transformations atmosphériques (Seinfeld and Pandis, 2006).

Espèces Pourcentage massique

Cl 55,04 Na 30,61 SO42- 7,68 Mg 3,69 Ca 1,16 K 1,10 Br 0,19 C (non-carbonaté) 3,5.10-3 – 8,7.10-3

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Espèces Pourcentage massique

Al 4,6.10-4 – 5,5.10-3 Ba 1,4.10-4 I 1,4.10-4 Si 1,4.10-4 – 9,4.10-3 NO3- 3,0.10-6 – 2,0.10-3 Fe 5,0.10-5 – 5,0.10-4 Zn 1,4.10-5 – 4,0.10-5 Pb 1,2.10-5 – 1,4.10-5 NH4+ 1,4.10-6 – 1,4.10-5 Mn 2,5.10-6 – 2,5.10-5 V 9,0.10-7

Les sulfates se trouvent principalement sous forme de sulfate d’ammonium, suite à la réaction de dioxyde de soufre et d’ammoniaque gazeux dans des conditions humides (Seinfeld and Pandis, 2006), ou d’acide sulfurique (Izumi et al., 1986).

Malgré la dominance des sels inorganiques, la proportion de matière organique présente dans l’aérosol marin n’est pas négligeable et peut représenter plus de 50% de sa masse totale (Cochran et al., 2017 ; Hoffman and Duce, 1974 ; Middlebrook et al., 1998 ; Putaud et al., 2000 ; Reinhardt et al., 2007). Les composés organiques sont omniprésents dans les eaux de surface des mers et océans et peuvent entrer dans la composition des sels marins. Les simulations (Long et al., 2011) montrent clairement une bonne corrélation entre les flux d’émission de particules marines et les flux de carbone organique dans les zones océaniques de vents forts (Figure 1.8).

Figure 1.8. Distributions spatiales des (a) flux de particules d’aérosols et des (b) flux de carbone organique particulaire, sur une moyenne de 5 ans (d’après (Long et al., 2011)).

La présence de carbone est également corrélée avec la concentration en microorganismes (phytoplancton, des algues et des plantes marines) (Long et al., 2011) et par conséquent les teneurs en matière organique dans les particules dépendent également fortement de la latitude et des saisons. Par exemple, O'Dowd et al. (2004) ont analysé la composition chimique de particules

(b) Flux de carbone organique particulaire (ngC m-2.s-1)

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marines prélevées en Atlantique Nord, ils ont montré que durant de faibles activités biologiques (hiver), la proportion de composés inorganiques domine, avec un taux de 75% pour des particules de 0,125 à 0,5 µm de diamètre. Ce taux augmente jusqu’à plus de 95% pour des particules de taille supérieures à 0,5 µm. En revanche, lors de périodes de fortes activités biologiques (printemps à automne en atlantique Nord), la part d’espèces organiques augmente considérablement, notamment dans les fractions fines. Elle atteint une valeur de 65% pour le mode accumulation et est de l’ordre de 5% pour les particules de taille supérieure à 1 µm. En hiver, cette fraction organique diminue jusqu’à 15% pour les particules de taille inférieure à 0,5 µm.

Figure 1.9. Origine de la matière organique présente dans les particules d’aérosols marins (Estillore et al., 2016).

La matière organique produites par les microorganismes marins, est essentiellement composée de dérivés stérols marins, d’alcools gras, d’acides gras, d’amines et de composés soufrés (Cochran et al., 2017 ; Estillore et al., 2016). Ces composés se répartissent dans une fine couche de 1 à 1000 µm d’épaisseur en surface de l’océan (micro couche de surface océanique). Ces espèces organiques vont alors être simultanément emportées avec les gouttelettes marines lors de leur propulsion dans l’atmosphère (Figure 1.9). Selon leur affinité avec l’eau, les composés organiques seront dissouts dans la gouttelette ou formeront un revêtement en surface de la particule (Donaldson and Vaida, 2006 ; O'Dowd et al., 2004). Un revêtement organique constitué principalement de molécules d’acides gras a été observé à l’échelle de particules individuelles par Ault et al. (2013) et Russell et al. (2010), pour des particules prélevées en milieux océaniques.

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