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Influence des polymères sur l’hydratation des pâtes de ciment

CHAPITRE III : HYDRATATION ET SÉCHAGE À L’AIR LIBRE DE COMPOSITES MORTIER-POLYMÈRE

III.1. Hydratation de pâtes de ciment en présence de polymères

III.1.2. Suivi de l’hydratation des pâtes de ciment

III.1.2.3. Influence des polymères sur l’hydratation des pâtes de ciment

Tableau III.18 – Chaleurs d’hydratation relevées dans la littérature par calorimétrie isotherme sur des pâtes de ciment non modifiées âgées de 48h

Références Chaleur d’hydratation (J/g,ciment)

Cette étude 278 ± 8

Atkins et al. (1991) [ATKI91] 248

Kong et al. (2015) [KONG15] 325

III.1.2.3. Influence des polymères sur l’hydratation des pâtes de ciment

Le suivi de l’hydratation de pâtes de ciment contenant des polymères est effectué dans les mêmes conditions que celles décrites dans le paragraphe précédent. Les résultats sont présentés dans les paragraphes qui suivent.

Évolution du flux de chaleur

Les courbes d’évolution du flux de chaleur mesurés sur des pâtes de ciment contenant des polymères issus du latex CM-230 ER et CM-330 sont représentées sur les Figure III.66 et Figure III.67

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respectivement. Dans les deux cas, le flux de chaleur des pâtes de ciment ayant un ratio P/C de 0,01 est semblable à ceux obtenus en analysant des pâtes de ciment non modifiées. En revanche, à partir d’un ratio P/C de 0,05, la phase d’induction s’allonge, et le maximum du pic de flux de chaleur est décalé vers des temps plus longs. Cet effet, qui traduit un effet retardateur de prise du ciment par les polymères, est d’autant plus important que le ratio P/C augmente. Ainsi donc, pour un P/C de 0,4, la phase d’induction est allongée de plus de 15 heures, et le maximum du pic n’apparaît que 28 h après la mise en contact du ciment avec l’eau. Il peut aussi être noté que, dans les deux cas présentés, pour un P/C supérieur ou égal à 0,05, l’intensité du maximum de pic est plus faible que dans le cas de pâtes de ciment non modifiées. Toutefois, cet effet est davantage marqué dans le cas de pâtes de ciment formulées avec du CM-330.

Figure III.66 – Évolution du flux de chaleur en présence de CM-230 ER

Figure III.67 – Évolution du flux de chaleur en présence de CM-330

Pour les deux types de polymère, un retard de prise a pu être mis en évidence. Il est, dans les deux cas, engendré par l’ajout de polymère qui occasionne un allongement de la phase d’induction. Un suivi simultané de la prise et de l’hydratation des pâtes de ciment contenant des polymères est réalisé afin de vérifier s’il existe une corrélation entre temps de début de prise et flux de chaleur, comme cela a été observé pour les pâtes de ciment de référence dans le paragraphe précédent. La détermination du temps de début de prise est effectuée au prisomètre Vicat à 21,8°C ± 0,5°C et 45% ± 2% d’humidité relative. Les résultats sont présentés sur les Figures Figure III.68 et Figure III.69 pour des pâtes de ciment contenant du CM-230 ER et du CM-330 respectivement. Dans le cas des pâtes de ciment contenant du CM-230 ER, le début de la prise intervient un peu avant le point d’inflexion précédent le maximum du pic de flux de chaleur. En revanche, dans le cas des pâtes de ciment contenant du CM-330, le début de la prise correspond au point d’inflexion précédent l’atteinte du maximum du pic de flux de chaleur, tout comme dans le cas d’une pâte de ciment non modifiée. De plus, dans ce cas, une fois le début de la prise atteint, la mesure de la pénétration de l’aiguille relevée fluctue. Ce phénomène est dû au fait que de la pâte de ciment adhère à l’aiguille, ce qui peut par moment gêner les mesures.

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Figure III.68 – Comparaison entre la mesure du temps de début de prise et le suivi du flux de chaleur de pâtes de ciment avec

du CM-230 ER (P/C=0,1)

Figure III.69 – Comparaison entre la mesure du temps de début de prise et le suivi du flux de chaleur de pâtes de ciment avec

du CM-330 (P/C=0,1)

Les résultats obtenus montrent donc que la corrélation entre le début de la prise et le point d’inflexion précédent le pic du maximum de flux de chaleur n’est pas toujours exacte, mais permet d’évaluer le début de la prise du matériau. Ce point est donc retenu comme repère d’hydratation dans la suite de ce chapitre.

Le temps de début de prise a donc été déterminé pour toutes les pâtes de ciment à partir des courbes d’évolution du flux de chaleur au cours du temps. Les résultats sont représentés sur la Figure III.70. Les résultats obtenus confirment que les deux types de polymère ont un effet retardateur de prise. Toutefois, cet effet est plus prononcé dans le cas du CM-230 ER (copolymère styrène-acrylate). En effet, dans ce cas, l’effet retardateur de prise intervient dès un ratio P/C de 0,05. Dans le cas du CM-330 (polymère acrylique), cet effet n’intervient qu’à partir d’un P/C de 0,1. De plus, le temps de prise est toujours supérieur pour le polymère CM-230 ER quel que soit le ratio P/C.

Figure III.70 – Temps de début de prise estimé pour les pâtes de ciment contenant des polymères

Ces résultats vont dans le sens des études réalisées par différents auteurs [ATKI91, KONG15, MARC12]. En effet, avec des méthodes d’étude différentes, Kong et al. (2015) et Marceau et al. (2012) mettent en évidence un retard de 4 à 5 h entre l’apparition du repère d’hydratation d’un matériau non modifié, et celui d’un matériau cimentaire contenant environ 10% en masse de copolymère styrène-acrylate par rapport à la masse de ciment (Tableau III.19). Or, dans le cadre de cette étude, pour un tel polymère (i.e. pour le CM-230 ER), un retard d’environ 6h a été observé, ce

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qui concorde avec les résultats obtenus dans la littérature.

Ces différents auteurs expliquent de tels résultats par l’adsorption des polymères à la surface des grains de ciment, ce qui peut limiter la diffusion des ions et bloquer l’accès aux sites de nucléation, et par l’interaction entre les groupes carboxyles issus des polymères et les ions calcium présents dans la solution interstitielle.

Tableau III.19 – Retards d’hydratation identifiés dans la littérature pour des matériaux cimentaires contenant des copolymères styrène-acrylate

Référence Repère, méthode d’étude Retard entre un P/C=0 et un P/C=0,1 Cette étude Temps de début de prise estimé (couplage

calorimètre/prisomètre) Env. 6h

Kong et al. (2015) Maximum du pic de flux de chaleur

(calorimètre isotherme) Env. 5h

Marceau et al. (2012) Temps de début de prise (prisomètre Vicat) Env. 4h

En outre, la diminution de l’intensité du maximum de pic de flux de chaleur avec l’augmentation du ratio P/C a été constatée. Ce paramètre a donc été relevé pour chaque formulation (Figure III.71). Pour des valeurs de P/C de 0,01, il n’y a pas d’effet des polymères. Cependant, à partir d’un P/C de 0,05, l’intensité diminue en présence de polymère. La comparaison des formulations réalisées avec le latex CM-230 ER et le latex CM-330 montre une différence de comportement des deux polymères. En effet, les intensités obtenues sont plus faibles dans le cas du CM-330 que dans le cas du CM-230 ER. De plus, dans le cas du CM-230 ER, l’augmentation du taux de polymère conduit à une stabilisation de cette intensité entre un P/C de 0,1 et un P/C de 0,4. A contrario, dans le cas du CM-330, il n’y a pas de stabilisation et l’intensité continue de décroître, même pour un P/C de 0,4. Ce phénomène a déjà été observé par Kong et al. (2015), qui l’ont attribué à l’adsorption des particules de polymère sur les surfaces minérales [KONG15].

Figure III.71 – Intensités associées au maximum des pics de flux de chaleurs des pâtes de ciment modifiées

Évolution de la chaleur d’hydratation

À partir des courbes de flux de chaleur, l’évolution de la chaleur d’hydratation ramenée à la masse de ciment peut être déterminée en fonction du temps, par intégration du flux. Les résultats sont

81 présentés pour les pâtes de ciment formulées avec des polymères issus des latex 230 ER et CM-330 (Figure III.72 et Figure III.73 respectivement). Ces résultats montrent que, dans les deux cas, les pâtes de ciment ayant un ratio P/C 0,01 ont un comportement similaire à des pâtes de ciment non modifiées. Cette observation s’applique également à des pâtes de ciment contenant du CM-230 ER avec un P/C de 0,05. En revanche, pour des quantités de polymères supérieures, la chaleur cumulée dégagée à l’issue des 24h d’essai est plus faible que celle dégagée par les pâtes de ciment non modifiées. Cet affaiblissement de la chaleur cumulée dégagée est d’autant plus important que le ratio P/C est élevé. De plus, cet effet est plus marqué en présence de CM-330, en accord avec les observations faites précédemment concernant les courbes de flux de chaleur. Ainsi, à l’issue des 84h d’essai, la chaleur cumulée dégagée par la pâte de ciment contenant du CM-330 avec un P/C de 0,4 est moitié moins importante que celle dégagée par l’échantillon de référence, non modifié.

Figure III.72 – Évolution de la chaleur d’hydratation en présence de CM-230 ER

Figure III.73 – Évolution de la chaleur d’hydratation en présence de CM-330

La chaleur d’hydratation dégagée par chaque pâte de ciment au bout de 84h d’essai est déterminée (Figure III.74). Comme évoqué précédemment, il apparaît que pour des faibles ratios P/C, les pâtes de ciment ont le même comportement qu’une pâte de ciment non modifiée. Dans le cas des pâtes de ciment contenant du CM-330, les différences de comportement apparaissent dès un P/C de 0,05. À partir de ce ratio, la chaleur d’hydratation diminue avec l’augmentation de la quantité de polymère. En revanche, dans le cas du CM-230 ER, une diminution de la chaleur d’hydratation apparaît à partir d’un P/C de 0,1, mais elle reste de faible amplitude et tend à se stabiliser pour un P/C de 0,4. Un tel comportement est également observé dans les études de Kong et al. (2015). Ils montrent que plus la densité de charge d’un polymère est élevée, plus ce polymère s’adsorbe à la surface des grains de ciment, et donc plus la chaleur d’hydratation totale est faible [KONG15].

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Figure III.74 – Chaleurs d’hydratation totales de pâtes de ciment incorporant du CM-230 ER ou du CM-330, pour différents P/C