VI. Chapitre 6: L’influence de la langue maternelle
VI.1. L’influence de la langue maternelle (cas de la langue arabe) dans la construction du sens au
VI.1.1. L’interférence
La maîtrise de deux langues aboutit au contact des langues chez un individu ce qui entraîne l’influence mutuelle des langues en contact : il y a un transfert d’une langue à l’autre. L’interférence et l’intégration sont des exemples du contact.
Le terme interférence est employé d’abord par : « Weinreich (1953) in Chaer (1995 :
158) pour désigner le changement d’un système d’une langue comme le résultat du contact de langues chez un individu bilingue. Alwasilah (1993 : 132) fait le même constat en disant que l’interférence signifie l’influence mutuelle entre des langues. Krdalaksana (1984 :76) précise
que l’interférence constitue l’utilisation des éléments d’autres langues par un bilingue ».20
Selon les linguistes Josiane F. Hamers et Michel Blanc : « l’interférence désigne des
problèmes d’apprentissage dans lesquels l’apprenant transfère le plus souvent inconsciemment et de façon inappropriée des éléments et des traits d’une langue connue
dans la langue cible » (Hamers et Blanc, 1983: 452)21.
De nombreuses études et recherches ont traité de l’interférence linguistique dans le domaine de l’apprentissage des langues. Les didacticiens ont mené des études pour identifier les problématiques de l’interférence linguistique. Dans cette optique (Cuq, dir, 2003 :139) précise que :
« La réflexion linguistique s’est, très souvent au cours de son histoire, consacrée à l’étude
comparative de langues apparentées en vue d’en dégager les propriétés ou origines communes. Les didacticiens, quant à eux, ont comparé les systèmes des langues en présence dans les contextes d’enseignement-apprentissage, afin d’identifier les similitudes et les
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(Cité in : ALWASILAH, A. C, 2003)
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différences, posant par hypothèse que celles-ci favorisent l’apprentissage (transfert) ou constituent la cause essentielle des fautes (interférences). ».
Les différences entre la langue étrangère et la langue maternelle apportent très souvent des difficultés dans le domaine d’apprentissage. L’apprenant en langue étrangère réfléchit inconsciemment dans sa langue maternelle pour produire ou comprendre un énoncé en langue étrangère ce qui engendre des interférences linguistiques. Ces interférences viennent du fait que l’apprenant saoudien (arabophone) a des contacts très rares avec une langue étrangère en milieu scolaire ou familial. En outre, il est reconnu que les locateurs d’espagnol ou d’italien ont plus de facilité à apprendre le français que nos publics saoudiens (arabophones) car le français est une langue latine comme l’espagnol et l’italien, tandis que l’arabe appartient à la famille des langues sémantiques. Cependant, comme le souligne Kathleen Julie « l’enseignement d’une langue vivante se complique davantage du fait que
cette langue n’est pas maternelle. Le terme étranger qui la désigne n’est pas un hasard. Elle
peut facilement être ressentie comme une agression ».22
En résumé, acquérir un nouveau système langagier n’est pas chose facile, surtout lorsque ce dernier diffère de la langue maternelle. Les difficultés que rencontrent les apprenants arabophones proviennent, dans une large mesure, des interférences entre les deux langues et, plus particulièrement, du transfert de la langue maternelle sur la langue étrangère. « Suivant l’âge, l’acquisition d’un nouveau système phonologique pose plus ou moins de
problème à l’apprenant. Le système phonologique de la langue maternelle est en effet automatisé vers l’âge de 15-16 ans et fait alors partie intégrante de l’individu. Au delà de cet âge l’acquisition d’une autre (voire plusieurs autres) système(s) phonologique(s), également à automatiser, devient de plus en plus difficile. ». (Narcy, 1997 : 110)
La langue maternelle est un obstacle qu’il faut surmonter pour comprendre un message oral en langue étrangère. C’est pourquoi la notion d’interférence de la langue maternelle est utilisée essentiellement pour désigner une influence « négative » que la langue maternelle exerce sur l’apprentissage de la langue étrangère.
« La notion d’interférence est centrale dans l’analyse contrastive qui se fixe pour
objectif de prédire des zones d’interférence potentielles permettant de prévenir les fautes et d’y remédier. ». (Lado, Fries, Cité in Cuq, dir, 2003 :139).
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VI.1.2. Type d’interférence
Il existe deux types d’interférences : l’interférence réceptive et productive. Une autre répartition est proposée par Briere (1968) in Hender (1997 : 33) et aussi d’autres psycholinguistiques. Il distingue aussi deux types : l’interférence rétroactive et proactive et explique plus loin que l’interférence rétroactive est « The influence the learning of subsequent
list has on the retention of the orginally learned list »: alors que l’interférence proactive
désigne «The decremental effect on retention of subsequently learned lists resulting from
prior learning ».
Nababan (1988) in Wati (1998 :32) décrit également les types d’interférence en les classant en trois types :
1. L’interférence de performance « performance interference » dans l’acte de production orale chez un individu.
2. L’interférence du développement ou de l’apprentissage (developmental or learning
intreference) qui se passe pendant que quelqu’un apprend une langue seconde ou
étrangère.
3. L’interférence qui se voit par les changements d’une langue dans laquelle on trouve des éléments du système d’autres langues.
Weinreich (1953) in Hendar (1997 : 35) identifie trois types d’interférences :
1. Le changement de la fonction et de la catégorie des éléments dû au processus du transfert.
2. L’application d’éléments de langue première qui ne sont pas valides dans la seconde langue.
3. La négligence de la structure de la langue seconde due au manque d’équivalence en première langue.
Mackey constate que « les types d’interférence dépendent de la condition dans
laquelle un apprenant parle en langue seconde ou s’il essaie simplement de comprendre ce qu’il entend ou bien ce qu’il lit. S’il parle ou écrit en langue seconde, la structure de sa langue maternelle étant déjà internalisée chez lui, cette langue perturbera l’utilisation de la langue seconde apprise. Au contraire, si un apprenant essaie simplement de comprendre cette langue seconde, la compréhension sera plus facile si la première langue ressemble à la langue seconde. ». (Mackey, in Kartiwa, 2007 : 37).
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Haugen distingue aussi deux interférences : « l’importation et la substitution. La
première désigne des aspects de la langue source qui sont transférés à la langue réceptive. Et la deuxième désigne la substitution des éléments d’une langue par leurs équivalences en d’autres langues ». (Haugen, 1950) in Wati (1998 : 37).